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17/11/2016 | FRANCE | N°15/04723

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 17 novembre 2016, 15/04723


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 17 NOVEMBRE 2016



(Rédacteur : Monsieur Marc SAUVAGE, Président)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 15/04723

















SAS SERMAT



c/



Monsieur [H] [W]





















Nature de la décision : AU FOND







Notifié

par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 juin 2015 (...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 17 NOVEMBRE 2016

(Rédacteur : Monsieur Marc SAUVAGE, Président)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 15/04723

SAS SERMAT

c/

Monsieur [H] [W]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 juin 2015 (R.G. n° F 14/00082) par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage d'ANGOULÊME, Section Commerce, suivant déclaration d'appel du 23 juillet 2015,

APPELANTE :

SAS SERMAT, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 1]

N° SIRET : B 3 11 945 109

représentée par Me Jean-Philippe POUSSET de la SCP LAVALETTE AVOCATS CONSEILS, avocat au barreau de CHARENTE

INTIMÉ :

Monsieur [H] [W]

né le [Date naissance 1] 1966

de nationalité Française

Chauffeur livreur, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Frédérique BERTRAND de la SELARL BERTRAND-RAHMANI, avocat au barreau de CHARENTE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 septembre 2016 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Marc SAUVAGE, Président,

Madame Catherine MAILHES, Conseillère,

Madame Sophie BRIEU, Vice-Présidente Placée,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Gwenaël TRIDON DE REY,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Par jugement du 11 mai 2009, le conseil de prud'hommes d'Angoulême a condamné la SAS Sermat ( La Sermat), à payer à l'un de ses salariés, Monsieur [Z], les sommes de 1 424,39€ et de 472,80€ à titre de rappel de la prime de vacances. Cette prime, équivalant à 30% d'un mois de salaire était versée, avant le 1er juillet 2004 à l'ensemble des salariés en deux fois dans le cadre d'un usage d'entreprise.

Ce jugement a été confirmé par arrêt de la cour d'appel de Bordeaux en date du 1er juillet 2010 qui a dit que cette prime s'ajouterait au salaire de base et a condamné la société Sermat à faire figurer la prime de vacances de 2,5% du salaire brut sur une ligne distincte du bulletin de paie.

Par requête déposée au greffe le 10 mars 2014, Monsieur [H] [W] a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande au titre de l'indemnité de vacances sur les cinq années antérieures ;

Par jugement de départage en date du 26 juin 2015, le conseil de prud'hommes a :

-condamné la société Sermat à payer à Monsieur [W] la somme de 3 023,57€ au titre du rappel de salaire pour la période du 1er mars 2009 au 31 janvier 2015,

-ordonné sous astreinte la délivrance par l'employeur d'un bulletin de paie conforme à ce rappel pour la période antérieure au 1er mars 2014 et de tous les bulletins de paie conformes à ce rappel pour la période postérieure au 1er mars 2014,

-rejeté la demande complémentaire de Monsieur [W] au titre de la résistance abusive,

-condamné la société Sermat sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le conseil de prud'hommes a motivé sa décision en retenant que, pour Monsieur [W] si l'article 6 de son contrat de travail mentionnait que la prime de vacances était incluse dans son salaire mensuel brut, la Sermat ne justifiait pas que cette intégration ne caractérisait pas une violation du principe 'à travail égal salaire égal' pour Monsieur [W], par comparaison à la situation des salariés de l'entreprise qui continuaient à bénéficier du versement de la prime.

La SAS Sermat a interjeté appel en retenant qu'à compter du 1er janvier 2004, la prime vacances auparavant versée en juillet et en décembre était versée par fractions d'1/12 de son montant, s'ajoutant au salaire brut mensuel. Les salariés en avaient été informés par une note jointe à leur bulletin de paie de janvier 2004. Un certain nombre de salariés demandaient à signer un avenant qui précisait que 'la rémunération mensuelle de 1.450€ incluait l'ancienne prime de vacances en vigueur antérieurement dans l'entreprise.'

La société précise ne s'être pas pourvu en cassation contre l'arrêt de 2010 de la cour d'appel de Bordeaux, dans la mesure où elle ne pouvait pas justifier avoir dénoncé individuellement à chaque salarié cet usage.

En revanche, elle prétend qu'il l'avait été ultérieurement et que l'arrêt de 2010 avait été rendu dans le cadre de la défense d'un droit individuel qui ne saurait ouvrir des droits collectifs aux autres salariés.

Elle retient qu'elle démontre avoir régulièrement dénoncé l'usage aux délégués du personnel, peu important que le point n'ait pas figuré à l'ordre du jour de la réunion. La réalité de l'information dispensée avait d'ailleurs été retenue par l'inspecteur du travail. L'usage avait été dénoncé par note jointe à chaque bulletin de paie.

Pour les salariés embauchés postérieurement à la dénonciation de l'usage, elle retient qu'il appartient au salarié qui se prévaut d'une discrimination d'en établir l'existence et, à tout le moins, de demander au juge d'ordonner la communication la production des pièces détenues par une autre partie lui permettant de s'en prévaloir.

Elle s'oppose à toute condamnation à des dommages et intérêts.

Pour les salariés ayant signé un contrat de travail , l'intégration d'un avantage issu d'un usage dans le contrat de travail met fin à cet usage, peu important que l'usage ait été ou non préalablement régulilèrement dénoncé. Il ne peut dès lors être modifié que par un nouvel accord des parties. Tel était le cas pour Monsieur [W], pour lequel, il n'est pas établi que cette intégration caractériserait une inégalité de traitement par comparaison à d'autres salariés qui continueraient à percevoir la prime. Il appartient au salarié qui excipe d'une violation du principe 'à travail égal, salaire égal' à son détriment d'en justifier de la réalité quitte à demander au juge d'ordonner la production des éléments de preuve se trouvant entre les mains d'une autre partie.

Elle retient que Monsieur [W] n'établit pas la réalité de cette rupture d'égalité et que le jugement du conseil de prud'hommes a inversé la charge de la preuve.

La Sermat demande que le jugement du conseil de prud'hommes soit confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [W] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et elle demande qu'il soit condamné à lui payer la somme de 1€ à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre la somme de 500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions remises au greffe le 02 septembre 2016, Monsieur [W] relève que l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 1er juillet 2010 avait retenu que, le fait pour la société Sermat, de cesser d'appliquer un usage, sans l'avoir régulièrement dénoncé, causait un préjudice direct à l'intérêt collectif des salariés. Par ailleurs, la société a reconnu continuer à verser la prime initiale à Monsieur [S] compte-tenu de l'irrégularité de la dénonciation à son égard. S'agissant de Monsieur [W], s'il était fait application de la clause insérée à son contrat de travail, il subirait une inégalité de traitement par rapport aux salariés qui continuent à bénéficier de cette prime puisque, si elle s'ajoute au salaire de base, encore faut-il qu'elle apparaisse sur une ligne distincte du bulletin de paie, ce qui n'est précisément pas l'hypothèse.

La violation du principe à travail égal salaire égal est caractérisée par le fait que les salariés engagés à compter du 1er juillet 2004 n'en bénéficient plus, contrairement à ceux qui l'ont été avant.

Monsieur [W] sollicite donc la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la Sermat à lui verser la prime due jusqu'au mois de janvier 2015 et de lui avoir enjoint de lui remettre un bulletin de paie modifié. Il demande que la société soit condamnée à lui payer la somme de 933,60€ au titre de la prime de vacances pour la période de février 2015 à septembre 2016, d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et de condamner la Sermat à lui payer la somme de 1 000€ sur ce fondement, outre un montant identique sur celui de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Monsieur [W] appartient à la catégorie de salariés concernés pour lesquels la prime de vacances était stipulée à son contrat de travail, pour lui le contrat de travail signé le 03 mars 2004, en qualité de chauffeur-livreur , Niveau NII, Echelon E2, Coefficient 180, précisait dans son article 6 :

Pour mémoire, il est précisé que cette rémunération mensuelle de 1.450 euro, inclue l'ancienne Prime de vacances de vacances en vigueur antérieurement dans l'entreprise'

Si l'on compare à la formulation retenue dans le contrat de travail de Monsieur [D], signé le 06 janvier 2013:

' Article 6- Rémunération

En contrepartie de son travail, Monsieur [Y] [D] recevra une rémunération mensuelle brute de 1.450€

'Mille cent cinquante quatre euros vingt sept centimes d'euros.)

S'ajoute à cette rémunération :

'' une prime dite de 'vacances',

Le règlement des primes collective ou individuelle interviendra en fonction des règles définies par l'entreprise.'

Cette comparaison fait apparaître sans ambiguïté que, pour Monsieur [D], la prime s'ajoutait à son salaire alors que pour Monsieur [W], elle était incluse dans celui-ci sans que le salaire soit augmenté : en réalité, elle disparaissait.

Au regard du respect du principe « à travail égal, salaire égal », la seule

circonstance que des salariés aient été engagés avant ou après l'entrée en vigueur d'un accord collectif ou d'un engagement unilatéral ne saurait suffire à justifier des différences de traitement entre eux, quelles que soient par ailleurs les stipulations de leur contrat de travail. Il appartient à l'employeur de démontrer qu'il existe des raisons objectives à la différence de traitement entre des salariés effectuant un même travail ou un travail de valeur égale dont il revient au juge de contrôler la réalité et la pertinence, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Au surplus, le fait même que la prime de vacances n'apparaisse plus sur le bulletin de paie de Monsieur [W] établit qu'en réalité, il n'en bénéficiait plus.

Enfin, lorsque la différence de traitement entre des salariés placés dans une

situation identique au regard de l'avantage considéré résulte des termes mêmes d'un engagement unilatéral de l'employeur à l'origine d'un usage d'entreprise , il y a lieu de faire application du principe d'égalité de traitement sans recourir nécessairement à une comparaison entre salariés de l'entreprise effectuant le même travail ou un travail de valeur égale.
C'est en conséquence par des motifs complets et pertinents qui ne sont pas remis en cause par les débats en appel et que la cour adopte, que le premier juge a considéré que la prime était toujours due et le jugement doit être confirmé sur ce point.

Monsieur [W] ayant demandé à ce que la Sermat soit condamnée à lui payer cette prime jusqu'au 1er septembre 2016, le jugement doit être complété sur ce point.

Si Monsieur [W] a mis en demeure la Sermat de lui payer la prime de vacances par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 10 novembre 2011, le fait que l'employeur n'ait pas obtempéré ne suffit pas à retenir que la résistance de l'employeur peut dès lors être qualifiée d'abusive. Le jugement doit également être confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [W] de sa demande de dommages et intérêts sur ce fondement.

La SAS Sermat succombant, il n'y a lieu de faire droit ni à sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, ni à sa demande d'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à Monsieur [W] la charge de ses frais irrépétibles et il est fait droit à sa demande d'application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Y ajoutant,

Condamne la SAS SERMAT à payer à Monsieur [H] [W] la somme de 933,60€ au titre de la prime de vacances pour la période de février 2015 à septembre 2016,

Condamne la SAS SERMAT à payer à Monsieur [H] [W] la somme de 1 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute pour le surplus la SAS Sermat de ses demandes,

Condamne la SAS SERMAT aux dépens.

Signé par Marc SAUVAGE, Président et par Gwenaël TRIDON DE REY Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 15/04723
Date de la décision : 17/11/2016

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°15/04723 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-11-17;15.04723 ?
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