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26/06/2014 | FRANCE | N°12/05867

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 26 juin 2014, 12/05867


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



--------------------------











ARRÊT DU : 26 JUIN 2014

gtr

(Rédacteur : Madame Véronique LEBRETON, Conseiller)



SÉCURITÉ SOCIALE



N° de rôle : 12/05867





















Monsieur [V] [N]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 12/6613 du 06/12/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)



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CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE

SAS SOCAT

SAS SOCAT DELMON INDUSTRIE

Société LES TRANSPORTS MESSAGERIES PERIGOURDINES









Nature de la décision : AU FOND



Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adres...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 26 JUIN 2014

gtr

(Rédacteur : Madame Véronique LEBRETON, Conseiller)

SÉCURITÉ SOCIALE

N° de rôle : 12/05867

Monsieur [V] [N]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 12/6613 du 06/12/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)

c/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE

SAS SOCAT

SAS SOCAT DELMON INDUSTRIE

Société LES TRANSPORTS MESSAGERIES PERIGOURDINES

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 septembre 2012 (R.G. n°20080536) par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de DORDOGNE, suivant déclaration d'appel du 24 octobre 2012,

APPELANT :

Monsieur [V] [N]

né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 4]

de nationalité Française

Sans profession, demeurant [Adresse 1]

représenté par Monsieur [B] [Y], Président de l'association AGIR, muni d'un pouvoir régulier

INTIMÉES :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 4]

dispensée de comparaître

SAS SOCAT Société d'Outillage et de Caoutchouc pour ApplicationsTechniques, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 2]

représentée par Me Nadia ZANIER de la SCP RAFFIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

SAS SOCAT DELMON INDUSTRIE

Sans profession, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Nadia ZANIER de la SCP RAFFIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

Société LES TRANSPORTS MESSAGERIES PERIGOURDINES, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 5]

non comparante ni représentée bien que régulièrement convoquée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 22 mai 2014, en audience publique, devant Madame Véronique LEBRETON, Conseillère chargée d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Elisabeth LARSABAL, Présidente

Madame Catherine MAILHES, Conseillère

Madame Véronique LEBRETON, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Gwenaël TRIDON DE REY,

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

M. [V] [N] a été embauché par la société SOCAT à compter du 12 juin 1989 et était principalement affecté au poste d'encollage de l'unité hautes technologies et dans ce cadre il a été amené à manipuler plusieurs types de solvants.

A la suite de la reconnaissance d'une maladie professionnelle inscrite au tableau n° 62 en 1996, il a été licencié pour inaptitude à tous postes le 7 mai 1996. Il a été ensuite embauché en 2004 en qualité de chauffeur par la société Transport messagerie périgourdine.

le 13 juin 2007 il a formulé une demande de reconnaissance du caractère professionnel de la polynévrite qu'il a plus tard développée.

La CPAM de la Dordogne lui a notifié le 3 décembre 2007 un refuse de prise en charge.

M. [V] [N] a saisi d'une contestation de cette décision la commission de recours amiable qui a soumis le dossier à l'ingénieur conseil régional de la caisse et au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) de [Localité 1], lequel a considéré que la preuve d'un lien direct entre la pathologie déclarée et l'exposition incriminée n'était pas rapportée.

Cet avis s'imposant à la caisse, a été notifié à M. [V] [N] le rejet de sa contestation auprès de la commission de recours amiable.

M. [V] [N] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Dordogne qui a dans un premier temps saisi le CRRMP de [Localité 3] pour émettre un avis sur l'imputabilité de l'affection à son activité professionnelle au sein de la société SOCAT.

Le CRRMP a rendu un avis défavorable le 20 septembre 2012 à la suite duquel le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Dordogne a rendu un jugement le 20 septembre 2012 aux termes duquel il a débouté M. [V] [N] de l'ensemble de ses demandes et dit n'y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 24 octobre 2012 M. [V] [N] a relevé appel de ce jugement.

Par conclusions en date des 20 janvier et 22 mai 2014 soutenues à l'audience, M. [V] [N] sollicite de la cour qu'elle infirme le jugement, reconnaisse sa maladie professionnelle au titre des tableaux 4bis, 9, 12, 84 et 85 des maladies professionnelles, condamne la société SOCAT à lui remettre sa fiche de suivi post-professionnel eu égard à son exposition aux produits CMR, rejette l'intégralité des demandes de la CPAM de la Dordogne et de la société SOCAT, les condamne solidairement à lui payer les sommes de 10000 euros pour préjudice subi, et de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir les moyens suivants :

dans le cadre de son activité il a été amené à utilisation des solvants, notamment du trichloroethylene et du chemosil, dans des conditions de manipulation imposées par l'employeur, sans aucune protection cutanée et respiratoire et dans un local de 18 m2 dépourvu d'aération, ce faisant l'employeur qui ne pouvait ignorer la toxicité des produits a manqué à son obligation de prévention, d'information et de sécurité,

il ne présentait pas d'antécédent et des symptômes neurologiques étaient apparus avant son licenciement pour inaptitude, sachant que les solvants utilisés peuvent être à l'origine de diverses maladies dont la polynévrite,

les avis des CRRMP ne peuvent être retenus car ils ont été rendus dans le cadre d'un conflit d'intérêt, sont entachés de contradictions, pour celui de bordeaux il est entaché de faux en écritures et pour celui de [Localité 3] il est entaché de nullité comme ayant été rendu par deux membres au lieu de trois,

il bénéficie d'une présomption d'imputabilité et il appartient à l'employeur d'apporter la preuve que le travail a été totalement étranger à la survenance de la maladie.

Par conclusions du 22 octobre 2013 soutenues à l'audience la CPAM de la Dordogne sollicite de la cour qu'elle confirme le jugement et déboute M. [V] [N] de ses demandes.

Elle fait valoir que les conditions de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale ne sont pas toutes remplies puisque le délai de 11 ans écoulé entre la cessation de l'exposition au risque et la première constatation médicale est supérieur au délai de 30 jours prévus par le tableau 12 D, ceci imposant l'établissement d'un lien de causalité entre la pathologie et l'exposition professionnelle et justifiant la saisine du CRRMP dont l'avis s'impose à elle.

Par conclusions du 31 juillet 2013 et 15 mai 2014, la société SOCAT sollicite de la cour qu'elle confirme le jugement, déboute M. [V] [N] de ses demandes et le condamne aux dépens et à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir qu'elle n'a pas manqué à ses obligations, que le lien entre la polynévrite neurotoxique découverte en 2007 puisqu'il n'existe aucun élément clinique antérieur, laquelle peut avoir une autre origine, et l'exposition professionnelle qui a cessé en 1996, n'est pas établi ainsi que l'ont exposé les avis de deux CRRMP successifs qui peuvent être retenus.

La société Transport messagerie périgourdine n'a pas comparu bien que régulièrement convoquée.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l'article L461-1 code de la sécurité sociale la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle est assimilée à la date de l'accident, en outre est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau, sachant que si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

En l'espèce, M. [V] [N] sollicite la reconnaissance de sa maladie au titre des tableaux n° 4bis, 9, 12, 84 et 85 qui prévoit des délais de prise en charge compris entre 7 jours (n°4 bis) et 30 ans (n°85), sa pathologie relevant du tableau n°12 qui prévoit un délai de prise en charge de 30 jours. Cette condition n'étant pas remplie, M. [V] [N] doit rapporter la preuve qu'elle est directement causée par son travail habituel au sein de la société Socat, les moyens développés relativement à la responsabilité de l'employeur dans l'exposition de M. [V] [N] à des produits toxiques étant à ce stade du litige inopérants.

Il est constant que du 12 juin 1989 au 7 mai 1996, date de son licenciement pour inaptitude à la suite de la reconnaissance d'une maladie professionnelle inscrite au tableau n° 62, M. [V] [N] a exercé la fonction d'encolleurs d'opercules, qu'à ce titre, au cours des activités de grenaillage, de meulage, de dégraissage manuel, d'encollage, de séchage et de stockage des opercules, il a manipulé des produits toxiques dont le trichloroethylene (repris dans les tableaux n°12 et n°84 du régime général), le toluene (repris dans les tableaux n° 4 bis et n°84 du régime général) , le xylene, le methylethylcetone (repris dans le tableau n°84 du régime général), l'alcool éthylique et le chemosil, et que depuis 1996 l'exposition a ces produits a cessé du chef de l'activité professionnelle.

Il a été placé en arrêt de travail prolongé à compter du 5 décembre 2006 et le 13 juin 2007 il a fait une demande de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la polynévrite neurotoxique sur la base d'un certificat médical initial signé par le docteur [E] qui prolonge l'arrêt de travail en cours depuis le 5 décembre 2006 et qui date la première constatation médicale de la maladie professionnelle au 5 décembre 2006.

Il produit un certificat médical du 12 avril 2007 établi par son médecin psychiatre le docteur [M] qui précise : «ce patient présente un tableau somato-psychique complexe évoluant depuis environ six ans. Il se trouve en arrêt de travail depuis le 5 12 2006. le tableau clinique est constitué par : 1) un syndrome polyalgique diffus d'intensité sévère avec retentissement fonctionnel(marche, statique, motricité..) 2)un trouble thymique répondant aux critères d'un épisode dépressif majeur (OMS CIM XF32.2) 3) un syndrome anxieux de type anxiété généralisée (OMS CIM XF41.1). Des explorations fonctionnelles récentes ont mis en évidence une atteinte du système nerveux périphérique de type polynévritique (EMG) qui est sans doute à mettre en rapport avec une exposition à des substances neurotoxiques dans le cadre professionnel ce qui engageraient une procédure de maladie professionnelle. ».

Ce certificat médical s'appuie sur un avis du docteur [G] du 23 mars 2007 qui indique au médecin psychiatre, à la suite d'une consultation en service de neurologie au centre hospitalier de [Localité 2], : « l'EMG montre une discrète neuropathie sensitive axonale. Devant ce contexte d'intoxication chronique avec l'aréflexie ostéo-tendineuse et les anomalies à l'EMG, on peut retenir le diagnostic de neuropathie sensitive d'origine toxique avec une composante fonctionnelle associée. ». Le docteur [M] répondant au service du contrôle médical le 19 décembre 2007 dans le cadre de l'instruction du dossier indiquait que « l'examen EMG montrait des signes de neuropathie compatibles avec leur origine toxique. Seule une enquête étiologique et épistémologique pourra incriminer lequel des toxiques avec lequel M. [N] a été en contact dans le cadre de son activité professionnelle est responsable du tableau observé. ».

Il ressort donc des pièces produites par M. [V] [N] que la neuropathie sensitive dont il souffre a été diagnostiquée, et par conséquent objectivée, le 23 mars 2007 par le docteur [G] et que le certificat du docteur [M] du 12 avril 2007 est la première pièce médicale qui met en lien, au demeurant de manière conditionnelle, cette pathologie avec l'activité professionnelle de son patient. Le certificat médical du docteur [E] du 15 novembre 2010 qui mentionne que « M. [V] [N] est porteur d'une polynévrite neurotoxique découverte en 2007 sachant que son état de santé était déjà préoccupant depuis son licenciement en 1996. » confirme cette objectivation de la polynévrite en 2007 et, de part le caractère général des termes utilisés, n'est pas de nature à établir l'origine du caractère « préoccupant » de l'état de santé général de M. [V] [N] qui présentait, selon le docteur [M], un « tableau somato-psychique complexe » évoluant depuis six ans. Le certificat médical du docteur [C] du 28 décembre 2007 retranscrit l'historique de l'exposition professionnelle à des toxiques et de l'apparition de la pathologie sans apporter d'éléments complémentaires utiles à la résolution du litige.

Il convient de déduire de ces éléments factuels établis que M. [V] [N] souffre de la pathologie litigieuse de manière certaine depuis 2007 et qu'un syndrome polyalgique était apparu six années auparavant soit en 2001.

Le 19 septembre 2008 le CRRMP de Bordeaux saisi par la caisse a rendu l'avis suivant : « Après avis du laboratoire de chimie de la caisse régionale d'assurance maladie d'Aquitaine le seul risque chimique identifié pouvant être en cause par rapport avec la pathologie déclarée neurologique est le trichloroéthylène (tableau numéro 12). Mais les membres du CRRMP considèrent que le délai de 11 ans entre la cessation d'exposition professionnelle à l'agent chimique incriminé et la 1ére constatation médicale est trop long pour retenir l'existence d'un lien direct entre les deux. Aucun autre agent causal n'a pu être identifié par rapport à la pathologie neurologique déclarée. En conséquence le CRRMP considère que les éléments de preuve de l'existence d'un lien direct ,entre la pathologie déclarée et l'exposition professionnelle incriminée ne sont pas réunies dans ce dossier. ».

La référence qui est fait dans cet écrit à l'avis du laboratoire de chimie en ce qui concerne le tableau n° 12 du régime général, seul concernant la pathologie litigieuse, dans lequel se retrouve l'exposition au trichloroéthylène est conforme à l'avis du 15 février 2008 dont s'agit qui mentionnait les tableaux du régime général dans lesquels étaient mentionnés certains des produits auxquels avait été exposé M. [V] [N] durant son activité professionnelle, de sorte que cet avis n'est pas entaché de faux en écriture.

Cet avis est confirmé le 17 mai 2011 par le CRRMP du Limousin Poitou-Charente, dont la composition par les trois professionnels requis par la réglementation est rappelée dans le corps et la fin de l'écrit formalisant l'avis du comité qui ne comporte pas la signature du médecin inspecteur régional du travail, a délivré la décision suivante : « l'ampleur du délai écoulé entre la fin d'exposition au risque (1996) et la date des premières objectivations médicales à l'origine de la demande (EMG du 23/03/2007) alors qu'aucun élément clinique n'a antérieurement été mis en évidence. Les membres du CRRMP estiment que ce délai est trop long pour retenir l'existence d'un lien direct entre la pathologie déclarée et l'exposition professionnelle incriminée ».

L'absence de signature du médecin inspecteur sur cet écrit n'est pas de nature en soi à établir son absence lors de la prise de décision qu'il formalisée. Même à considérer que les articles de presse sur lesquels s'appuie M. [V] [N] au soutien de la nullité de cet avis établissent la désertion par les médecins inspecteurs du travail des CRRMP pour des raisons de revendications catégorielles, celle-ci ne concerne que la période du 1er octobre 2012 au 16 octobre 2013. Dés lors il n'est pas démontré que l'avis du 17 mai 2011 a été rendu par deux membres sur trois, de sorte qu'il convient de le considérer également comme régulier.

Ces deux avis réguliers doivent donc être pris en considération.

Pour combattre ces avis et les effets du délai de 11 ans écoulé entre la cessation de l'activité professionnelle et la demande de reconnaissance, M. [V] [N] produit un compte rendu de bilan réalisé au cours du mois de mai 1998 par le service de pneumologie du centre hospitalier de [Localité 4] à la demande du docteur [E] suite à un amaigrissement important de M. [V] [N] rédigé par le docteur [Z] qui fait état au paragraphe relatant les doléances du patient, entre autres, de « réveils nocturnes causés par des arthralgies des membres inférieurs » et conclut qu'il n'y a pas d'étiologie précise et pas davantage de cause organique à cet amaigrissement, et pose la question d'une cause psychogène. Cette pièce est la seule contemporaine et relative à la période écoulée entre 1996 et 2007, autres que celles ci dessus examinées qui font partiellement référence à cette période et de manière imprécise au plan strictement médical.

Alors que M. [V] [N] ne produit aucune autre pièce, datant de cette même période ou y faisant référence, qui comporterait la description précise d'un tableau clinique évoquant ou caractérisant l'existence d'une neuropathie sensitive dés 1996, ce seul document faisant apparaître des doléances touchant les membres inférieurs dans un contexte de bilan global approfondi ne permet pas à lui seul d'établir que la pathologie s'était déclarée au cours de l'activité professionnelle ou très rapidement après la cessation d'activité.

A cet égard, le dossier de la médecine du travail qui le concerne, depuis son embauche jusqu'à la reconnaissance de la maladie professionnelle du tableau n°62, ne fait référence qu'à des symptômes touchant essentiellement les yeux en 1993, la cage thoracique et les voies respiratoires plus particulièrement à partir du mois de janvier 1995, et le courrier du docteur [A] du 15 février 1995 confirme cet état de fait lorsqu'il porte diagnostic d'une dyspnée asthmatiforme provoquée par les isocyanates organiques.

Par ailleurs il résulte des pièces 31 de la communication de la société Socat, portant description théorique de la polynévrite qui précise que celle-ci peut avoir des causes carentielles liées à l'alcool, des causes toxiques liées à certains médicaments ou certains toxiques, des causes toxi-infectieuses liées à des pathologies virales ou infectieuses et des causes métaboliques liées à d'autres pathologies et de la pièce 32 portant description théorique d'origine professionnelle qu'« une neuropathie périphérique peut survenir tardivement après une exposition aiguë à une concentration élevée d'un neurotoxique. C'est le cas des polynévrites aux organophosporeés ou à l'acrylamide. L'évolution de neuropathie dépend alors de l'intensité de l'atteinte nerveuse. Mais la plupart des cas de polynévrite toxique d'origine professionnelle sont secondaires à une exposition chronique à de faibles doses de neurotoxiques comme des métaux lourds ou des solvants organiques. Le résultat est l'apparition insidieuse d'une neuropathie progressive avec une lente récupération après arrêt de l'exposition. De manière générale, la plupart de neuropathies périphériques d'origine toxiques sont réversibles à l'arrêt de l'exposition. ». Il résulte donc de ces éléments que la polynévrite peut avoir d'autres origines que l'exposition, même chronique, à des produits toxiques et que la polynévrite d'origine toxique est réversible à l'arrêt de l'exposition.

Dans ces conditions la cour, estimant que M. [V] [N] ne rapporte pas la preuve que la pathologie qu'il a déclaré en 2007 est de manière certaine directement causée par son travail habituel au sein de la société Socat dans la période écoulée entre le 12 juin 1989 et le 7 mai 1996 au cours de laquelle il a été exposé à des produits toxiques, confirme le jugement en toutes ses dispositions.

Nonobstant l'issue de l'appel, l'équité et les circonstances économiques commandent de ne pas faire droit à la demande formée par la société Socat en application de l'article 700 du code de procédure civile., M. [V] [N] étant débouté quant à lui de sa demande du même chef, ainsi que de ses demandes de dommages-intérêts.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et déboute en conséquence M. [V] [N] et la société Socat de leur demande de ce chef,

Dit qu'en application des articles L 144-5 et R 144-10 du Code de la sécurité sociale, il n'y a pas lieu de statuer sur les dépens.

Signé par Madame Elisabeth LARSABAL, Présidente, et par Gwenaël TRIDON DE REY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

G. TRIDON DE REY Elisabeth LARSABAL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 12/05867
Date de la décision : 26/06/2014

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°12/05867 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-06-26;12.05867 ?
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