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06/04/2017 | FRANCE | N°14/06696

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 06 avril 2017, 14/06696


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



--------------------------









ARRÊT DU : 06 AVRIL 2017



(Rédacteur : Madame Catherine MAILHES, Conseillère)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 14/06696

















Maître [V] [M]



c/



Madame [T] [T]

CGEA [Localité 1]

Société LABORATOIRE CLINIDIS

Société LABORATOIRE PEDIACT












>

Nature de la décision : AU FOND







Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivré...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 06 AVRIL 2017

(Rédacteur : Madame Catherine MAILHES, Conseillère)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 14/06696

Maître [V] [M]

c/

Madame [T] [T]

CGEA [Localité 1]

Société LABORATOIRE CLINIDIS

Société LABORATOIRE PEDIACT

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 octobre 2014 (R.G. n° F13/2887) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d'appel du 12 novembre 2014,

APPELANT :

Maître [V] [M], agissant en sa qualité de mandataire liquidateur de la Société LABORATOIRES BIOETHIC

Sté Civile Professionnelle BTSG - [Adresse 1]

représenté par Me Sylvie ALRIQUET loco Me Hubert DE FREMONT, avocat au barreau de VERSAILLES

INTIMÉES :

Madame [T] [T]

née le [Date naissance 1] 1974

de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Arnaud BAULIMON, avocat au barreau de LIBOURNE

CENTRE DE GESTION ET D'ETUDES AGS (CGEA) [Localité 1], pris en la personne de son représentant légal domiciliée en cette qualité au siège social,

[Adresse 3]

représenté par Me GRANET loco Me Philippe DUPRAT de la SCP DAGG, avocat au barreau de BORDEAUX

Société LABORATOIRE CLINIDIS, prise en la personne de son représentant légal domiciliée en cette qualité au siège social,

[Adresse 4]

N° SIRET : 788 708 576

non comparante ni représentée bien que régulièrement convoquée

Société LABORATOIRE PEDIACT, prise en la personne de son représentant légal domiciliée en cette qualité au siège social,

[Adresse 4]

N° SIRET : 753 826 759

assistée de Me Dimitri PRORELIS, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 février 2017 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Eric VEYSSIERE, Président,

Madame Catherine MAILHES, Conseillère,

Madame Sophie BRIEU, Vice-Présidente placée,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Gwenaël TRIDON DE REY,

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [T] [T] a été embauchée par la SARL Laboratoire Bioethic en contrat à durée indéterminée à temps plein en qualité de déléguée à l'information thérapeutique niveau 5B de la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique sur un secteur défini contractuellement à compter du 11 juin 2007.

La SARL Laboratoires Bioethic a été admise au bénéfice d'une période de sauvegarde le 24 janvier 2013 et la procédure collective a été convertie en redressement judiciaire le 6 mai 2013.

Le 7 mai 2013, Mme [T] a transmis un certificat d'état de grossesse pour un début congé maternité au 1er octobre 2013.

Par jugement du 9 juillet 2013, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la SARL Laboratoires Bioethic et la SCP BTSG a été désignée en qualité de mandataire liquidateur.

La SCP BTSG a procédé au licenciement du personnel dont les contrats étaient en cours, après homologation d'un plan de sauvegarde de l'emploi par accord unilatéral suivant les dispositions prévues par la loi sur la sécurisation de l'emploi du 14 juin 2013.

Mme [T] a été licenciée par courrier recommandé du 30 juillet 2013 pour motif économique tiré de la suppression du poste de travail en raison de la liquidation judiciaire de la société.

Le 25 septembre 2013, Mme [T] a saisi le conseil des prud'hommes de Bordeaux en nullité de son licenciement, pour obtenir le paiement de dommages et intérêts pour nullité du licenciement, et subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, des dommages et intérêts pour violation du statut protecteur de la femme enceinte, indemnité de congés payés , indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents outre la remise des documents de rupture rectifiés sous astreinte et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du16 octobre 2016 le conseil des prud'hommes de Bordeaux a :

jugé qu'en l'absence de preuve de recherche de reclassement, le licenciement de Mme [T] est sans cause réelle et sérieuse,

fixé la créance de Mme [T] au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Laboratoires Bioethic aux sommes suivantes :

12.600 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail,

700 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 70à du code de procédure civile,

débouté Mme [T] du surplus de ses demandes,

dit que le jugement est opposable à la SCP BTSG, prise en la personne de Me [M], ès-qualités de mandataire liquidateur de la SARL Laboratoires Bioethic et au Centre de Gestion et d'Etudes AGS dans la limite légale de son intervention, celle-ci excluant l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

mis les dépens à la charge de la liquidation judiciaire.

Par déclaration au greffe de son avocat le 12 novembre 2014, le SCP BTSG prise en la personne de Me [M] a régulièrement relevé appel de ce jugement. Mme [T] a fait appel incident.

Par conclusions déposées le 20 janvier 2016, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la SCP BTSG prise en la personne de Me [M], ès-qualités de mandataire liquidateur de la SARL Laboratoires Bioethic conclut à la réformation de la décision dont appel et demande à la Cour de :

se déclarer incompétente au profit du tribunal administratif pour statuer sur la demande tendant à dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, s'agissant du contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et notamment des mesures de reclassement qu'il contient,

débouter Mme [T] de l'ensemble de ses demandes,

condamner Mme [T] à lui verser une indemnité de 1.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

à titre subsidiaire,

réduire le montant des demandes dans de plus justes proportions.

Par conclusions déposées le 12 janvier 2017 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, Mme [T] fait appel incident et demande à la cour de :

dire que son licenciement est nul,

fixer comme suit sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Laboratoires Bioethic :

8.825,64 euros au titre des salaires à percevoir au titre de la période couverte par la nullité du licenciement,

882,52 euros au titre des congés payés y afférents,

60.000 euros de dommages et intérêts pour licenciement nul,

à titre subsidiaire,

écarter l'exception d'incompétence soulevée par l'appelante,

dire que le liquidateur n'a pas exécuté loyalement son obligation de recherche de reclassement,

dire que le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse,

fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Laboratoires Bioethic à la somme de 60.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

en tout hypothèse,

fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Laboratoires Bioethic comme suit :

213,51 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

21,35 euros au titre des congés payés y afférents,

7,12 euros au titre de l'indemnité repas,

1260 euros à titre de dommages et intérêts pour non paiement de la prime 2013,

dire la décision à intervenir opposable au Centre de Gestion et d'Etudes AGS [Localité 1],

ordonner sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, la remise des bulletins de salaire afférents aux créances salariales ainsi que d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle Emploi rectifiés.

Par conclusions déposées le 16 février 2016 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, le Centre de Gestion et d'Etudes AGS [Localité 1] demande à la cour de :

à titre liminaire,

se déclarer incompétente au profit du tribunal administratif s'agissant du contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et notamment des mesures de reclassement qu'il contient,

sur le fond,

lui donner acte de ce qu'il se réfère aux arguments et conclusions de la SCP BTSG prise en la personne de Me [M], mandataire liquidateur de la SARL Laboratoires Bioethic,

débouter en toute hypothèse Mme [T] de sa demande de nullité du licenciement et de sa demande subséquente de salaire pendant la période de protection,

constater que Mme [T] a déjà été remplie de ses droits au titre du préavis,

la débouter de sa demande à ce titre,

subsidiairement, en cas de mauvaise application du plan de sauvegarde de l'emploi par le mandataire liquidateur concernant l'obligation de reclassement,

débouter Mme [T] de ses demandes de dommages et intérêts,

subsidiairement, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

réduire les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à six mois de salaire soit la somme de 12600 €, faute de préjudice établi,

sur la garantie de l'AGS,

dire n'y avoir lieu à garantie des sommes nées au titre de l'exécution du contrat pendant la période d'observation et les 21 jours suivants la liquidation judiciaire et à titre infiniment subsidiaire, des salaires sur la période de congé maternité,

dire que le jugement à intervenir ne sera opposable à l'AGS que dans la limité légale de sa garantie, laquelle exclut l'astreinte et l'indemnité allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

* Sur la rupture du contrat de travail :

Mme [T] soutient que le licenciement est nul à raison

- d'une part de l'imprécision du motif du licenciement, la lettre de licenciement ne précisant pas expressément, en application des dispositions de l'article L. 1225-4 du code du travail l'impossibilité de maintenir le contrat de travail pour des motifs étrangers à la grossesse,

- d'autre part en raison de la prise d'effet du licenciement pendant la période de suspension, le conseil de prud'hommes ayant retenu la seule date de notification du licenciement sans considérer la date des effets de la rupture, à l'issue de la période de préavis.

En conséquence de la violation du statut protecteur, elle a droit au versement des salaires qui devaient être perçus pendant la période couverte par la nullité et à l'indemnisation du préjudice lié à la nullité, précisant notamment qu'elle a, de ce fait, perdu le bénéfice de sa mutuelle et qu'elle a dû en rechercher une autre pendant sa grossesse, que l'indemnisation Pôle Emploi lui a été refusée dans un premier temps au motif pris de son congé maternité

Le mandataire liquidateur de la SARL Laboratoires Bioethic fait valoir que le licenciement pour motif économique est valable, en ce que les difficultés économiques rencontrées par l'employeur et en l'occurrence, la liquidation judiciaire de la SARL Laboratoires Bioethic entraînant sa cessation d'activité caractérisent l'impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à l'état de grossesse conformément aux dispositions de l'article L.1225-4 du code du travail. La Cour de cassation a d'ailleurs précisé que la mention de l'impossibilité de maintenir le contrat de travail en raison d'un motif étranger à l'état de grossesse n'est pas nécessaire en cas de cessation d'activité faisant suite à une liquidation judiciaire. La lettre de licenciement fait en outre référence à la suppression de son poste de travail.

Au soutien de son appel en ce qu'il porte sur la cause réelle et sérieuse du licenciement, le mandataire liquidateur soutient qu'en application de la loi de Sécurisation de l'emploi L. n°2013-504 du 14 juin 2013 :

d'une part la demande tendant à dire sans cause réelle et sérieuse le licenciement est irrecevable en raison de l'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi par la Dirrect,

les juridictions prud'homales étant incompétentes au profit de la juridiction administrative pour connaître de cette demande, laquelle est fondée sur un manquement global à l'obligation de reclassement par application des dispositions de l'article L. 1235-7 du code du travail issu visant à invalider dans l'absolu le PSE du fait du manquement à la procédure d'élaboration mise en oeuvre et non sur un manquement concernant sa situation personnelle ;

d'autre part qu'il a satisfait à l'obligation de recherche de reclassement au sein du groupe, les cinq sociétés en faisant partie ayant toutes répondu qu'elles n'exerçaient aucune activité et n'employaient aucun salarié, la société Pediact n'appartenant pas, elle, à ce groupe, n'entretenant aucun lien capitalistique avec les autres sociétés mais seulement des liens économiques entre commerçants ; il a procédé à une recherche de reclassement externe, au-delà de l'obligation légale et Mme [T] ne saurait en conséquence se prévaloir des règles applicables au seul reclassement interne.

Mme [T] s'oppose à l'exception d'incompétence, qu'elle estime avoir été justement écartée par les premiers juges, la juridiction judiciaire conservant sa compétence sur les question afférentes à la mise en oeuvre de la procédure de licenciement économique et à l'exécution de l'obligation de reclassement.

Elle soutient que le mandataire liquidateur n'établit pas avoir interrogé les sociétés filiales et ne communique pas les réponses communiquées par les entreprises du même secteur d'activité (concernant le reclassement en externe). Elle n'a jamais été destinataire d'offres de reclassement, alors même que l'appelant a fait l'aveu judiciaire de ce qu'il existait des postes à pourvoir dans le cadre du reclassement.

Aucune démarche n'a été faite auprès de la société Pediact qui disposait de postes à pourvoir. Elle soutient que cette société faisait partie du groupe de reclassement, dès lors que la SARL Laboratoires Bioethic lui avait transféré dès la fin 2012 la distribution de ses produits sous licence les plus rentables et que les deux sociétés étaient liées par des rapports d'affaires et des imbrications en terme de personnel et d'activité, de nombreux transferts de salariés étant intervenus entre la SARL Laboratoires Bioethic et Pediact, le dirigeant de Pediact étant un ancien salarié de la SARL Laboratoires Bioethic.

L'AGS développe et reprend à son compte les moyens et arguments du mandataire liquidateur, faisant essentiellement valoir que le périmètre de reclassement est prévu dans le plan de sauvegarde de l'emploi et que le litige portant sur le reclassement ne relève pas de la compétence de la cour.

La société Laboratoire Pédiact, mise en cause à la demande du mandataire liquidateur de la SARL Laboratoires Bioethic est intervenu à l'instance. Elle demande à la cour de lui donner acte de ce qu'aucune demande n'a été faite à son encontre et de la mettre hors de cause.

La société Laboratoire Clinidis dont la mise en cause avait été sollicitée par le mandataire liquidateur de la SARL Laboratoires Bioethic n'a pas comparu. Toutefois, la lettre recommandée avec accusée de réception qui lui avait été envoyée est revenue avec la mention 'destinataire inconnu à l'adresse indiquée' et la SCP BTSG n'a pas procédé à sa mise en cause par voie de signification. Elle n'est donc pas en cause dans cette instance.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'exception d'incompétence

En l'espèce Mme [T] ne conteste pas le document unilatéral élaboré par l'employeur mentionné à l'article L.1233-24-4, ni le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, ni les décision prises par l'administration au titre de l'article L.1233-57-5, ni même la régularité de la procédure de licenciement collectif mais la mise en oeuvre du licenciement collectif à son égard au regard de l'obligation de reclassement de l'employeur en sorte que les dispositions de l'article L. 1235-7-1 du code du travail ne sont pas applicables et que la juridiction judiciaire est compétente pour connaître du litige.

Sur l'exécution du contrat de travail

1/Sur le remboursement de frais professionnels

Selon l'avenant n°1 au contrat de travail en date du 11 juin 2007 le remboursement des frais professionnels de prospection s'effectue de manière mensuelle et de manière forfaitaire sur présentation obligatoire de justificatifs en ce qui concerne les frais de déjeuner, dîner et hôtel.

Mme [T] n'apporte pas les justificatifs de ses frais en sorte qu'elle sera déboutée de sa demande de reliquat de frais professionnels à hauteur de 7,12 €.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de cette demande.

2/ Sur les primes 2013

Mme [T] soutient que l'attestation Pôle Emploi ne mentionne aucune prime au titre des primes de campagne de promotion 2013 mais seulement des primes d'objectifs dites de pharmacie, qu'elle ne dispose d'aucun élément pour lui permettre de calculer ses droits au titre de ces primes et qu'à défaut pour l'employeur d'avoir répondu à sa sommation de produire les justificatifs, elle subit un préjudice qui sera réparé par référence aux primes versées en 2012 soit la somme de 1.260 €.

Le mandataire liquidateur répond que Mme [T] ne communique pas les bulletins de salaire correspondant à cette période de sorte qu'il ne peut être vérifié les sommes perçues à ce titre.

Selon le contrat de travail, Mme [T] bénéficie de primes qui sont versées suivant les modalités en usage sur chaque campagne de promotion.

Il ressort tant des bulletins de salaire de l'année 2012 que ceux de l'année 2013 que les primes intitulées 'prime pharmacie- Promovar' représentent en réalité les seules primes de campagne de promotion, en sorte que Mme [T] ne saurait se prévaloir d'un défaut de paiement de ces primes et que c'est à bon droit que les premiers juges l'ont déboutée de sa demande à ce titre.

Elle sera en outre déboutée de sa demande indemnitaire au titre du défaut de paiement de ces primes. Il sera ajouté au jugement de ce chef.

Sur la rupture du contrat de travail

1/Sur la demande de nullité du licenciement

Selon lettre recommandée avec accusé de réception du 30 juillet 2013, Mme [T] a reçu notification des motifs de son licenciement et proposition d'adhésion au contrat de sécurisation de l'emploi dans les termes suivants :

' Par jugement en date du 9 juillet 2013, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la SARL Laboratoires Bioethic et m'a désigné en qualité de liquidateur.

Cette liquidation, faute de poursuite d'activité, entraîne la suppression de tous les postes de travail et notamment votre poste de délégué à l'information thérapeutique...

Par décision implicite du 29 juillet 2013, la Dirrecte a homologuée ce document unilatéral.

Comme il a été indiqué aux membres du Comité d'entreprise pendant ces réunions, la liquidation judiciaire de la SARL Laboratoires Bioethic conduit à la suppression de la totalité des postes de travail en vertu de l'article L. 641-4 du code de commerce.

Afin d'éviter votre licenciement nous avons préalablement mis en oeuvre tous les moyens dont nous disposons pour rechercher des postes de reclassement interne. La SARL Laboratoires Bioethic est toutefois dans l'impossibilité de proposer des postes de reclassement en son sein dans la mesure où elle fait l'objet d'une liquidation judiciaire.

En outre, nous avons sollicité les sociétés du Groupe dont l'activité permettrait une permutabilité des salariés pour communication de leurs offres de reclassement. Celles-ci nous ont fait savoir qu'elles n'avaient pas d'activités et n'employaient aucun salarié.

Par ailleurs, dans le cadre des recherches de reclassement en externe, de nombreuses sociétés appartenant au même secteur d'activité et bassins d'emploi que la SARL Laboratoires Bioethic ainsi que la commission paritaire nationale ont également été interrogées sur d'éventuels postes disponibles.

Malheureusement, ces démarches n'ont pas permis de trouver des postes disponibles.

Du fait du jugement de liquidation judiciaire , votre poste de travail se trouve supprimé et je suis par conséquent contraint de vous notifier votre licenciement pour motif économique...

Conformément aux articles L.1233-65 et suivants du code du travail, le bénéfice du contrat de sécurisation professionnelle vous est proposé...

1- En cas d'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle :

Votre contrat de travail sera réputé rompu d'un commun accord à la date d'expiration du délai de 21 jours. En outre je vous dispense de toute présence au sein de l'entreprise à réception de la présente et ce jusqu'au terme du délai de réflexion de 21 jours...

2- En cas de refus du contrat de sécurisation professionnelle :

Vous voudrez bien considérer la présente comme notification de votre licenciement pour motif économique.

Cette mesure prendra effet à la date d'envoi de cette lettre. La date de première présentation de cette lettre par le service des postes fixera le point de départ du préavis...

Je vous dispense d'effectuer votre préavis...'

Selon les dispositions de l'article L. 1225-4 du code du travail, aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d'une salariée lorsqu'elle est en état de grossesse médicalement constaté et pendant l'intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé maternité, qu'elle use ou non de ce droit, ainsi que pendant les quatre semaines suivant l'expiration de ces périodes.

Toutefois, l'employeur peut rompre le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressée, non liée à son état de grossesse, ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement. Dans ce cas, la rupture du contrat de travail ne peut prendre effet ou être notifiée pendant les périodes de suspension du contrat de travail mentionnées au premier alinéa.

La lette de licenciement qui vise la cessation d'activité de l'entreprise à raison du jugement de liquidation judiciaire satisfait aux exigences de motivation résultant de l'application combinée des articles L. 1232-6 et L. 1225-4 du code du travail et le moyen tiré de l'absence de motivation expresse portant sur l'impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement sera rejeté.

En outre, la cessation d'activité de l'entreprise, dans le cadre de la liquidation judiciaire, fait obstacle à l'exécution du préavis, en sorte que la rupture du contrat prend effet le jour de la notification.

Ce faisant, la rupture du contrat de travail de Mme [T] été notifiée et a pris effet le 30 juillet 2013, en dehors de la période de protection débutant le 1er octobre 2013, conformément au statut protecteur de la femme enceinte.

Les demandes tendant au paiement de dommages et intérêts en violation du statut protecteur de la femme enceinte et à déclarer nul le licenciement de Mme [T] seront donc rejetées.

2/ Sur la demande tendant à dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse

Selon les dispositions de l'article L.1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou des mutations technologiques.

En application des dispositions de l'article L. 1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient.

Le reclassement d'un salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi de catégorie inférieure. Les offres de reclassement sont écrites et précises.

La recherche des possibilités de reclassement du salarié doit s'apprécier à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

Il est justifié par le mandataire liquidateur que les quatre autres sociétés du groupe capitalistique auquel appartient la SARL Laboratoires Bioethic, à savoir la SARL BDH, la SARL BDEP, la SAS Conseil et la SARL Arvem Pharma n'ont aucune activité et n'emploient pas de personnel salarié en sorte qu'aucune permutation de personnel n'est possible et qu'aucun reclassement ne pouvait être proposé en leur sein. Il s'ensuit que le moyen selon lequel le mandataire liquidateur ne justifie pas avoir interrogé ces sociétés sera rejeté.

Contrairement à ce que Mme [T] prétend, l'appelant n'a jamais fait l'aveu judiciaire de ce qu'il existait des postes à pourvoir dans le cadre du reclassement.

Mme [T] prétend que la société Pédiact fait partie du groupe de reclassement et que des postes en son sein étaient disponibles.

Le fait que des produits distribués par la SARL Laboratoires Bioethic le soient par la société Pédiact depuis la fin février 2013 permet uniquement d'établir que les deux sociétés se situent sur le même secteur d'activités, s'agissant au demeurant de sociétés d'intermédiaires spécialisées dans le commerce de produits spécifiques à vocation pharmaceutique.

Sur la liste de 23 noms de salariés de la SARL Laboratoires Bioethic qui auraient été embauchés par la société Pédiact et qui est produite aux débats, Mme [T] ne justifie que des situations de M. [A] et de Mme [D].

M. [A], directeur général de la société Pédiact était apporteur d'affaires au sein de la SARL Laboratoires Bioethic de janvier 2007 à septembre 2012 et Mme [D], responsable marketing au sein de la société Pédiact à compter de novembre 2012 était chef de produit au sein de la SARL Laboratoires Bioethic de juillet 2011 à octobre 2012.

Il ne saurait s'induire de ces deux cas que la SARL Laboratoires Bioethic et la société Pédiact ont des activités, une organisation ou un lieu d'exploitation permettant la permutation de tout ou partie du personnel, alors même qu'elles ne font pas partie d'une franchise, qu'elle n'appartiennent pas au même groupe capitalistique, qu'il n'existe pas de bourse aux emplois et qu'il n'est pas donné le moindre élément sur les modalités de recrutement de Pédiact.

Ainsi, il ne saurait être fait grief à la SCP BTSG de ne pas avoir dirigé ses recherches de reclassement au sein de la société Pédiact.

Les seuls renseignements juridiques relatifs à la société laboratoire Clinidis, portant mention de son activité, sa catégorie, ses numéros SIRET, RCS, de son capital social et plus spécifiquement du fait que M. [A] en est le gérant, sont insuffisants pour établir qu'elle et la SARL Laboratoires Bioethic ont des activités, une organisation ou un lieu d'exploitation permettant la permutation de tout ou partie du personnel. Il s'ensuit qu'il ne saurait être fait grief au mandataire liquidateur de ne pas avoir dirigé ses recherches de reclassement auprès de la société laboratoire Clinidis.

Par ailleurs le reproche tiré de ce que le mandataire liquidateur ne communique pas les réponses des entreprises du même secteur d'activité n'est pas non plus opérant, puisque ce grief porte sur le reclassement externe au sein d'entreprises du même secteur d'activité mais ne faisant pas partie du groupe auquel appartient l'employeur parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel. S'agissant d'une obligation extra-légale, aucun reproche ne saurait être fait à l'employeur sur le fondement des dispositions de l'article L.1233-4 du code du travail.

Il s'ensuit que la SCP BTSG prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Laboratoires Bioethic a procédé de manière loyale et sérieuse à son obligation de reclassement et que le licenciement économique de Mme [T] est fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a dit que le licenciement de Mme [T] était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences de la rupture

Mme [T] soutient que son salaire mensuel de référence s'élève à la somme de 2.206,41 euros et non à la somme de 2.135,24 euros en sorte qu'elle a droit à un reliquat d'indemnité compensatrice de préavis et d'indemnité de congés payés y afférent.

La somme de 2.135,35 euros qui a été retenue par le mandataire liquidateur comme étant le salaire auquel Mme [T] pouvait prétendre, intègre le salaire fixe de 2.073,05 euros outre la prime d'ancienneté de 62,19 euros mais n'intègre pas la prime de promotion qui fait partie intégrante du salaire.

La somme de 2.206,41 euros mentionnée sur l'attestation Pôle Emploi au titre du salaire brut versé à l'occasion de la rupture correspond à la moyenne des salaires des douze derniers mois intégrant les primes de promotion versées en décembre 2012, en mars et en juin 2013, en sorte que c'est à juste titre que Mme [T] réclame un reliquat de 213,51 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de 21,35 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférent. Ces sommes seront donc inscrites au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Laboratoires Bioethic.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a débouté Mme [T] de sa demande à ce titre.

Il convient donc d'ordonner la remise d'un bulletin de salaire et d'une attestation Pôle Emploi rectifiés, sans qu'il y ait lieu à astreinte.

Sur la mise en cause de la société Laboratoire Pédiact

Il convient de constater l'intervention forcée de la société Laboratoire Pédiact de la mettre hors de cause.

Sur la garantie de l'AGS

Il convient de rappeler que l'AGS n'est redevable de sa garantie que dans les limites précises des dispositions légales des articles L.3253-6 et L. 3253-8 du Code du Travail et de l'article L. 621-48 du code de commerce, qu'au regard du principe de subsidiarité, elle ne doit sa garantie qu'autant qu'il n'existe pas de fonds disponibles dans la procédure collective et qu'elle ne garantit pas les montants alloués au titre l'article 700 du code de procédure civile.

Il y a également lieu de rappeler qu'en application de l'article L. 621-48 du code de commerce, les intérêts cessent de courir à compter du jour de l'ouverture de la procédure collective.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La SCP BTSG prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Laboratoires Bioethic succombe, en sorte que les dépens de l'instance seront employés en frais privilégiée de la procédure collective de la SARL Laboratoires Bioethic. La SCP BTSG ès-qualités sera déboutée en conséquence de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande toutefois de ne pas faire bénéficier Mme [T] des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de la débouter de sa demande d'indemnité à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a jugé qu'en l'absence de preuve de recherche de reclassement, le licenciement de Mme [T] est sans cause réelle et sérieuse, en ce qu'il a fixé la créance de Mme [T] au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Laboratoires Bioethic aux sommes de 12.600 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail et de 700 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a débouté Mme [T] de sa demande de reliquat d'indemnité compensatrice de préavis et d'indemnité de congés payés y afférent ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

Se déclare compétent pour statuer sur la demande tendant à dire que le licenciement de Mme [T] est dépourvu de cause réelle et sérieuse pour défaut de respect de l'obligation de reclassement ;

Dit que le licenciement de Mme [T] est fondé sur une cause réelle et sérieuse;

Fixe la créance de Mme [T] passif de la liquidation judiciaire de la SARL Laboratoires Bioethic aux sommes de 213,51 euros au titre du reliquat d'indemnité compensatrice de préavis et de 21,35 euros au titre du reliquat d'indemnité compensatrice de congés payés y afférent ;

Ordonne la remise par la SCP BTSG ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Laboratoires Bioethic d'un bulletin de salaire et d'une attestation Pôle Emploi rectifiés, sans qu'il y ait lieu à astreinte ;

Déboute Mme [T] de toutes autres demandes ;

Confirme le jugement entrepris sur le surplus,

Y ajoutant,

Constate que la société Laboratoire Pédiact est intervenue à l'instance ;

Met hors de cause la société Laboratoire Pédiact ;

Rappelle que l'AGS n'est redevable de sa garantie que dans les limites précises des dispositions légales des articles L.3253-6 et L. 3253-8 du Code du Travail et de l'article L. 621-48 du code de commerce, qu'au regard du principe de subsidiarité, elle ne doit sa garantie qu'autant qu'il n'existe pas de fonds disponibles dans la procédure collective et qu'elle ne garantit pas les montants alloués au titre l'article 700 du code de procédure civile ;

Rappelle qu'en application de l'article L. 621-48 du code de commerce, les intérêts cessent de courir à compter du jour de l'ouverture de la procédure collective ;

Déboute les parties de toutes autres demandes ;

Dit que les dépens de l'appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective de la SARL Laboratoires Bioethic.

Le présent arrêt a été signé par Eric VEYSSIERE, Président et par Gwenaël TRIDON DE REY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 14/06696
Date de la décision : 06/04/2017

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°14/06696 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-04-06;14.06696 ?
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