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30/03/2017 | FRANCE | N°15/06819

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 30 mars 2017, 15/06819


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



--------------------------









ARRÊT DU : 30 MARS 2017



(Rédacteur : Monsieur Marc SAUVAGE, Président)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 15/06819

















Monsieur [C] [M]



c/



SAS TERREAL





















Nature de la décision : AU FOND







Notifié par

LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 octobre 2015 (...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 30 MARS 2017

(Rédacteur : Monsieur Marc SAUVAGE, Président)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 15/06819

Monsieur [C] [M]

c/

SAS TERREAL

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 octobre 2015 (R.G. n°F 13/00367) par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage d'ANGOULEME, Section Industrie, suivant déclaration d'appel du 03 novembre 2015,

APPELANT :

Monsieur [C] [M]

né le [Date naissance 1] 1972 à MAROC

de nationalité Française

Sans profession, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Rachid RAHMANI de la SELARL BERTRAND-RAHMANI, avocat au barreau de CHARENTE

INTIMÉE :

SAS TERREAL, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 2]

N° SIRET : 562 110 346

représentée par Me Claudia LEROY de la SELARL BOULET LAMBERTI BEBON, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 01 février 2017 en audience publique, devant Monsieur Marc SAUVAGE, Président et Madame Sophie BRIEU, Vice-Présidente Placée, chargés d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Marc SAUVAGE, Président,

Madame Catherine MAILHES, Conseillère,

Madame Sophie BRIEU, Vice-Présidente placée,

Greffier lors des débats : Gwenaël TRIDON DE REY,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

M. [M] a été recruté par la société TERREAL en qualité d'ouvrier en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 16 mars 1998. A compter du 15 septembre 1998, il était affecté à l'atelier moules.

Monsieur [M] a été placé en arrêt de travail de manière continue du 21 juin 2011 au 31 mai 2012. Il a établi le 14 octobre 2011 une déclaration d'accident du travail pour un accident du travail survenu le 21 juin 2011 en relatant les éléments suivants :

'agression verbale avec menaces physiques pendant le passage des consignes; moquerie humiliation par rapport à mon trouble obsessionnel compulsif.'

Par décision du 10 janvier 2012, la caisse primaire d'assurance maladie a notifié à M.[M] et à la société Terreal un accord de prise en charge l'accident du 21 juin 2011 au titre d'un accident du travail.

Cette reconnaissance devait être déclarée inopposable à l'employeur par la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie le 18 juillet 2012.

La caisse primaire d'assurance maladie de la Charente a notifié à M. [M] le 4 mai 2012 son classement en invalidité de 2ème catégorie.

La première visite de reprise auprès du médecin du travail le 04 juin 2012 concluait à une inaptitude temporaire.

La seconde, le 22 juin 2012, concluait au fait que M. [M] était inapte à son poste mais apte à celui de contrôle qualité à mi-temps proposé par l'employeur.

Invoquant le refus par M. [M] des différents postes de reclassement qui lui avaient été proposés, Terreal le convoquait à un entretien préalable et lui notifiait son licenciement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 20 novembre 2012.

Par requête déposée au greffe du conseil de prud'hommes d'Angoulême le 26 novembre 2013, Monsieur [M] a demandé de :

' déclarer nul son licenciement consécutif à un harcèlement moral,

' à titre subsidiaire dire que son licenciement survenu sans que soit respectée l'obligation de reclassement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

' en tout état de cause, condamner son ancien employeur à lui payer les sommes de :

- 48 408€ à titre de dommages et intérêts correspondant à 48 mois de salaire,

- 8 068€ à titre de rappel de salaire du 22 juillet au 22 novembre 2012, un mois après l'avis définitif d'inaptitude,

- 17 361,26€ au titre de l'indemnité spéciale de licenciement, doublée lorsque le licenciement est consécutif à un accident du travail,

- 2 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement de départage en date du 09 octobre 2015, le conseil de prud'hommes d'Angoulême a :

'rejeté les demandes de M. [M] au titre du harcèlement moral et du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

'condamné Terreal à lui payer les sommes de :

-4 034€ bruts au titre de rappel de salaire avant licenciement,

-8 680,63€ à titre d'indemnité spéciale de licenciement,

-1 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration de son avocat reçu au greffe de la cour le 03 novembre 2015, M. [M] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions reçues au greffe de la cour le 02 février 2016, il demande à la cour de :

' confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Terreal à lu payer les sommes de 8 680,63€ à titre d'indemnité spéciale de licenciement et de 1 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,

'infirmer les autres dispositions du jugement et,,

' statuant à nouveau,

'dire que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse,

'condamner Terreal à lui payer les sommes de :

- 48 408€ à titre de dommages et intérêts,

- 8 068€ à titre de rappel de salaire pour la période du 22 juillet au 22 novembre 2012,

- 2 500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile dans les conditions de l'article 37 de la loi sur l'aide juridique.

M. [M] rappelle que, depuis août 2010, il bénéficiait d'un poste aménagé suite à une décision du médecin du travail. En raison de troubles obsessionnels compulsifs, il devait être isolé des autres salariés. Il indique qu'il avait fait état de vols et de dégradations dans son service, qui étaient connus de tous mais n'étaient pas révélés. Il a subi en retour des brimades et des insultes de la part de collègues, en particulier M. [V] sans que son supérieur hiérarchique, M. [D] n'intervienne.

Il a déposé plainte auprès de la gendarmerie et saisi l'inspection du travail et le CHSCT,

Il prétend avoir refusé les postes de reclassement qui lui étaient proposés parce qu'ils ne correspondaient pas aux préconisations du médecin du travail.

Il prétend que le harcèlement moral résulte de la réaction de ses collègues quand il a dénoncé des vols et des dégradations et que l'employeur est demeuré passif face à cette situation.

Concernant les postes de reclassement, il indique que, contrairement à ce qu'avait préconisé le médecin du travail, ils n'avaient pas été soumis à l'avis d'un psychiatre.

Il souhaitait réintégrer son poste qui correspondait à un poste aménagé et c'est de manière fautive qu'il a été affecté à un poste à mi-temps manifestement inadapté.

Le rappel de salaire et l'indemnité spéciale de licenciement résultent des dispositions spéciales applicables en application de l'article L 1226-4 et L 1226-14 du code du travail.

Aux termes de ses conclusions déposées au greffe le 21 décembre 2016, Terreal, qui a pour activité la fabrication de tuiles, indique qu'elle a immédiatement déclenché une enquête lorsque M. [M] a dénoncé les faits de ce qu'il considérait comme l'incident du 21 juin 2011 et rappelle que la plainte pénale qu'il a déposée a été classée sans suite. Elle précise n'avoir pas été informée de la déclaration d'accident du travail qu'il a établie le 14 octobre 2011 pour agressions verbales avec menaces.

Elle souligne qu'elle a proposé à M. [M] 13 postes de reclassement et qu'en dernier lieu, après avoir repris l'attache du médecin du travail, elle lui a présenté une dernière proposition par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 15 octobre 2012 comprenant quatre postes qui avaient reçu l'aval du médecin du travail.

Elle indique que la preuve de faits constitutifs de harcèlement moral n'est pas rapportée et qu'en particulier l'existence de l'incident du 21 juin 2011 n'a pu être établie. Elle souligne que les troubles obsessionnels compulsifs dont il souffre sont indépendants du travail.

Elle conclut à titre principal à la confirmation du jugement.

A titre très subsidiaire, elle indique que l'indemnité sollicitée pour licenciement nul est d'un montant très exagéré et que M. [M] perçoit une pension d'invalidité d'un montant de 13 299,43€ par an.

Sur l'absence de cause réelle et sérieuse, elle indique qu'elle n'est pas responsable de l'inaptitude de M. [M] et qu'elle a respecté son obligation de reclassement.

Concernant l'indemnité spéciale de licenciement, elle retient qu'il n'est pas établi que l'arrêt de travail soit consécutif à un accident du travail et qu'il n'est pas plus établi que ce dernier soit à l'origine de l'inaptitude. S'il était fait droit à cette demande, le montant de l'indemnité spéciale de licenciement ne pourrait excéder 6 637,55€.

Elle reconnaît être redevable de 1 888,02€ au titre du rappel de salaire mais indique avoir payé à tort deux mois de préavis et demande la condamnation de M. [M] à lui verser la somme de 2 555,95€.

MOTIFS DE LA DECISION

En ce qui concerne les faits de harcèlement moral, l'article L 1152-1 du code du travail dispose qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Concernant la charge de la preuve, l'article L 1154-1 précise que le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et, qu'au vu de ces éléments, pris dans leur ensemble, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En ce qui concerne les faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, Monsieur [M] ne fait plus état devant la cour d'appel que du fait qu'il était confronté à un climat délétère, qu'il subissait et des injures auxquelles il était confronté en lien avec sa maladie, et du fait qu'il aurait subi des représailles de ses collègues après avoir dénoncé des faits de vols et de dégradations commis par d'autres salarié,s et tout particulièrement de l'incident du 21 juin 2011 qui l'a opposé à Monsieur [V].

Il n'est donc plus fait état de l'avertissement prononcé le 23 mars 2009 pour absence injustifiée les 2, 3 et 4 mars 2009, avertissement dont l'annulation n'a jamais été demandée. Monsieur [M] avait saisi l'inspection du travail et l'entreprise avait répondu à l'inspection du travail , réponse transmise par cette administration à Monsieur [M] le 28 septembre 2010 :

'C'est donc sans jamais avoir obtenu d'autorisation d'absence - ce qui n'est pas contesté par Monsieur [M] que ce dernier ne s'est pas présenté à son poste de travail les 2, 3 et 4 mars 2009.

Nous avons par conséquent indiqué à Monsieur [M], non sans l'avoir reçu une nouvelle fois au préalable- que sa sanction était confirmée.'

Cet avertissement n'appelle aucune observation et ne pourrait constituer un fait permettant de présumer un harcèlement.

Pour ce qui est du climat délétère auquel Monsieur [M] aurait été confronté, il faut rappeler qu'il souffre d'un trouble obsessionnel compulsif ainsi décrit par le médecin du travail :

'Phobie des microbes et des salissures. Ne peut pas serrer la main des personnes, ne peut pas se déshabiller pour les examens médicaux, lave sa carte vitale au savon, se lave et se douche ++++ dès qu'il a eu un contact direct ou indirect avec une autre personne.'

La visite médicale du 26 octobre 2010 reprend cette pathologie mais ne fait état d'aucune difficulté autre avec ses collègues. Il indique qu'il peut travailler dans l'atelier moules car dans cet atelier personne ne l'approche, ni ne touche ses outils, contrairement à d'autres postes où les matériels sont susceptibles d'avoir été touchés par des tiers '(dit que la simple idée d'y aller le bouffe, qu'il a été près de se suicider...)'

Le 20 janvier 2011 :

'Les restrictions sont bien respectées. Ne rencontre que peu de difficultés à ce poste. Suivi par mise en demeure tt 5 Marcombes n'ayant pas jujé utile de le revoir régulièrement). Se sent à peu près bien. Veut continuer comme cela.'

Encore après son arrêt maladie, lors de la visite du 10 octobre 2011, 'Monsieur [M] dit qu'il n'y a qu'une seule personne avec qui il y a un problème à l'atelier moules.'

Avant son arrêt de travail, Monsieur [M] n'a jamais fait état d'une difficulté particulière avec des collègues et, après quatre mois d'arrêt, il n'a fait état d'une difficulté qu'avec une seule personne.

Sur les rapports de visites de 2003 à 2009, les troubles obsessionnels compulsifs ne paraissent pas invoqués avant la visite du 16 mars 2009 et il est uniquement noté à cette date :

'est perturbé++ car doit aller en production. Pas envie'

Dans son courrier à son employeur du 23 juin 2009 Monsieur [M] reprend un incident avec Monsieur [V] qui aurait commis des faits de moquerie et d'humiliation par rapport à son TOC et qui :

' le 21 juin 2011 à 11h55 pendant la relève il m'a fait des menaces physiques il a levé la main sur moi en me disant 'sale peste si je t'entends dire mon nom je t'en colle une' ensuite je lui demande de quoi il s'agit il continuait à m'insulter (t'es une femme etc...)'

Dans ce courrier Monsieur [M] évoque ensuite l'avertissement de mars 2009 dont il a été vu qu'il n'appelait pas d'observation et le fait que sa vie serait devenue 'un enfer' suite à la dénonciation des vols, enfer qu'il fait remonter à février 2009.

Aucun fait précis, aucun nom, n'est cité.

Le seul fait susceptible de faire présumer l'existence d'un harcèlement est l'incident avec Monsieur [V] dont il faut d'abord observer qu'il est unique et qu'il ne peut donc suffire à établir l'existence d'un harcèlement, deux faits distincts étant au minimum exigibles.

Au surplus, ce fait a donné lieu à une enquête de gendarmerie qui a conclu qu'aucun élément probant ne permettait de mettre en cause M. [V] pour des injures non publiques. A été établie l'existence d'une courte altercation entre les deux hommes, Monsieur [V] reprochant à Monsieur [M] d'avoir parlé contre lui à des tiers au lieu de le lui dire directement.

L'existence de faits permettant de présumer un harcèlement n'est donc pas établie et le jugement doit donc être confirmé tant sur l'inexistence d'un harcèlement moral que, en conséquence, sur l'absence de nullité du licenciement de ce chef ;

Pour ce qui est du licenciement pour inaptitude, ce qui importe devant le conseil de prud'hommes c'est le motif d'inaptitude retenu par le médecin du travail qui a toujours été une inaptitude pour maladie et non pour accident du travail.

Aux termes de l'article L 1226-2 du code du travail, consacré au reclassement du salarié suite à une maladie ou un accident non professionnel :

Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.

En application de ce texte, le chef d'entreprise doit rechercher par tous moyens s'il est possible de préserver l'emploi du salarié; il doit étudier toutes les propositions émises par le médecin du travail en procédant éventuellement à une mutation, à une transformation de poste ou à un aménagement du temps de travail.

Cette recherche d'un poste de reclassement doit être effectuée non seulement dans l'entreprise au sein de laquelle travaillait le salarié devenu inapte mais également dans toutes les entreprises du groupe auquel appartient l'entreprise, du moins dans celles dont les activités, l'organisation et le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la mutation de tout ou partie du personnel.

Le reclassement est subordonné à l'acceptation par le salarié du nouvel emploi qui lui est proposé.

Un refus du salarié ne dispense pas l'employeur de faire de nouvelles propositions. Ce n'est que dans les situations où il n'existe aucun emploi dans l'entreprise et dans le groupe qui puisse être tenu par le salarié inapte, ou si l'avis du médecin du travail mentionne expressément que tout maintien du salarié dans l'entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé que l'employeur peut procéder de façon légitime au licenciement du salarié.

Le 22 juin 2012, à l'issue de la seconde visite (article R 4624-31 du code du travail) le médecin du travail a conclu :

'Apte à un essai de reprise au poste proposé (contrôle qualité) à mi-temps'

Ce poste a été refusé par un courrier du conseil de Monsieur [M] du 11 septembre 2012.

Compte tenu d'un refus téléphonique préalable de l'intéressé, l'employeur lui avait proposé 14 postes par courrier du 17 juillet 2012.

L'employeur a repris l'attache du médecin du travail en lui demandant son avis sur 05 postes par courriel du 13 septembre 2012.

Le médecin du travail a répondu le 26 septembre :

'La réponse n'est pas simple car s'il n'y a pas de contre-indication médicale particulière à affecter Mr L sur ces postes cela nécessite tout de même que l'intéressé accepte l'idée de changer de travail pour occuper l'un ou l'autre des postes proposés, ce qui n'est, semble-t-il, pas le cas actuellement.'

Le même jour, la responsable des ressources humaines de Terreal lui adressait un nouveau courriel en demandant au médecin :

'que vous nous donniez vos recommandations médicales ou, à l'inverse, vos contre-indications concernant lesdits postes'

Le médecin du travail répondait le lendemain :

'Comme je vous l'ai indiqué dans mon précédent courriel, vous pouvez proposer ces 4 postes à Mr L car il n'y a pas de contre-indication médicale. Ce salarié, comme les autres, doit pouvoir accéder à des installations sanitaires conformes.'

Les quatre postes étaient proposés à Monsieur [M] le 15 octobre 2012, courrier auquel il n'a pas répondu. Il a été convoqué le 30 octobre 2012 à un entretien préalable au licenciement le 12 novembre 2012 et a été licencié pour inaptitude par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 20 novembre 2012.

Monsieur [M] exigeait de reprendre son ancien poste, au service des moules c'est à dire qu'il exigeait de son employeur de le replacer au poste même où il affirmait avoir fait état de harcèlement de février 2009 au 21 juin 2012.

Il importe peu pour l'employeur que le médecin du travail n'ait pas sollicité l'avis d'un psychiatre alors qu'il avait indiqué, auparavant, qu'un avis spécialisé serait sollicité lorsqu'il aurait à donner un avis sur les propositions de reclassement. Il appartenait à Monsieur [M] de contester l'avis du médecin du travail en saisissant l'inspecteur du travail (articles R 4624-34 à R 4624-36 du code du travail).

L'employeur a proposé des offres de reclassement réelles, sérieuses et loyales qui avaient reçu l'aval du médecin du travail auquel il avait soumis les propositions et dont il avait sollicité des précisions. Il ne pouvait donner suite à la seule proposition qui aurait reçu l'aval du salarié sauf à replacer ce dernier, qui souffre d'une maladie mentale et qui a été placé en invalidité de deuxième catégorie, dans les conditions mêmes de harcèlement-non confirmé- qu'il avait dénoncées.

Le jugement doit donc également être confirmé en ce qu'il avait retenu une cause de licenciement réelle et sérieuse.

Le licenciement a été prononcé dans le cadre d'une maladie ou d'un accident non professionnel et dès lors l'indemnité spéciale de l'article L 1226-14 n'est pas due, le jugement doit donc être infirmé de ce chef.

Le licenciement ayant été prononcé pour maladie ou accident non professionnel, en application de l'article L 1226-4, le préavis n'est pas dû.

En application du 1er alinéa de cet article, la société devait reprendre le paiement du salaire un mois à compter de l'examen de reprise du travail, jusqu'à la date du licenciement. La société Terreal devait donc reprendre le paiement du salaire du 22 juin 2012 au 20 novembre suivant pour un montant total de salaires de 8 068€, correspondant à quatre mois de salaires.

Elle n'a réglé que 6 179,98€ et reste donc débitrice d'une somme de 1 888,02€.

En revanche, elle a payé deux mois de préavis indus pour un totale de 4 443,97€ de préavis indû et les dettes respectives se compensent donc à hauteur de 2 555,95€ au profit de la société Terreal que Monsieur [M] doit donc être condamné à lui payer.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile,

Monsieur [M] qui succombe en cause d'appel doit être condamné aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SAS Terreal à payer à Monsieur [C] [M] la somme de 8 680,63€ à titre d'indemnité spéciale de licenciement,

Statuant à nouveau du chef infirmé,

Déboute Monsieur [C] [M] de sa demande d'indemnité spéciale de licenciement,

Y ajoutant,

Ordonne la compensation entre la somme de 4 443,97€ payée à tort par la SAS Terra au titre du préavis non dû et les salaires qu'elle reste devoir à Monsieur [C] [M] pour un montant de 1 888,02€ à hauteur de la plus faible des deux sommes,

Condamne en conséquence Monsieur [C] [M] à payer à la SAS Terreal la somme de 2 555,95€,

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes, y compris d'application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [C] [M] aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Marc SAUVAGE, Président et par Gwenaël TRIDON DE REY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 15/06819
Date de la décision : 30/03/2017

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°15/06819 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-03-30;15.06819 ?
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