COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CHAMBRE SOCIALE - SECTION A
--------------------------
ARRÊT DU : 24 SEPTEMBRE 2014
(Rédacteur : Monsieur Claude Berthommé, Conseiller)
PRUD'HOMMES
N° de rôle : 13/01772
Monsieur [H] [I]
c/
SAS BTPS Atlantique
Nature de la décision : AU FOND
Notifié par LRAR le :
LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :
La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par
voie de signification (acte d'huissier).
Certifié par le Greffier en Chef,
Grosse délivrée le :
à :
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 février 2013 (RG n° F 11/00082) par le Conseil de Prud'hommes - formation de départage - de Bordeaux, section Industrie, suivant déclaration d'appel du 18 mars 2013,
APPELANT :
Monsieur [H] [I], né le [Date naissance 1] 1962, de nationalité française,
profession étancheur, demeurant [Adresse 2],
Représenté par Maître Pierre Santi de la SCP Yves Darmandrail & Pierre Santi, avocats au barreau de Pau,
INTIMÉE :
SAS BTPS Atlantique, siret n° 410 651 178 00015, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 1],
Représentée par Maître Fabienne Guillebot-Pourquier, avocat au barreau de Bordeaux,
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 juin 2014 en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Maud Vignau, Président,
Monsieur Claude Berthommé, Conseiller,
Madame Isabelle Lauqué, Conseiller,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière.
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :
Monsieur [H] [I] a été embauché le 11 mai 1992 par la société BTPS Atlantique en qualité d'ouvrier d'exécution.
Les relations contractuelles se sont poursuivies dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du début de l'année 1993.
Le 12 octobre 2010, le salarié a adressé à son employeur un courrier de démission.
Monsieur [H] [I] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux le 11 janvier 2011 aux fins d'obtenir que sa démission soit requalifiée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que la condamnation de son employeur à lui payer diverses sommes.
Par jugement de départage en date du 25 février 2013, le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux a considéré que la rupture du contrat de travail du salarié produit les effets d'une démission et a rejeté l'ensemble de ses prétentions le condam-nant à payer à la société BTPS Atlantique une somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l'instance.
Monsieur [H] [I] a régulièrement interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe de la Cour en date du 18 mars 2013.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
L'appelant conclut à la réformation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et demande à la Cour de dire que la prise d'acte de rupture du contrat de travail par l'employeur sans notification d'aucune lettre de licenciement s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et à titre subsidiaire que la démission provoquée par le comportement de l'employeur doit produire les effets d'un licen-ciement dépourvu de toute cause réelle et sérieuse.
Il sollicite la condamnation de la société BTPS Atlantique à lui payer les sommes suivantes :
- 43.140,00 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle
et sérieuse,
- 8.687,00 € à titre d'indemnité de licenciement,
- 2.843,90 € à titre d'indemnité de préavis,
- 359,50 € à titre d'indemnité de congés payés sur préavis,
- 15.000,00 € en réparation du préjudice distinct résultant de l'absence de formation
professionnelle continue et du devoir au manquement d'adaptation,
- 2.500,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de son appel, il fait valoir qu'il a fait l'objet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse en l'absence de notification de la lettre de licenciement alors qu'il avait été convoqué le 13 août 2010 à un entretien préalable avec mis à pied à titre conservatoire et qu'il n'a jamais été informé que l'employeur souhaitait renoncer à poursuivre la procédure de licenciement ce dont il résulte que la prise d'acte de rupture du contrat de travail devra être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Il ajoute que la lettre de démission circonstanciée et motivée qui invoque de nombreux griefs à l'encontre de l'employeur est suffisamment équivoque pour ne pas être considérée comme une démission de sa part et qu'il est fondé à demander diverses indemnités résultant de la rupture de son contrat de travail.
La société BTPS Atlantique conclut à la confirmation du jugement entrepris et demande à la Cour de juger que la prise d'acte de rupture du contrat de travail doit s'analyser en une démission exclusive de toute indemnité mais aussi à sa réformation en ce que le salarié devra être condamné à lui payer la somme de
3.154,74 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre une somme de 2.000 €
en application de l'article 700 du code de procédure civile.
L'intimée fait valoir que la prise d'acte de rupture du contrat de travail par la démission du salarié ne peut être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse en l'absence de tout manquement de l'employeur dûment établi alors qu'au contraire les nombreuses absences du salarié et son comportement inacceptable vis-à- vis de sa hiérarchie et des autres salariés ont justifié l'ouverture d'une procédure de licenciement pour faute grave laquelle n'a pas été menée à son terme.
Elle ajoute que la prise d'acte produisant les effets d'une démission, le salarié doit être condamné à verser à l'employeur une indemnité pour non respect du délai de préavis de sorte que le jugement de départage 25 février 2013 devra être réformé sur ce point.
Il convient pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties de se référer à leurs conclusions écrites développées oralement à l'audience.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la rupture du contrat de travail
La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail et que s'il démissionne en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture ne peut être considérée comme une prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse que si les faits invoqués constituent des manquements suffisamment graves pour la justifier et rendre impossible la poursuite du contrat de travail.
Force est de constater en l'espèce que tel n'est pas le cas dès lors que les manquements dont il est fait état dans sa lettre de démission du 12 octobre 2010 sur la désorganisation de l'entreprise, la mauvaise répartition des tâches et les provocations dont il aurait fait l'objet de la part de sa hiérarchie ne sont nullement établis au regard
.../...
des pièces produites par le salarié constituées essentiellement des courriers qu'il a adressés à son employeur alors que ce dernier verse aux débats différents témoignages de salariés attestant de la réalité des incidents imputables à Monsieur [I] ainsi que des difficultés croissantes rencontrées pour gérer son comportement et son caractère malgré plusieurs avertissements et 'recadrages' demeurés sans effet.
Le fait que l'employeur a engagé une procédure de licenciement pour faute des le lendemain de la lettre de démission du salarié sans lui notifier son licenciement est indifférent dès lors que cette procédure est intervenue postérieurement à l'envoi de la lettre de démission du salarié ayant pour conséquence la cessation du contrat de travail laquelle démission ne peut être requalifiée en prise d'acte de rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Il convient donc de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que la prise d'acte de rupture du salarié doit produire les effets d'une démission et non d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et l'a débouté de l'ensemble de ses demandes.
Sur les autres demandes
S'agissant de la demande nouvelle relative au préjudice résultant d'un défaut de formation professionnelle continue, il est réclamé par le salarié une somme de 15.000 € sans justifier d'un préjudice en relation avec un manquement de l'employeur alors que les formations et stages qui ont été prévues par l'entreprise n'ont pas été suivies par le salarié qui est porté absent sur les listings de sorte qu'il ne peut sérieusement invoquer ce grief à l'encontre de l'employeur au regard de son obligation d'assurer une formation professionnelle continue.
Sur la demande reconventionnelle formée par l'employeur, il a été relevé à juste titre par le premier juge que le salarié a été convoqué le 13 octobre 2010 à un entretien préalable à un éventuel licenciement avec mis à pied à titre conservatoire en vue selon l'employeur d'un licenciement pour faute grave de sorte qu'il n'est pas démontré que l'employeur avait demandé au salarié d'effectuer le préavis qu'il avait envisagé de faire ce dont il résulte que sa demande reconventionnelle sera rejetée par la Cour.
La condamnation par le premier juge de Monsieur [H] [I] au paiement d'une indemnité de procédure sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile est conforme à l'équité et doit être approuvée.
En cause d'appel il est équitable de condamner l'appelant qui succombe à l'ensemble de ses demandes dont celle formulée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à supporter partie des frais non répétibles exposés par l'intimée à hauteur de la somme de 600 € les dépens de première instance et d'appel étant mis à sa charge.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
' Déclare l'appel régulier, recevable mais mal fondé.
' Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Y ajoutant :
' Condamne Monsieur [H] [I] à payer à la société BTPS Atlantique une indemnité de procédure de 600 € (six cents euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
' Déboute les parties du surplus de leurs demandes.
' Condamne Monsieur [H] [I] aux dépens de première instance et d'appel.
Signé par Madame Maud Vignau, Président, et par Madame Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
A-M Lacour-Rivière M. Vignau