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01/04/2015 | FRANCE | N°13/07104

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, CinquiÈme chambre civile, 01 avril 2015, 13/07104


COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
--------------------------
ARRÊT DU : 01 avril 2015
(Rédacteur : Madame Béatrice SALLABERRY, Conseiller,)
No de rôle : 13/ 7104
Monsieur Fabrice X... Société MEDICAL INSURANCE COMPANY LIMITED

c/
Madame Anne-Marie Y... PAVILLON DE LA MUTUALITE venant aux droits de la Clinique Mutualiste de Pessac C. P. A. M. de la GIRONDE SA MATMUT ENTREPRISE venant aux droits de la Compagnie d'assurances MATMUT

Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocatsDécision déférée à la

Cour : jugement rendu le 06 novembre 2013 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (Chambre 6, ...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
--------------------------
ARRÊT DU : 01 avril 2015
(Rédacteur : Madame Béatrice SALLABERRY, Conseiller,)
No de rôle : 13/ 7104
Monsieur Fabrice X... Société MEDICAL INSURANCE COMPANY LIMITED

c/
Madame Anne-Marie Y... PAVILLON DE LA MUTUALITE venant aux droits de la Clinique Mutualiste de Pessac C. P. A. M. de la GIRONDE SA MATMUT ENTREPRISE venant aux droits de la Compagnie d'assurances MATMUT

Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocatsDécision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 novembre 2013 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (Chambre 6, RG 11/ 07163) suivant déclaration d'appel du 06 décembre 2013
APPELANTS :
Monsieur Fabrice X..., né le 21 Décembre 1945, de nationalité Française, demeurant ...
Société MEDICAL INSURANCE COMPANY LIMITED LTD prise en la personne de son représentant légal en FRANCE SAS FRANCOIS BRANCHET-35 avenue du Granier-38240 MEYLAN-dont le siège social est 2nd floor-13/ 17 Dawson street-DUBLIN 2- IRELANDE
représentés par Maître PARROT substituant Maître Paola JOLY de la SCP BAYLE-JOLY, avocat au barreau de BORDEAUX,
INTIMÉES :
Madame Anne-Marie Y..., née le 04 Septembre 1956 à BORDEAUX (33000), de nationalité Française, demeurant ...
représentée par Maître Annie TAILLARD de la SCP ANNIE TAILLARD AVOCAT, avocat postulant, et assistée de Maître Véronique GARCIA, avocat plaidant, au barreau de BORDEAUX,
PAVILLON DE LA MUTUALITE venant aux droits de la Clinique Mutualiste de Pessac prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social 45, Cours du Maréchal Galliéni-33082 BORDEAUX CEDEX,
SA MATMUT ENTREPRISE venant aux droits de la Compagnie d'assurances MATMUT prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social 66, rue de Sotteville-76100 ROUEN,
représentés par Maître Laurence DOUMAS, avocat au barreau de BORDEAUX,
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social Place de l'Europe-33085 BORDEAUX,
représentée par Maître Max BARDET, avocat au barreau de BORDEAUX,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 février 2015 en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Henriette FILHOUSE, Président, Monsieur Bernard ORS, Conseiller, Madame Béatrice SALLABERRY, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie HAYET
ARRÊT :
- contradictoire-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

OBJET DU LITIGE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 26 septembre 2005, Madame Anne-Marie Y..., souffrant de douleurs abdominales, a été adressée par son médecin traitant à la CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC pour suspicion de sigmoïdite.
Le 27 septembre 2005, elle a été opérée en urgence par le Docteur Patrice X... aux fins d'évacuation par coelioscopie d'un abcès à l'utérus, traité par lavage local et drainage externe, et ablation d'un stérilet en place depuis plusieurs années, avec traitement par bi-antibiothérapie en post-opératoire.
Le 1er octobre 2005, Madame Anne-Marie Y... a regagné son domicile sans prescription d'antibiotique ni de suivi spécifique particulier.
Le 4 octobre 2005, les résultats d'analyses pratiquées sur le stérilet de Madame Anne-Marie Y..., ont mis en évidence la présence de deux germes " Acinétobacter Baumanii et Streptococcus Constellatus ", le premier étant seul sensible aux antibiotiques prescrits au cours de l'hospitalisation mais non le second.
Compte tenu de la persistance des douleurs pelviennes accompagnées de fièvre, Madame Anne-Marie Y..., a bénéficié d'un traitement antibiotique délivré par son médecin traitant, puis a de nouveau été orientée en urgence à la CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC le 21 octobre 2005 où elle a subi, après réalisation d'une échographie abdomino-pelvienne, le 22 octobre 2005, une laparotomie par coelioscopie pour évacuation de l'abcès à l'utérus par toilette locale et drainage externe, selon un geste opératoire identique à celui réalisé le 27 septembre 2005.
Dans la soirée du 23 octobre 2005, Madame Anne-Marie Y... a présenté une forte et brutale douleur abdominale ainsi qu'une hémorragie interne importante nécessitant son transfert dans la nuit en service de réanimation.
Le 24 octobre 2005 au matin, Madame Anne-Marie Y... a subi une nouvelle laparotomie qui a fait constater un épanchement de sang dans la paroi péritonéale (hémopéritoine) et, devant la persistance de l'hémorragie et après réalisation d'un scanner, une ablation de la rate a été pratiquée le même jour en fin d'après-midi, les deux interventions étant réalisées par le Docteur Patrice X....
Dans les suites opératoires Madame Anne-Marie Y... a souffert d'importants problèmes respiratoires nécessitant qu'elle reste intubée et ventilée pendant plusieurs jours en réanimation et a présenté un syndrome infectieux important entraînant une modification de la bi-antibiothérapie le 28 octobre, puis la mise en place d'une tri-antibiothérapie à partir du 1er novembre 2005.
Devant la persistance d'un syndrome infectieux rebelle et après réalisation d'un scanner mettant en évidence la récidive d'un abcès local, Madame Anne-Marie Y... a subi le 5 novembre 2005, une cinquième intervention chirurgicale réalisée par le Docteur Z..., consistant en une ablation de la trompe et de l'ovaire gauches où l'infection était localisée, ceci a mis un terme au processus infectieux abdominal.
Les suites opératoires ont été compliquées par une escarre au sacrum en raison de l'alitement prolongé durant la période de réanimation qui a été infectée par la présence d'un staphylocoque doré.
Madame Anne-Marie Y... est restée placée sous assistance respiratoire jusqu'au 21 novembre 2005 et a regagné son domicile le 19 décembre 2005.
Le 21 janvier 2006, Madame Anne-Marie Y... a été hospitalisée au CHU de BORDEAUX pour une dyspnée et des douleurs thoraciques où il a été diagnostiqué une embolie pulmonaire bilatérale dont le point de départ est une thrombose d'une veine pelvienne contiguë à l'ancien foyer infectieux justifiant une mise sous traitement anticoagulant et sous bi-antibiothérapie lui permettant un retour à domicile le 13 février 2006 avec poursuite des traitements.
Au mois de septembre 2006, la cicatrisation complète de l'escarre sacrée a été constatée.
Le 1er avril 2008, Madame Anne-Marie Y... a été opérée par le Docteur A...à la CLINIQUE SAINT AUGUSTIN de BORDEAUX pour cure d'une éventration ombilicale sur une des cicatrices abdominales avec mise en place d'une plaque prothétique, nécessitant une hospitalisation d'une dizaine de jours.
Par courrier du 16 juin 2008, Madame Anne-Marie Y... a saisi la Commission Régionale de Conciliation et d'Indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (la CRCI) d'AQUITAINE d'une demande d'indemnisation de ses préjudices. Par décision du 27 août 2008, le Président de la CRCI d'AQUITAINE a désigné le Docteur Jean-Marie B..., chirurgien urologue et viscéral, en qualité d'expert aux fins d'expertise médicale.

Le 13 novembre 2008, un premier rapport a été déposé à la CRCI d'AQUITAINE concluant à l'engagement de la responsabilité du Docteur Patrice X... à l'égard de Madame Anne-Marie Y..., toutefois l'évaluation de ses préjudices n'a pas pu être faite la patiente étant absente lors de la réunion d'expertise du 17 octobre 2008.
Par avis du 18 mars 2009, la CRCI d'AQUITAINE a conclu à l'engagement de la responsabilité pour faute du Docteur Fabrice X... à l'égard de Madame Anne-Marie Y... et a désigné de nouveau le Docteur B..., en qualité d'expert, aux fins d'évaluation des préjudices ce qui a donné lieu à l'établissement d'un second rapport déposé le 7 juillet 2009.
Par avis du 16 décembre 2009, la CRCI d'AQUITAINE a évalué les préjudices de Madame Anne-Marie Y... en indiquant qu'il appartenait à l'assureur du Docteur Patrice X... d'adresser à la victime une offre d'indemnisation, lequel a, dans un courrier du 30 août 2010, manifesté à cette dernière son intention de contester l'avis de la CRCI.
Aucune offre d'indemnisation n'a été émise dans les 4 mois par l'assureur du Docteur X....
Par actes d'huissier des 27 et 29 juin 2011 et 19 et 20 juillet 2011, Madame Anne-Marie Y... a fait assigner le Docteur Patrice X..., son assureur la société MÉDICAL INSURANCE COMPAGNIE LIMITED (MIC LTD), le PAVILLON DE LA MUTUALITÉ, venant aux droits de la CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC, et son assureur, la SA ENTREPRISES MATMUT, venant au lieu et place de la compagnie MATMUT et la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE (CPAM) DE LA GIRONDE devant le Tribunal de Grande Instance de Bordeaux aux fins de déclarer le docteur X... responsable de son préjudice corporel et d'obtenir la garantie de l'assureur de ce dernier pour l'indemniser de ses préjudices.
Par jugement en date du 6 novembre 2013, le Tribunal de Grande Instance de Bordeaux a :- Dit que le Docteur Patrice X... a commis des fautes à l'origine des préjudices subis par Madame Anne-Marie Y... à la suite des interventions chirurgicales pratiquées ;- Dit que le Docteur Patrice X... est entièrement responsable des préjudices subis par Madame Anne-Marie Y... et qu'il sera tenu in solidum avec la compagnie MIC LTD à l'indemniser de ses préjudices ;- Constaté qu'aucune demande n'est formulée par Madame Anne-Marie Y... à l'encontre du PAVILLON DE LA MUTUALITÉ venant aux droits de la CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC, et de son assureur, la SA ENTREPRISES MATMUT, venant au lieu et place de la compagnie MATMUT,- Dit que la CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC n'a commis aucune faute à l'origine des préjudices de Madame Anne-Marie Y... ;- Dit n'y avoir lieu à un partage de responsabilité entre le Docteur Patrice X... et la CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC ;- Ordonné la mise hors de cause du PAVILLON DE LA MUTUALITÉ, venant aux droits de la CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC et de son assureur, la SA ENTREPRISES MATMUT, venant au lieu et place de la compagnie MATMUT ;- Fixé le préjudice corporel subi par Madame Anne-Marie Y... à la somme de 240. 855, 76 ¿, décomposée comme suit : * Dépenses de Santé Actuelles (DSA).............................................. : 121. 535, 64 ¿ * Frais Divers (FD).......................................................................... : 1. 250, 00 ¿ * Dépenses de Santé Futures (DSF).................................................. : 5. 641, 38 ¿ * Assistance par Tierce Personne (ATP)........................................... : 56. 107, 74 ¿ * Déficit Fonctionnel Temporaire (DFT).......................................... : 2. 646, 00 ¿ * Souffrances endurées (S. E.)........................................................... : 25. 000, 00 ¿ * Déficit Fonctionnel Permanent (DFP)............................................ : 21. 675, 00 ¿ * Préjudice Esthétique Permanent (PEP).......................................... : 6. 000, 00 ¿ * Préjudice d'Agrément (P. A.).......................................................... : 1. 000, 00 ¿- Condamné in solidum le docteur X... et la compagnie MIC LTD à payer : * à Madame Anne-Marie Y... la somme de 113. 779, 02 ¿ en réparation de son préjudice corporel, après imputation de la créance de l'organisme social, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, * à la CPAM DE LA GIRONDE la somme de 127. 076, 74 ¿ au titre des prestations versées pour le compte de son assurée sociale, en ce compris les frais futurs qui seront dus au fur et à mesure qu'ils seront exposés à moins qu'ils ne préfèrent s'en libérer par le versement immédiat d'un capital de 5. 641, 38 ¿, outre la somme de 1. 015 ¿ au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, avec intérêts au taux légal à compter du jugement et application des dispositions de l'article 1154 du Code civil,- Débouté Madame Anne-Marie Y... de sa demande au titre de la perte de rémunération de Monsieur Yannick Y... ;- Débouté le Docteur Patrice X... et la compagnie MIC LTD de leur demande de relevé indemne par le PAVILLON DE LA MUTUALITÉ, venant aux droits de la CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC et de son assureur, la SA ENTREPRISES MATMUT, venant au lieu et place de la compagnie MATMUT,- Débouté les parties du surplus de leurs demandes ;- Ordonné l'exécution provisoire du jugement dans toutes ses dispositions ;- Condamné in solidum le docteur X... et la compagnie MIC LTD à payer sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile : * à Madame Anne-Marie Y... la somme de 1. 500 ¿ * à la CPAM DE LA GIRONDE la somme de 300 ¿- Débouté le PAVILLON DE LA MUTUALITÉ, venant aux droits de la CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC et son assureur, la SA ENTREPRISES MATMUT, venant au lieu et place de la compagnie MATMUT de leur demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à l'encontre de Madame Anne-Marie Y... ;- Condamné in solidum le Docteur Patrice X... et la compagnie MIC LTD aux dépens de l'instance, dont distraction au profit de Maître Max BARDET, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 6 décembre 2013, le docteur Patrice X... et la compagnie MIC LTD ont relevé appel général de cette décision à l'encontre de toutes les parties.
Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 28 janvier 2015, le docteur Patrice X... et la compagnie MIC LTD demandent à la cour de : A titre principal-Infirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions.- Dire et juger que la faute du docteur X... n'est pas rapportée, que le lien de causalité entre la prise en charge du docteur X... et les préjudices de Madame Y... n'est pas établi et prononcer sa mise hors de cause,- Débouter Madame Y... de l'ensemble des demandes dirigées à leur encontre,- Condamner Madame Y... à leur payer la somme de 2. 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.- Débouter la CPAM DE LA GIRONDE et toutes les autres parties des demandes dirigées à leur encontre, A titre subsidiaire-Infirmer le jugement déféré en ce qu'il a conclu que le Docteur X... est entièrement responsable des préjudices subis par Mme Y..., que la CLINIQUE MUTUALISTE n'est pas tenue de le relever indemne de la moitié des condamnations à intervenir à son encontre, que le poste de préjudice des frais divers était établi, que le déficit fonctionnel total doit être indemnisé à hauteur de 1. 760 ¿, que les souffrances endurées doivent être indemnisées à hauteur de 25. 000 ¿, que le préjudice esthétique permanent doit être indemnisé à hauteur de 6. 000 ¿, que le préjudice d'agrément est établi, que le poste de préjudice de l'assistance par tierce personne est établi, que la créance de la CPAM est établie et sur leur condamnation à verser des indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens. Statuant à nouveau-Dire et juger que seuls 10 % des préjudices de Madame Y... sont imputables au docteur X... et à LA CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC,- Dire que la responsabilité de LA CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC est engagée,- Condamner LE PAVILLON DE LA MUTUALITÉ venant aux droits de LA CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC à relever indemne le Docteur X... de la moitié des condamnations à intervenir à son encontre en ce compris celles au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens tant en première instance qu'en appel.- Faire supporter au Docteur X..., et à la CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC seulement 10 % de l'indemnisation totale de Mme Y...,- Fixer l'indemnisation de Mme Y... comme suit : * préjudice matériel........................................................................ : 100, 28 ¿ * Déficit Fonctionnel Temporaire partiel........................................ : 1. 380, 00 ¿ * Déficit Fonctionnel Temporaire total........................................... : 886, 00 ¿ * Souffrances Endurées................................................................... : 16. 000, 00 ¿ * Déficit Fonctionnel Permanent..................................................... : 21. 675, 00 ¿ * Préjudice Esthétique..................................................................... : 3. 000, 00 ¿- Dire et juger que les postes de préjudice au titre du préjudice d'agrément et de l'assistance par tierce personne ne sont pas établis,- Débouter la CPAM DE LA GIRONDE de l'ensemble de ses demandes,- Débouter Madame Y... de l'ensemble de ses demandes présentées au titre de son appel incident,- Confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a dit que Mme Y... n'a pas qualité pour solliciter une réparation au titre des pertes de rémunération subies par M. Yannick Y... et que les frais de déplacement de Mme Y... ne sont pas justifiés.

Au soutien de leur appel le docteur X... et la compagnie MIC LTD invoquent le rapport d'expertise relevant que les problèmes infectieux de la patiente préexistaient à l'intervention initiale ayant pour origine le stérilet non changé depuis de nombreuses années. Ils relèvent que l'expert n'a retenu aucun manquement à l'encontre du docteur Patrice X... dans le choix thérapeutique et la réalisation de l'acte, ni à son devoir d'information. Ils estiment que les préjudices de Madame Anne-Marie Y... ont pour cause exclusive l'infection initiale présentée imputable au stérilet, cette pathologie pouvant évoluer de façon identique à l'évolution effective après les différents actes chirurgicaux, raison pour laquelle ils demandent la mise hors de cause du praticien.
Quant aux manquements relevés par l'expert au titre de l'antibiothérapie, ils soutiennent que la prescription des antibiotiques incombait aux anesthésistes de l'établissement. Ils rappellent que le médecin n'est tenu qu'à une obligation de moyens estimant qu'aucune faute n'est caractérisée à l'encontre du docteur X... et que sa responsabilité ne peut se déduire du seul lien entre l'intervention et le préjudice subi, ni de l'échec des soins ou de la seule anormalité du dommage ou de sa gravité exceptionnelle. A titre subsidiaire, ils concluent à un partage de responsabilité avec la CLINIQUE MUTUALISTE en faisant valoir que la prescription des antibiotiques relevait des anesthésistes, faute qu'il impute à un défaut d'organisation et un manque de coordination de l'établissement en demandant à ce que le médecin soit relevé indemne d'une large partie des condamnations à intervenir. Sur les préjudices de Madame Anne-Marie Y..., ils estiment que la patiente a contribué à leur réalisation, l'infection dont elle a fait l'objet étant essentiellement due au fait qu'elle a conservé le même stérilet pendant plus de 15 ans et non le défaut de prescription d'une antibiothérapie. Ils demandent en conséquence de limiter à 10 % l'indemnisation des préjudices de Madame Anne-Marie Y... devant être mis à leur charge.
Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 30 janvier 2015, Madame Anne-Marie Y... demande à la cour de :- Confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a dit que le docteur X... a commis des fautes à l'origine des préjudices subis à la suite des interventions chirurgicales pratiquées, dit que le docteur X... est entièrement responsable de ses préjudices et qu'il sera tenu in solidum à l'en indemniser avec la Compagnie MIC LTD, Faisant droit a son appel incident,- Réformer le jugement de première instance en ce qu'il a fixé son préjudice global à la somme de 113. 779, 02 ¿,- Condamner in solidum le docteur X... et, la Compagnie MIC LTD, à lui payer après déduction de la créance de la CPAM DE LA GIRONDE, la somme de 139. 456, 65 ¿ avec intérêts au taux légal à compter de la saisine de la CRCI ;- Condamner in solidum le docteur X... et, la Compagnie MIC LTD, à lui payer la somme de 3. 000 ¿ par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

A l'appui de ses demandes, Madame Y... reproche au docteur Patrice X... les manquements aux règles de l'art caractérisés par l'expert, à savoir l'absence de prescription d'une antibiothérapie adaptée et suffisamment prolongée et de ne pas avoir pratiqué les examens préalables à une intervention pour un hémopéritoine. Elle soutient également que le Docteur Patrice X... a failli à son obligation d'information en faisant valoir qu'il n'a jamais apporté la preuve de ce qu'il lui avait délivré une information préalable et en arguant des conclusions de l'expert qui aurait constaté l'absence de conseil dans les suites opératoires.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 16 juillet 2014 la CPAM DE LA GIRONDE demande à la cour de : A titre principal,- Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,- Donner acte aux appelants de ce qu'ils ont exécuté les condamnations mises à leur charge par le jugement entrepris à son profit, A titre subsidiaire, si la Cour devait retenir un partage de responsabilité entre le Docteur X... et la Clinique mutualiste de PESSAC,- Condamner conjointement et solidairement le Docteur X..., la Compagnie d'assurances MIC LTD, LE PAVILLON DE LA MUTUALITÉ, venant aux droits de LA CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC, à lui verser la somme de 127. 076, 74 ¿ au titre des prestations versées pour le compte de son assurée sociale, en ce compris les frais futurs qui seront dus au fur et à mesure qu'ils seront exposés à moins qu'ils ne préfèrent s'en libérer par le versement immédiat d'un capital de 5. 641, 38 ¿ (dus à compter de 2011), outre la somme de 1. 015 ¿ ; En tout état de cause,- Condamner conjointement et solidairement le docteur X... et la Compagnie LTD, à lui verser la somme de 500 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 24 avril 2014 le PAVILLON DE LA MUTUALITÉ, venant aux droits de la CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC et son assureur, la SA ENTREPRISES MATMUT, venant au lieu et place de la compagnie MATMUT demandent à la cour de :- Débouter le Docteur X... et son assureur la compagnie MIC LTD de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré, Y ajoutant,- Condamner le Docteur X... et la compagnie MIC LTD, à leur payer la somme de 2. 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la présente procédure.

Au soutien de leur argumentation, ils font observer que Madame Anne-Marie Y... ne forme aucun grief à leur encontre tout comme le Docteur B...qui n'a pas retenu l'existence d'une infection nosocomiale ni de problème dans l'organisation du service ou le fonctionnement de l'établissement. Ils estiment que le Docteur Patrice X... est mal fondé à tenter de s'exonérer de sa responsabilité au détriment des anesthésistes qui en tout état de cause ne sont pas salariés de l'établissement mais exercent à titre libéral, de sorte que seule leur responsabilité personnelle peut être recherchée et non celle de l'établissement, en relevant en outre qu'aucun anesthésiste n'a été appelé en la cause. Ils considèrent que seul le Docteur Patrice X... est responsable des préjudices subis par Madame Anne-Marie Y... sur la base du rapport d'expertise et de l'avis de la CRCI d'AQUITAINE et sollicitent leur mise hors de cause.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 février 2015.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I Sur la responsabilité du docteur Patrice X...
-1- Sur le respect du devoir d'information
En application de l'article L. 1111-2 du Code de la Santé Publique, toute personne a le droit d'être informée sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ; que seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser, qu'en cas de litige, il appartient au professionnel d'apporter la preuve qui peut être apportée par tout moyen, que l'information a été délivrée.
Madame Anne-Marie Y... reproche au docteur Patrice X... de ne pas rapporter la preuve de la délivrance de l'information préalable à l'intervention et d'avoir manqué à son obligation de conseil dans le cadre des suites opératoires et autres interventions pratiquées.
Madame Anne-Marie Y... a été orientée à la CLINIQUE MUTUALISTE dans le cadre de l'urgence à deux reprises les 26 septembre et 21 octobre 2005, où elle a été opérée par le Docteur X..., les deux autres interventions qu'il a pratiquées l'ont été dans les suites d'une hémorragie interne.
Le docteur Patrice X... ne produit aucun élément permettant d'établir le respect de ce devoir d'information, il n'en demeure pas moins qu'il y a lieu de tenir compte du contexte et des circonstances dans lesquelles les actes chirurgicaux ont été réalisés. Qu'à ce titre, l'expert rappelle que la patiente a été admise en urgence à la clinique pour un syndrome infectieux pelvien dont l'origine n'avait pu être déterminée par les investigations para-cliniques réalisées.
L'expert retient que le docteur X... a informé Madame Anne-Marie Y... du rôle du stérilet dans la genèse de l'infection et de la nécessité d'évacuer l'abcès par voie coelioscopique et d'en déterminer la cause ainsi que d'une possible laparo conversion si le traitement s'avérait non réalisable par voie coelioscopique. Il estime qu'il paraissait difficile de donner davantage de précisions à la patiente, dans les conditions précitées en l'absence d'origine diagnostique précise et conclut " au vu des circonstances, on ne peut retenir de façon formelle de défaillance de la part du docteur Patrice X... concernant son devoir d'information " ;
C'est au vu de ces éléments que le tribunal a justement considéré qu'il ne pouvait être retenu à l'encontre du docteur X... un défaut d'information. La décision déférée sera confirmée sur ce point.

-2- Sur les fautes dans la réalisation des actes médicaux et soins post-opératoires

L'article 1142-1 § 1 du Code de la santé publique, prévoit " hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés dans la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostics ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes, de prévention, diagnostics ou de soins qu'en cas de faute " ;
Il appartient à la victime de rapporter la preuve de la faute du médecin.
Mme Aime-Marie Y... reproche au docteur Patrice X... l'absence de prescription d'une antibiothérapie adaptée et suffisamment prolongée (pas de prescription d'antibiotique lors de son retour à domicile après la 1ère intervention) et l'absence de réalisation des examens préalables à l'intervention pour un hémopéritoine.
Il ressort du rapport d'expertise qu'aucune faute au niveau de l'étape diagnostique, du choix thérapeutique et de la réalisation de la première intervention le 27 septembre 2005 ne peut être reprochée au docteur Patrice X... qui a agi selon les règles de l'art.
En revanche, l'expert estime que la récidive précoce de l'infection a été favorisée par l'absence d'antibiothérapie, le fait d'avoir laissé Madame Anne-Marie Y... quitter l'établissement sans conseil de soins ou de surveillance spécifique et surtout sans prescription d'antibiotique n'est pas conforme aux règles de l'art et ce d'autant plus que lors de la première intervention, il n'a pas procédé à l'exérèse de la trompe gauche, décision qui pouvait néanmoins être retenue comme acceptable, mais dont l'absence aurait d'autant plus dû justifier une antibiothérapie adaptée et plus prolongée.
Le docteur B...souligne qu'après la 2ème intervention chirurgicale du 22 octobre 2005, lorsque l'état de Madame Anne-Marie Y... s'est brutalement dégradé dans la nuit du 23 au 24 octobre, le docteur Patrice X... a décidé de procéder à une nouvelle intervention chirurgicale par laparotomie sans avoir demandé au préalable d'investigation iconographique. Il note qu'en se dispensant d'examen à ce stade, il n'a pas pu localiser l'origine de l'hémorragie et n'a pu intervenir qu'en procédant à une évacuation des caillots et du sang par un drainage externe, la technique opératoire utilisée l'empêchant d'explorer la partie de l'abdomen où se trouvait la rate. Ainsi ce n'est qu'après cette intervention et après la réalisation d'un scanner révélant une hypertrophie de la rate, en rapport avec un très probable hématome central signant une rupture de l'organe, que le docteur X... a procédé à une laparotomie mais cette fois par voie sous costale permettant d'accéder à l'hypocondre gauche et effectuer l'ablation de la rate à l'origine du saignement.
La faute du docteur X... est ainsi caractérisée à ce moment là, par le défaut de prescription d'une investigation iconographique, telle qu'une échographie abdominale, pourtant facilement réalisable même en lit de réanimation, qui aurait permis d'identifier l'origine de l'hémorragie et non simplement à privilégier, un nouveau geste de lavage et de drainage sans penser à une éventuelle lésion de la rate.
A cet égard l'expert dit : " la réalisation d'une investigation iconographique, même simple comme une banale échographie abdominale, aurait sûrement permis de détecter la lésion splénique avant la première réintervention pour hémorragie et aurait ainsi conduit, quitte à agrandir nettement l'incision médiane vers le haut, à pratiquer d'emblée la splénectomie évitant la deuxième réintervention le même jour pour la poursuite du saignement ".
Il s'ensuit que l'ablation de la rate (splénectomie) aurait pu être évitée si le problème septique avait été contrôlé plus efficacement, ce qui repose la question de l'indication de l'annexectomie gauche (ablation des trompes et de l'ovaire), dès la première réintervention du 22 octobre 2005 et en tout cas démontre l'intérêt voire la nécessité d'une antibioprophylaxie adaptée et prolongée après l'intervention initiale du 27 septembre 2005 qui aurait, peut être, pu éviter l'évolution vers la poursuite et l'aggravation de l'infection locale.
Le docteur Patrice X... demande à l'égard de la patiente un partage de responsabilité compte tenu de ce que l'état infectieux présenté a probablement pour origine le port d'un stérilet non changé depuis plusieurs années.
Il se fonde en cela sur la page 20 du rapport où l'expert indique ", La pathologie initiale infectieuse à point de départ gynécologique aurait théoriquement pu évoluer spontanément en l'absence de tout traitement, de façon identique à l'évolution effective après les différents actes chirurgicaux. Du moins, en ce qui concerne les phénomènes infectieux pelviens, leurs conséquences septiques générales, y compris comme on l'a vu la rupture spontanée splénique, et même les phénomènes emboliques pulmonaires secondaires de 2006 dont le point de départ est une thrombose démontrée de la veine hypogastrique gauche contiguë au foyer infectieux pelvien gauche "
Mais il a omis de relever que l'expert précise après avoir fait cette analyse que " Pour éviter justement ces possibilités évolutives spontanées, un traitement d'emblée adéquat représentait la meilleure solution, comme on l'a vu plus haut : antibiothérapie adaptée et suffisamment prolongée après l'intervention princeps, annexectomie gauche de principe lors de la première réintervention pour récidive de la collection pelvienne ".
L'expert a précisé également en page 27 de son rapport : " L'évolution n'est donc pas la conséquence d'un accident médical, d'une affection iatrogène ou d'une infection nosocomiale. On peut considérer qu'elle résulte d'une inadéquation des traitements successifs initiaux (par le docteur X...) ou que, pour le moins, cette inadéquation a privé la patiente d'une chance non négligeable d'une évolution favorable de son problème initial sans une série de complications en cascade aux conséquences multiples ".
Il résulte de ces éléments que s'il est établi que Madame Anne-Marie Y... a présenté une infection ayant pour origine un stérilet non changé depuis 1988, il n'en demeure pas moins que les interventions réalisées par le docteur Patrice X... n'ont pas été adaptées et n'ont pas permis une évolution favorable de cette infection en raison des manquements aux règles de l'art qui ont été retenus à son égard, lesquels sont entièrement à l'origine des préjudices subis par Madame Anne-Marie Y... qui ne présentait, comme l'a relevé l'expert, pas d'antécédents d'état de vulnérabilité particulier si ce n'est l'infection pour laquelle elle a été amenée à consulter en urgence.
Il n'y a donc pas lieu de retenir à l'égard de Madame Y... un quelconque partage de responsabilité.
Au contraire il est établi plusieurs fautes du docteur X... : l'absence de suivi approprié par antibiothérapie prolongée après la première intervention du 27 septembre 2005, le choix opératoire de la 1ère réintervention du 22 octobre 2005 et l'absence d'explorations iconographiques intra-abdominales préalable à l'intervention en urgence du 24 octobre 2005 lorsque l'état de la patiente s'est brusquement aggravé en faisant une hémorragie péritonéale.
La décision sera confirmée en ce qu'elle a retenu la responsabilité fautive du docteur X... à l'égard de Madame Y....

II Sur la responsabilité du PAVILLON DE LA MUTUALITÉ, venant aux droits de la CLINIQUE MUTUALISTE DE PESSAC

Madame Anne-Marie Y... ne formule aucun grief ni aucune demande à l'encontre de l'établissement de soins.
Le docteur Patrice X... sollicite un partage de responsabilité entre lui et l'établissement de soins en soutenant que la prescription des antibiotiques, dont l'absence lui a été reprochée par l'expert, relevait des anesthésistes selon les habitudes de la clinique, ceci démontrant, selon lui, le manque de coordination de l'établissement.
Cependant il ne produit aucun justificatif permettant de rapporter la preuve de la réalité de la répartition des compétences et responsabilités ainsi alléguées. L'expert n'a relevé aucun problème dans l'organisation du service ou son fonctionnement ayant pu avoir un effet délétère direct sur l'état de santé de la patiente, il a même ajouté que la répartition des tâches dans la prescription des antibiotiques entre chirurgiens et anesthésistes ne paraît pas clairement identifiée.
L'expert a indiqué à cet égard que " Le praticien « responsable de la patiente » en l'occurrence celui qui l'a prise en charge après son admission, soit le docteur X..., restait tout de même celui à qui incombe la prise en charge globale incluant les soins et prescriptions post-opératoires ".
En outre le PAVILLON DE LA MUTUALITÉ fait justement observer que les anesthésistes interviennent à titre libéral dans son établissement. Par ailleurs il est constant qu'aucun d'eux n'a été dénommé par le docteur X... qui les met en cause et encore moins attraits à la procédure.
Le docteur X... et son assureur seront donc déboutés de leur demande de rélevé indemne par la CLINIQUE MUTUALISTE.
La mise hors de cause du PAVILLON DE LA MUTUALITÉ venant aux droits de la CLINIQUE MUTUALISTE sera confirmée.

III Sur le lien de causalité entre les fautes et le préjudice de Madame Anne-Marie Y...

Madame Anne-Marie Y..., atteinte d'un syndrome infectieux causé par le port d'un stérilet non changé depuis plusieurs années, a subi 5 interventions chirurgicales, dont 4 ont été pratiquées par le docteur Patrice X... avant que le phénomène infectieux ne puisse être enrayé qu'après réalisation de l'annexectomie gauche pratiquée le 5 novembre 2005 par le docteur Z....
L'expert conclut que l'évolution de l'état de santé de Madame Anne-Marie Y... résulte de l'inadéquation des traitements successifs prodigués par le Docteur Patrice X..., et a retenu que la splénectomie aurait pu être évitée si le problème septique avait été contrôlé plus efficacement dès le départ.
Il ressort de la chronologie des soins telle qu'exposée ci-dessus, que lors de l'hémorragie interne, survenue dans la soirée du 23 octobre 2005, la réalisation d'une échographie abdominale aurait sûrement permis de détecter la lésion au niveau de la rate et donc de réaliser immédiatement la splénectomie afin d'éviter ainsi une deuxième réintervention le même jour afin de stopper l'hémorragie.
L'état de Madame Anne-Marie Y... a été considérablement fragilisé par la multiplication des interventions sur une période de moins de deux mois. Le lien de causalité entre les fautes retenues à l'encontre du docteur X... et le préjudice de Madame Anne-Marie Y... est ainsi caractérisé et ce comprenant les escarres infectées dues à son alitement prolongé ainsi que les complications pulmonaires survenues en janvier 2006.
Il s'ensuit que le docteur Patrice X... doit être déclaré responsable de tous les préjudices subis par Madame Y... et tenu de les réparer sous la garantie de son assureur.

IV Sur la liquidation des préjudices de Madame Anne-Marie Y...

L'expert dans son rapport déposé le 7 juillet 2009 a détaillé comme suit l'évaluation des différents préjudices subis par Madame Y... :
- Déficit Fonctionnel Temporaire : * Total du 27 septembre au 19 décembre 2005, du 21 janvier au 13 février 2006, le 28 février 2006 et du 1er au 10 avril 2008. * Partiel : à hauteur moyenne de 50 % du 19 décembre 2005 au 21 janvier 2006 puis jusqu'au 1er septembre 2006 à hauteur de 20 %, puis au même taux du 10 avril au 10 mai 2008,- Dommages esthétiques : en rapport avec les multiples laparotomies, l'éventration abdominale et l'escarre sacrée,- La patiente a bénéficié et continue à bénéficier de l'aide de son mari pour certains actes de la vie quotidienne,- Soins quotidiens à domicile pour problème d'escarre du 19 décembre 2005 au 21 janvier 2006,- Suite à l'embolie pulmonaire survenue le 21 janvier 2006, nécessité de poursuivre encore ce jour un traitement anticoagulant avec surveillance adéquate,- Date de consolidation : 1er mai 2008,- Déficit Fonctionnel Permanent : 17 %,- Souffrances endurées : 5, 5/ 7,- Discret préjudice d'agrément.

Il est noté que Madame Y... n'a pas repris et ne reprendra pas d'activité professionnelle du fait d'une pathologie traumatique antérieure au niveau du pied droit qui a entraîné son classement en invalidité 2ème catégorie à compter du 10 septembre 2004. Ceci est sans rapport avec les conséquences des interventions chirurgicales.
L'expert souligne que du fait de la splénectomie, Madame Y... restera exposée à un risque plus grand d'infection pneumococcique, ceci induisant la nécessité de poursuite du traitement anticoagulant avec surveillance biologique très régulière. Il mentionne également le risque tardif potentiel de phénomènes occlusifs intestinaux.
Les parties s'accordent sur la confirmation d'un seul poste de préjudice celui relatif au Déficit Fonctionnel Permanent, pour lequel le tribunal a alloué la somme de 21. 675 ¿ pour un Déficit Fonctionnel Permanent évalué par l'expert à 17 %.
Tous les postes de préjudice sont discutés par l'une ou l'autre des parties, ils seront examinés successivement.

-1- Les Dépenses de Santé Actuelles (DSA)

Le docteur X... et la compagnie MIC LTD demandent l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il les a condamnés à payer à la CPAM DE LA GIRONDE la somme de 121. 535, 64 ¿ au titre des débours exposés pour le compte de Madame Y.... Celle-ci demande la confirmation de la décision y compris en ce qu'elle lui a alloué la somme de 100, 28 ¿ au titre des frais pharmaceutiques restés à sa charge.
On ne peut que s'étonner de l'argumentation des appelants selon laquelle les justificatifs produits par la CPAM ne sont que des preuves qu'elle se constitue à elle-même et que seuls les notaires ont compétence pour établir des actes authentiques (sic), ce qui n'a nullement été soutenu et paraît totalement dénué de toute pertinence.
En effet ainsi que l'objecte la CPAM DE LA GIRONDE, en sa qualité d'organisme social elle ne peut justifier des dépenses engagées que par les décomptes établis par ses propres services et certificats émanant de ses médecins conseils. Sauf à ce que les appelants ne démontrent que ces pièces aient été établies indûment ou soient de faux décomptes ou certificats, ce qu'ils ne font pas, ils sont de nature à justifier de la réalité des dépenses engagées et du lien de celles-ci avec les soins nécessités par Madame Y... suite aux différentes interventions du docteur X... déclarées fautives.
Suivant le décompte détaillé produit par la CPAM DE LA GIRONDE le 16 septembre 2011, il est établi que Madame Anne-Marie Y... a bénéficié de prestations en nature, frais d'hospitalisation, frais médicaux et pharmaceutiques, rééducation, appareillage, pour un montant total de 121. 435, 36 ¿, les dates des soins et prestations et leur nature sont indiqués précisément dans les pièces produites.
Il sera relevé que curieusement le docteur X... et la MIC LTD ne contestent pas la somme de 100, 28 ¿ restée à la charge de Madame Y... au titre des frais pharmaceutiques qui pourtant s'appuient sur les mêmes justificatifs.
La décision sera confirmée sur ces points, étant précisé que les appelants se sont déjà acquittés du paiement de ces sommes dans le cadre de l'exécution provisoire ordonnée par la décision déférée.

-2- Les Frais Divers

Le tribunal a accordé à Madame Y... la somme de 1. 250 ¿ en remboursement des frais engagés pour son assistance par un médecin au cours des opérations d'expertise, mais l'a déboutée faute de justificatifs de la demande d'indemnisation de ses frais de déplacement à hauteur de 800 ¿.
Mme Y... maintient cette demande en appel, le docteur X... et son assureur ne forment aucune offre de ce chef.
Elle motive cette demande par les frais engagés à raison des déplacements effectués pour se rendre aux divers rendez-vous médicaux et d'expertise, elle ne produit toutefois aucun justificatif ni même une attestation permettant à la cour d'apprécier sa demande faite sur une base forfaitaire. C'est à juste titre que le tribunal l'en a déboutée.

-3- Les Dépenses de Santé Futures (DSF)

Le tribunal a accordé au titre des Dépenses de Santé Futures la somme de 5. 641, 38 ¿, ce dont Madame Y... et la CPAM DE LA GIRONDE demandent la confirmation.
Le docteur X... et la compagnie MIC LTD s'opposent à cette demande estimant qu'à cet égard le certificat établi par le médecin conseil de la CPAM est insuffisant pour en justifier et reprennent la même argumentation que celle développée pour les Dépenses de Santé Actuelles.
Cependant l'expert a indiqué que la splénectomie exposait Madame Arme-Marie Y... à une vulnérabilité accrue à certaines infections notamment celles à pneumocoques préconisant pour l'avenir une vigilance particulière à ce niveau, et a retenu la nécessité de poursuite du traitement anticoagulant avec surveillance biologique très régulière.

Contrairement à ce que soutiennent les appelants, la CPAM DE LA GIRONDE a produit une note relative aux frais futurs prévoyant une vaccination anti-pneumococcique et une surveillance biologique, le montant des frais futurs s'élevant à la somme annuelle de 492, 31 ¿. Ces frais sont directement en lien avec les fautes retenues à l'encontre du docteur Patrice X... et représentent après capitalisation la somme de 5. 641, 38 ¿.
La décision sera confirmée sur ce point, étant précisé que les appelants se sont déjà acquittés du paiement de cette somme dans le cadre de l'exécution provisoire ordonnée par la décision déférée.

-4- L'Assistance par Tierce Personne (ATP)

Le tribunal a alloué la somme capitalisée de 56. 107, 74 ¿ en retenant la nécessité d'une assistance par tierce personne non spécialisée 3 h par semaine au taux horaire de 15 ¿.
Madame Anne-Marie Y... sollicite la somme capitalisée de 72. 982, 80 ¿ à ce titre en indiquant ne plus pouvoir se livrer aux tâches ménagères importantes ni porter de charges lourdes en s'appuyant sur les observations du Docteur C..., l'ayant assisté lors de l'expertise qui aurait évalué ses besoins à 5 heures par semaine sur la base de 15 ¿ de l'heure.
Le docteur Patrice X... et la compagnie MIC LTD concluent au débouté de cette demande, la nécessité d'une tierce personne n'ayant pas été retenue par l'expert et ajoutent que Madame Anne-Marie Y... était déjà en invalidité à la suite d'une fracture du pied antérieure aux interventions chirurgicales.
Contrairement à ce que soutiennent les appelants, le docteur B...retient dans son rapport que Madame Anne-Marie Y... a bénéficié et continue de bénéficier de l'aide de son mari ou de tiers pour certains actes de la vie quotidienne, et notamment l'entretien du domicile, le port de charges lourdes lors des courses
C'est pour le surplus par les justes motifs adoptés du tribunal auxquels il est expressément référé qu'il a été fait droit au principe de la demande de Madame Y....
Le tribunal a fait par ailleurs une juste appréciation de la quantification et du taux de rémunération de l'aide humaine indispensable en raison des séquelles imputables aux seules conséquences des interventions chirurgicales et de leurs complications ultérieures. La décision sera confirmée sur ce point.
-5- Le Déficit Fonctionnel Temporaire (DFT)
Madame Y... demande la confirmation des sommes allouées par le tribunal au titre du Déficit Fonctionnel Temporaire total (1. 760 ¿) et partiel (330 ¿ + 556 ¿) soit un montant global de 2. 646 ¿.
Le docteur Patrice X... et son assureur offrent de verser la somme de 1. 380 ¿ au titre du déficit fonctionnel total et sollicitent la confirmation de la décision sur l'indemnisation allouée au titre des deux périodes de déficit fonctionnel partiel respectivement 330 ¿ et 556 ¿ soit au total la somme de 2. 266 ¿.
C'est par de justes motifs auxquels il est expressément référé que la décision entreprise a évalué l'indemnisation du DÉFICIT FONCTIONNEL TEMPORAIRE à la somme totale de 2. 646 ¿, qui correspond à la jurisprudence habituelle de la cour.

-6- Les Souffrances endurées (S. E.)

Les Souffrances endurées ont été évaluées par l'expert à 5, 5/ 7, prenant en compte les 5 interventions chirurgicales, leurs complications et suites, ainsi que les souffrances physiques et psychologiques en résultant. Le tribunal a fait droit à la demande de Madame Y... d'indemnisation de cet important préjudice à la somme de 25. 000 ¿, ce dont elle demande la confirmation.
Le docteur Patrice X... et la compagnie MIC LTD offrent pour l'indemnisation de ce préjudice la somme de 16. 000 ¿, indiquant que la somme allouée par la décision déférée est largement supérieure à la jurisprudence habituelle de la cour.
Cependant c'est après avoir analysé tout le parcours médical et chirurgical de Madame Y..., en se fondant sur les deux rapports d'expertise du docteur B...que le tribunal a fait droit à sa demande. Cette appréciation contrairement à ce qu'affirment les appelants est parfaitement conforme à la jurisprudence de la cour. La décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a accordé à Madame Y... en indemnisation de ce préjudice somme de 25. 000 ¿.

-7- Le Préjudice esthétique permanent (PEP)

L'expert a évalué le Préjudice Esthétique de Madame Y... à 3/ 7, le tribunal a alloué à cette dernière la somme de 6. 000 ¿ de ce chef, ce dont elle demande la confirmation.
Le docteur X... et la compagnie MIC LTD estiment cette prétention excessive au regard de la jurisprudence habituelle et offrent la somme de 3. 000 ¿ à titre d'indemnisation.
C'est au vu des constatations de l'expert sur le nombre et la taille des cicatrices dont Madame Y... est porteuse que le tribunal a fait une juste appréciation de l'indemnité allouée, laquelle est conforme à la jurisprudence habituelle de la cour.
La décision sera confirmée sur ce point.

-8- Le Préjudice d'Agrément

L'expert a relevé l'existence d'un préjudice d'agrément qu'il a qualifié de " discret ", le tribunal a accordé à ce titre la somme de 1. 000 ¿.
Madame Anne-Marie Y... demande la somme de 8. 000 ¿, faisant valoir qu'avant les interventions chirurgicales elle pratiquait assidûment le jardinage, activité ne peut plus pratiquer qu'avec difficulté en raison de la fatigue éprouvée et évoque en outre son incapacité à s'occuper de ses petits-enfants pour le même motif.
Le docteur Patrice X... et son assureur concluent au rejet de la demande en rappelant qu'il appartient à la victime de prouver la pratique antérieure de l'activité ce qu'elle ne démontre pas.
Il est cependant établi par les attestations produites par Madame Anne-Marie Y... qu'elle pratiquait effectivement le jardinage de façon régulière, ce qu'elle ne peut plus faire dans les mêmes conditions. Concernant les répercussions sur sa vie familiale, elles relèvent des troubles dans les conditions d'existence déjà été indemnisées au titre du Déficit Fonctionnel Permanent.

La décision déférée qui a fait une juste appréciation de ce préjudice sera confirmée.

-9- Sur la demande d'indemnisation au titre de la perte de rémunération de Monsieur Yannick Y...

Madame Anne-Marie Y... sollicite la somme de 1. 002, 57 ¿ au titre de la perte de rémunération subie par son mari Monsieur Yannick Y..., à la suite d'un arrêt maladie réactionnel à l'état de santé de son épouse.
Le docteur Patrice X... et son assureur concluent au rejet de la demande.
Madame Anne-Marie Y... n'a pas qualité pour solliciter réparation d'un préjudice personnel subi par Monsieur Yannick Y.... En outre celui-ci n'est pas partie à la procédure.
En conséquence cette demande sera déclarée irrecevable, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les justificatifs produits à son appui.
Il sera fait droit à la demande de La CPAM DE LA GIRONDE concernant la condamnation du docteur X... et de son assureur MIC LTD à lui payer l'indemnité forfaitaire de gestion de 1. 015 ¿, prévue par les dispositions des articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale. La décision déférée sera également confirmée sur ce point.
Il sera fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit, de Madame Y..., du PAVILLON DE LA MUTUALITÉ et de la CPAM DE LA GIRONDE, les indemnités allouées à ce titre étant mises à la charge du docteur X... et de la compagnie MIC LTD.
Ces derniers qui succombent totalement en leurs appel seront en outre condamnés à en supporter les dépens.

PAR CES MOTIFS la cour

-Déclare irrecevable pour défaut de qualité à agir la demande de Madame Y... tendant à obtenir la réparation du préjudice subi par son mari Monsieur Yannick Y... au titre de sa perte de rémunération,
- Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
- Condamne le docteur X... et de la compagnie MIC LTD à payer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile : * la somme de 3. 000 ¿ à Madame Anne-Marie Y..., * la somme de 300 ¿ à la CPAM DE LA GIRONDE, * la somme de 2. 000 ¿ au PAVILLON DE LA MUTUALITÉ,

- Condamne le docteur X... et de la compagnie MIC LTD à supporter les dépens d'appel qui pourront être recouvrés en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Henriette Filhouse, Présidente, et par Sylvie Hayet, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président

S. Hayet H. Filhouse


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : CinquiÈme chambre civile
Numéro d'arrêt : 13/07104
Date de la décision : 01/04/2015
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2015-04-01;13.07104 ?
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