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13/04/2017 | FRANCE | N°15/05901

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 13 avril 2017, 15/05901


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



--------------------------









ARRÊT DU : 13 AVRIL 2017



(Rédacteur : Monsieur Marc Sauvage, Président)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 15/05901

















Association APEC



c/



Madame [Q] [G]





















Nature de la décision : AU FOND







Notifié

par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 septembre ...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 13 AVRIL 2017

(Rédacteur : Monsieur Marc Sauvage, Président)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 15/05901

Association APEC

c/

Madame [Q] [G]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 septembre 2015 (R.G. n° F14/255) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANGOULEME, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 24 septembre 2015,

APPELANTE :

Association APEC, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 1]

N° SIRET : 781 227 079 00154

représentée par Me Paul COEFFARD, avocat au barreau de POITIERS

INTIMÉE :

Madame [Q] [G]

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me MISSUS loco Me Jean-Michel CAMUS, avocat au barreau de CHARENTE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 15 février 2017 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Marc SAUVAGE, Président,

Monsieur Eric VEYSSIERE, Président,

Madame Sophie BRIEU, Vice-Présidente Placée,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Gwenaël TRIDON DE REY,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Madame [Q] [G] a été engagée par l'APEC le 1er septembre 1991 comme éducatrice spécialisée, en dernier lieu échelon 7, coefficient 581. Elle a intégré en 2004, le SESSAD (servie d'éducation spécialisé et de soins à domicile), dont elle avait proposé la création en 2003.

Elle a connu de nombreux arrêts de travail à partir du 08 novembre 2013 et a été déclarée inapte à tout poste avec danger immédiat par le médecin du travail le 15 janvier 2015.

Elle a refusé plusieurs postes de reclassement et a été convoquée le 1er avril 2015 à un entretien préalable au licenciement et a été licenciée le 08 avril 2015 pour inaptitude.

Par requête reçue au greffe du conseil de prud'hommes le 11 juillet 2014 elle a demandé la condamnation de son employeur pour harcèlement moral et manquement à son obligation de sécurité de résultat.

En dernier lieu, elle demandait de :

-dire et juger qu'elle a été victime de harcèlement moral et que L'APEC a manqué à son obligation de sécurité de résultat,

-de condamner L'APEC à lui payer les sommes de :

-60 000€ à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

-14 183,46€ pour licenciement nul,

- 5 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-ordonner la publication du jugement dans deux quotidiens locaux en cas de condamnation de L'APEC.

Par jugement en date du 17 septembre 2015, le conseil de prud'hommes d'Angoulême a :

- dit que Madame [G] a subi des faits de harcèlement moral au sein de l'APEC,

- déclaré que L'APEC a violé son obligation de sécurité de résultat pour assurer et protéger la santé physique et mentale de Madame [G],

-déclaré que son licenciement s'analyse en un licenciement nul,

-condamné l'APEC à lui payer les sommes de :

- 14 183,46€ pour licenciement nul,

-30 000€ à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

-ordonné la publication des 'faits', 'motifs' et 'par ces motifs' du jugement dans deux journaux locaux, les frais de publication étant à la charge de l'APEC,

-ordonné l'exécution provisoire.

L'APEC a interjeté appel par déclaration reçue au greffe de la cour le 25 septembre 2015.

Aux termes de ses conclusions reçues au greffe de la cour le 23 janvier 2017, L'APEC indique que Madame [G] a simplement pu faire l'objet de remarques ponctuelles sur son travail ou de rappels relatifs aux règles en vigueur au sein de l'association de façon courtoise et légitime.

Un intervenant extérieur a pu faire état dans une intervention de 'sous-système parasite' et une éducatrice se présenter à la réunion suivante avec une bombe insecticide et une affiche représentant des insectes nuisibles, pensant illustrer avec humour la réunion précédente.

Madame [G] ne saisira son employeur d'une prétendue dégradation de ses conditions de travail que le 20 novembre 2013, Monsieur [M], le directeur, rencontrant rapidement les membres du SESSAD avec la secrétaire du CHSCT et saisissant cette instance qui rencontrait Madame [G], celle-ci ayant été invitée à lui transmettre ses observations écrites.

Le CHSCT ne retenait pas l'existence de faits de harcèlement moral et l'employeur saisissait également tant un cabinet spécialisé que L'ARS qui ne donnait pas suite à sa demande d'inspection.

Madame [G] reprenait le travail le 1er avril 2014, l'employeur organisant le mi-temps thérapeutique préconisé par le médecin du travail. Madame [G] alléguait un accident du travail le 08 avril qui donnait lieu à un refus de prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie.

L'inspection du travail ne donnait pas suite à l'échange de courriers avec l'employeur et le cabinet PSYA retenait que les salariées du SESSAD n'étaient soumises à aucun risque psycho-social majeur, Madame [G], bien qu'en arrêt maladie, ayant été mise à même de rencontrer les intervenants.

L'APEC relève que huit postes ont été proposés à Madame [G] en lien avec le médecin du travail et les délégués du personnel et qu'elle ne s'est pas présentée à un entretien technique sur les possibilités de reclassement.

Madame [G] refusait l'ensemble des propositions par courrier du 26 février 2015, L'APEC attirant en réponse son attention sur l'intérêt de l'un des postes, celui d'éducateur spécialisé à [Établissement 1], qu'elle refusait le 12 mars 2015.

Elle était en conséquence licenciée par courrier en date du 08 avril 2015.

Concernant le harcèlement moral, l'APEC retient que Madame [G] n'apporte pas la preuve de ses allégations : les propos décrits comme dénigrants lors de la réunion du 12 juillet 2013 proviennent d'un malentendu. Les commentaires sur ses relations avec son fils ne sont pas établis, ni datés et concernent une discussion entre salariés sur leurs relations avec leurs enfants.

Il n'est pas plus établi que la directrice adjointe l'ait poussée à postuler sur un autre poste, ait cherché à l'isoler ou l'ait privée de ses prérogatives, notamment de référente qualité.

Il n'a jamais existé un accord sur une reprise à temps partiel avant les préconisations du médecin du travail et Madame [G] n'en établit pas l'existence.

L'association a respecté son obligation de sécurité eu égard aux mesures mises en place et le licenciement pour inaptitude de Madame [G] était fondé rappelant qu'elle avait interrogé l'ensemble des services sur les postes disponibles et avoir organisé une réunion avec Madame [G] pour envisager les possibilités de reclassement, réunion à laquelle celle-ci ne s'est pas présentée. Cette recherche de reclassement s'est faite en lien avec le médecin du travail et les délégués du personnel.

L'APEC demande en conséquence que le jugement déféré soit infirmé en toutes ses dispositions et que Madame [G] soit condamnée à lui payer la somme de 5 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile;

Aux termes de ses conclusions reçues au greffe le 08 février 2017, Madame [G] demande la confirmation du jugement sauf à porter à 35 458,65€ le montant des dommages et intérêts pour licenciement nul ou non respect de l'obligation de reclassement, à 6 000€ sa demande d'application de l'article 700 du code de procédure civile et le remboursement des frais engagés pour l'exécution forcée du jugement de première instance.

Madame [G] rappelle qu'elle a été poursuivie par citation directe par son ancien employeur pour diffamation publique devant le tribunal correctionnel de La Rochelle qui l'a relaxée par jugement du 02 février 2016.

Elle indique que les faits de harcèlement moral proviennent de l'organisation du SESSAD, service dans lequel elle était quotidiennement au contact de la directrice adjointe, Madame [R] [D], même si elle travaillait en milieu ouvert.

Elle fait état de propos dénigrants dans lesquels elle était assimilée à un parasite ou décrite en 'burn-out'. Ses relations avec son fils donnaient lieu à des propos de même nature.

Son travail était dévalorisé., elle était poussée à postuler dans d'autres services.

Mi-juillet un acronyme dévalorisant était inscrit sur le tableau de service :

'Sévices des

Educatrices

Spécialisées

Spécialistes

Aux Débilités.'

La prérogative de référente qualité lui a été retirée et il n'a pas été tenu compte de la préconisation d'un mi-temps thérapeutique par le médecin du travail alors que ce mi-temps lui avait été accordé avant même qu'il soit indiqué par le médecin du travail mais qu'il n'en avait pas été tenu compte par l'association dans un premier temps. Elle a au surplus repris dans des conditions dégradées (changement de bureau, absence de codes informatiques, téléphone professionnel dépourvu de chargeur, casier professionnel vidé et contenant seulement un livret sur la ménopause à 50 ans).

Ces agissement caractérisent bien, par leurs conséquences, des faits d'harcèlement moral et l'employeur n'a pris que tardivement des mesures dépourvues de contenu pour y faire face : enquêtes partiales du CHSCT ou d'un consultant extérieur mandaté sept mois après qu'elle ait alerté son employeur, non respect du mi-temps thérapeutique.

Concernant le reclassement, elle retient que certains postes proposés étaient en violation directe des préconisations du médecin du travail.

Son licenciement est nul en raison du harcèlement moral dont elle a souffert et à tout le moins dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manque de précision des offres de reclassement (Horaires, salaires, qualification);

Elle précise la gravité des préjudices dont elle a souffert tant en raison du harcèlement moral que du licenciement nul.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En ce qui concerne les faits de harcèlement moral, l'article L 1152-1 du code du travail dispose qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Concernant la charge de la preuve, l'article L 1154-1 précise que le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et, qu'au vu de ces éléments, pris dans leur ensemble, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En exergue, il sera retenu que le caractère probant de l'attestation de Madame [Z] ne peut être retenu : en conflit avec son employeur dans les mêmes conditions que Madame [G], ayant également saisi le conseil de prud'hommes, cette attestation établie dans le cadre d'un litige étroitement lié avec le sien propre, ne peut voir son caractère probant retenu concernant les faits qui ne sont corroborés par aucun témoignage tiers.

En ce qui concerne les faits allégués permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral, Madame [G] fait état :

' des propos dénigrants aux termes desquels elle était décrite 'en burn out' par la directrice adjointe Madame [H] :

Il sera rappelé que Madame [G] s'est, le 07 novembre 2013, présentée avec une déléguée du personnel, Madame [C] à une réunion de travail prévue avec la responsable du SESSAD, Madame [H], qui est aussi directrice adjointe de L'APEC. Celle-ci, s'agissant d'une réunion professionnelle et non d'un entretien disciplinaire a refusé que Madame [C] y participe, ce qui ne peut être critiqué. En revanche, les trois intéressées ont eu un échange au vu et au su des autres salariés qui pouvaient être présents ou passer dans le couloir. Quelque soit le caractère regrettable de cette situation, force est d'observer qu'elle incombe à Madame [G] et à Madame [C].

Madame [C] a relaté dans son attestation que Madame [H] a nié avoir évoqué en réunion d'analyse de la pratique, devant toute l'équipe, l'état de fatigue de Madame [G] et son burn-out.

Ce fait doit donc être écarté.

'Les appréciations péjoratives sur la qualité des relations avec son fils :

Sur ce point, Madame [C] atteste que Madame [R] [D] a reconnu avoir conseillé à Madame [G] de 'couper le cordon'. Cette expression, couramment utilisée en matière éducative, qui suppose être intervenue au cours d'un échange entre deux salariées est en lui-même neutre.

'La dévalorisation de son travail, le fait qu'elle était poussée à postuler dans d'autres services n'est pas attesté en dehors de la communication aux salariés des postes vacants sur lesquels ils seraient susceptibles de postuler, étant observé que c'est l'attitude inverse, celle de ne pas donner connaissance à ses subordonnés des postes disponibles, qui pourrait être reprochée au supérieur hiérarchique. Les pressions pour pousser Madame [G] à quitter le service en postulant à d'autres postes, ne sont en rien établies.

'Les propos dénigrants dans lesquels elle était assimilée à un parasite :

Un intervenant extérieur, Monsieur [Q], a effectué une présentation de la notion de 'sous-système parasite'. A cette première intervention Madame [G] n'était pas présente. A la séance suivante, Monsieur [Q] relate :

' Lors de l'Analyse des Pratiques qui suivit, une stagiaire est venue avec une bombe insecticide et une petite affichette représentant divers insectes nuisibles. Volontairement, je n'ai pas prêté grande attention à ce trait d'humour qui fait partie de la vie en collectivité. Je pensais qu'il s'agissait d'une taquinerie liée à une incompréhension. Même si cela n'était pas très délicat et maladroit. Mais un stage est un temps d'apprentissage durant lequel les futurs professionnels perfectionnent leurs compétences comportementales et sociales. Il faut savoir être indulgent. Seule l'expérience du terrain peut les conduire à modifier leurs attitudes. Madame [C] [D] a joué son rôle et s'est empressée de déplacer la bombe pour clore cet épisode qui pouvait être mal interprété.'

Le document se présente sous la forme suivante :

'ÉCRASE LES PARASITES DE L'OPEN SPACE!

Pose cette page par terre et écrabouille les nuisibles'.

En-dessous sont représentés cinq insectes avec leur nom et a été ajoutée, pour chacun d'eux, une légende manuscrite :

-Le cloporte : 't'façons, j' m'en fous, j'ai un boulot',

-la punaise : 'j'irai voir la D.R.H.',

-le cloporte : 'c'est la faute à Pignon',

-la mouche à merde (sic) : 't'es sûr que ça va ''

Et un dernier insecte non identifié sur la photocopie : 'Snif, la machine à café est en panne'.

Il s'agit de manière évidente, pour la stagiaire qui a réalisé ce document dans une intention qui se voulait humoristique, d'une dénonciation de comportements professionnels 'parasites' présentés comme des archétypes. De par leur diversité même, rien ne permet de retenir qu'ils visaient un salarié du groupe et Madame [G] n'expose pas en quoi elle a pu se sentir spécifiquement visée.

'La présence d'un acronyme dévalorisant sur le tableau de service :

'Sévices des

Educatrices

Spécialisées,

Spécialistes

Aux Débilités'

L'inscription de cet acronyme sur le tableau de service n'est pas établie.

'Le retrait de la prérogative référente qualité :

Madame [S] [A], éducatrice spécialisée, a attesté que Madame [G] avait fait part au directeur général de l'Apec, Monsieur [M], qu'elle était depuis plusieurs années référente qualité du SESSAD mais depuis septembre 2013, Madame [R] [D] lui avait signifié qu'elle n'avait plus cette fonction sans que celle-ci lui fournisse d'autres explications.

Ce fait est établi

.'La reprise du travail à temps complet au 1er avril 2014 :

Le premier planning communiqué à Madame [G] lors de sa reprise du travail correspondait effectivement à un temps complet. Dès que l'employeur a eu connaissance des préconisations du médecin du travail, c'est un mi-temps qui a été proposé. Rien n'indique que le directeur s'était auparavant engagé sur une reprise à mi-temps, étant observé que, en dehors d'un mi-temps thérapeutique, il s'agissait d'une modification du contrat de travail qui aurait supposé la conclusion d'un avenant qui n'aurait pas pu intégrer le maintien, en tout ou partie, du versement des indemnités journalières.

'La reprise dans des conditions matérielles dégradées.

L'existence de ces conditions n'est pas établie.

Il est établi que les arrêts maladie de Madame [G] font état d'une souffrance au travail, avec souvent la mention '+++' et qu'elle a été suivie par un psychiatre. Cependant, ces mentions ne font que reprendre l'expression de son mal-être et sont dépourvues, en elles-mêmes, de force probante sur la réalité de de faits qui, pris dans leur ensemble, laissent présumer l'existence d'un harcèlement moral.

À l'exception du retrait de la responsabilité de référente qualité, aucun autre fait propre à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral n'est établi, étant relevé que le jugement du conseil de prud'hommes se borne à affirmer l'existence de tels faits sans s'expliquer sur le caractère probant des éléments produits à leur appui. Un fait isolé ne suffit pas à laisser présumer l'existene d'un harcèlement moral.

Le jugement du conseil de prud'hommes sera donc infirmé en ce qu'il a condamné l'employeur pour harcèlement moral et retenu de ce fait la nullité du licenciement et accordé à ce titre une indemnité.

Aux termes des articles L 4121-1 et L 4121-2 du code du travail

L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement

des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes

L'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :

1° Eviter les risques ;

2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;

3° Combattre les risques à la source ;

4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;

5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ;

6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;

7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L 1152-11 et L. 1153-1, ainsi que ceux liés aux agissements sexistes définis à l'article L. 1142-2-1 ;

8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;

9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs

L'employeur est donc tenu, à l'égard de son personnel, d'une obligation de sécurité qui lui impose de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs. Il lui est interdit, dans l'exercice de son pouvoir de direction, de prendre des mesures qui auraient pour objet ou pour effet de compromettre la santé et la sécurité des salariés.

L'APEC, en amont du présent litige, avait saisi un organisme extérieure, L'ARACT Poitou Charente (Agir pour la qualité de vie dans l'entreprise ) qui avait établi une étude sur les conditions de travail et les risques psychosociaux dans l'entreprise qui avait donné lieu à une restitution le 18 octobre 2011.

Le directeur de l'association a été saisi de la difficulté spécifique par un courrier de Madame [G] du 20 novembre 2013. Il lui a répondu le 26 novembre 2013 en lui proposant un rendez-vous pendant ses heures de sortie autorisées afin qu'elle puisse exposer ses griefs, avec la possibilité de se faire accompagner par une personne de son choix, salariée de l'association. Il a rencontré Mesdames [A] et [C], dont il a été relevé qu'elles avaient fourni les seuls témoignages pertinents et l'équipe SESSAD la semaine du 02 au 08 décembre suivant.

La réunion du CHSCT du 19 février 2014 ( CHSCT central extraordinaire) a été entièrement consacrée à la situation du SESSAD.

Le 10 avril 2014, le directeur, Monsieur [M] a saisi L'ARS :

'Je vous confirme notre demande d'inspection par vos services du SESSAD Sud Charente pour le motif suivant : Dysfonctionnement grave du service suite à des relations interpersonnelles particulièrement difficiles entre la hiérarchie et deux éducatrices (saisine de l'employeur pour harcèlement moral).'

Le 26 mai courrier à Madame [G] pour l'informer de la saisine d'un cabinet extérieur, 'PSYA Sud-Ouest', lui fournissant les coordonnées des deux psychologues qui interviennent pour ce cabinet en lui proposant de prendre rendez-vous le 18 ou le 19 juin, étant rappelé que Madame [G] était autorisée à sortir durant son arrêt maladie.

Ce courrier précise :

' Votre participation est importante, seuls vos témoignages nous permettront de mettre en place les bonnes actions et garantir votre bien-être.'

Madame [G] n'a pas rencontré les psychologues étant précisé que sur la copie de ce courrier qu'elle produit elle-même, la date du 18 juin est entourée et une flèche indique '10h', ce qui établit qu'elle avait pris un rendez-vous auquel elle ne s'est pas rendue.

Cet organisme a remis son rapport le 04 juillet 2014 qui concluait :

'Les salariées du SESAD ne sont soumises à aucun risque psychosocial majeur. Elles décrivent des conditions de travail très satisfaisantes, au sein d'une équipe soudée et impliquée.

L'équilibre que l'équipe actuelle est parvenue à ateindre ainsi que la qualité des relations entre collègues seraient fortement remis en cause par la réintégration des deux salariées actuellement en arrêt maladie.

L'équipe est en effet choquée des propos tenus à l'égard de la directrice ( et des salariées du en général), car ces propos, selon elles, ne correspondent absolument pas à la réalité.

La directrice semble très fragilisée par les accusations qui ont été faites à son encontre, mais elle bénéficie du soutien des salariées actuellement en poste au SESSAD'.

Une nouvelle évaluation a été demandée à un service extérieur qui a remis son rapport le 17 mars 2016.

L'employeur, qui a mis en place en amont une politique de prévention et qui, lorsqu'il est saisi d'une dénonciation de faits de harcèlement moral par une salariée, diligente une enquête interne, saisit le CHSCT, son autorité de tutelle, ici l'A.R.S. puis, successivement, deux consultants extérieurs, ne peut se voir reprocher une violation de son obligation de sécurité. Madame [G] sera donc déboutée de ce chef.

Aux termes de l'article L 1226-2 du code du travail, consacré au reclassement du salarié suite à une maladie ou un accident non professionnel:

'Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail'

En application de ce texte, le chef d'entreprise doit rechercher par tous moyens s'il est possible de préserver l'emploi du salarié; il doit étudier toutes les propositions émises par le médecin du travail en procédant éventuellement à une mutation, à une transformation de poste ou à un aménagement du temps de travail.

Cette recherche d'un poste de reclassement doit être effectuée non seulement dans l'entreprise au sein de laquelle travaillait le salarié devenu inapte mais également dans toutes les entreprises du groupe auquel appartient l'entreprise, du moins dans celles dont les activités, l'organisation et le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la mutation de tout ou partie du personnel.

Le reclassement est subordonné à l'acceptation par le salarié du nouvel emploi qui lui est proposé.

Un refus du salarié ne dispense pas l'employeur de faire de nouvelles propositions. Ce n'est que dans les situations où il n'existe aucun emploi dans l'entreprise et dans le groupe qui puisse être tenu par le salarié inapte, ou si l'avis du médecin du travail mentionne expressément que tout maintien du salarié dans l'entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé que l'employeur peut procéder de façon légitime au licenciement du salarié.'

Le 15 janvier 2015, suite à la visite de reprise, le médecin du travail a émis l'avis d'inaptitude suivant :

'Suite à l'étude de poste et des conditions de travail dans l'entreprise du 11 décembre 2014, la salariée est inapte à son poste. Il n'y aura pas de second examen médical suite à la procédure de 'Danger Immédiat' prévue à l'article R 4624-31 du code du travail. Un poste identique en travail de jour pourrait convenir dans une structure organisationnelle différente au sein de l'association.'

Le 20 janvier 2015, un courriel a été adressé à dix responsables de l'association aux fins de transmission des postes disponibles pouvant convenir à 'une salariée qui occupe un poste d'éducatrice spécialisée, coefficient 581, à temps plein.'

Le 04 février 2015, la description des onze postes disponibles a été adressée au médecin du travail en lui précisant :

'Nous vous remercions de nous préciser si la salariée pourrait être reclassée sur l'un de ces postes de travail, mais également quels autres postes pourraient être concernés par des adaptations, mutations, transformations ou un aménagement voire une réduction du temps de travail, afin de les rendre compatibles avec les indications mentionnées dans votre avis d'inaptitude.'

Bien que la consultation des délégués du personnel n'était pas obligatoire, ceux-ci

ont été consultés et Madame [G] a été convoquée à un entretien technique afin de faire le point avec elle sur la question du reclassement par courrier du 18 février 2015. Elle n'a pas souhaité s'y rendre.

Le 17 février 2015 les délégués du personnel s'en sont remis à l'avis du médecin du travail.

Par courriel du 17 février 2015, le médecin du travail a rappelé le contenu de son avis en ajoutant qu'une évaluation quant à l'aptitude aux postes proposés ne pouvait résulter que d'une visite médicale.

Les postes ont été proposés à Madame [G] par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 20 février 2015.

Par courrier en date du 26 février 2015 Madame [G] a indiqué que les postes proposés lui paraissaient inapdaptés en prenant deux postes en exemple.

Le 09 mars 2015, l'attention de Madame [G] a été attirée sur l'intérêt particulier offer par le poste d'éducateur à L'IME [Établissement 1], à temps complet et au même coefficient que les siens. Madame [G] l'a refusé le 12 mars 2015. Madame [G] décrit comme une nouvelle agression le fait qu'il lui soit rappelé dans ce courrier que ce poste était concomitamment offert à sa collègue, Madame [Z], alors que le courrier fixe les règles d'attribution du poste si chacune des deux salariées répondait positivement (attribution à la première réponse, si elles sont simultanées, attribution à l'éducatrice ayant la plus grande ancienneté). Il s'agit de la définition de critères objectifs pour éviter toute difficulté postérieure.

Il s'en est suivi la procédure de licenciement pour inaptitude, la lettre de licenciement du 08 avril 2015 rappelant précisément la procédure de reclassement mise en oeuvre qui apparaît sérieuse et loyale, Madame [G] étant déboutée de sa demande au titre du non respect de l'obligation de reclassement.

Madame [G], qui succombe, doit être condamnée aux dépens.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à l'APEC la charge de ses frais irrépétibles.

La Cour,

PAR CES MOTIFS

Infirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute Madame [Q] [G] de ses demandes au titre :

'du harcèlement moral,

'de la violation par l'Association APEC de son obligation de sécurité,

'du licenciement nul,

' du remboursement des frais d'exécution de première instance,

Déboute les parties de leurs demandes respectives d'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne Madame [Q] [G] aux dépens.

Signé par Marc SAUVAGE, Président et par Gwenaël TRIDON DE REY Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 15/05901
Date de la décision : 13/04/2017

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°15/05901 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-04-13;15.05901 ?
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