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11/02/2015 | FRANCE | N°13/03121

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 11 février 2015, 13/03121


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 11 FÉVRIER 2015



(Rédacteur : Madame Isabelle Lauqué, Conseiller)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 13/03121











SAS Sape Polytek



c/



Monsieur [I] [G]















Nature de la décision : AU FOND











Notifié par LRAR le :



LRA

R non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 avril 20...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 11 FÉVRIER 2015

(Rédacteur : Madame Isabelle Lauqué, Conseiller)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 13/03121

SAS Sape Polytek

c/

Monsieur [I] [G]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 avril 2013 (RG n° F 12/01489) par le Conseil de Prud'hommes - formation paritaire - de Bordeaux, section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 17 mai 2013,

APPELANTE :

SAS Sape Polytek, siret n° 318 250 842 00032, agissant en la personne

de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 2],

Représentée par Maître Alain Guérin de la SELARL Alain Guérin & Jérôme Delas, avocats au barreau de Bordeaux,

INTIMÉ :

Monsieur [I] [G], né le [Date naissance 1] 1970, de nationalité française, demeurant [Adresse 1],

Représenté par Maître Florian Bécam, avocat au barreau de Bordeaux,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 décembre 2014 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Maud Vignau, Président,

Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller,

Madame Isabelle Lauqué, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Gwenaël Tridon de Rey.

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

M. [I] [G] a été embauché par la société Sape Polytek à compter du 2 janvier 2008 dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps complet en qualité de directeur technique, statut cadre, coefficient 900, niveau 57 de la convention collective nationale de transformation des matières plastiques.

Par avenant, la SAS Sape Polytek s'est engagée à reprendre ses quinze années d'ancienneté acquises chez son ancien employeur.

Lors de la rupture du contrat de travail, sa rémunération moyenne brute mensuelle s'élevait à 2.975 euros.

Par courrier du 5 octobre 2009, la SAS Sape Polytek a convoqué M. [G] à un entretien préalable en vue de son licenciement qui s'est déroulé le 13 octobre 2009 et lui a notifié sa mise à pied conservatoire.

Par courrier du 5 octobre 2009, il a été licencié pour faute grave, la SAS Sape Polytek lui reprochant 'la mise sur le marché de matériels défaillants et son comportement avec la messagerie'.

Le 11 janvier 2010, M. [G] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux pour contester son licenciement et formuler diverses demandes indemnitaires et en paiement d'heures supplémentaires.

Le 24 avril 2013, le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux a jugé que le licenciement de M. [G] n'était pas fondé sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse et qu'il était irrégulier en la forme.

Le Conseil a condamné la SAS Sape Polytek à lui payer les sommes suivantes :

- 8.649,00 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 864,90 € pour les congés payés y afférents,

- 13.830,00 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 1.098,44 € à titre de rappel de salaire relatif à la mise à pied conservatoire,

- 109,84 € au titre des congés payés y afférents,

- 100,00 € à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure,

- 600,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En revanche, le Conseil a rejeté ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement abusif et en paiement d'heures supplémentaires ainsi que les demandes reconventionnelles de la SAS Sape Polytek.

Cette dernière a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions régulièrement déposées et développées oralement à l'audience du 8 décembre 2014 et auxquelles la Cour se réfère expressément, elle conclut à la réformation du jugement attaqué.

Elle demande à la Cour de juger que le licenciement de M. [G] est fondé sur une faute grave et de le débouter de toutes ses demandes.

Elle demande à la Cour de ramener à 1 € la condamnation au titre de l'irrégularité de la procédure et, à titre reconventionnel, elle sollicite la condamnation de M. [G] au paiement d'une somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions régulièrement déposées et développées oralement à l'audience du 8 décembre 2014 et auxquelles la Cour se réfère expressément, M. [G] conclut à la confirmation partielle du jugement attaqué et fait valoir que son licenciement est irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Il demande à la Cour de condamner la SAS Sape Polytek à lui payer les sommes suivantes :

- 1.098,44 € à titre de rappel de salaire relatif à la mise à pied conservatoire,

- 109,84 € au titre des congés payés y afférents,

- 8.649,00 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 864,90 € pour les congés payés y afférents,

- 13.830,00 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 69.192,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause

réelle et sérieuse,

- 2.883,00 € à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,

- 8.843,98 € au titre des heures supplémentaires impayées effectuées entre juin

2008 à janvier 2009,

- 884,39 € au titre des congés payés y afférents,

- 2.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

DISCUSSION :

- Sur le licenciement :

La lettre de licenciement pour faute grave dont les motifs énoncés fixent les limites du litige est motivée comme suit :

'Par courrier recommandé du 5 octobre 2009, vous avez été convoqué à un entretien préalable à votre licenciement à la date du 13 octobre 2009 avec mise à pied conser-vatoire jusqu'au prononcé de la sanction.

Au cours de votre entretien préalable en date du 13 octobre 2009, en présence de Monsieur [Y] [N], conseiller inscrit sur la liste établie par le préfet, je vous ai demandé de vous expliquer sur les faits qui vous sont reprochés relatifs à la mise sur le marché sous votre responsabilité de matériels défaillants étudiés par vos soins. Ainsi j'ai recueilli vos explications :

- ce ne sont pas de vrais problèmes,

- aux vues des prototypes, ç'a aurai dû marcher,

- les plans n'ont pas été respectés,

- les tests n'ont pas été faits malgré l'outillage réalisé.

Je vous ai demandé si vous aviez fait des rapports de contrôle :

- vous m'avez répondu non et que votre tort est de ne pas avoir fait refaire les pièces.

- vous m'avez demandé de vérifier auprès de vos collègues, des mesures de cotes.

- vous m'avez dis que certain de vos collègues opérateurs avaient signalé des problèmes de conception, mais le retour ne vous est pas parvenu.

Je vous ai exposé les différents préjudices techniques et financiers subis dû à vos manquements: retour des ppièces,erreurs sur les prix de revients, fabrications à nouveau, avoir clients, indemnisations de main d'oeuvre pour remplacements pièces, ventes annulés etc...

Je vous ai demandé si vous aviez conscience de cette ssituation,vous m'avez répondu :

- je me sens à la hauteur du poste, ma mission est remplie.

Je vous ai interrogé sur votre comportement avec votre messagerie :

- concernant l'utilisation de mon matériel personnel, (MSN, Webcam) je l'ai repris, et son utilisation, était limitée en dehors des heures de travail, et après 17h ou lors des poses.

Après avoir recueilli les témoignages et explications de vos collègues et par la présente, je vous notifie votre licenciement pour faute grave.

'..'

En l'espèce, il est donc reproché à M. [G] d'avoir mis sur le marché du matériel défaillant ainsi que son comportement avec la messagerie.

Ce second grief est très général et n'impute à M. [G] aucun fait précis, il ne répond donc pas aux exigences de précision qui s'attachent à la motivation de la lettre de licenciement en ce qu'il ne permet pas au juge d'en apprécier le caractère réel et sérieux.

En revanche, contrairement au Conseil, la Cour considère que le premier grief est, lui, suffisamment précis.

L'exécution défectueuse de la prestation de travail n'est susceptible d'être sanctionnée sur le terrain disciplinaire que si elle est due à l'abstention volontaire du salarié ou à sa mauvaise volonté délibérée.

L'employeur ne peut donc valablement licencier son salarié pour motif disciplinaire si les griefs invoqués ne relèvent que de la mauvaise qualité de son travail.

En l'espèce, la SAS Sape Polytek reproche à M. [G] d'avoir mis sur le marché du matériel défaillant et expose que ce dernier n'a pas rempli les objectifs fixés, qu'il s'est révélé incapable de mener à bien le projet de pompes à Rotor, qu'il n'a pas réalisé les coudes décanteurs dans les délais et que des fuites sont apparues entraînant l'annulation des livraisons.

Les termes employés de défaillances et de carences démontrent que le grief invoqué relève de la mauvaise exécution du contrat de travail et la Cour observe qu'il n'est nullement argumenté sur le terrain de l'inexécution fautive qui suppose un comportement délibéré du salarié.

Ainsi, la Cour constate que la SAS Sape Polytek reproche à M.[G] d'avoir failli dans l'exécution des missions qui lui avaient été confiées.

Dès lors, estimant que le grief tiré du comportement avec la messagerie est imprécis et équivaut à une absence de motif et que d'autre part la SAS Sape Sopytek qui a prononcé un licenciement pour faute grave ne fait état à l'appui de cette sanction que d'une exécution défectueuse de la prestation de travail de son salarié, indépen-damment de tout comportement fautif, le licenciement pour faute grave de M. [G] doit être jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Aussi, la SAS Sape Polytek sera condamnée à payer à M. [G] les sommes qui lui sont dues au titre de la rupture du contrat de travail soit :

- 1.098,44 € à titre de rappel de salaire relatif à la mise à pied conservatoire,

- 109,84 € au titre des congés payés y afférents,

- 8.649,00 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 864,90 € pour les congés payés y afférents,

- 13.830,00 € à titre d'indemnité de licenciement.

La SAS Sape Sopytek avait contractuellement repris l'ancienneté de M. [G] chez son ancien employeur.

Il disposait, donc, d'une ancienneté de 15 ans et 10 mois lors de la rupture de la relation de travail.

M. [G] ne justifie pas de sa situation actuelle.

Dans ces conditions, le préjudice de M. [G] qui se limite à la perte de son emploi doit être évalué à la somme de 25.000 € de dommages et intérêts.

- Sur l'irrégularité de la procédure de licenciement :

En application de l'article L.1232-2 du code du travail, l'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou de la remise en main propre de la lettre de convocation.

Si le salarié à plus de 2 ans d'ancienneté ou si l'entreprise à plus de 11 salariés, l'indemnité pour irrégularité de la procédure ne se cumule pas avec les dommages et intérêts pour licenciement abusif.

En l'espèce, le délai de 5 jours ouvrables prévus par l'article L.1232-2 du code du travail n'a pas été respecté entre la réception le 7 octobre 2009 de la convocation à l'entretien par M. [G] et l'entretien fixé au 13 octobre 2009.

L'irrégularité de la procédure n'est pas contestée mais la Cour ayant indemnisé M. [G] pour licenciement abusif, ce dernier ne peut bénéficier du cumul d'indemnités pour irrégularité de la procédure et pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En conséquence, réformant la décision attaquée sur ce point, sa demande d'indemnité sera rejetée.

- Sur les heures supplémentaires :

Il résulte de l'article L.3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fourmis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir, en cas de besoin, ordonné toutes les mesures d'instructions qu'il estime utile.

Ainsi, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par le salarié, qui doivent étayer suffisamment sa demande, et de ceux fournis par l'employeur qui doivent être de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

La production d'un décompte des jours travaillés établi unilatéralement par le salarié et qui n'est corroboré par aucun autre élément ne suffit pas à étayer suffisam-ment la réalité d'heures supplémentaires dont il est réclamé le paiement.

En l'espèce, M. [G] ne produit à la Cour qu'un tableau excell récapitulatif des heures supplémentaires dont il réclame le paiement.

Ce document n'est corroboré par aucun autre élément et la Cour estime qu'il ne suffit pas à étayer sa demande en paiement.

En conséquence, la décision du Conseil de Prud'hommes sera confirmée sur ce point.

- Sur les autres demandes :

La SAS Sape Polytek sera condamnée à payer à M. [G] la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

' Infirme le jugement attaqué en ce qu'il a jugé que le licenciement de M. [G] était fondé sur une cause réelle et sérieuse et l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif et en ce qu'il a fait droit à sa demande de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure.

Y substituant :

' Dit que le licenciement de M. [G] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

' Condamne la SAS Sape Sopytek à payer à M. [G] la somme de 25.000 € (vingt cinq mille euros) à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

' Déboute M. [G] de sa demande de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure.

' Confirme le jugement attaqué en toutes ses autres dispositions.

Y ajoutant :

' Condamne la SAS Sape Polytek à payer à M. [G] la somme de 1.000 € (mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

' Condamne la SAS Sape Polytek aux dépens.

Signé par Madame Maud Vignau, Président, et par Madame Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Anne-Marie Lacour-Rivière Maud Vignau


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 13/03121
Date de la décision : 11/02/2015

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°13/03121 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-02-11;13.03121 ?
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