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04/02/2015 | FRANCE | N°13/05958

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 04 février 2015, 13/05958


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 04 FÉVRIER 2015



(Rédacteur : Monsieur Jean-François Sabard, Président)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 13/05958











Société Laurence Esthétique



c/



Madame [L] [I]

















Nature de la décision : AU FOND














r>Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :





Décision déférée à la Cour : jugeme...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 04 FÉVRIER 2015

(Rédacteur : Monsieur Jean-François Sabard, Président)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 13/05958

Société Laurence Esthétique

c/

Madame [L] [I]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 23 septembre 2013 (RG n° F 12/00246) par le Conseil de Prud'hommes - formation paritaire - de Périgueux, section Commerce, suivant déclaration d'appel du 10 octobre 2013,

APPELANTE :

Société Laurence Esthétique, siret n° 477 755 128 00014, agissant en la

personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 1],

Représentée par Maître Claudia Tierney-Hancock de la SELARL Vesunna Avocats, avocat au barreau de Périgueux,

INTIMÉE :

Madame [L] [I], née le [Date naissance 1] 1986 à [Localité 1], de nationalité française, demeurant [Adresse 2],

Représentée par Monsieur [K] [H], délégué syndical de l'Union

Locale CGT du Libournais, muni d'un pouvoir régulier,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure

civile, l'affaire a été débattue le 02 décembre 2014 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-François Sabard, Président, chargé d'instruire l'affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-François Sabard, Président,

Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller,

Monsieur Claude Berthommé, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Gwenaël Tridon de Rey.

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Madame [L] [I] a été engagée par la société Laurence Esthétique par contrat de professionnalisation à durée déterminée de deux ans à compter du 15 octobre 2011 pour une durée hebdomadaire de travail de 35 heures.

Le 13 juin 2012, la salariée est licenciée pour faute grave.

Contestant son licenciement pour faute grave, Madame [I] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Périgueux le 17 octobre 2012 de diverses demandes découlant de la rupture de son contrat de professionnalisation par l'employeur.

Par jugement du Conseil de Prud'hommes du 23 septembre 2013 auquel il convient de se référer pour l'exposé des faits et de la procédure, il a été considéré que la rupture du contrat de professionnalisation ne repose pas sur une faute grave et a condamné l'employeur à lui payer les sommes suivantes :

- 22.810,72 € à titre de dommages-intérêts pour rupture du contrat de profession-

nalisation.

- 150,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [L] [I] a été déboutée de ses autres demandes et la société Laurence Esthétique a été condamnée aux dépens de l'instance.

La société Laurence Esthétique a régulièrement interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe de la Cour en date du 10 octobre 2013.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

L'appelante conclut à la réformation du jugement entrepris et statuant à nouveau, demande à la Cour de dire que la salariée a commis des fautes justifiant son licen-ciement pour faute grave et de rejeter l'ensemble de ses prétentions en la condamnant au paiement d'une indemnité de procédure de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens d'instance.

Au soutien de son appel, la société Laurence Esthétique fait valoir que la faute grave de la salariée justifie son licenciement et la rupture du contrat de profes-sionnalisation dès lors que celle-ci avait déjà au préalable reçu un avertissement lui reprochant son comportement préjudiciable au bon fonctionnement de l'entreprise ainsi qu'il résulte des nombreuses attestations régulières versées aux débats émanant de clientes insatisfaites des prestations de la salariée.

L'appelante ajoute que la salariée ne peut se prévaloir d'aucune perte de chance dans la mesure où elle n'a pu achever sa formation dans le cadre de son contrat de professionnalisation et alors qu'elle ne verse aucune pièce sur sa situation profes-sionnelle actuelle.

Madame [L] [I] conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'employeur à lui payer les sommes de 22.810,72 € à titre de dommages-intérêts pour rupture du contrat de professionnalisation et 150 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de réformer le jugement pour le surplus en condamnant la société Laurence Esthétique au paiement de la somme de 8.000 € à titre de dommages-intérêts pour perte de chance outre 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'intimée fait valoir que la faute grave pour justifier la rupture du contrat de professionnalisation n'est pas du tout caractérisée et que la sanction de la faute qui lui est reprochée doit être atténuée du fait de son manque d'expérience se trouvant en formation durant son contrat et qu'elle est fondée à demander des dommages intérêts pour perte de chance alors qu'elle était une bonne élève bien notée et pouvait légitimement espérer obtenir son diplôme du brevet professionnel d'esthéticienne.

Elle indique par ailleurs que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat en ne prenant pas les dispositions nécessaires pour soumettre la salariée à la visite médicale d'embauche ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai ce qui lui a causé nécessairement un préjudice dont elle est fondée à demander réparation.

Il convient pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties de se référer expressément à leurs conclusions écrites développées oralement à l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la rupture anticipée du contrat de professionnalisation :

La lettre de licenciement pour faute grave du 13 juin 2012 reproche à Madame [I] d'avoir le 29 mai 2012 reçu une cliente en l'absence de son employeur et lui avoir fait subir un soin comportant un rayonnement de rayons ultraviolets qu'il était seul à pouvoir lui dispenser alors qu'elle ne disposait d'aucune habilitation pour effectuer cette prestation et n'a pas pris le soin de faire remplir à la cliente une fiche pour s'enquérir notamment des traitements qu'elle suivait et qui auraient pu interdire une telle exposition ce qui était le cas en l'espèce puisque cette personne suivait un traitement antibiotique incompatible avec une exposition au rayonnement UV.

Cette lettre de licenciement reprend, par ailleurs, les griefs formulés précédemment et qui avaient fait l'objet d'un avertissement le 2 avril 2012 pour une mauvaise exécution des différentes tâches qui lui avaient été confiées notamment l'épilation et la pose d'ongles auprès des clients qui se sont plaints de la mauvaise qualité des prestations effectuées par Madame [I].

Au terme d'une jurisprudence établie, la faute grave dont la preuve doit être rapportée par l'employeur, est définie comme celle résultant de tout fait ou ensemble de faits, non déjà sanctionné, imputable au salarié constituant une violation des obligations découlant de son contrat de travail ou de sa fonction d'une importance telle qu'elle rend impossible son maintien dans la société concernée et ce même pendant la durée du préavis.

La salariée qui est titulaire d'un CAP d'esthéticienne et qui avait suivi une formation de plusieurs mois ne pouvait ignorer que pour dispenser des soins comportant des rayonnements UV il faut une habilitation et faire remplir au préalable à la cliente une fiche pour vérifier qu'aucun traitement médical n'est incompatible avec un tel soin.

Il ne s'agit pas là d'une simple erreur pouvant être admise de la part d'une personne en formation en vue d'obtenir un brevet professionnel d'esthéticienne mais d'une faute grave résultant de la méconnaissance de dispositions protectrices de la santé des clients eu égard au danger que comporte des rayonnements UV sur la santé de sorte que la rupture anticipée du contrat de professionnalisation prévu par les articles

L.6325-1 et suivants du code du travail dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée est justifiée par la faute grave de la salariée qui avait déjà dans le passé montré une conscience professionnelle insuffisante au regard des exigences de la qualification d'assistante esthéticienne.

Il convient, donc, de réformer le jugement entrepris et de rejeter les prétentions de Madame [I] au titre de la rupture du contrat de professionnalisation.

Sur l'indemnisation pour perte de chance :

La rupture anticipée du contrat de professionnalisation imputable à la faute grave de Madame [I] la prive du droit de formuler une demande aux fins d'indem-nisation d'une perte de chance d'obtenir le brevet professionnel d'esthéticienne si tant est qu'elle ait pu subir un préjudice quelconque dès lors qu'elle ne fournit aucune pièce sur ce point.

S'agissant de l'obligation de l'employeur de prévoir une visite médicale d'embauche, la Cour relève qu'aucune obligation ne figure dans le contrat de profes-sionnalisation de deux ans de sorte que c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté ce chef de demande.

Sur les autres demandes :

Le jugement entrepris sera réformé sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dès lors que l'équité ne commande pas d'y faire droit tant en première instance qu'en cause d'appel et de débouter la société Laurence Esthétique de sa demande sur le même chef.

Les dépens de première instance et d'appel seront mis à la charge de Madame [L] [I].

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Déclare l'appel régulier, recevable et fondé.

Réforme le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la rupture du contrat de profes-sionnalisation de Madame [L] [I] ne repose pas sur une faute grave et a condamné la société Laurence Esthétique au paiement de dommages-intérêts et d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau :

Dit que la faute grave commise par Madame [L] [I] justifie la rupture anticipée du contrat de professionnalisation.

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les autres demandes de Madame [L] [I].

Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en cause d'appel.

Condamne Madame [L] [I] aux dépens de première instance et d'appel.

Signé par Monsieur Jean-François Sabard, Président, et par Madame Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Anne-Marie Lacour-Rivière Jean-François Sabard


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 13/05958
Date de la décision : 04/02/2015

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°13/05958 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-02-04;13.05958 ?
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