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08/06/2016 | FRANCE | N°14/03699

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 08 juin 2016, 14/03699


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 08 JUIN 2016



(Rédacteur : Madame Maud Vignau, Président)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 14/03699









Madame [K] [X]



c/



Groupe La Brégère



















Nature de la décision : AU FOND















Notifié par LRAR le :>


LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :





Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 mai 2014 ...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 08 JUIN 2016

(Rédacteur : Madame Maud Vignau, Président)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 14/03699

Madame [K] [X]

c/

Groupe La Brégère

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 mai 2014 (RG n° F 12/00175) par le Conseil de Prud'hommes - formation paritaire - de Périgueux, section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 23 juin 2014,

APPELANTE :

Madame [K] [X], née le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 1]

(40000), de nationalité française, demeurant [Adresse 1],

Représentée par Maître Luc Gaillard de la SELARL Luc Gaillard & Associés, avocats au barreau de la Corrèze,

INTIMÉ :

Groupe La Brégère, siret n° 788 040 921, pris en la personne de son Président Directeur Général Monsieur [U] domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 2],

Représenté par Maître Frédérique Pohu-Panier, avocate au barreau de Périgueux,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 avril 2016 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Maud Vignau, Président, chargé d'instruire l'affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Maud Vignau, Président,

Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller,

Madame Isabelle Lauqué, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière.

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

Madame [K] [X] a été engagée par le Groupe La Brégère par contrat de travail à durée indéterminée, le 15 octobre 2009, en qualité de collaboratrice affectée au service paye gestion sociale - coefficient 260 de la convention collective nationale des experts comptables et commissaires aux comptes-, pour une rémunération annuelle brute de 32.500 €.

Le lieu d'exercice d'activité professionnelle de Madame [X] au sein dudit groupe était commun avec celui de la Société Agorajuris, société d'avocats dans laquelle travaille Maître [Y], avocat en droit social.

Lors du départ de l'assistante de Maître [Y], celui-ci a sollicité le Groupe La Brégère pour une mission d'assistante juridique dans le cadre d'un contrat de prestation de services dans l'attente de trouver un collaborateur juridique.

Madame [X] souhaitant évoluer vers un poste de juriste en droit social s'est déclarée intéressée par cette nouvelle mission.

Dans ce cadre, une lettre de mission définissant les domaines d'inter-vention de Madame [X] a été signée entre la Société Agorajuris et le Groupe La Brégère, le 31 mai 2011.

À compter du 1er juin 2011 Madame [X] a partagé son temps de travail (35 heures) entre son employeur et le cabinet Agojuris. La situation a été régularisée par avenant à son contrat de travail du 4 novembre 2011.

Madame [X] a été en arrêt maladie du 21 novembre 2011 au 8 décembre 2011 puis du 16 janvier 2012 au 31 juillet 2012.

Durant cette période elle a sollicité la mise en oeuvre d'une rupture conventionnelle et réclamé, en sus de ses indemnités légales, des rappels de salaire au titre de l'intéressement 2010/2011 et 2011/2012.

N'ayant aucune réponse à ses demandes, Madame [X] a pris acte de la rupture de son contrat de travail pour non-paiement des salaires.

Madame [X] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Périgueux le 11 juillet 2012 aux fins de :

' voir requalifier sa prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse aux torts exclusifs de son employeur,

' voir condamner son employeur à lui verser diverses indemnités.

Par jugement en date du 26 mai 2014, le Conseil de Prud'hommes de Périgueux, section Activités Diverses,

' déclare qu'il n'est du ni rappel de salaire, ni heures supplémentaires à Madame [X],

' déclare que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par Madame [X] en date du 9 juillet 2012 s'analyse en une démission,

' déboute en conséquence Madame [X] de l'intégralité de ses demandes,

' condamne Madame [X] à verser au Groupe La Brégère, en la personne de son représentant légal, la somme de 690,60 € au titre du remboursement des cotisations de mutuelle pour la période du 1er octobre 2012 au 28 février 2013,

' déboute le Groupe La Brégère de ses autres demandes,

' condamne Madame [X] aux entiers dépens et frais éventuels d'exécution.

Madame [X] a régulièrement interjeté appel de cette décision le 24 juin 2014.

Par conclusions du 20 avril 2016, développées oralement à l'audience, Madame [X] sollicite de la Cour de :

' dire recevable et fondé son appel,

' réformer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

' dire que sa prise d'acte de rupture du contrat de travail l'a été aux torts exclusifs de l'employeur,

' requalifier, en conséquence, sa prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' faire droit à l'intégralité de ses demandes et condamner, en conséquence, le Groupe La Brégère à lui verser les sommes de :

- 29.958,00 € à titre d'indemnité pour violation des dispositions de l'article L.8221-5 du code du travail (six mois de salaire),

- 2.744,00 € brut à titre de rappel salaire durant la mise à disposition chez Agorajuris, outre 274,40 €, de congés payés

- 18.203,94 € brut à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 1.820,38 € à titre de congés payés afférents,

- 9.986,00 € à titre de préavis, outre 998,60 € à titre de congés payés afférents,

- 2.746,00 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 3.133,52 € brut à titre de maintien de salaire pendant l'arrêt maladie, outre 313,35 € à titre de congés payés afférents,

- 4.016,00 € brut à titre de rappel de salaire au titre de l'intéressement pour l'exercice 2011/2012 au prorata du temps travaillé, outre 401,60 € à titre de congés payés afférents,

- 39.944,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et

sérieuse,

' déboute le Groupe La Brégère de l'intégralité de ses demandes,

' condamner ledit groupe à lui verser la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens et frais éventuels d'exécution de la décision à intervenir.

Par conclusions n° 2 - du 20 avril 2016 développées oralement à l'audience, le Groupe La Brégère sollicite de la Cour de :

' confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

' dire qu'il n'est dû ni rappel de salaire, ni heures supplémentaires à Madame [X],

' constater qu'il n'a commis aucun manquement en qualité d'employeur,

' dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail doit s'analyser en une démission,

' débouter Madame [X] de l'intégralité de ses demandes,

' condamner Madame [X] à lui verser les sommes de :

- 690,60 € au titre du trop-perçu sur les cotisations de la mutuelle,

- 2.500,00 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers

dépens et frais éventuels d'exécution.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.

SUR CE, LA COUR

Sur la prise d'acte

En cas de prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié, cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits

invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.

Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.

- L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de

faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige ; le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même

si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.

Il résulte de la combinaison des articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail, en l'espèce, Madame [X] reproche à son employeur le Groupe La Brégère les manquements suivants :

- le non paiement des sommes qui lui sont légalement dues ;

- une surcharge de travail qui a eu pour conséquence la dégradation de son état de

santé ;

- un prêt de manoeuvre illicite dans le cadre du mi-temps qu'elle a été amenée à accomplir auprès de Maître [Y] et Agorajuris.

Premier manquement

Madame [X] reproche à son employeur le Groupe La Brégère un prêt de manoeuvre illicite dans le cadre du mi-temps qu'elle a été amenée à accomplir auprès de Maître [Y] et Agorajuris.

C'est à Madame [X] de rapporter la preuve de ce manquement. Elle indique que la lettre de mission du 31 mai 2011 définissant précisément la prestation de service du Groupe La Brégère au profit de son client Agorajuris serait un faux établi par son ex employeur et Agorajuris, pour les besoins de la cause ....sans en apporter le moindre commencement de preuve.

Madame [X] est également dans l'incapacité de démontrer avoir travaillé sous lien de subordination de Maître [Y], en dehors du fait que ce dernier aurait contresigné les e-mail et les courriers qu'elle adressait aux clients d'Agorajuris, dans le cadre des prestations définies expressément dans la lettre de mission précitée.

Il ressort au contraire explicitement des pièces produites par le Groupe La Brégère : lettre de mission fixant expressément les prestations assurées par le cabinet d'experts comptables telles que 'l'établissement de contrat de travail, l'assistance et la représentation en cas de contrôle administratifs d'organisme sociaux, l'établissement de bulletins de salaire, l'assistance ou l'établissement des déclarations annuelles de données sociales, le conseil sur des questions juridiques simples portant sur la réglementation du travail', un avenant au contrat de travail de Madame [X], les factures des missions adressées par le Groupe La Brégère à Agorajuris) que Madame [X] n'a jamais été mise à disposition d'Agorajuris qu'elle est toujours demeurée sous la seule subordination du Groupe La Brégère qui seul conservait sur elle un pouvoir de direction, de discipline.

Il s'ensuit qu'il s'agit bien donc d'un contrat de prestations de services. Madame [X] est dans l'incapacité d'établir d'une quelconque manière l'existence d'un prêt de manoeuvre illicite, mieux elle produit elle même dans ses propres pièces une facture de mission adressée par le Groupe La Brégère à Agorajuris ...

Deuxième manquement

Le non paiement de ses heures supplémentaires, Madame [X] soutient avoir largement dépassé la durée du temps de travail de 35 heures prévue chaque semaine à compter de juin 2011, outre les 4 heures de travail effectuées auprès du cabinet Agojuris elle continuait à effectuer la plus grande partie de son travail au sein du Groupe La Brégère.

Elle indique avoir effectué 411,73 heures supplémentaires.

Aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

En l'espèce, Madame [X] produit un tableau récapitulatif des heures supplémentaires qu'elle dit avoir effectuées. (pièce 12 de la salariée). Pour étayer sa demande la salariée produit des e-mails.

L'employeur conteste le nombre d'heures supplémentaires réclamées. Il fait valoir qu'il dispose d'un état de gestion des temps qui correspond à des unités de facturation vers les clients ou vers les collaborateurs, établi à partir des feuilles de semaine remises au service facturation par chaque collaborateur et donc par la salariée (pièces 18, 19, 20 de l'employeur). L'employeur indique que les horaires du cabinet sont les suivants : 8h30-12h30/14h00-18h00 soit 39 heures par semaine les salariés bénéficient de 10 jours de RTT et 30 minutes de pause par jour soit une moyenne annuelle de 35 heures par semaine.

L'employeur rapporte de surcroît la preuve, au vu du semainier de la standardiste, que Madame [X] était en congés payés la deuxième semaine d'août alors qu'elle indique avoir effectué 51,25 heures supplémentaires, elle était en congés la 3ème et la 4ème semaine de mars alors qu'elle prétend avoir effectué 40 heures par semaine ou encore en congés maladie les semaines 4 et 5 de novembre alors que selon son tableau elle prétend avoir effectué 47,5 heures chacune de ces semaines. De même l'exploitation des e-mails produits par Madame [X] n'établit en rien les heures supplémentaires sollicitées, l'employeur établit au contraire l'arrivée plus tardive de la salariée dans la matinée ou même ses absences dans la journée les jours où elle prétend avoir travaillé au-delà de 18 heures. Il résulte expressément des preuves apportées par l'employeur que Madame [X] n'a nullement accompli les heures qu'elle dit

avoir effectuées.

L'employeur établit au surplus que Madame [X] a délibérément triché en remettant au service administratif de l'avocat d'Agorajuris Maître [Y] un nombre d'heures très inférieures à celles qu'elle a déclaré avoir effectuées chez ce même Maître [Y] à son employeur du Groupe La Brégère pour juin, juillet, août, septembre, afin d'obtenir une rémunération indue.

Il s'ensuit que ce manquement n'est pas établi, la somme réclamée par Madame [X] au titre des heures supplémentaires et du rappel de salaire durant son affectation à Agorajuris n'est en rien fondée.

Troisième manquement la surcharge de travail et la dégradation de l'état de santé de Madame [X]

Madame [X] sur qui repose la charge de la preuve ne produit aucun document médical, attestation, ou autre élément permettant d'établir ni cette surcharge de travail au vu des développements ci-dessus sur les heures supplémentaires ni de lien avec la dégradation de son l'état de santé.

Au contraire, il résulte de l'avenant n° 2 à son contrat de travail (pièce 2 de la salariée) signé le 4 novembre 2011 par les deux parties qu'elle devait 'réduire le portefeuille de clients dont elle était responsable pour le Groupe La Brégère en les répartissant aux nouveaux assistants recrutés à cet effet de sorte que la clientèle ne puisse en aucun cas se plaindre d'un manque de disponibilité de sa part'. L'employeur produit les attestations et e-mails qui établissent qu'il avait organisé la décharge de Madame [X], notamment au profit [R] [I], dès le 31 mai 2011.

Il s'ensuit que Madame [X] ne rapporte pas non plus la preuve de ce manquement.

Dès lors la prise d'acte de Madame [X] produit les effets d'une démission. Il convient donc de la débouter de toutes ses demandes de rappels de salaires et de commissions non fondées.

Sur la demande reconventionnelle du Groupe La Brégère

La Cour ne trouve pas motif à réformer la décision attaquée qui par de justes motifs que la cour adopte a condamné Madame [X] à reverser à son ancien employeur la somme de 690,60 € au titre du remboursement des cotisations de mutuelle.

Sur les autres demandes l'équité et les circonstances de la cause commandent de laisser à la charge de chacune des parties ses propres frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

' Confirme la décision attaquée dans toutes ses dispositions.

' Déboute les parties de leurs autres demandes y compris celles fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

' Condamne Madame [X] aux entiers dépens.

Signé par Madame Maud Vignau, Président, et par Madame Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Anne-Marie Lacour-Rivière Maud Vignau


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 14/03699
Date de la décision : 08/06/2016

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°14/03699 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-06-08;14.03699 ?
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