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24/09/2015 | FRANCE | N°14/05358

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 24 septembre 2015, 14/05358


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 24 SEPTEMBRE 2015



(Rédacteur : Véronique LEBRETON, conseiller)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 14/05358

















Société JARDILAND ENSEIGNDES DENOMEE JARDILAND VENANT AUX DROITS DE LA SOCIÉTÉ JARDI SOYAUX



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Monsieur [Y] [A]


















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LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse dél...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 24 SEPTEMBRE 2015

(Rédacteur : Véronique LEBRETON, conseiller)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 14/05358

Société JARDILAND ENSEIGNDES DENOMEE JARDILAND VENANT AUX DROITS DE LA SOCIÉTÉ JARDI SOYAUX

c/

Monsieur [Y] [A]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 01 septembre 2014 (R.G. n° F13/00087) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANGOULEME, Section Commerce, suivant déclaration d'appel du 12 septembre 2014,

APPELANTE :

Société JARDILAND ENSEIGNDES DENOMEE JARDILAND venant

Aux droits de la SOCIÉTÉ JARDI SOYAUX

représentée par Me Julia ERB loco Me Sahra CHERITI, avocates au barreau de LYON

INTIMÉ :

Monsieur [Y] [A]

né le [Date naissance 1] 1972 à ANGOULEME (16000)

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Stéphanie BERLAND de la SELARL CBS AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 juillet 2015 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Elisabeth LARSABAL, Présidente

Madame Catherine MAILHES, Conseillère

Madame Véronique LEBRETON, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Nathalie BELINGHERI,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

M. [Y] [A] a été engagé par la SNC Jardinerie Conte & Cie devenue la SNC Jardi Soyaux suivant contrat de travail à durée déterminée à temps plein en date du 5 janvier 1998 en qualité de vendeur.

L'entreprise exploite un fonds de commerce de jardinerie-animalerie à [Localité 2] sous l'enseigne Jardiland.

Après un contrat saisonnier conclu le 20 février 1998, M. [A] a été embauché suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps plein en date du 30 juin 1998 selon la convention collective nationale des Jardineries et Graineteries.

M. [A] percevait une rémunération brute mensuelle de 1.563,72 € pour 151,67 heures de travail mensuelles.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 14 novembre 2012, M. [A] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 28 novembre 2012 avec mise à pied à titre conservatoire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 6 décembre 2012, M. [A] a été licencié pour faute grave, son employeur lui reprochant ''des attitudes équivoques et des propos répétés à connotation sexuelle inadmissibles à l'égard de plusieurs collaboratrices''.

Contestant cette décision, M. [A] a saisi le conseil de Prud'hommes d'[Localité 1] (section commerce) le 2 avril 2013 aux fins d'obtenir une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité de préavis (ainsi que les congés payés afférents), le paiement de son salaire pendant la mise à pied conservatoire et des dommages et intérêts pour procédure vexatoire.

Après avoir procéder à une enquête, par jugement en date du 1er septembre 2014, le conseil de Prud'hommes d'[Localité 1] a :

jugé que le licenciement de M. [A] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

condamné la SNC Jardi Soyaux à payer à M. [A] les sommes suivantes :

927,90 € à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied injustifiée,

4.189 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

6.984 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,

18.764,64 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

10.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait de la procédure vexatoire et abusive,

1.500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la SNC Jardi Soyaux à remettre à M. [A] l'ensemble des documents légaux et ses bulletins de salaire rectifiés selon les décisions du jugement,

dit que la remise de chacun des documents est assortie d'une astreinte de

50 € par jour à compter du quinzième jour suivant la date de notification du jugement,

condamné la SNC Jardi Soyaux aux entiers dépens.

La SNC Jardi Soyaux a régulièrement interjeté appel de cette décision le 15 septembre 2014. M. [A] forme un appel incident aux fins d'augmenter le quantum du montant des dommages et intérêts accordés au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par conclusions déposées au greffe le 10 juin 2015 et développées oralement à l'audience, la SNC Jardi Soyaux sollicite de la Cour qu'elle :

infirme le jugement du conseil de Prud'hommes d'[Localité 1],

déboute M. [A] de l'intégralité de ses demandes,

condamne M. [A] au paiement de la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions déposées au greffe le 17 novembre 2014 et développées oralement à l'audience, M. [A] sollicite de la Cour qu'elle :

confirme le jugement du conseil de Prud'hommes en ce qu'il a :

jugé que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

condamné la SNC Jardi Soyaux à lui payer les sommes suivantes :

927,90 € à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied injustifiée,

4.189 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

6.984 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,

10.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait de la procédure vexatoire et abusive,

1.500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la SNC Jardi Soyaux à lui remettre ses documents légaux sous astreinte,

réforme la décision sur le montant des dommages et intérêts alloués en application des dispositions de l'article L.1235-5 du code du travail,

condamne la SNC Jardi Soyaux à lui payer la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

condamne la SNC Jardi Soyaux à lui payer une indemnité de 4.200 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamne la SNC Jardi Soyaux aux entiers dépens.

Sur le licenciement pour faute grave :

La SNC Jardi Soyaux fait valoir que M. [A] était responsable du rayon animalerie, disposait de responsabilités et de prérogatives en termes de commandement du personnel placé sous sa subordination et se devait d'adopter un comportement exemplaire dans l'exercice de ses fonctions, mais qu'il résulte des attestations des stagiaires qui travaillaient sous sa direction qu'il tenait à leur égard des propos grivois et adoptait parfois de nombreuses postures équivoques, que de plus, les stagiaires ont porté plainte suite à son comportement, peu important que cette plainte ait été classée sans suite, que son ancienneté n'excuse en rien son comportement inadmissible à l'égard de ses subordonnées qui résulte de témoignages circonstanciés, l'enquête interne, qui n'a nul besoin d'être contradictoire, ayant été suffisante, que lors de l'enquête du conseil des prud'hommes ces témoins ont confirmé leurs dénonciations de faits qui justifient que le licenciement prononcé à son égard soit fondé sur une faute grave.

M. [A] fait valoir que l'employeur ne s'est appuyé sur les propos des stagiaires qui ont cherché à se venger de mauvaises appréciations, sans procéder à une réelle enquête contradictoire au sein de l'entreprise, que de plus, des attestations ont été produites par des mineures et doivent donc être écartées et leurs plaintes ont été classées sans suite, qu'enfin, il a toujours eu de bonnes relations avec ses stagiaires, que son ancienneté témoignant d'un comportement irréprochable la sanction est disproportionnée et non fondée, que le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse doit être augmenté au regard de son ancienneté dans l'entreprise et de la précarité de l'emploi qu'il a retrouvé.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.

MOTIFS DE LA DECISION

Il résulte des dispositions des articles L 1232-1 et L 1235-1 du code du travail que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, et qu'en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables et la lettre de licenciement fixant les limites du litige.

Toutefois, la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'un importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, l'employeur devant en rapporter la preuve s'il l'invoque pour licencier, les dispositions des articles L 1234-1 et L 1234-9 du code du travail prévoyant que lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n'a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement.

En l'espèce la lettre de licenciement adressée à M. [A] le 6 décembre 2012 par la SNC Jardi Soyaux est ainsi libellée :

« le 14 novembre 2012, nous avons été alerté par le proviseur du lycée avec lequel nous travaillons, au sujet d'une stagiaire en formation sur notre magasin. Cette lycéenne, âgé de 17 ans, en stage au sein du rayon animalerie dont vous avez la responsabilité, s'était confié à lui en larmes se plaignant de votre comportement anormal à son égard. J'ai aussitôt rencontré la stagiaire pour la questionner sur les raisons de son état. Elle m'a alors déclaré qu'elle n'en pouvait plus car cela faisait plusieurs mois qu'elle subissait de votre part des allusions et propos répétés déplacés et/ou à connotation sexuelle, et des blagues incessantes (quotidiennes) systématiquement orientées sur le sexe. Elle vous aurait d'ailleurs demandé à plusieurs reprises de cesser de vous comporter ainsi à son égard, sans que sa requête soit suivie d'effets. La stagiaire me cite pour exemple, alors qu'elle nettoyait les aquariums dans le courant du mois de novembre, que vous vous êtes positionné derrière elle en lui disant « tu t'élargis des fesses, tu vas porter la culotte de cheval plus tard ». Dernièrement, alors qu'elle était accompagnée d'une autre stagiaire du rayon animalerie, et vous demandait de lui faire un retour sur la visite de son professeur principal, vous avez répondu alors à toutes les deux : « j'ai dit que toi tu étais conne et que tu ne pensais qu'au cul, et que toi tu pétais plus haut que ton cul, et que tu dandinais trop ton cul ». Elle me confie également qu'elle sentait un permanence votre regard insistant posé sur ses fesses. Elle ajoute aussi qu'un jour, alors qu'elle était au point conseil, vous auriez glissé votre cuisse le long de ses jambes. Vous lui auriez également proposé de vous rejoindre dans une chambre d'hôtel. Eu égard à la gravité des faits rapportés, nous avons décidé de la mise en 'uvre d'une enquête interne et avons étendu(sic), dans ce cadre d'autres collaborateurs. Ainsi, une autre stagiaire du rayon animalerie, âgée de 17 ans elle aussi, nous déclare que vous lui auriez demandé « alors t'as baisé avec ton copain ' ». Elle fait mention également d'allusions fréquentes à caractère sexuel : « regarde ce poisson, il est beau, il a une belle queue ». Un jour, alors qu'elle allait chercher son petit ami à la gare, vous lui auriez dit « pense à l'hygiène, tu vas encore baiser, tu penses qu'à ça, tu peux pas venir travailler car tu vas passer ton week-end à baiser ». Elle ajoute aussi avoir été témoin d'une conversation que vous auriez eue avec une collaboratrice au cours de laquelle vous lui auriez dit « moi ce que j'adore c'est combler les deux trous en même temps, faire de nouvelles positions bien hard». Elle nous confirme par ailleurs les dires de sa collègue stagiaire, dont elle a été directement témoin, lorsque vous avez déclaré « j'ai dit que t'étais qu'une pauvre conne et que tu pensais qu'au cul ». Vous lui auriez également déclaré « j'ai testé un bisou sur la chatte pour me faire pardonner ». Elle nous rapporte également qu'une autre fois, vous lui auriez dit en regardant sa collègue stagiaire « elle a un beau cul, je l'enculerais bien ». Ou encore, alors qu'elle était en qualité de client sur le magasin avec son petit frère de 12 ans et son ami, vous auriez déclaré devant trois en parlant d'une ancienne collaboratrice : « j'aurais aimé qu'elle me suce comme cadeau de départ ». Une troisième collaboratrice dont nous avons recueilli le témoignage, qui a intégré le magasin et le rayon animalerie depuis peu, nous rapporte les commentaires que vous auriez tenus à propos d'une cliente en jupe courte : « c'est une salope, une prostituée ». Une ancienne collaboratrice est également venue témoigner à notre demande et nous confirme que vos propos étaient très souvent à connotation sexuelle ou péjorative. Vous lui auriez dit en effet : « à chaque fois que je te vois, je bande ». « Tu es moche et grosse ». « Ton poisson est mort car tu as dû le mettre dans ta chatte ». À l'exposé de l'ensemble de ces faits, vous disiez avoir tenu de tels propos, ou avoir eu de tels comportements. Il ressort néanmoins très nettement de la totalité des témoignages recueillis, que vous avez il y a plusieurs reprises des attitudes équivoque et des propos répétés à connotation sexuelle inadmissibles plus que déplacés et dégradants et humiliants, à l'égard de plusieurs collaboratrices dont de jeunes mineures en stage dans votre rayon et avec lesquelles vous avez des liens de subordination. Les deux stagiaires concernées ont déposé plainte. Indépendamment des suites qui y seront données et de la qualification qui sera le cas échéant pénalement retenue, nous ne pouvons en aucun cas tolérer un tel comportement qui est constitutif d'une faute grave, car il porte atteinte à la dignité des collaborateurs, impacte de manière inadmissible et patente leurs conditions de travail et est susceptible d'altérer leur santé physique et mentale. En outre, vos dénégations et votre manque de prise de conscience quant à la gravité des faits établis mais ne permettent pas de modifier notre jugement, ni même d'envisager un quelconque changement d'attitude de votre part. Nous sommes par conséquent dans l'obligation de vous notifier par la présente lettre votre licenciement pour faute grave, qui prend effet immédiatement, sans indemnité de préavis de licenciement. La mise à pied conservatoire dont vous faites l'objet depuis le 14 novembre 2012 est confirmée et fera l'objet d'une déduction de salaire pendant toute sa durée.(..) ».

La SNC Jardi Soyaux produit à l'appui des griefs faits à son salarié, d'une part, les attestations manuscrites de Melles [K] et [U], victimes des faits et stagiaires au service dont M. [A] avant la responsabilité au moment de leur stage, établies au mois de décembre pour la première et au mois de novembre pour la seconde, lesquelles énoncent exactement les faits qui ont commencé à se dérouler à compter du mois de mai 2012 jusqu'à la mise à pied de M. [A] tels que repris dans la lettre de licenciement, et d'autre part, les procès-verbaux des auditions de ces témoins réalisées en novembre 2012 par les services de police devant lesquels Melles [K] et [U] reprennent de manière identique les faits visées dans leurs attestations. Elles ont par ailleurs réitéré leurs propos et confirmé leurs attestations initiales devant le conseil des prud'hommes lors de l'enquête réalisée par la juridiction du premier degré en avril 2014, alors qu'elles étaient toutes deux devenues majeures.

Il s'ensuit que les témoignages valables et cohérents de ces deux stagiaires mineures au moment des faits eux mêmes, et devenues majeures au moment de leur réitération devant le conseil des prud'hommes, doivent être retenus et établissent les faits qu'elles dénoncent, les livrets scolaires et carnets de liaison des deux jeunes filles et l'attestation de Mme [D], formatrice à la MFR, produits aux débats ne démontrant pas les mauvaises évaluations dont elles auraient fait l'objet et qui seraient à l'origine des dénonciations faites par vengeance à son encontre selon M. [A], dont la thèse en ce sens n'est donc justifiée par aucun élément probant.

Par ailleurs la SNC Jardi Soyaux produit également : l'attestation de Mme [G], ancienne collègue de M. [A] en poste au moment des faits dénoncés par Melles [K] et [U], qui relate les propos déplacés dont elle a été victime de la part de son collègue en janvier et février 2012 et de manière conforme aux déclarations des deux stagiaires les faits dont celles-ci se sont plaintes auprès d'elle, Mme [G] ayant confirmé ses dires devant le conseil des prud'hommes ; l'audition de M. [K], frère de Melle [K], qui a été témoin de la réflexion faite par M. [A] à propos de Melle [G], telle que dénoncée par une des stagiaires; les attestations de M. [C], moniteur à la maison familiale et rurale dans laquelle les stagiaires effectuaient leur scolarité, et de M. [E], directeur de la structure, qui énoncent les conditions dans lesquelles ils ont été informés dès le 13 novembre 2012 des faits par Melle [K] puis Melle [U] et qui relatent l'état psychologique perturbé dans lequel celles-ci se trouvaient alors; les attestations de Mme [M], vendeuse qui rapporte les propos déplacés de M. [A] en novembre 2012 à propos d'une cliente en jupe courte, et de Mme [U], s'ur de Melle [U] qui relate la fragilité de celle-ci face au deuil subi par la famille et les perturbations résultant du comportement déplacés en rapport avec le sexe d'un de ses collègues. Tous ces éléments confortent et étayent les témoignages de Melles [K] et [U] comme étant concordants sur les faits ou venant éclairer le contexte des dénonciations.

De son côté M. [A] produit quatorze attestations émanant de collègues, d'anciens collègues ou d'anciennes stagiaires, qui, à l'exception de M. [W] qui indique n'avoir jamais été témoin de comportement ou propos inadaptés de M. [A] à l'égard des stagiaires qui ne paraissaient pas perturbées, ne travaillaient pas au service animalerie du magasin, ou n'y travaillaient pas au moment où Melles [K] et [U] y étaient stagiaires, de sorte que ces attestations, y compris celle de M. [W] ne peuvent venir sérieusement contredire les éléments probants apportés par l'employeur, étant observé que ce dernier produit l'attestation de M. [L], directeur du magasin, qui relativise les témoignages produits par M. [A] notamment quant à la capacité des collègues du salarié à être informés, et donc d'en témoigner, de ce ce qui se déroulait au sein du service animalerie étant donné le peu d'échanges entre les secteurs d'activité de l'établissement au cours de la journée de travail.

Il convient de déduire de l'ensemble de ces considérations que la SNC Jardi Soyaux rapporte la preuve des faits justifiant le licenciement prononcé à l'encontre de M. [A], lequel a eu des comportements déplacés à connotation sexuelle dans le cadre professionnel à l'égard de ses subordonnées, deux d'entre elles étant mineures en formation, de sorte que les faits dont s'agit sont constitutifs d'une faute grave rendant impossible le maintien du lien contractuel.

Par conséquent le jugement déféré sera infirmé et statuant à nouveau la cour dira le licenciement de M. [A] fondée sur une faute grave et le déboutera de l'intégralité de ses demandes y compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant à titre principal, il sera également tenu aux dépens de première instance et d'appel et nonobstant l'issue de l'appel l'équité et les circonstances économiques commandent de ne pas faire droit à la demande formée par l'employeur que sera débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de M. [A] par la SNC Jardi Soyaux est fondé sur une faute grave,

Déboute M. [A] de toutes ses demandes,

Déboute la SNC Jardi Soyaux de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [A] aux dépens de première instance et d'appel.

Signé par Madame Elisabeth LARSABAL, Présidente, et par Gwenaël TRIDON DE REY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

G. TRIDON DE REY Elisabeth LARSABAL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 14/05358
Date de la décision : 24/09/2015

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°14/05358 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-09-24;14.05358 ?
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