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18/11/2015 | FRANCE | N°13/06702

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 18 novembre 2015, 13/06702


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 18 NOVEMBRE 2015



(Rédacteur : Madame Maud Vignau, Président)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 13/06702











Madame [K] [J]



c/



SARL [Établissement 1]



SA Orpea













Nature de la décision : AU FOND













Notifié par LRAR

le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :







Décision déférée à la Cour : jugement rend...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 18 NOVEMBRE 2015

(Rédacteur : Madame Maud Vignau, Président)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 13/06702

Madame [K] [J]

c/

SARL [Établissement 1]

SA Orpea

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 octobre 2013 (RG n° F 11/03710) par le Conseil de Prud'hommes - formation paritaire - de Bordeaux, section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 19 novembre 2013,

APPELANTE :

Madame [K] [J], née le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 1]

de nationalité française, sans profession, demeurant [Adresse 3],

Représentée par Maître Maryline Le Dimeet de la SELAS Le Dimeet & Associés, avocats au barreau de Bordeaux,

INTIMÉES :

SARL [Établissement 1], siret n° 319 625 786, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 1],

SA Orpea, siret n° 401 251 566, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 2],

Représentées par Maître Olivier Lopes de la SELARL Patrice Bendjebbar & Olivier Lopes, avocats au barreau de Saintes,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 31 août 2015 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Maud Vignau, Président,

Madame Isabelle Lauqué, Conseiller,

Madame Annie Cautres, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière.

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

Rappel des faits et de la procédure

Madame [K] [J] a été engagée par la Société Horizon 33 par contrat de travail à durée indéterminée en date du 1er septembre 1974, en qualité d'aide soignante.

En novembre 1986 elle a occupé le poste de responsable à la Maison de Retraite [Établissement 1], soit une autre Société appartenant aux époux [K], propriétaire de la Société Horizon 33. Par la suite, elle a été promue directrice d'exploitation - coefficient 330 de la convention collective nationale de l'hos- pitalisation privée du 18 avril 2002.

En juin 2005 la Maison de Retraite [Établissement 1] a été cédée au groupe Mediter et est devenue un établissement pour héberger des personnes âgées dépen-dantes.

En janvier 2011, le groupe Mediter a cédé ledit établissement au groupe Orpea.

Le 8 juin 2011, la direction régionale Sud-Ouest du groupe Orpea a convoqué Madame [J] à un rendez-vous pour un entretien préalable en vue d'une éventuelle mesure de licenciement et lui a notifié sa mise à pied conservatoire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception, Madame [J] a été licenciée pour faute grave le 22 juin 2011.

Contestant le motif de son licenciement, Madame [J] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux le 29 novembre 2011, aux fins de :

' voir requalifier la rupture de son contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' obtenir le versement de diverses indemnités.

Par jugement en date du 22 octobre 2013, le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux, section Encadrement, a :

' dit que le licenciement de Madame [J] était dénué de cause réelle et sérieuse,

' condamné la SARL [Établissement 1] à verser à Madame [J] les sommes de :

- 2.243,00 € bruts à titre de rappel de salaire,

- 220,04 € bruts à titre de rappel de congés payés sur salaire,

- 14.145,53 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 52.219,98 € bruts à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

' rappelé que l'exécution provisoire est de droit, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois, cette moyenne étant, en l'espèce, de 4.715,21 €,

- 80.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de

travail,

- 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamné la SARL [Établissement 1] à remettre à Madame [J] les documents suivants :

- un bulletin de salaire rectifié pour le mois de juillet 2011,

- une attestation Pôle Emploi rectifiée mentionnant que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et modifiant les différentes sommes relatives à l'exécution du contrat de travail,

- enjoint la SARL [Établissement 1], prise en la personne de son représentant légal, d'avoir à régulariser la situation de Madame [J] auprès des organismes sociaux au bénéfice desquels sont acquittées les cotisations mentionnées sur les bulletins de salaire,

- ordonné d'office le remboursement par la SARL [Établissement 1] à Pôle Emploi des indemnités de chômage éventuellement versées à Madame [J] du jour de son licenciement au jour du jugement dans la limite de six mois d'indemnités de chômage,

- ordonné l'exécution provisoire de l'ensemble de la décision sur tout ce qui n'est pas de droit et sur ce qui excéderait la limite maximum de neuf mois de salaire prévue par l'exécution provisoire de droit,

- débouté Madame [J] du surplus de ses demandes,

- condamné la SARL [Établissement 1] aux entiers dépens.

Madame [J] a régulièrement interjeté appel de cette décision limité aux chefs de demande dont elle a été déboutée et au montant des dommages et intérêts qui lui ont été alloués.

Par conclusions du 1er juin 2015 développées oralement à l'audience, Madame [J] sollicite de la Cour de :

' confirmer le jugement suscité en ce qu'il a admis que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse,

' reformer le jugement pour le surplus,

' dire que son ancienneté court à compter du 1er Septembre 1974,

' dire que la date à laquelle lui a été conféré le statut de cadre est celle du 1er octobre 1986,

' faire droit à ses demandes d'indemnités pour heures supplémentaires, repos compensateur et travail dissimulé,

' faire droit à ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' faire droit à ses demandes de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et licenciement vexatoire et abusif,

' fixer son salaire de référence à la somme de 5.818,13 €,

' condamner la SARL [Établissement 1] aux versements des sommes suivantes :

- 17.454,39 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 1.754,44 € à titre d'indemnité de congés payés y afférents,

- 87.271,95 € à titre d'indemnité conventionnelle plafonnée compte tenu d'une

ancienneté de service à compter du 1er septembre 1974, ainsi que d'un

passage au statut cadre à compter du 1er octobre 1986, et ce sur la base

d'un salaire de référence de 5.818,13 €,

- 2.714,12 € à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, outre

271,41 € à titre d'indemnités de congés payés y afférents,

- 30.123,00 € à titre d'heures supplémentaires (dans la limite de la prescription),

- 3.012,30 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

- 9.400,00 € à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information de la salariée

sur ses droits à repos,

- 34.900,00 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

- 174.550,00 € correspondant à 30 mois de salaires à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 30.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- 5.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers

dépens.

Par conclusions du 31 août 2015 développées oralement à l'audience, auxquelles la Cour se réfère expressément, la SARL [Établissement 1] sollicite de la Cour de confirmer le jugement attaqué dans toutes ses dispositions de débouter Madame [J] de ses autres demandes et la condamner à lui verser 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.

SUR CE, LA COUR

Sur l'ancienneté de madame [J]

Au soutien de sa demande madame [J] fait valoir qu'elle a été engagée par contrat verbal par la SARL Horizon du 1er septembre 1974 au 1er octobre 1986, appartenant aux époux [K].

A compter du 1er octobre 1986 elle a été engagée par la SARL La

Pastorale , appartenant également aux époux [K], en qualité de responsable de service, par contrat de travail, uniquement verbal. Elle soutient qu'il s'agit là d'un simple transfert et que son ancienneté doit être reprise à compter du 1er septembre 1974.

Or, la Cour constate que si la SARL [Établissement 1] et la SARL Horizon appartenaient et étaient dirigées toutes les deux par les époux [K], il s'agissait cependant de deux entités juridiques distinctes.

Aucune reprise d'ancienneté de Madame [J] n'a été manifestement envisagée par les époux [K], qui ont pourtant exercé les fonctions de co-gérants de la SARL Horizon jusqu'au mois de juin 2005, date de cession de la SARL Horizon au groupe Mediter, puisque sur les bulletins de paye produits par Madame [J] de 1991 à la date de son licenciement, figure comme seule date d'ancienneté le 1er octobre 1986.

L'attestation établie ultérieurement par Madame [K] pour les besoins de la cause est insuffisante à démontrer le contraire, il s'ensuit que la Cour ne trouve pas motif à réformer la décision attaquée concernant l'ancienneté de Madame [J].

Sur le statut de cadre

Au soutien de son appel, Madame [J] ne produit aucun élément nouveau. Ce n'est pas l'attestation de Madame [K], qui n'a pas jugé utile lorsqu'elle était elle-même employeur de Madame [J] de faire bénéficier celle-ci du statut de cadre avant le 1er janvier 2002 ni d'établir de contrats de travail écrits ni d'avenant, qui peut permettre à la Cour de modifier l'analyse des premiers juges qui pour de justes motifs que la cour adopte ont dit que la date d'acquisition du statut cadre par Madame [J] était le 1er janvier 2002 et que Madame [J] avait donc une ancienneté de cadre de 9 ans 173 jours au moment de la rupture de son contrat de travail.

Sur les heures supplémentaires sollicitées

Aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au

juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ;

le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

En l'espèce, Madame [J] expose avoir toujours effectué des heures supplémentaires tout au long de sa relation de travail, elle indique avoir travaillé en moyenne dix heures par jour, soit 43 heures par semaine soit 8 heures supplémen-taires par semaine, et en dehors de ses heures de présence s'être déplacée sys-tématiquement sur les lieux. Elle sollicite un rappel de salaires de 30.123 €, pour étayer ses dires, elle produit un certain nombre d'attestations.

Il s'ensuit que Madame [J] produit ainsi des éléments préalables qui peuvent être discutés par l'employeur et qui sont de nature à étayer sa demande. L'employeur critique certes les attestations produites, mais ne produit aucune pièce, aucun élément à l'appui de sa contestation. Au vu des éléments produits par la salariée et des arguments développés par l'employeur, et sans qu'il soit besoin d'une mesure d'instruction, la Cour a la conviction au sens du texte précité que Madame [J] a bien effectué des heures supplémentaires, en assumant des responsabilités très étendues au vu de la délégation de compétence et de missions qui lui était confiée, et qui nécessitaient sa présence dans l'établissement en dehors même de ses heures services, comme en font foi un certain nombre d'attestations produites, sans pouvoir toutefois justifier du nombre d'heures supplémentaires réclamées, manifestement très exagéré, la Cour évalue le montant des heures supplémentaires effectuées par la salariée, congés payés inclus à la somme de 8.000 €.

Il n'est pas établi, en l'espèce, que Madame [J] ait dépassé chaque année le contingent d'heures supplémentaires fixé par la convention collective et, en conséquence, la déboute de sa demande de repos compensateurs.

Sur l'indemnité de travail dissimulé

Madame [J], qui bénéficiait d'une très grande autonomie dans l'organisation de son travail eu égard à ses responsabilités, ne justifie pas avoir réclamé le paiement d'heures supplémentaires ni même avoir tenu son employeur informé des heures accomplies au cours de la période non prescrite. Il s'ensuit que le caractère intentionnel de la dissimulation n'est pas, en l'espèce, démontré, aussi la Cour déboute Madame [J] de cette demande insuffisament fondée.

Sur les causes de la rupture du contrat de travail

Les parties s'entendent pour demander la confirmation de la décision attaquée en ce qu'elle a dit que le licenciement de Madame [J] pour faute grave qui lui a été notifié le du 22 juin 2011, ne reposait en réalité sur aucune cause réelle et sérieuse. La Cour confirme donc la décision attaquée sur ce point. Ainsi que toutes les conséquences en résultant sur le plan des indemnités légales, de préavis, de licenciement, du rappel de salaire pour mise à pieds conservatoire.

Sur le préjudice de Madame [J] pour licenciement abusif

La salariée a été brutalement licenciée à l'âge de 55 ans, elle justifie ne pas avoir pu retrouver de travail depuis, elle est toujours inscrite à Pôle Emploi, arrivée en fin de droits en août 2014, elle perçoit désormais uniquement l'allocation de solidarité spécifique.

Madame [J], au vu de son ancienneté, de son âge, de ses difficultés à retrouver un emploi, des pièces produites, justifie avoir subi un très grave préjudice que la Cour évalue à 110.000 € de dommages et intérêts.

En revanche, Madame [J] ne justifie pas d'un préjudice distinct au titre de l'exécution déloyale de son contrat de travail, elle sera, en conséquence, déboutée de cette demande.

L'équité et les circonstances de la cause commandent de condamner la SARL [Établissement 1] à verser à Madame [J] 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

' Confirme la décision attaquée dans toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne les heures supplémentaires et le montant des dommages et intérêts pour licen-ciement abusif.

' Infirme sur ces deux points :

' Condamne la SARL [Établissement 1] à verser à Madame [J] les sommes de :

- 8.000 € (huit mille euros) de rappel de salaire au titre des heures supplémen-

taires y compris les congés payés afférents ;

- 110.000 € (cent dix mille euros) de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

' Confirme pour le surplus.

Y ajoutant :

' Condamne la SARL [Établissement 1] à verser à Madame [J] 1.500 € (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Signé par Madame Maud Vignau, Président, et par Madame Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Anne-Marie Lacour-Rivière Maud Vignau


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 13/06702
Date de la décision : 18/11/2015

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°13/06702 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-11-18;13.06702 ?
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