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17/06/2015 | FRANCE | N°13/07138

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, CinquiÈme chambre civile, 17 juin 2015, 13/07138


COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU : 17 juin 2015
(Rédacteur : Madame Henriette FILHOUSE, Président,)
No de rôle : 13/ 7138

Monsieur Jean-Michel X... c/ Association AQUITAINE ESAT-Entreprise BEL AIR

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :
aux avocatsDécision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 novembre 2013 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (Chambre 5, RG 10/ 10775) suivant déclaration d'appel du 09 décembre 2013,

APPELANT :
Monsieur Jean-Michel X..., né le 23 Mars

1959 à BORDEAUX (33000), de nationalité Française, demeurant ...-33000 BORDEAUX,
représenté par Maître Guy...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU : 17 juin 2015
(Rédacteur : Madame Henriette FILHOUSE, Président,)
No de rôle : 13/ 7138

Monsieur Jean-Michel X... c/ Association AQUITAINE ESAT-Entreprise BEL AIR

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :
aux avocatsDécision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 novembre 2013 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (Chambre 5, RG 10/ 10775) suivant déclaration d'appel du 09 décembre 2013,

APPELANT :
Monsieur Jean-Michel X..., né le 23 Mars 1959 à BORDEAUX (33000), de nationalité Française, demeurant ...-33000 BORDEAUX,
représenté par Maître Guy NOVO, avocat au barreau de BORDEAUX,

INTIMÉE :
Association AQUITAINE ESAT-Entreprise BEL AIR prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social 40 rue du Moulineau-33320 EYSINES,
représentée par Maître DE GROMARD substituant Maître Yves GUEVENOUX de la SELAS GESTION SOCIALE APPLIQUEE G. S. A., avocat au barreau de BORDEAUX,

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 912 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 06 mai 2015 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Henriette FILHOUSE, Président, chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Henriette FILHOUSE, Présidente, Monsieur Bernard ORS, Conseiller, Madame Béatrice SALLABERRY, Conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Véronique SAIGE Greffier lors du délibéré : Madame Sylvie HAYET

ARRÊT :
- contradictoire-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile. Monsieur X..., travailleur handicapé, a été admis par l'Association Aquitaine ESAT entreprise BEL AIR (ci après l'ESAT) le 9 janvier 1978. Plusieurs avenants sont intervenus.
Le 12 janvier 2004, il a été placé en position d'arrêt maladie.
L'ESAT, par courrier, a mis fin à la prise en charge à compter du 30 juin 2006.
Monsieur X... a saisi le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX afin d'obtenir de l'ESAT des dommages et intérêts en réparation des préjudices subis du fait de cette rupture.
La décision du Juge de la Mise en Etat en date du 3 novembre 2011 rejetant l'exception d'incompétence soulevée par l'ESAT a été confirmée par la cour le 2 octobre 2012.
Par jugement du 5 novembre 2013, le tribunal, après avoir observé que le décret du 23 décembre 2006 instaurant et organisant le contrat de soutien et d'aide par le travail, postérieur à la cessation du contrat, ne pouvait s'appliquer en l'espèce, a dit-que le contrat ne pouvait ni s'analyser en contrat de travail relevant du code du travail ni en un contrat d'entreprise,- que le contrat était donc un contrat suis generis régi par le code civil,- que la décision de rupture a été prise en suite d'un arrêt de travail prolongé, d'un placement en invalidité catégorie 2 et de la décision de la CDAPH de sortie d'établissement et service d'aide par le travail,- que la relation contractuelle était en réalité suspendue depuis deux ans et que monsieur X... avait nécessairement connaissance des décisions prises par la CDAPH notamment celle du 18 janvier 2005,- que l'ESAT n'a pas pour obligation de motiver les décisions de la CDAPH,- qu'en conséquence, il n'était démontré aucune exécution fautive, mauvaise foi ou intention de nuire de L'ESAT Il a, en conséquence, débouté monsieur X... de ses demandes, dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, monsieur X... étant cependant condamné aux entiers dépens.
Le 9 décembre 2013, monsieur X... a relevé appel de cette décision. Les parties ont conclu
Le conseiller de la mise en état a clôturé l'affaire par ordonnance du 22 avril 2015.
En ses dernières écritures du 9 juillet 2014, auxquelles il sera référé pour plus ample exposé, monsieur X... poursuivant l'infirmation de la décision déférée a conclu-au dire que l'ESAT n'a pas de mission de service public et qu'il ne peut prétendre être l'exécuteur des décisions administratives-au dire la contradiction entre les décisions de la COTOREP du 19 janvier 2005 et du 28 décembre 2008- au dire que la rupture unilatérale du contrat est brusque et fautive en application de l'article 1134 du code civil-à la condamnation de l'ESAT à lui payer la somme de 17. 676, 32 ¿ au titre de sa perte financière-à la condamnation de l'ESAT à lui payer la somme de 5. 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile au Maître Novo.
Il observe-que la décision invoquée par L'ESAT du 19 janvier 2005 prévoit le maintien en CAT jusqu'au 15 avril 2010 et qu'elle se trouve en contradiction avec celle du 23 décembre 2008 qui fait référence à la fois à une sortie d'établissement qui aurait été décidée en 2005 et à l'orientation à L'ESAT-que la référence à la sortie d'établissement n'impliquait pas le licenciement dès lors qu'il se trouve en catégorie 2 depuis son embauche,- que la décision de la CPAM de juin 2006 lui accordait une pension d'invalidité cumulable à la rémunération et ne pouvait pas motiver une rupture du contrat,- qu'il n'avait de relation contractuelle qu'avec l'ESAT et qu'il est faux de dire qu'elle n'est qu'une simple exécutante d'une décision administrative-que l'ESAT ne pouvait qu'avoir connaissance de la prochaine intervention du décret du 23 décembre 2006 organisant les obligations des parties au contrat de soutien et d'aide par le travail Il considère donc,- que la rupture unilatérale du contrat est fautive-que son préjudice est constitué par la perte de son salaire
En ses dernières écritures du 13 mars 2014, auxquelles il sera référé pour plus ample exposé, l'ESAT a conclu à la confirmation de la décision déférée et donc au rejet des demandes de l'appelant ainsi qu'à l'allocation de 1. 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Sans remettre en cause le fondement juridique (1382 du code civil) invoqué par l'appelant, l'ESAT dénie toute faute personnelle contractuelle soutenant-l'absence de contrat entre monsieur X... et elle, * le décret du 23 décembre 2006 n'étant pas applicable dans leurs relations, * il n'y a pas eu de contrat signé entre eux * l'article L 241-6 du code de l'action sociale et des familles attribue à la CDAPH compétence pour décider de l'orientation et désigner les services correspondants, la décision s'imposant à l'établissement,- la décision de la CDAPH du 18 janvier 2005 se prononçant sur la sortie de l'établissement-la mise en ¿ uvre de cette décision le 30 juin 2006 que monsieur X... n'a pas contestée
Il fait valoir-qu'il n'existe aucune contradiction entre la décision du 18 janvier 2005 et le courrier du 19 janvier 2005 adressé à monsieur X..., dès lors que du fait de l'engorgement de la commission, les décisions se prenaient en comité restreint avec information orale donnée aux établissements et étaient renvoyées à une commission ultérieure-que monsieur X... n'a jamais demandé à intégrer un autre ESAT à compter d'avril 2010,- qu'elle n'a pas à motiver la sortie de l'établissement, cette information incombant à la CDAPH-que la décision de la CDAPH était la conséquence de la décision de la CPAM en catégorie 2 avec invalidité des 2/ 3, décision non contestée-que le code du travail ne s'applique pas et que monsieur X... ne peut se prévaloir d'aucun préavis
Sur le préjudice, elle oppose-que monsieur X... se trouvait en situation de maladie depuis plus de deux ans, ne percevait pas de salaire si ce n'est un complément de la DIRECCTE-que la décision a été mise en place de manière à la faire coïncider avec la mise en place de la pension d'invalidité-qu'il n'est justifié d'aucune recherche d'emploi dans un autre établissement ni des ressources actuelles

SUR QUOI
Aux termes de l'article L 241-6 du code de l'action sociale et des familles, la décision de la commission s'impose à tout établissement ou service dans la limite de la spécialité au titre de laquelle il a été autorisé ou agréé. L'établissement ou le service ne peut mettre fin, de sa propre initiative, à l'accompagnement sans décision préalable de la commission.
Il a été définitivement jugé que l'ESAT BEL AIR est une personne privée qui n'est pas chargée d'une mission de service public. Cependant, il n'en demeure pas moins que ces décisions d'admission ou de sortie d'effectif dépendent étroitement des décisions de la CDAPH. Les décisions en cause n'ont pas été contestées en leur temps par monsieur X....
Il n'est pas vraiment contesté que les parties n'étaient pas liées par un contrat de travail stricto sensu, monsieur X... d'une part invoquant les dispositions de l'article 1134 du code civil, d'autre part, ne prétendant pas relever de la juridiction prud'homale. Indépendamment des termes utilisés dans les documents échangés (« lettre d'embauche » « ouvrier salarié » ¿) monsieur X... avait selon les termes de la loi du 2 janvier 2002, organisant les droits et la protection des personnes handicapées, le statut d'« usager »
De même, il n'est pas sérieusement discuté le fait que le décret du 2 3 décembre 2006 est inapplicable dans les relations entre les parties, même si ce décret est cité au soutien du moyen tiré du caractère fautif de la rupture.
Il n'en demeure pas moins, qu'il a été conclu entre l'ESAT et l'usager, monsieur X... un contrat organisant leurs relations dans le cadre de l'accueil de monsieur X... dans la structure.
Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.
Il est constant que l'accueil par l'ESAT dépend des décisions de la CDAPH et de fait de la C. P. A. M et que donc la rupture des relations ne peut être justifiée que par ces décisions.
Il est tout aussi constant qu'à la date du courrier du 30 juin 2006 mettant fin à l'accueil par l'ESAT, monsieur X... était en position de maladie et ne fréquentait plus en sa qualité d'usager l'ESAT depuis deux ans.
Il résulte de la notification faite à monsieur X... le 19 janvier 2005 et de celle faite le 23 décembre 2008, que la CDAPH (alors COTOREP) s'est réunie le 18 janvier 2005, qu'une décision de sortie de l'ESAT a été prise mais n'a été notifiée à monsieur X... que plus de deux ans plus tard et qu'en attendant de formaliser cette décision, la situation d'orientation sur l'ESAT avait été maintenue. Cependant cette notification portait aussi sur son classement en catégorie C (handicap grave). Il ne justifie pas avoir été précédemment classé dans cette catégorie, classement qu'il n'a pas contesté Monsieur X... n'a pas contesté non plus la décision qui lui a été notifiée le 23 décembre 2008, notamment pour se plaindre des contradictions dont il se plaint entre les deux notifications reçues à deux ans de distance. Monsieur X... a été, par ailleurs, destinataire d'une notification de la C. P. A. M du 13 juin 2006 d'une décision de placement en invalidité catégorie 2 laquelle correspond aux personnes ne pouvant plus travailler, autre décision qu'il n'a pas contesté. Cette catégorie 2 ne peut être mise en lien avec les mentions « catégorie 2 » reprises dans les documents émanant de l'ESAT produits, correspondant manifestement à la catégorie B de la COTOREP (handicap modéré).
L'ESAT n'a pas à répondre des contradictions et des disfonctionnement de la COTOREP ni à donner des explications que seule la COTOREP puis la CDAPH était en mesure de donner.
Par contre, L'ESAT était tenu de par la loi par les décisions de la COTOREP dont l'analyse sur les capacités de travail a été validée par la C. P. A. M, de mettre fin à la prise en charge de monsieur X..., au demeurant suspendue du fait de l'arrêt maladie et ne saurait de ce fait être recherché pour rupture abusive de ce contrat d'accueil.
L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile
Les dépens doivent être mis à la charge de monsieur X... ;

PAR CES MOTIFS la cour
Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions
Y ajoutant
Condamne monsieur X... à payer à l'ASSOCIATION AQUITAINE ESAT ENTREPRISE BEL AIR la somme de 1. 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Condamne monsieur X... aux entiers dépens.
Le présent arrêt a été signé par Henriette Filhouse, Présidente, et par Sylvie Hayet, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : CinquiÈme chambre civile
Numéro d'arrêt : 13/07138
Date de la décision : 17/06/2015
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2015-06-17;13.07138 ?
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