La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/03/2014 | FRANCE | N°11/07782

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 18 mars 2014, 11/07782


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



--------------------------







ARRÊT DU : 18 MARS 2014



(Rédacteur : Madame Maud Vignau, Président)

(PH)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 11/07782









Madame [M] [I]



c/



SA Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher















Nature de la décision : AU FOND














r>Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :



Décision déférée à la Cour :...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 18 MARS 2014

(Rédacteur : Madame Maud Vignau, Président)

(PH)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 11/07782

Madame [M] [I]

c/

SA Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 décembre 2011 (RG n° F 11/00088) par le Conseil de Prud'hommes - formation paritaire - de Bergerac, section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 22 décembre 2011,

APPELANTE :

Madame [M] [I], née le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 4]

[Localité 4], demeurant lieu-dit '[Adresse 2],

Représentée par Maître Charlotte Bellet, avocat au barreau de Paris,

INTIMÉE :

SA Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher, siret n° 876 580 077, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 1],

Représentée par Maître Sandrine Beauge-Gibier, avocat au barreau de Chartres,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 novembre 2013 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Maud Vignau, Président, chargé d'instruire l'affaire, et Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller,

Le magistrat, chargé d'instruire l'affaire, a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Maud Vignau, Président,

Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller,

Madame Isabelle Lauqué, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière.

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

Le 24 juin 1995 Monsieur et Madame [I] [M] achetaient un fonds de commerce, un salon de beauté, vente de produits de beauté, soins esthétiques, exploité sous l'enseigne Yves Rocher, appartenant à Monsieur et Madame [O] pour la somme de 76.225 €. (pièce V de l'appelante).

Le 25 juillet 1995 la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher et Madame [I] [M] passaient un contrat de franchise, d'une durée de cinq ans renouvelable pour exploiter un Centre de Beauté [Adresse 3]. (pièce A de Madame [I])

Par lettre du 06 12 1999 la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher notifiait à Madame [I] sa volonté de ne pas renouveler le contrat de franchise.

Toutefois, Madame [I] ayant souhaité voir se poursuivre les relations commerciales, celles-ci se sont poursuivies, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée signé le 30 janvier 2007. (pièce D de l'appelante)

Par lettre recommandée du 22 décembre 2007 Madame [I] résiliait

le contrat de franchise qui la liait à la société Yves Rocher. (pièce G)

Les relations contractuelles devaient cesser le 1er juillet 2008.

Madame [I] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Bergerac le 27 avril 2009 après s'être désistée de l'action entreprise, dans un premier temps contre la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher devant le Tribunal de Commerce.

Par jugement du 15 décembre 2011, cette juridiction a dit que Madame [I] ne réunissait pas les conditions fixées par les articles L.7321-1, L.7321-2 et L.7321-3 du code du travail, dit que Madame [I] avait signé avec la société Yves Rocher un contrat de franchise qui ne relèvait pas d'un contrat de travail mais procédait de la gestion ordinaire d'un fonds de commerce dépositaire de l'image d'une marque commerciale librement acceptée, a déclaré irrecevables et infondées les demandes de Madame [I], l'a condamné à payer 2.500 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive à la société de Biologie Végétale Yves Rocher,

2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [I] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées au greffe, développées oralement et auxquelles

il est expressément fait référence, Madame [I] demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris dans toute ses dispositions, de dire que la signature d'un contrat commercial ne peut la priver des droits qu'elle tient à titre individuel des dispositions de l'article L.7321-2 du code du travail, de constater que l'activité était exercée personnellement par Madame [I], de dire qu'elle réunit toutes les conditions fixées par les articles L.7321-2, L.7321-3 du code du travail, de constater que la société de Biologie Végétale Yves Rocher porte l'entière responsabilité de la rupture des relations contractuelles. Se déclarer compétent, requalifier la rupture du contrat en licenciement sans cause réelle et sérieuse, de fixer la rémunération référente à la somme

.../...

de 2.687 €, de condamner la société de Biologie Végétale Yves Rocher à lui verser : 5.656 € à titre de rappel de salaire, 65.144 € à titre d'heures supplémentaires, 8.736 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, 8.064 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, 64.488 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dire que ces condamnations seront assorties des intérêts au taux légal, 8.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées au greffe, développées oralement et auxquelles

il est expressément fait référence, la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher demande de confirmer la décision attaquée en toutes ses dispositions, de débouter Madame [I] de sa demande de requalification du contrat de location-gérance en contrat de gérante de succursale, relevant des article L.7321-2 et suivants du code du travail, de sa requalification du contrat de franchise en contrat de travail, de constater l'absence de tout lien de subordination, à titre subsidiaire de constater le caractère irrecevable et mal fondé de sa demande de rappel de salaire et d'heures supplémentaires, de dire que la rupture s'analyse en une démission, de débouter Madame [I] de toutes ses demandes, à titre reconventionnel, la condamner à lui verser 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à 3.500 € pour procédure abusive.

Pour plus ample exposé des circonstances de fait, de la procédure et des prétentions des parties, il convient de se référer au jugement déféré et aux conclusions des parties.

Sur ce, la Cour :

Sur la demande de la société Yves Rocher tendant à voir écarter les pièces communiquées par Madame [I] concernant d'autres relations contractuelles entre [W] [R] et des tiers. La Cour observe d'une part que ces pièces ont été régulièrement communiquées à la société Yves Rocher et d'autre part que la société Yves Rocher appuie elle même son argumentation sur des attestations de témoins et des pièces concernant d'autres relations contractuelles, existant entre elle et des tiers à la procédure de Madame [I]. En conséquence, la Cour rejette cette demande comme étant non fondée.

Sur la requalification du contrat de franchise en contrat de gérante de succursale visé par les articles L.7321-2 du code du travail, sollicitée par Madame [I]

L'article L.7321-2 2° du code du travail dispose qu'est gérant de succursale toute personne dont la profession consiste essentiellement à vendre des marchandises de toute nature qui leur sont exclusivement ou presque exclusivement fournies par une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agrée par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise.

1ère condition : essentiellement vendre des marchandises de toute nature qui sont exclusivement ou presque exclusivement fournies par une seule entreprise

En l'espèce, il n'est pas contesté que la Madame [I] vendait des marchandises fournies exclusivement par [W] [R] (la société Yves Rocher reconnait elle-même dans ses conclusions que seule la cire utilisée pour les épilations n'était pas nécessairement fournie par elle).

Il est établi que chaque année d'exploitation, le CA généré par la vente de produits était bien supérieur à celui généré par les soins.

C'est ainsi qu'en 2008 Madame [I] a enregistré un chiffre

d'affaires de 240 k€ en produits [W] [R] contre 41 k€ pour les soins.

Ce qui est, d'ailleurs, confirmé par les tableaux établis par la société Yves Rocher, elle-même, (page 18 de ses conclusions) dont il résulte que le chiffre d'affaires annuel de Madame [I] était réalisé entre 84,7 % et 86,3 % par la vente de produits Yves Rocher et entre 13,7 % et 15,3 % par l'activité de soins, réalisés exclusivement avec des produits Yves Rocher, activité de soins, également expressement prévue par le contrat de franchise qui précisait que seuls les produits et traitements autorisés par la société Yves Rocher pouvaient être respectivement utilisés et effectués (6.6).

Il s'en déduit que la profession de Madame [I] consistait bien essentiellement à vendre des marchandises fournies exclusivement par [W] [R] et qu'en conséquence le premier critère est rempli.

2ème condition : dans un local fourni ou agréé par cette entreprise

La Société Yves Rocher reconnait à l'appui de son appel que le fonds de

commerce et le local acquis par Madame [I] correspondait bien aux normes fixées par elle (franchiseur) et qu'elle avait donc agréé ce local.

Toutefois, dès 1997 ce local n'était plus aux normes '4ème génération'

fixées par la Société Yves Rocher et encore moins en 2004 ou les nouvelles normes de la 5 ème génération avaient été établies. Raison pour laquelle elle ne pouvait 'agréer' le local d'exploitation de Madame [I]. L'architecte des bâtiments de France ayant refusé l'autorisation de travaux envisagés par Madame [I] pour lui permettre de faire évoluer son local, en vue d'obtenir l'agrément de la Société Yves Rocher. Celle-ci fait valoir que ce deuxième critère n'est pas rempli par Madame [I]. La Société Yves Rocher reconnait que la transformation de ce magasin ne relève pas de l'absence volonté de Madame mais seulement de l'avis de l'architecte des batiments de France. Or, en poursuivant la relation contractuelle puis en passant ce contrat à durée indéterminée, [W] [R] a nécessairement maintenu son agrément pour toute la période contractuelle en conséquence, réforme la décision attaquée.

3ème condition : conditions d'exploitation imposées par l'entreprise

Il résulte des pièces produites par Madame [I] que la Société Yves Rocher fixait les objectifs de l'institut, (pièces K) procédait mois par mois aux évaluations des résultats commerciaux, de la qualité des prestations et services de l'évolution du fichier clients, donnait des instructions nombreuses et détaillées quant aux conditions d'exploitation du fonds : opérations publicitaires, signalétique, agencement et décoration de l'institut, tenues vestimentaires des esthéticiennes, les compétences de l'équipe, la planification de l'emploi du temps, les guides de procédures imposaient à Madame [I] de se conformer dans les moindres détails aux instructions de la société Yves Rocher, sans lui laisser de marge de manoeuvre dans un quelconque domaine.

Il résulte également des pièces versées que la société Yves Rocher

organisait des contrôles réguliers des conditions de travail, du respect des règles d'hygiène et de sécurité, des tarifs, les tenues, de la présentation des produits, afin de vérifier le respect de toutes les consignes données.

La Société Yves Rocher ne conteste pas avoir communiqué à Madame

[I] les grilles de salaire qu'il fallait appliquer aux esthéticiennes et vendeuses de l'institut.

Madame [I] référait systématiquement à la société Yves Rocher du

nombre de ses salariées, de leur qualification et du salaire de chacune d'elles. Dès lors, la société Yves Rocher ne peut soutenir que Madame [I] avait une parfaite maîtrise de la masse salariale et encore moins qu'elle avait une parfaite autonomie dans l'exploitation de son fonds de commerce, au motif que c'était elle qui procédait aux embauches et au licenciement des salariées, prérogatives qui sont habituellement celles d'une directrice de succursale. Dès lors, force est de constater que la troisième condition est également remplie.

4ème condition : des prix imposés par cette entreprise

Il résulte des pièces produites par Madame [I] (tome V) (tome IV) que les prix fixés par la société Yves Rocher étaient inscrits sur les supports publicitaires, dans des mailings transmis directement à la clientèle et que, dès lors, il est difficile de soutenir comme le fait la société Yves Rocher qu'il s'agissait simplement là, de prix conseillés. La responsable de l'institut était bien obligée de vendre les produits aux prix déterminés et controlés par la société Yves Rocher. L'exploitante franchisée n'ayant pas la liberté de fixer les prix de vente des marchandises la quatrième condition est elle aussi remplie.

Aussi réformant la décision attaquée , la cour dit que les conditions visées

à l'article L.7321-2 du code du travail sont remplies, et en conséquence requalifie la relation contractuelle du contrat de franchise entre Madame [I] et la société Yves Rocher, en celui de gérant de succursale. Il s'ensuit que Madame [I] titulaire d'un contrat de franchise remplissant les conditions visées à l'article L.7321-2 du code du travail, bénéficie des dispositions du code du travail suivant l'article L.7321-1 du code du travail sans qu'il y ait à prouver l'existence d'un lien de subordination.

Sur l'application des dispositions L.7321-3 du code du travail

Madame [I] demande le bénéfice des dispositions du livre II du travail relatives aux heures supplémentaires et aux congés payés.

Il est constant que ces dispositions ne sont applicables aux gérants de succursale que s'ils établissent que les conditions de travail, d'hygiène et de sécurité dans l'établissement sont fixées par le mandant.

En l'espèce, Madame [I] démontre que la société Yves Rocher procédait chaque année à une étude de conformité du centre comprenant le contrôle de tous les éléments intérieurs et extérieurs,comprenant l'hygiène et la sécurité de

.../...

l'établissement, à des études de qualimétrie permettant de contrôler les paramètres d'exploitation de l'institut, à des études de qualité, la société Yves Rocher imposait le bureau véritas pour venir contrôler l'installation électrique de l'institut, ses fournisseurs pour contrôler et entretenir les équipements de chauffage, climatisation, ventilation, plomberie, les tenues des employées, les badges, la dératisation. Dès lors, Madame [I] démontre qu'elle n'avait aucune autonomie ni liberté en matière de conditions de travail d'hygiène et de sécurité qui étaient toutes fixées par la société Yves Rocher et qu'elle relève bien des dispositions de l'article L7321-3 du code du travail.

Sur les demandes formées par Madame [I]

Madame [I] demande à la Cour de fixer sa rémunération de référence à la somme de 2.687 € qui correspond à la rémunération versée par la société Yves Rocher à ses directrices d'institut. (2.687 € x 48 mois = 128.976 € brut).

La société Yves Rocher fait valoir mais sans le démontrer que Madame [I] ne peut prétendre à ce salaire, correspondant à la taille d'un d'institut et à un chiffre d'affaires bien supérieur à celui de l'institut de [Localité 2].

Madame [I] demande un rappel de salaire de 5.656 € correspondant

à la différence entre les sommes qu'elle indique avoir perçu entre le 18 mai 2004 et le 22 juin 2008 : 123.320 € et celles qu'elle aurait dû percevoir 128.976 € durant cette période.

Toutefois, il ressort des propres comptes de Madame [I] et notam-

ment de l'attestation de son expert comptable que les prélèvements opérés par de Madame [I] durant cette période de référence s'élève à 168.222 € et non à 123.320 €.

Dès lors, Madame [I] ayant perçu durant l'exploitation de son fonds de commerce des sommes supérieures à la rémunération de référence qu'elle revendique en tant que gérante de succursale, ne peut utilement prétendre à un rappel de salaire. Ce d'autant qu'au vu des pièces comptables produites, elle ne démontre nullement avoir dû payer des dettes de l'institut. Dès lors, la déboute de sa demande de rappel de salaire.

Sur le rappel d'heures supplémentaires

Madame [I] demande 65.144 € au titre des heures supplémentaires,

aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail. En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

En l'espèce, Madame [I] [M] fait valoir qu'elle était présente en permanence dans son institut dont l'amplitude horaire était la suivante de 9 heures à 19 heures du mardi au samedi, (5 jours par semaines soit 50 heures) et qu'elle devait en outre consacrer 5heures minimum par semaine à la tenue de la comptabilité. Elle estime donc son temps de travail à 55 heures par semaine. Pour étayer ses dires, elle produit uniquement les attestations de deux anciennes salariées. Or, en l'espèce la société Yves

.../...

[R] rappelle que les heures d'ouverture étaient laissées à la libre appréciation de la franchisée. Elle conteste avoir fixé les conditions de travail ou même que celles-ci aient été soumises à son accord. Elle conteste les attestations produites par Madame [I] notamment celle de Madame [T], qui en contrat de qualification, n'était pas présente tous les jours dans le magasin et encore moins le dimanche. Elle indique que Madame [I] se contredit puisque dans un de ses propres courriers elle précise qu'elle n'était pas présente à l'institut depuis deux mois, suite à des problèmes de santé. La société Yves Rocher soutient contrairement à ce que prétend Madame [I] qu'elle n'exigeait pas des franchisées ou des locataires gérantes une présence permanente dans l'institut, elle établit d'ailleurs que bon nombre de franchisées pouvaient être responsables de deux, voir trois instituts,en ayant le temps le temps de s'organiser pour les gérer. (pièces 61-1 à 61-11 de la société Yves Rocher)

Si au vu des éléments assez succints produits par Madame [I], la

Cour n'a pas la conviction que Madame [I] était en permanence à l'institut ni faisait 55 heures de permanence par semaine, il est évident cependant qu'avec les systèmes excessivement sophistiqués mis en place par la société Yves Rocher pour controler l'activité, les conditions de travail, les performances ,l'amplitude d'ouverture de l'institut,la Société Yves Rocher avait parfaitement connaissance du fait que Madame [I] effectuait des heures supplémentaires , c'est si vrai que l'intimée dans ses conclusions reconnait que Madame [I] a effectué des heures supplémentaires pour une somme supérieure à 30.000 €. Aussi au vu des éléments produits par les parties et sans qu'il soit nécessaire de procéder à une expertise, la Cour a la conviction que Madame [I] a effectué les heures supplémentaires qui sont justifiés à hauteur de

33.240 € congés payés compris .

Sur la demande compensatrice de congés payés

Madame [I] au soutien de son appel, ayant entre trois et quatre salariées en permanence à l'institut n'établit pas qu'elle était dans l'impossibilité de prendre ses congés annuels, les attestations qu'elle produit sont contradictoires et ne permettent pas d'établir contrairement à ce qu'elle le soutient qu'elle ne prenait que deux semaines de congés par an, en conséquence, la Cour la déboute de sa demande de dommages et intérêts pour congés payés non pris.

Sur la rupture de la relation contractuelle

Madame [I] [M] a résilié le contrat de franchise par courrier du 22 décembre 2007.

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de la démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou

manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances

antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire, d'une démission. Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.

Elle fait valoir que la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher a refusé ses six propositions de transfert de local de l'institut qu'elle lui a proposé sur [Localité 2], sans justifier sa décision ; et a refusé de faire droit à sa demande de prendre la direction des instituts de [Localité 1] et [Localité 3]. En conséquence, de quoi elle a été acculée au départ, sans pouvoir vendre sa clientèle ni son fonds de commerce ni pouvoir faire reprendre le contrat de travail de ses salariées qu'elle a été obligée de licencier. Elle estime cette rupture abusive et demande, en conséquence, d'analyser sa démission comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse . La société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher ne conteste pas les faits dénoncés par Madame [I] qui ont conduit à son départ sans pouvoir vendre sa clientèle. Ce qui lui a nécessairement causé un préjudice important.

Aussi la Cour considère en l'espèce, que la rupture du contrat de franchise est la conséquence directe des manquements imputables à la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher et en conséquence requalifie cette rupture en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Au moment de la rupture Madame [I] avait 13 ans d'ancienneté, 61 ans, le fait de ne pas pouvoir vendre sa clientèle du fait la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher. Compte tenu de son âge et du montant très faible de s a pension de retraite , la Cour fixe le montant de la réparation de son préjudice à la somme de 35.000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher est, en outre, condamnée à payer à Madame [I] 8.736 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, en prenant comme salaire de référence 2.687 € au vu des éléments produits par Madame [I] relatifs au salaire perçu par une autre directrice [W] [R] exerçant des fonctions assimilées aux siennes.

En conséquence, la Cour réforme la décision attaquée dans toutes ses dispositions.

L'équité commande la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher succombant en cause d'appel de la condamner à payer à Madame [I] 1.500 € en application des dispsoitions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

' Réforme la décision attaquée dans toutes ses dispositions.

' Se dit compétent pour statuer sur les demandes de Madame [I].

' Requalifie la relation contractuelle entre Madame [I] et la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher, en gérance de succursale.

' Dit que la relation contractuelle de la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher et de Madame [I], gérant de succursale, remplit les conditions visées aux articles L.7321-1, 7321-2, et 7321-3 du code du travail.

' Dit que la rupture de cette relation contractuelle s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- Fixe la rémunération mensuelle de référence à la somme de 2.687 € (deux mille six cent quatre vingt sept euros) ;

- déboute Madame [I] de sa demande de rappel de salaires et d'indemnité compensatrice de congés payés.

' Condamne la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher à verser à Madame [I] :

- 33.240 € (trente trois mille deux cent quarante euros) à titre d'heures supplémen-

taires,

- 35.000 € (trente cinq mille euros) de dommages et intérêts pour licenciement sans

cause réelle et sérieuse,

- 8.736 € (huit mille sept cent trente six euros) au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement.

' Condamne la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher à verser à Madame [I] 1.500 € (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

' Déboute la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher qui succombe en cause d'appel de ses demandes reconventionnelles.

Déboute Madame [I] de ses autres demandes.

' Condamne la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher aux entiers dépens.

Signé par Madame Maud Vignau, Président, et par Madame Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A-M Lacour-Rivière M. Vignau


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 11/07782
Date de la décision : 18/03/2014

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°11/07782 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-18;11.07782 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award