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30/10/2014 | FRANCE | N°12/06634

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 30 octobre 2014, 12/06634


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



--------------------------











ARRÊT DU : 30 OCTOBRE 2014

gtr

(Rédacteur : Madame Elisabeth LARSABAL, Présidente)



SÉCURITÉ SOCIALE



N° de rôle : 12/06634



jonction sous le numéro 12/6634 des dossiers enregistrés sous les numéros 12/6634 et 13/5836 ;



















Société SAINT GOBAIN EMBALLAGE



c/



CAISSE PRIMA

IRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA CHARENTE











Nature de la décision : AU FOND







Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signi...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 30 OCTOBRE 2014

gtr

(Rédacteur : Madame Elisabeth LARSABAL, Présidente)

SÉCURITÉ SOCIALE

N° de rôle : 12/06634

jonction sous le numéro 12/6634 des dossiers enregistrés sous les numéros 12/6634 et 13/5836 ;

Société SAINT GOBAIN EMBALLAGE

c/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA CHARENTE

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 novembre 2012 (R.G. n°2011/160) par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de CHARENTE, suivant déclaration d'appel du 27 novembre 2012,

APPELANTE :

Société SAINT GOBAIN EMBALLAGE, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 1]

représentée par Me FERRY loco Me Benoît CHAROT de la SCP REED-SMITH-RAMBAUD-CHAROT, avocats au barreau de PARIS

INTIMÉE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA CHARENTE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 2]

représentée par Me HARMAND de la SCP ROUXEL & HARMAND, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 02 octobre 2014, en audience publique, devant Madame Elisabeth LARSABAL, Présidente chargée d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Elisabeth LARSABAL, Présidente

Madame Catherine MAILHES, Conseillère

Madame Véronique LEBRETON, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Gwenaël TRIDON DE REY,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

I-Faits et procédure

[P] [V] a été salarié de la société [Adresse 3], qui fabrique des bouteilles de verre, du 25 novembre 1963 au 1er avril 1993, date de sa retraite, en qualité de conducteur de machine de fabrication verrière au service soufflage puis de mécanicien entretien soufflage, puis à compter de 1982 comme metteur au point dans le service visite automatique.

Le 24 mars 2010, il a procédé à une déclaration de maladie professionnelle auprès de la CPAM de la Charente pour un carcinome épidermoide du larynx, avec certificat médical initial du 7 mars 2010. Cette pathologie ne figure au tableau des maladies professionnelles.

Cette pathologie a été prise en charge par la caisse par décision du 16 décembre 2010 après avis du CRRMP (comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles) de [Localité 1] et un taux d'IPP de 30 % a été notifié à [P] [V] le 26 mars 2011.

[P] [V] a sollicité la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur.

[P] [V] est décédé des suites de cette pathologie le 29 juin 2012. Ses ayants droit ont repris la procédure.

La cour est saisie de deux jugements du tribunal des affaires de sécurité sociale de la Charente, celui sur l'opposabilité de la reconnaissance de la pathologie au titre de la législation professionnelle, jugement du 12 novembre 2012, dossier n° 12/6634, et celui sur la faute inexcusable, dossier n°13/5836, jugement du 2 septembre 2013.

II- Jugement du 12 novembre 2012, dossier n° 12/6634

Par courrier du 26 mars 2010, la caisse a informé la société [Adresse 3] de cette demande de reconnaissance de maladie professionnelle et le 21 juin 2010, elle l'a également informée de la nécessité de recourir à un délai complémentaire d'instruction. Le 27 juillet 2010, la caisse l'a informée de la transmission du dossier au Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Limoges.

Le 16 septembre 2010, la caisse a informé [P] [V] du rejet de la demande de prise en charge au motif de l'absence de réception de l'avis du CRRMP, en indiquant qu'en cas d'avis favorable, elle reviendrait sur cette notification en adressant un avis de prise en charge.

Le CRRMP a émis le 16 novembre 2010 un avis favorable à la prise en charge, avis qui lie la caisse.

Par lettre du 25 novembre 2010 reçue le 26 novembre 2010, la CPAM de la Charente a invité la société [Adresse 3] à venir consulter les pièces du dossier d'instruction avant la décision à intervenir le 16 décembre 2010.

La caisse primaire d'assurance maladie a accordé la prise en charge sollicitée par notification du 16 décembre 2010.

La société [Adresse 3] a saisi la commission de recours amiable qui a rejeté son recours.

Le 25 avril 2011, la société [Adresse 3] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Charente aux fins de contester la décision de la commission de recours amiable de la CPAM de la Charente rejetant sa contestation de la décision de la prise en charge au titre de la législation professionnelle de [P] [V] et l'opposabilité de cette décision.

Par jugement du 12 novembre 2012, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Charente a :

- débouté la société [Adresse 3] de l'ensemble de ses demandes,

- dit que la prise en charge de la maladie professionnelle de M. [V] ainsi que ses conséquences sont opposables à la société [Adresse 3],

- rappelé qu'il n'y a pas lieu de liquider les dépens.

Il a considéré que la décision initiale de refus de prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle n'était pas une décision définitive car intervenant en attente de l'avis du Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles qui n'avait pas encore rendu son avis et que l'instruction n'était pas terminée, de sorte que la caisse n'avait pas à respecter les dispositions de l'article R.441-14 du code de la sécurité sociale à l'égard de l'employeur lors de cette notification de décision de refus et qu'elle pouvait se contenter d'une notification à ce dernier par lettre simple.

Selon déclaration de son avocat au greffe de la cour d'appel du 29 novembre 2012, la société [Adresse 3] a relevé appel de ce jugement. Cet appel est enregistré sous le n° RG 12/6634.

Par conclusions déposées au greffe le 22 juillet 2013 et développées oralement à l'audience, la société [Adresse 3] conclut à la réformation de la décision dont appel et demande à la Cour de :

- débouter la caisse primaire d'assurance maladie de la Charente de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- dire que la décision de la CPAM de la Charente de prendre en charge la maladie de M. [V] au titre de la législation professionnelle est intervenue après une décision initiale de refus, avant laquelle la caisse s'est dispensée de se conformer à ses obligations à l'égard de l'employeur au titre de l'article R.441-11 du code de la sécurité sociale, en conséquence,

- annuler la décision de rejet de la commission de recours amiable de la CPAM de la Charente du 15 avril 2011,

- déclarer inopposable à la société [Adresse 3] la décision de prise en charge de la maladie de M. [V] au titre de la législation professionnelle ainsi que toute décision subséquente.

Par conclusions responsives déposées au greffe le 30 juin 2014 et développées oralement à l'audience, la CPAM de la Charente demande à la cour de :

- juger la société [Adresse 3] mal fondée en son appel et l'en débouter,

- confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions.

Le dossier relatif à l'appel formé par la société [Adresse 3] contre le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de la Charente du 12 novembre 2012 relatif à l'opposabilité de la reconnaissance de la maladie professionnelle avait été fixé à l'audience du 28 novembre 2013 puis renvoyé à la demande des parties à l'audience du 26 juin 2014 et à nouveau renvoyé à la demande des parties en raison d'un mouvement de grève des avocats à la même audience que celle fixée pour le jugement du 2 septembre 2013 relatif à la reconnaissance de la faute inexcusable.

III- Jugement du 2 septembre 2013, dossier n° 13/5836

Le 5 juillet 2011, [P] [V] a sollicité auprès de la CPAM de la Charente la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, puis en l'absence de conciliation, a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Charente le 2 septembre 2011.

[P] [V] est décédé des suites de sa maladie le 29 juin 2012, et ses ayants droit ont repris la procédure.

Par jugement du 2 septembre 2013, le tribunal :

- a dit que la maladie professionnelle dont a été atteint puis est décédé [P] [V] est due à la faute inexcusable de son employeur la société [Adresse 3]

- a fixé au maximum la majoration de la rente

- a accordé aux ayants droit de [P] [V] l'indemnité forfaitaire légale égale à un mois de salaire de l'article L452-3 du code de la sécurité sociale

- a fixé comme suit les préjudices de [P] [V] et des ayants droit :

* au titre de l'action successorale :

- 50 000 € au titre des souffrances physiques

- 50 000 € au titre de des souffrances morales

- 40 000 € au titre du préjudice d'agrément

- 5 000 € au titre du préjudice esthétique

- 7800 € au titre du déficit fonctionnel temporaire,

* au titre des préjudice moraux des ayants droit :

- 50 000 € pour l'épouse de la victime

- 20 000 € pour son fils

- 5 000 € pour chacune des deux petites filles,

- a débouté les consorts [V] de la demande au titre du préjudice sexuel

- a déclaré opposable à la société [Adresse 3] la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle du décès de [P] [V],

- a sursis à statuer sur la question de l'opposabilité à l'employeur de la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie déclarée par [P] [V] dans l'attente de l'arrêt de la cour d'appel sur le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du 12.11.2012 et donc sur l'action récursoire de la caisse

- a condamné la société [Adresse 3] à verser aux consorts [V] une somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société [Adresse 3] a régulièrement relevé appel de ce jugement. Cet appel est enregistré sous le numéro 13/5836.

Par conclusions déposées au greffe le 9 mai 2014 et reprises à l'audience, les conclusions récapitulatives adressées par courrier le 29 septembre 2014 n'ayant été reçues que le 3 octobre 2014, postérieurement à l'audience du 2 octobre 2014, la société [Adresse 3] demande à la cour :

- de juger les consorts [V], la CPAM de la Charente et le FIVA mal fondés en leurs demandes,

- à titre principal de juger qu'elle n'a commis aucune faute inexcusable à l'origine de la maladie professionnelle et du décès de [P] [V] et en conséquence de débouter les consorts [V] de l'ensemble de leurs demandes,

- à titre subsidiaire si la cour retenait la faute inexcusable, de débouter les consorts [V] de l'ensemble de leurs demandes au titre du préjudice ou à tout le moins de les réduire,

- en tout état de cause de constater que la cour d'appel de Bordeaux est saisie d'une procédure concernant l'opposabilité à la société [Adresse 3] de la prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle et de surseoir à statuer sur l'action récursoire de la CPAM,

- de juger en conséquence que la caisse ne pourra récupérer sur la société [Adresse 3] les sommes qui seraient allouées aux consorts [V],

- de juger que la CPAM de la Charente a décidé d'imputer le décès de [P] [V] à la maladie reconnue comme professionnelle en violation du principe du contradictoire et de juger que la caisse ne pourra pas récupérer les sommes allouées au titre de la faute inexcusable afférentes au décès de [P] [V].

Par conclusions d'appel incident de 279 pages déposées au greffe le 7 août 2014 et reprises à l'audience, les consorts [V] demandent à la cour :

- de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la faute inexcusable de l'employeur la société [Adresse 3], a fixé au maximum la majoration de la rente et leur a alloué l'indemnité forfaitaire égale à un mois de salaire et a condamné la société [Adresse 3] au paiement des sommes suivantes :

* au titre de l'action successorale :

50 000 € au titre des souffrances physiques,

50 000 € au titre de des souffrances morales,

40 000 € au titre du préjudice d'agrément,

5 000 € au titre du préjudice esthétique,

7800 € au titre du déficit fonctionnel temporaire ,

* au titre des préjudice moraux des ayants droit :

50 000 € pour l'épouse de la victime,

20 000 € pour son fils,

5 000 € pour chacune des deux petites filles

et ce avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- de le réformer pour le surplus et condamner la société [Adresse 3] au paiement de la somme de 10 000 € au titre du préjudice sexuel, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt,

- de condamner la société [Adresse 3] au paiement de la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées au greffe le 27 août 2014 et reprises à l'audience, la CPAM de la Charente demande à la cour :

- de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte sur la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur

- de surseoir à statuer en attente de l'arrêt sur le dossier 12/6634 qui concerne l'appel du jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale

- de statuer ce que de droit sur les préjudices de [P] [V].

L'audience avait été fixée au 4 septembre 2014 et a été renvoyée à la demande des parties qui demandent la jonction au 2 octobre 2014 pour qu'il soit statué sur le dossier 12/6634 et l'opposabilité de la décision de la prise en charge au titre de la législation professionnelle de la pathologie.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.

MOTIFS

Sur la jonction

Il y a lieu dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice et conformément à la demande des parties , de joindre les deux dossiers enregistrés sous les numéros 12/6634 et 13/5836 sous le numéro 12/6634, le second jugement ayant prononcé à juste titre un sursis à statuer partiel dans l'attente de la décision de la cour sur le premier, et la demande de renvoi du premier dossier, préalablement audiencé, en raison de la grève des avocats ayant fait obstacle à ce que le premier dossier soit jugé avant le second.

Sur l'opposabilité à la société [Adresse 3] de la reconnaissance de la maladie professionnelle déclarée le 24 mars 2010 ( jugement du 12 novembre 2012)

La question soumise à la cour est celle du refus 'conservatoire' de prise en charge notifié à l'assuré avant l'avis du Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, transmis pour information à l'employeur et du respect du principe de la contradiction issu des nouvelles dispositions de l'article R.441-11 et R441-14 du code de la sécurité sociale à l'égard de l' employeur.

La société [Adresse 3] soutient que la caisse ayant initialement refusé de prendre en charge la reconnaissance du caractère professionnel d'une maladie, sans s'acquitter auprès de l'employeur de ses obligations au titre du principe du contradictoire, toute décision ultérieure de prise en charge doit lui être déclarée inopposable, quand bien même il se serait vu proposer dans un second temps par la caisse primaire d'assurance maladie de prendre connaissance du dossier .

La CPAM soutient que l'instruction n'était pas terminée de sorte qu'elle n'avait pas à informer la société [Adresse 3] de la clôture de la procédure d'instruction, mais qu'elle se trouvait contrainte de prendre une décision provisoire de refus de prise en charge dès lors que le Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles n'avait pas encore rendu son avis et qu'à défaut de prendre une décision avant le 24 septembre 2010, le caractère professionnel de la maladie aurait été reconnu implicitement conformément aux dispositions de l'article R.441-14 du code de la sécurité sociale. Elle estime que la jurisprudence invoquée n'est pas transposable.

C'est par des motifs complets et pertinents qui ne sont pas remis en cause par les débats en appel et que la cour adopte que le premier juge a dit que la décision de la prise en charge au titre de la législation professionnelle de la pathologie déclarée par [P] [V] était opposable à la société [Adresse 3].

En effet, la décision de refus notifiée à [P] [V] le 24 septembre 2010, que la caisse dit avoir communiquée à l'employeur sans pour autant en justifier, était conservatoire pour éviter une prise en charge implicite et nécessaire dans la mesure où, la pathologie ne figurant pas au tableau des maladies professionnelles, la saisine du CRRMP était nécessaire et où le délai d'examen par ce comité s'impute sur le délai d'instruction ; la notification faite à [P] [V] et communiquée pour information à l'employeur mentionnait bien que ce refus était dans l'attente de l'avis du CRRMP, lequel n'a pas été saisi sur contestation de [P] [V] mais à l'initiative de la caisse. Il ne peut être considéré qu'il s'agissait d'un refus définitif ne pouvant être remis en cause dans les rapports entre la caisse et l'employeur.

Au demeurant, s'agissant d'une décision qui ne faisait pas grief à l'employeur, la caisse n'avait pas l'obligation de la lui notifier.

Dans ce contexte et étant rappelé que l'employeur a été informé de la saisine du comité par lettre du 27 juillet 2010, et n'a pris aucune initiative pour participer à la consultation de celui-ci, la notification de la fin de l'instruction après avis du comité le 25 novembre 2010 pour une décision à intervenir et intervenue le 16 décembre 2010, soit dans un délai supérieur à 10 jours francs, est conforme aux exigences des articles R441-11 et R441-14 du code de la sécurité sociale.

Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

Il sera constaté que la cause du sursis à statuer prononcé par le jugement du 2 septembre 2013 a disparu.

Sur l'opposabilité à la société [Adresse 3] de la prise en charge du décès de [P] [V]

Par les motifs qui précèdent, la cour confirme le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de la Charente du 12 novembre 2012 qui déclare opposable à la société [Adresse 3] la décision de la prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie professionnelle déclarée le 24 mars 2010 par [P] [V].

Dès lors, la cause du sursis à statuer dans l'attente du résultat de l'appel formé par la société [Adresse 3] à l'encontre de ce jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale statuant sur l'opposabilité de la reconnaissance de la pathologie initiale a disparu et il convient de statuer sur l'opposabilité de la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle du décès, l'opposabilité de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle ayant pu le cas échéant par son caractère préalable conditionner celle du décès.

Il n'est pas contesté que celui-ci résulte de la pathologie objet de la reconnaissance de maladie professionnelle.

C'est là encore par des motifs complets et pertinents que le tribunal des affaires de sécurité sociale a jugé que la décision de prise en charge du décès était opposable à la société [Adresse 3], au regard de la notification par la caisse du décès qui a été faite à la société [Adresse 3] par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 septembre 2012 et, après enquête conforme aux exigences de l'article R441-14 , de l'information par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 octobre 2012 de la fin de l'instruction et de l'invitation à venir consulter le dossier, avant

la décision à intervenir le 16 novembre 2012, ce à quoi la société [Adresse 3] n'a pas procédé.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la faute inexcusable

En application de l'article L452-1 du code de la sécurité sociale, lorsqu'un accident du travail ou une maladie professionnelle est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants.

En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat ; le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens des dispositions de l' article L452-2 du code de la sécurité sociale lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en protéger.

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de la maladie professionnelle ou de l'accident mais il suffit que la responsabilité de l'employeur soit engagée alors même que d'autres fautes auraient concouru au dommage.

La charge de la preuve de la faute inexcusable de l'employeur incombe au salarié.

En l'espèce, c'est par des motifs complets et pertinents qui ne sont pas remis en cause par les débats ou par la production de nouvelles pièces en appel et que la cour adopte que le premier juge a considéré que [P] [V] avait été exposé dans le cadre de ses deux premiers postes de 1963 à 1982, à l'inhalation de poussières d'amiante, et que l'employeur devait avoir conscience du danger et prendre les mesures nécessaires pour en protéger les salariés.

Sur les conséquences de la faute inexcusable

Sur les préjudices de [P] [V] et des ayants droit

Il y a lieu d'accorder au titre de l'action successorale aux consorts [V] le maximum de la majoration de la rente et l'indemnité forfaitaire prévue en cas de décès par l'article L452-3 du code de la sécurité sociale.

Le jugement sera confirmé en son évaluation pertinente et non contestée par les requérants et confortée par la production d'attestations :

- des souffrances physiques et morales endurées par [P] [V], relatées par ses proches, retracées par les pièces médicales et résultant des traitements et opérations douloureux subis, du préjudice d'agrément résultant de l'impossibilité de pratiquer la pêche, la marche, le jardinage, activités spécifiques au mode de vie de retraité septuagénaire de [P] [V], du préjudice esthétique causé notamment par l'appareillage faisant suite à l'opération de laryngotomie et du déficit fonctionnel temporaire avant consolidation

-des préjudices moraux des ayants droit, épouse, qui a accompagné son époux dans ses souffrances et l'a vu disparaître après 51 ans de vie commune, fils unique et petites filles âgées de 13 et 11 ans lors du décès de leur grand-père, qui attestent personnellement des activités qu'elles ne pouvaient plus faire avec lui et du spectacle de sa souffrance et de sa diminution.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté les ayants droit de la demande au titre de préjudice sexuel , dont aucune preuve n'est rapportée.

La CPAM de la Charente sera condamnée à verser aux consorts [V] les sommes allouées, le jugement étant également confirmé de ce chef.

Sur l'action récursoire de la CPAM de la Charente

Dès lors que l'opposabilité à la société [Adresse 3] des décisions de prise en charge au titre de la législation professionnelle tant de la maladie que du décès subséquent sont confirmées, la société [Adresse 3] sera condamnée à rembourser à la CPAM de la Charente les somme dont celle-ci aura fait l'avance.

Il sera ajouté de ce chef au jugement qui avait sursis à statuer.

Sur l' application de l'article 700 du code de procédure civile

La société [Adresse 3] sera condamnée à verser aux consorts [V], à qui il serait inéquitable de laisser la charge de leurs frais irrépétibles, une somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Ordonne la jonction sous le numéro 12/6634 des dossiers enregistrés sous les numéros 12/6634 et 13/5836 ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 12 novembre 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Charente ;

Constate que la cause du sursis à statuer prononcé par le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de la Charente du 2 septembre 2013 sur l'opposabilité à la société [Adresse 3] de la prise en charge au titre de la législation professionnelle de la pathologie déclarée par [P] [V] et sur l'action récursoire de la CPAM de la Charente a disparu par la confirmation du jugement du 12 novembre 2012 ;

Confirme pour le surplus le jugement déféré ;

Y ajoutant, dit que la société [Adresse 3] devra rembourser à la CPAM de la Charente les sommes dont celle-ci aura fait l'avance aux consorts [V] ;

Condamne la société [Adresse 3] à verser aux consorts [V] une somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Signé par Madame Elisabeth LARSABAL, Présidente, et par Gwenaël TRIDON DE REY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

G. TRIDON DE REY Elisabeth LARSABAL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 12/06634
Date de la décision : 30/10/2014

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°12/06634 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-10-30;12.06634 ?
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