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19/11/2014 | FRANCE | N°13/01045

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 19 novembre 2014, 13/01045


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 19 NOVEMBRE 2014



(Rédacteur : Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 13/01045











SA Serma Technologies



c/



Monsieur [P] [J]

















Nature de la décision : AU FOND















Notifi

é par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :



Décision déférée à la Cour : jugement r...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 19 NOVEMBRE 2014

(Rédacteur : Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 13/01045

SA Serma Technologies

c/

Monsieur [P] [J]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 janvier 2013 (RG n° F 11/03485) par le Conseil de Prud'hommes - formation paritaire - de Bordeaux, section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 13 février 2013,

APPELANTE :

SA Serma Technologies, siret n° 380 712 828 00058, agissant en la

personne de son Président Monsieur [W] [R] domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 1],

Représentée par Maître Laurent Guyomarch, avocat au barreau de Toulouse,

INTIMÉ :

Monsieur [P] [J], né le [Date naissance 1] 1972, de nationalité française, demeurant [Adresse 2],

Représenté par Maître Renaud Frechin, avocat au barreau de Toulouse,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 septembre 2014 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Maud Vignau, Président,

Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller,

Madame Isabelle Lauqué, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière.

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. [P] [J] a été embauché par la SAS Serma Technologies par contrat de travail à durée indéterminée en date du 19 juin 2006, à effet immédiat, en qualité d'ingénieur commercial grand comptes pour un salaire brut mensuel de 4.170 € outre une rémunération variable.

Par avenant en date du 12 juillet 2007 la mise à disposition d'un véhicule Citroën était consentie à M. [J] et son salaire mensuel brut était porté à la somme de 4.232,60 €.

Par lettre recommandée datée du 5 septembre 2011 M. [J] était convoqué par la société Serma Technologies à un entretien préalable à son éventuel licenciement le 15 septembre 2011 avec mise à pied conservatoire. Le 20 septembre 2011 la SAS Serma Technologies notifiait à M. [J] son licenciement pour faute grave.

Le 31 octobre 2011, M. [J] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux pour contester son licenciement obtenir le paiement des indemnités de rupture et de dommages intérêts.

Par décision en date du 17 janvier 2013, le Conseil de Prud'hommes a dit le licenciement de M. [J] dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné la société Serma Technologies à payer à M. [J] les sommes suivantes :

- 17.565,96 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 1.756,59 € au titre des congés payés afférents,

- 5.855,32 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 2.927,66 € à titre de rappel de salaires,

- 35.200,00 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle

et sérieuse,

- 650,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

et a condamné la SA à Serma Technologies à remettre à M. [J] un certificat de travail précisant les dates d'embauche et de fin de contrat ainsi qu'une attestation pôle emploi conforme.

Le 18 février 2013, la SAS Serma Technologies a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 12 septembre 2014, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la SAS Serma Technologies conclut à la réformation du jugement entrepris en ce qu'il a dit le licenciement de M. [J] dépourvu de cause réelle et sérieuse et l'a condamnée à divers paiements en conséquence.

Elle demande à la Cour de débouter M. [J] de l'intégralité de ses demandes et de le condamner à lui payer une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Oralement elle a conclu à la recevabilité de l'ensemble de ses pièces.

Par conclusions déposées le 17 septembre 2014 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, M. [J] demande à la Cour d'écarter des débats les pièces numérotées 19 à 24 de la société Serma. Au fond il sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a dit son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et demande la condamnation de la société à lui payer les sommes suivantes :

- 70.263,84 € à titre de dommages-intérêts nets de CSG et de CRDS,

- 17.565,96 € à titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 1.756,59 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

- 5.855,32 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 2.927,66 € à titre de rappel de salaires pendant la mise à pied conservatoire,

- 10.000,00 € à titre de dommages-intérêts au regard des conditions vexatoires du

licenciement,

- 6.819,09 € à titre de dommages-intérêts pour violation des termes de la lettre

d'embauche,

- 3.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

il demande, en outre, que la condamnation de la société à lui remettre un certificat de travail et une attestation ASSEDIC conforme soit assortie d'une astreinte de 40 € par jour de retard.

MOTIVATION

* Sur la demande de retrait des pièces 19 à 24 de la société Serma Technologies :

M. [J] ne peut invoquer l'application des dispositions du quatrième

alinéa de l'article 446-2 pour fonder cette demande. En effet, le calendrier de procédure du 10 février 2014 dont il se prévaut n'a pas été adopté par le conseiller en charge de la mise en état des procédures au cours d'une audience avec l'accord des parties ou de leurs conseils, il s'agit simplement d'un calendrier proposé aux parties.

En revanche aux termes des dispositions de l'article 135 du code de procédure civile il incombe aux parties de communiquer leurs pièces en temps utile pour permettre à la partie adverse de répliquer dans le respect du principe de la contradiction.

En l'espèce les pièces 19 à 21 ont été transmises par la société Serma à la partie adverse le 10 septembre 2014 les pièces 22 et 23 le 11 septembre et la pièce 24 le 16 septembre 2014.

S'agissant de cette dernière pièce il y a lieu d'observer qu'elle est rédigée en langue anglaise sans traduction, ce qui n'a pas permis à M. [J] dans le temps imparti d'en solliciter la traduction pour pouvoir utilement la critiquer. La pièce 24 sera donc écartée des débats.

En revanche, les pièces 19 à 23 ont été communiquées 10 et 11 jours avant l'audience du 22 septembre 2014, M. [J] les critique dans ses dernières conclusions déposées le 18 septembre 2014. Il y a donc lieu de considérer qu'elles ont été communiquées en temps utile et de les retenir étant au demeurant observé que M. [J] n'a pas considéré nécessaire de solliciter le renvoi de l'affaire.

* Sur la rupture du contrat de travail :

La charge de la preuve de la gravité de la faute privative des indemnités de préavis et de licenciement incombe à l'employeur étant rappelé que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur.

Il appartient au juge de qualifier le degré de gravité de la faute. Si la faute retenue n'est pas de nature à rendre impossible le maintien du salarié pendant la durée du préavis, il appartient au juge de dire si le licenciement disciplinaire repose néan-moins sur une cause réelle et sérieuse.

En l'espèce, la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, après avoir rappelé les missions de M. [J] en tant que directeur du Centre d'évaluation de la Sécurité des Technologies de l'Information (CESTI) notamment sa mission managériale à l'égard de salariés hautement spécialisés, est motivée comme suit :

'Vous avez décidé au cours des dernières semaines de faire abstraction de vos obligations telles que rappelé précédemment en ne tenant aucun compte des impératifs inhérents à vos fonctions. Et ce, alors même qu'il vous est demandé d'assurer un excellent relationnel, il est apparu que l'attitude d'arrogance technique systématiquement adoptée tant en interne que vis-à-vis des clients nuisent à la crédibilité et à l'image la société. Sans les efforts de certains de vos collaborateurs du CESTI, pour minimiser la portée de vos propos et assurer un mode de communication normalisée avec nos clients, ces derniers seraient susceptibles de remettre en cause la bonne poursuite des relations commerciales de la société avec sa clientèle.

Corroborant l'ampleur de votre manque total de communication lié à une attitude ostensiblement arrogante et exempte de dialogue, vous avez également adopté ce mode de comportement en interne ce qui a eu pour effet d'entraver une collaboration normale avec vos interlocuteurs. Or, compte tenu de la dimension stratégique de votre poste, une collaboration efficiente est attendue de votre part avec votre hiérarchie et les services internes avec lesquels vous entrez en contact. Il est apparu lors de différentes réunions opérationnelles, dont le COPIL ayant lieu chaque lundi, que vous avez manifesté une opposition résolue à cette communication entre la direction et votre BU, sous couvert de confidentialité (activités, clients). Cela se traduisait, une fois encore, par une attitude arrogante et un refus de collaborer avec les autres BU concernant les dossiers en cours,

.../...

malgré les consignes claires données par la direction. Pour exemple, M. [W] [R], président du groupe Serma Technologies, a souhaité vous voir collaborer avec l'équipe commerciale. Cependant vous avez délibérément fait abstraction de cette demande réitérée. À telle enseigne qu'il a été nécessaire de faire intervenir en sus notre directeur commercial, M. [N] [E], pour que vous preniez en compte cette demande. Pour exemple encore, le service RH n'a réussi à obtenir de votre part une définition de poste sur le recrutement d'un futur collaborateur, qu'au bout de plusieurs semaines et moyennant des demandes répétées. Ce processus totalement anormal révélant une absence de prise en compte des demandes qui vous sont présentées, une rétention d'information volontaire totalement contraire aux attentes liées à vos fonctions.

Au sein de votre propre service, vous avez instauré un climat de travail extrêmement préjudiciable à l'implication de vos collaborateurs qui sont confrontés à des demandes de justification quotidienne confinant au harcèlement sur des points secondaires (pointage, rentabilité affaire, temps de récupération après un déplacement à l'étranger...), un manque de valorisation du travail réalisé totalement injustifié et ce alors même que nombre des salariés placés sous votre responsabilité sont dotés de compétences et d'une expertise de haut niveau, à un manque de dialogue totalement anormal compte tenu de la dimension managériale de votre poste. Les conséquences extrêmement préjudiciables de ces méthodes de gestion se sont manifestées avec acuité dans la mesure où votre attitude de dénigrement, également devenue systématique à l'égard de votre propre équipe, a entraîné deux présentations de démission de collaborateurs de grande qualité, les 21 juillet et le 8 août dernier. Ces salariés ne pouvant plus supporter vos remises en cause quant à leurs compétences techniques et vos propos vexatoires. Le 18 juillet dernier, lorsque le service RH a reçu les résultats des entretiens de progrès, il a attiré votre attention sur le mode d'évaluation totalement inapproprié de vos collaborateurs. En effet ceux-ci étaient essentiellement jugés sur des écarts de gestion secondaires en faisant abstraction de la plus-value technique qu'ils apportent aux clients et au développement du CESTI. Vous avez été reçu ce même 18 juillet, par le service RH, qui vous a mis en garde sur l'objet et la portée des entretiens de progrès qui par essence conduisent à s'interroger sur les compétences professionnelles de nos collaborateurs. Nous vous avons également expliqué avec force détails les répercussions négatives en termes de management d'un processus d'évaluation faisant abstraction de la valorisation des compétences pourtant réelles de nombre de vos collaborateurs. À cette occasion, vos explications ne nous ont pas convaincu et vous avez manifestement décidé dans les faits de maintenir votre ligne de conduite et ce y compris en ayant recours à l'égard de vos collaborateurs à des pratiques injustes et vexatoires. Illustrant avec acuité les répercussions négatives de votre management, deux salariés placés sous votre responsabilité ont présenté leur démission en faisant valoir une démotivation extrême en relation directe avec le mode de management pratiqué par vos soins. Sachant que ces deux salariés expérimentés sont considérés dans l'entreprise comme des professionnels reconnus en interne et en externe. Devant l'urgence de la situation, des entretiens approfondis ont été organisés avec ces deux personnes bien sûr, mais aussi avec d'autres collaborateurs. L'objectif de ces entretiens était de bien analyser les origines de cette situation critique au sein du CESTI. Sachant que les informations portées à notre connaissance révèlent un management d'ensemble altérant gravement l'implication de nos collaborateurs et plus généralement la préservation de leur état de santé psychologique. De telle sorte que nous sommes conduits à prendre des mesures urgentes de nature à restaurer un mode de fonctionnement normal au sein de votre service. Dans ces conditions, et compte tenu

.../...

de l'importance des responsabilités attachées à vos fonctions, des agissements volontaires qui vous sont imputables, et des conséquences extrêmement dommageables desdits agissements au sein de notre entreprise, il ne nous paraît plus possible de poursuivre notre collaboration'.

Les deux premiers griefs invoqués par la lettre de licenciement, une communication arrogante et inadaptée avec les clients et un refus de collaboration avec les autres services de la société ne sont pas établis, la seule attestation de M. [I], directeur des opérations de la société est insuffisante à cet égard.

En revanche la SAS Serma démontre par diverses pièces que M. [J] a adopté avec deux de ses subordonnés M. [G], ingénieur chef de projet, et M. [V], responsable du pôle Hardware du CESTI, un mode de management fait de petites brimades et de dénigrement confinant au harcèlement moral lequel a eu pour effet de provoquer la présentation de leurs démissions le 21 juillet 2011 à 0h55 pour M. [G] et le 08 août 2011 pour M. [V].

C'est à cette occasion que l'employeur, qui avait reçu dans les jours précédents les comptes-redus d'évaluation annuelle de ces salariés réalisés par M. [J] les 25 mars et 27 avril 2011, a pris connaissance de la gravité de la situation.

M. [V] atteste de la spirale négative dans laquelle les reproches systématiques apportés à son travail par M. [J], quelques soient les correctifs qu'il apportait, l'ont amené ce qui l'a conduit à considérer que la seule issue possible était de quitter son poste.

Il précise que le facteur déclencheur a été le manque de reconnaissance et même la dévalorisation d'un travail complexe de très haut niveau qu'il a mené reconnu par les autorités de tutelle et pour lequel M. [J] lui a refusé des autorisations de communication au prétexte que ce travail ne présentait pas d'intérêt particulier et ne méritait pas de reconnaissance. Cette dévalorisation de M. [V] s'est notamment manifestée lors de l'entretien annuel de progrès, ainsi sur une notation échelonnée entre A et D, alors que 4 des items de ses compétences techniques étaient évalués à la note A (très satisfaisant), 5 à la note B (satisfaisant) et un seul à la note C (convenable) M. [J] lui attribuait pour évaluation globale de son savoir-faire la note C, l'évaluation de son 'savoir-être' était aussi dépréciée.

Or, Mme [T], chargée de RH dans la société, atteste non seulement de sa surprise à la lecture de cette notation mais également de 'l'émotivité absolue' et du désarroi exprimés par M. [V] face à ce qu'il lui a décrit comme un perpétuel jugement déroutant et injuste.

Son attestation confirme l'effondrement psychologique de ce salarié qu'elle décrit pourtant comme un homme de sang-froid.

Ces éléments sont confortés par ceux qui concernent M. [G] qui dans un courriel adressé à la directrice du personnel le 16 décembre 2011 a développé ce qu'il a qualifié dans l'attestation produite devant la cour, établie et communiquée le 11 septembre 2014, de véritable harcèlement qui l'ont conduit à ne plus supporter de travailler avec M. [J] et à adresser sa démission à Mme [T] le 21 juillet 2011 aux

.../...

environs de 1 h 00 du matin, avant que celle-ci et M. [I] le convainquent de différer sa décision après une rencontre et un entretien. Il décrit une succession de petites brimades, refus d'un jour de récupération le 24 octobre 2010 après un voyage professionnel de deux semaines en Asie au cours duquel il a effectué plus de 50 heures d'avion (courriel versé aux débats), ordre de décharger un véhicule de fonction à 2 h00 du matin après trois jours de salon en décembre 2010, recours à des messages paradoxaux instillant le doute, à l'ironie et au sarcasme systématiques, exemples précis cités à l'appui, dévalorisation de son emploi concrétisée là encore dans son entretien de progrès de la fin avril 2011. M. [G] expose avoir adressé un courriel à la directrice des relations humaines, Mme [D], en juillet 2011 pour dénoncer ces agissements.

Contrairement aux affirmations de M. [J] ce comportement qui relève bien du harcèlement tel que visé par la lettre de licenciement, n'est pas couvert par la prescription. En effet l'employeur n'a pu en mesurer la réalité, l'ampleur et le degré de gravité que lorsque ces deux salariés, dont rien ne permet de penser qu'ils se sont concertés, ont manifesté leur intention de démissionner fin juillet début août 2011, au surplus il s'agit d'agissements répétés qui ont perduré dans le temps.

En conséquence, il convient de considérer que ce troisième grief est établi, de nature à compromettre l'état de santé psychologique de deux salariés, il présente un degré de gravité tel qu'il ne permettait pas la poursuite du contrat de travail de M. [J] pendant le préavis.

En conséquence, réformant le jugement déféré, il convient de dire le licenciement de M. [J] fondé sur une faute grave et de le débouter de ses demandes en paiement d'un rappel de salaires pendant la mise à pied conservatoire, d'indemnités de rupture, de dommages intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de dommages intérêts pour licenciement intervenu dans des conditions vexatoires.

* Sur la demande en paiement de dommages-intérêts pour violation des engagements initiaux relatifs à la mise à disposition d'un véhicule de fonction et de sa réparation :

Il est exact que la lettre de proposition d'embauche que la SAS Serma Technologies a envoyée à M. [J] le 7 juin 2006 fait état au titre des avantages de la mise à disposition d'une voiture de fonction. Cependant, le contrat co-signé par les parties le 19 juin 2006, qui fait la loi des parties, ne prévoit plus cet avantage en nature.

Toutefois la société reconnaît, et démontre, que dès l'expiration du terme de la période d'essai de M. [J] elle lui a proposé par courriel du 16 janvier 2007 deux véhicules de fonction, la première réponse de M. [J] dont il est justifié date du 02 avril 2007. Dans celle-ci il fait part de ses désirs pour la couleur de la peinture, le kilométrage

mais sollicite aussi divers chiffrages selon les caractéristiques, options... du véhicule. S'ensuivra un échange, le 18 avril 2007 la société lui propose deux véhicules, de couleur non conforme à son choix mais livrables plus rapidement, M. [J] a maintenu ses choix de couleur, de type... et a pris possession du véhicule choisi par lui, disponible depuis le 20 juillet 2007, le 25 juillet 2007 ; Il s'en déduit que le retard dans la mise à disposition du véhicule de fonction, qui n'était exigible au regard de l'engagement de la société qu'à l'issue de la période d'essai du contrat de travail de M. [J], est imputable au salarié lui-même. Dès lors il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a débouté de ce chef.

* Sur les autres demandes :

Le jugement entrepris sera réformé en ce qu'il a ordonné la remise de diverses pièces à l'encontre de la SA Serma Technologies.

M. [J] qui succombe conservera la charge de ses frais irrépétibles en première instance et en appel et sera condamné aux dépens de la procédure.

L'équité et les circonstances de la cause ne commandent de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

' Réforme le jugement déféré en ce qu'il a dit le licenciement de M. [J] dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné la SA Serma Technologies à lui payer diverses sommes, et à lui remettre divers documents.

Et, statuant de nouveau :

' Dit que le licenciement de M. [J] est fondé sur une faute grave.

' Déboute M. [J] de ses demandes en paiement d'un rappel de salaires pendant la mise à pied conservatoire, des indemnités de rupture, de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et pour licenciement vexatoire.

' Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [J] pour le surplus.

Y ajoutant :

' Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

' Condamne M. [J] aux dépens de la procédure de première instance et d'appel.

Signé par Madame Maud Vignau, Président, et par Monsieur Gwenaël Tridon de Rey, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Gnenaël Tridon de Rey Maud Vignau


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 13/01045
Date de la décision : 19/11/2014

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°13/01045 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-11-19;13.01045 ?
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