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25/02/2016 | FRANCE | N°15/02098

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 25 février 2016, 15/02098


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 25 FÉVRIER 2016



(Rédacteur : Monsieur Marc SAUVAGE, Président)



SÉCURITÉ SOCIALE



N° de rôle : 15/02098





















SARL DES DEUX LACS



c/



CAISSE DE MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE DE LA DORDOGNE









Nature de la décision : AU FOND


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Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à l...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 25 FÉVRIER 2016

(Rédacteur : Monsieur Marc SAUVAGE, Président)

SÉCURITÉ SOCIALE

N° de rôle : 15/02098

SARL DES DEUX LACS

c/

CAISSE DE MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE DE LA DORDOGNE

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 février 2015 (R.G. n°20140332) par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de DORDOGNE, suivant déclaration d'appel du 07 avril 2015,

APPELANTE :

SARL DES DEUX LACS

agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 2]

représentée par Me LESTURGEON-CAYLAC loco Me Albane RUAN-WALTHER, avocates au barreau de BORDEAUX substituant Me Lucie ROZENBERG, avocate au barreau de BERGERAC

INTIMÉE :

CAISSE DE MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE DE LA DORDOGNE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 1]

représentée par Monsieur [B] [R] rédacteur juridique muni d'un pouvoir régulier

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 21 janvier 2016, en audience publique, devant Monsieur Marc SAUVAGE, Président chargé d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Marc SAUVAGE, Président

Madame Catherine MAILHES, Conseiller,

Madame Véronique LEBRETON, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Florence Chanvrit adjoint administratif principal faisant fonction de greffier

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 14 août 2014,

la SARL des Deux Lacs a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Dordogne aux fins d'opposition à la contrainte émise par la Mutualité sociale agricole Dordogne Lot et Garonne du 29 juillet 2014 pour un montant en principal de 141.795,90 € au titre des cotisations dues pour le deuxième trimestre 2010 et pour les troisième et quatrième trimestres 2013, notifiées le 4 août 2014.

La SARL des Deux Lacs a formé une demande à titre subsidiaire visant à obtenir un sursis à statuer dans l'attente du traitement des dossiers déposés dans le cadre du plan d'actions fruits et légumes 2014, la Caisse de Mutualité sociale agricole sollicitant, à titre reconventionnel, que soit prononcée une amende civile à son encontre.

Par jugement en date du 26 février 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Dordogne a :

déclaré la SARL des Deux Lacs recevable mais mal fondée en son recours,

débouté la SARL des Deux Lacs de sa demande de sursis à statuer,

validé à hauteur de son montant initial la contrainte émise par la Caisse de Mutualité sociale agricole Dordogne Lot et Garonne le 29 juillet 2014,

condamné la SARL des Deux Lacs au paiement des frais de signification de la contrainte, ainsi qu'au coût des actes de procédure nécessaires à son exécution, conformément à l'article R.725-10 du code rural et de la pêche maritime,

rappelé qu'en vertu de l'article R.133-3 du code de la sécurité sociale, le jugement est exécutoire de droit à titre provisoire,

dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

dit n'y avoir lieu à amende civile.

La SARL des Deux Lacs a régulièrement interjeté appel de cette décision le 7 avril 2015.

Par conclusions déposées au greffe le 21 septembre 2015 et développées oralement à l'audience, la SARL des Deux Lacs sollicite de la Cour qu'elle :

infirme le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Dordogne,

juge que la contrainte émise le 29 juillet 2014 ne permet pas à la SARL des Deux Lacs de connaître la nature, la cause et l'étendue de ses obligations,

prononce la nullité de la contrainte émise le 29 juillet 2014,

condamne la MSA au paiement de la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamne la MSA aux entiers dépens.

Par conclusions déposées au greffe le 16 novembre 2015 et développées oralement à l'audience, la Caisse de Mutualité sociale agricole de Dordogne Lot et Garonne sollicite de la Cour qu'elle :

confirme la décision du tribunal des affaires de sécurité sociale,

valide la contrainte du 29 juillet 2014 pour son entier montant, soit la somme de 149.306,05 €,

rejette toute autre demande.

* Sur la validité de la contrainte :

La SARL des Deux Lacs fait valoir qu'elle a été confrontée à des difficultés financières et que les diverses sommes réclamées par la MSA sont illisibles, la MSA ne respectant pas les règles d'imputation des paiements en affectant les paiements aux majorations les plus récentes sans solder les cotisations dues pour les années antérieures. Dès lors, la MSA n'impute pas par priorité les majorations de retard et il y a lieu d'annuler la contrainte.

La MSA Dordogne Lot et Garonne fait valoir que les écarts de montant ont bien été expliqués dans les contraintes De plus, la nature, la cause et l'étendue des obligations de la société sont bien mentionnées et il y a donc lieu de déclarer la contrainte fondée et de condamner la SARL des Deux Lacs à son entier paiement.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.

MOTIFS DE LA DECISION

Au titre des pièces qu'elle produit, la MSA a émis :

- une mise en demeure afférente au quatrième trimestre 2013 pour un montant de 36 342,25€, notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception reçue le 30 juin 2014.

- sur cette mise en demeure est reprise une somme de 13 930,65€ qui paraît afférente aux cotisations dues pour le 2ème trimestre 2010 pour un montant strictement identique,

- une mise en demeure notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception reçue le 12 mai 2014. La photocopie présentée à la cour, comme pour les autres, est en partie illisible puisque des parties entières sont noircies. Y figurent au titre du deuxième trimestre 2010, un montant d'assurances sociales de 20,20€ et des sommes qui paraissent être des totaux en bas de trois colonnes illisibles (noircies) qui reprennent sur une ligne horizontale les sommes de 80 582,74€, 4 373,48€ et leur total, soit 84 956,22€. A la page suivante ces trois mêmes sommes figurent horizontalement en haut d'un tableau et, en bas de ce même tableau dont les colonnes sont par ailleurs soit illisibles, soit vides, les sommes de 107 089,78€, de 5 804,77€ et leur total, soit 112 894,55€, total dont en l'état rien ne permet de déterminer la nature des cotisations dues, la période sur laquelle elles ont été calculées et la détermination de leur montant,

- une mise en demeure délivrée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception reçue le 03 avril 2014 concernant les cotisations assurances sociales, allocations familiales et assurance vieillesse afférentes au 3ème trimestre 2013 pour un montant total de 237,85€.

- Sur ce a été délivrée, le 29 juillet 2014, une contrainte notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception reçue le 05 août 2014 pour un total de 149 306,05€.

Cette somme est très proche du total des mises en demeure, différence qui peut s'expliquer par l'imputation d'un paiement, mais en l'état il n'est pas possible de déterminer la nature des sommes pour lesquelles les mises en demeure ont été délivrées et la MSA ne produit aucun historique du compte.

Les pièces produites par la MSA ne sont pas cotées.

Les pièces produites par la Société permettent de déterminer que :

- la somme de 13 930,65€ correspond à une mise en demeure signée le 30 juin 2014 et afférente à des cotisations dues pour le deuxième trimestre 2010 et le 3ème trimestre 2013,

- la somme de 84 956,22€ correspond aussi au deuxième trimestre 2010 (mais uniquement pour un total de 20,20€) et au quatrième trimestre 2013. Le total de la première page est reporté sur la seconde et, en y ajoutant les autres cotisations dues pour le quatrième trimestre 2013, le total atteint la somme de 112 894,55€.

Une dernière mise en demeure a été délivrée pour un montant total de 237,85€ afférent au 3ème trimestre 2013.

Pour le reste, la Société produit le relevé des soldes qui lui avait été adressé par la MSA le 27 janvier 2015 pour un total de 472 269,93€ dont 35 966,75€ de majorations, dont part ouvrière de 214 831,81€.

Dans ses écritures la MSA indique :

' ATTENDU QUE la SARL DES DEUX LACS déclare ces cotisations par le biais de bordereaux de versements mensuels qui correspondent à une estimation de la part de la SARL du montant de leur cotisation,

QUE les cotisations sont donc dans un premier temps appelées sur la base de ces estimations puis recalculées à réception des déclarations de salaires réellement effectuées sur la période,

QU'un exploitant qui estime un montant de cotisations inférieur à la réalité de ses déclarations , recevra par conséquent une facture rectificative,

QUE le montant réclamé par la contrainte du 29 juillet 2014 n'est en aucun cas passé de 141 795,90€ en principal à 180 623,49€.

QUE cette différence correspond à des cotisations complémentaires sur ces périodes faisant l'objet de procédures contentieuses distinctes avec notamment une remise à l'huissier.

QUE s'il est utile de le préciser, une situation de compte à une date donnée ne constitue pas une contrainte, de sort que la SARL DES DEUX LACS ne peut raisonnablement pas faire un amalgame entre les deux.'

La MSA ne produit ni les bordereaux de versements mensuels correspondant à l'estimation par la Société du montant de ses cotisations, ni le calcul effectué à réception des déclarations de salaires alors que seuls ces éléments comptables peuvent justifier la contrainte qu'elle délivre.

En l'état la MSA ne produit aucun document permettant d'établir les modalités selon lesquelles elle a fixé les cotisation alors que la contrainte doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation. L'inobservation de ces prescriptions, qui constitue l'omission d'un acte et non un vice de forme, en affecte la validité, sans que soit exigée la preuve d'un grief.

Pour ce qui est de l'imputation des paiements, elle indique dans ses conclusions :

' QU'il est rappelé que l'article D 725-4-3 du code rural fixe un ordre de priorité quant à l'imputation des paiements.

QUE l'article 725-3-3 du même code précise :

' En cas de recouvrement partiel des cotisations et contributions dues par les personnes non salariées des professions agricoles, y compris dans le cas d'un recouvrement forcé les contributions...sont prélevées par priorité et dans des proportions identiques sur les sommes recouvrées. Le solde éventuel est affecté aux cotisations selon un ordre fixé.'

QUE cela signifie que les sommes recouvrées doivent être affectées conformément au titre auquel elles se rapportent.

QU'il est rappelé que les contraintes pour la SARL DES DEUX LACS sont régulièrement envoyées à un huissier pour le recouvrement des dettes post Redressement Judiciaire,

QUE ces titres sont transmis pour un montant en principal auquel s'ajoutent des majorations de retard;

QUE l'huissier recouvre les sommes conformément à la contrainte signifiée, c'est à dire cotisations et majorations de retard,

QUE les règlements que nous recevons de l'huissier en charge du dossier sont donc affectés sur les dettes mentionnées dans les diverses contraintes y compris sur les majorations de retard qui y figurent et ceux conformément à la législation en vigueur,

QUE si les règlements d'huissier n'étaient pas affectés conformément au titre auquel il se rapporte, la contrainte ne serait jamais soldée et le recouvrement resterait pendant auprès de l'étude huissier ce qui engendrerait des frais supplémentaire,

QU'en effet les procédures de recouvrement forcé entraînent divers frais de procédure que la SARL a pu réglé, ce qui peut expliquer les problèmes rencontrés dans la lecture de la comptabilité de la SARL,

QUE la Caisse ne saurait être tenue responsable de la complexité des décomptes de la SARL DES DEUX LACS,

QUE contrairement à ce qu'affirme la SARL DES DEUX LACS, elle connaît parfaitement la nature, la cause et l'étendue de son obligation au regard des factures, rappels, mises en demeure contraintes et tout autre document qui lui ont été adressés.'

L'article L725-3-3 du code rural et de la pêche dispose :

'En cas de recouvrement partiel des cotisations et contributions dues par les personnes non salariées des professions agricoles, y compris dans le cas de recouvrement forcé, les contributions mentionnées aux articles L. 136-4 du code de la sécurité sociale et 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale sont prélevées par priorité et dans des proportions identiques sur les sommes recouvrées. Le solde éventuel est affecté aux cotisations selon un ordre fixé par décret.'

Et l'article D 725-4-3 du même code précise :

Le solde éventuel mentionné à l'article L 725-3-3 est affecté aux cotisations dans l'ordre de priorité suivant :

- la cotisation d'assurance maladie et maternité ;

- la cotisation mentionnée à l'article L. 731-35-1 ;

- la cotisation d'assurance invalidité mentionnée à l'article D. 731-89 ;

- les cotisations d'assurance vieillesse de base ;

- les cotisations d'assurance vieillesse complémentaire obligatoire ;

- les cotisations d'assurance obligatoire contre les accidents du travail et les maladies professionnelles ;

- les cotisations de prestations familiales.

Cette affectation s'applique aux cotisations dues au titre de la dernière

échéance, puis à celles dues au titre des échéances antérieures en remontant de la plus ancienne à la plus récente'

Ces dispositions ne concernent pas les cotisations afférentes aux salaires et n'ont pour le surplus pas vocation à permettre à la MSA d'imputer les sommes recouvrées sur les majorations de retard avant de s'imputer sur celles dont le non versement expose le cotisant à des sanctions plus graves, conformément aux règles de l'imputation des payements prévues à l'article 1256 du code civil.

Il convient en conséquence de réformer le jugement et d'annuler la contrainte émise le 29 juillet 2014.

Il serait inéquitable de laisser à la Société la charge de ses frais irrépétibles et il est fait droit à sa demande d'application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Réforme le jugement en ce qu'il a validé à hauteur de son montant initial la contrainte émise par la Caisse de Mutualité Sociale Agricole Dordogne Lot et Garonne le 29 juillet 2014 et condamné la SARL Des Deux Lacs ainsi qu'au coût des actes de procédure nécessaires à son exécution, conformément à l'article R 725-10 du code rural et de la pêche maritime,

Statuant à nouveau,

Annule la contrainte du 29 juillet 2014 et dit que les frais afférents ne sont pas mis à la charge de la SARL Des Deux Lacs.

Signé par Monsieur Marc SAUVAGE, Président, et par Florence

CHANVRIT Adjointe Administrative Principale faisant fonction de greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Florence CHANVRIT Marc SAUVAGE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 15/02098
Date de la décision : 25/02/2016

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°15/02098 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-02-25;15.02098 ?
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