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19/12/2013 | FRANCE | N°12/06382

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 19 décembre 2013, 12/06382


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 19 DECEMBRE 2013

gtr

(Rédacteur : Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller)



SÉCURITÉ SOCIALE



N° de rôle : 12/06382





















Madame [B] [D]



c/



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE















Nature de la décision :

AU FOND







Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision défé...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 19 DECEMBRE 2013

gtr

(Rédacteur : Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller)

SÉCURITÉ SOCIALE

N° de rôle : 12/06382

Madame [B] [D]

c/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 octobre 2012 (R.G. n°2010/211) par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GIRONDE, suivant déclaration d'appel du 15 novembre 2012,

APPELANTE :

Madame [B] [D]

née le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 2]

de nationalité Française

Assistante en comptabilité, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me ROSET, loco Me Jean-david BOERNER de la SCP H. BOERNER J.D. BOERNER, avocats au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 2]

représentée par Me Sophie PARRENO, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 14 novembre 2013, en audience publique, devant Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller chargé d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller faisant fonction de Président,

Monsieur Benoît MORNET, Conseiller,

Madame Catherine MAILHES, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Gwenael TRIDON DE REY,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [B] [D] a été embauchée, le 11 octobre 1989, par la librairie MOLLAT à [Localité 1] en qualité d'aide-comptable.

Mme [D] a déposé, le 28 octobre 2009, une déclaration de maladie professionnelle auprès de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la GIRONDE (CPAM) accompagnée d'un certificat médical, établi le 27 octobre 2009, par le docteur [V], aux termes duquel elle présente ' une épicondylite coude gauche', affection figurant au tableau 57 des maladies professionnelles.

La CPAM a notifié à Mme [D] un refus de prise en charge, le 25 janvier 2010, après avis du Comité Régional des maladies professionnelles (le CRRMP), confirmé, le 20 juillet 2010, par la Commission de recours amiable de la CPAM (la CRA).

Le 13 septembre 2010, Mme [D] a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Gironde d'un recours destiné à contester cette décision.

Par jugement avant dire-droit daté du 17janvier 2012, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Gironde a sollicité l'avis du CRRMP de TOULOUSE , qui a conclu qu'il n'est pas établi que la maladie numéro 57 A (gauche ) de Mme [D] est directement causée par son travail habituel. Elle ne peut donc pas être reconnue d'origine professionnelle au titre du troisième alinéa de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale.

Par jugement rendu le 16 octobre 2012, Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Gironde a débouté Mme [D] de son recours mal fondé.

Mme [D] a régulièrement relevé appel de cette décision, le 15 novembre 2012.

Par conclusions développées oralement à l'audience auxquelles il est expressément fait référence, Mme [D] sollicite de la Cour qu'elle déclare recevable et bien-fondé son appel, qu'elle juge que l'épicondylite gauche dont elle souffre est en lien avec son activité professionnelle et, en conséquence, qu'elle réforme la décision déférée en ce qu'il a déclaré non fondée son action.

Statuant à nouveau, Mme [D] demande à la Cour de juger que l'épicondylite gauche dont elle souffre constitue une maladie professionnelle décrite par le tableau 57 B qui doit être prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels , de réformer, en conséquence, la décision de refus de reconnaissance de sa maladie professionnelle prise par la CPAM de la GIRONDE et de réformer la décision de refus de prise en charge rendue par la commission de recours amiable.

Elle demande que la CPAM soit condamnée aux dépens ainsi qu'à lui verser une indemnité de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par conclusions développées oralement à l'audience auxquelles il est expressément fait référence, la CPAM demande à la Cour de confirmer la décision déférée, de débouter Mme [D] de ses demandes et qu'elle soit condamnée à lui régler la somme de 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

A l'audience du 14 novembre 2013, Mme [D] a également oralement sollicité, à titre subsidiaire, que la Cour ordonne une expertise destinée à établir le lien entre la maladie et ses gestes quotidiens dans son travail.

La CPAM s'est opposée à cette demande.

MOTIFS DE LA DECISION

* Sur la demande de reconnaissance de maladie professionnelle

Selon l'article L.461-1 du code de la sécurité sociale

'Les dispositions du présent livre sont applicables aux maladies d'origine professionnelle sous réserve des dispositions du présent titre. En ce qui concerne les maladies professionnelles, la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle est assimilée à la date de l'accident.

Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.(...)

Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1.'

Mme [D] fait valoir que le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Gironde a estimé à tort être lié par la décision de rejet émise par les deux CRRMP .

Elle soutient qu'au regard de la présomption prévue à l'article L 461-1 ci-dessus cité, la pathologie dont elle souffre doit être prévue dans le tableau des maladies professionnelles, remplir la condition d'exposition aux risques au cours de travaux figurant dans la liste de ce tableau et remplir la condition relative au délai de prise en charge, que sa pathologie à savoir une épicondylite est inscrite au tableau 57 B, diagnostic qui n'est pas remis en cause même si le CRRMP de TOULOUSE a pu commettre l'erreur d'écrire qu'il s'agit d'une pathologie prévue au tableau 57 A, que son travail consistait au quotidien à récupérer des colis au service de réception des marchandises, des factures et des bons de livraison, chacun pouvant compter jusqu'à une centaine de pages, que le nombre de liasses pouvait être estimé de 400 à 700 par jour, de classer ces liasses qu'il était nécessaire de perforer en utilisant un gros perforateur manuel de plus de 800 grammes rendant nécessaire une sollicitation de son bras gauche liée à leur épaisseur et que ce perforateur a été remplacé, début 2010, par un perforateur électrique qui n'a pas été efficace.

Mme [D] soutient que ce mouvement était répété et que son bras gauche était constamment sollicité , qu'il s'agit de mouvements d'extension de la main ou l'avant bras ou des mouvements de supination et de prono-supination prévus au tableau 57 B.

Mme [D] expose qu'aucune analyse médicale sérieuse et contradictoire n'a été effectuée sur sa personne, alors qu'elle produit des pièces médicales justifiant aussi bien de son état médical que du lien entre son emploi et la pathologie et qu'elle s'est vue reconnaître la qualité de travailleur handicapé par la MDPH le 29 septembre 2010.

La CPAM fait valoir qu'au vu des éléments transmis par l'assurée et l'employeur elle a estimé que Mme [D] n'effectuait pas les travaux énumérés au tableau 57 des maladies professionnelles, que Mme [D] n'établit pas que la pathologie qu'elle a développée est directement causée par son travail habituel de sorte que le bénéfice de la législation professionnelle ne peut lui être accordée et que les deux avis concordants des deux CRRMP s'imposent à la caisse.

Le tableau 57 répertorie les affections péri articulaires provoqués par certains gestes et postures de travail, et le tableau 57 B fixe une liste limitative d'affections susceptibles d'affecter le coude, notamment l'épicondylite, avec un délai de prise en charge de 7 jours et la liste de travaux suivantes : Travaux comportant habituellement des mouvements répétés de préhension ou d'extension de la main sur l'avant - bras ou des mouvements de supination ou de prono-supination .

Le débat porte, dans un premier temps, sur le fait de savoir si la liste énumérant les travaux susceptibles de provoquer la maladie de Mme [D] selon les préconisations du tableau 57 B correspond aux tâches qu'elle accomplissait dans le cadre de son emploi pour qu'elle puisse bénéficier de la présomption prévue à l'article L 461-1-2 précité. Dans la négative, il appartient à Mme [D] de rapporter démontrer que sa pathologie a un lien avec son travail habituel au visa de l'article L 461-1-3 précité.

Mme [D] a été embauchée, le 11 octobre 1989, par la société MOLLAT en qualité d'aide-comptable.

Elle a été placée en arrêt de travail, à compter du 27 octobre 2009, en raison d'une épicondylite développée au coude gauche dont elle a demandé la prise en charge au titre de la législation professionnelle.

Les arrêts de travail de Mme [D], produits aux débats, ont été renouvelés jusqu'au 30 juin 2011.

Le CRRMP de BORDEAUX a considéré dans son avis, du 25 janvier 2010, que 'le travail de Mme [D] consiste en du classement de factures fournisseurs ( 3000 à 4000 factures par mois), qu'elle utilise un perforateur (jusqu'à 40 feuilles) qui a été récemment remplacé par un perforateur électrique. Les factures doivent être classées nécessitant la manipulation de 20 classeurs par jour. Mme H. doit manipuler des tas de factures non classées (de 50 cm de hauteur) ; elle frappe le clavier et utilise la souris d'ordinateur.

Le Comité considère que les gestes et postures décrits ne mettent pas en évidence d'hyper-sollicitation du coude gauche ( pas de répétitivité , pas de cadence soutenue, pas de préhension en force associée à des flexions/ extensions et prono-supinations, pas de port de charges) 'et qu'en conséquence la preuve d'un lien direct entre la pathologie déclarée et l'exposition professionnelle ne sont pas réunis.

Le CRRMP de TOULOUSE, le 27 février 2012, retenant que ' les gestes réalisés et la description de l'activité ne permettent pas de mettre en évidence d'hyper sollicitation dans la mesure où il ne semble pas y avoir de cadence soutenue, pas de préhension forte, pas de ports de charges lourdes et pas de mouvements de prosupination. De plus la pathologie est survenue du côté gauche alors que Mme [D] a sa main dominante du coté droit ' a conclu dans des termes identiques à ceux du CRRMP de BORDEAUX, même s'il a noté dans son rapport ' qu'il n'est pas établi que la maladie n° 57 A (gauche ) de Mme [D] est directement causée par son travail habituel" son analyse reposant effectivement sur le tableau 57 B.

Mme [D] a rempli à la demande de la CPAM un questionnaire décrivant son activité professionnelle: elle décrit un travail répétitif consistant essentiellement en du classement factures, d'un volume important, et nécessitant non seulement la manipulation de classeurs où elles étaient rangées, mais aussi l'utilisation d'un perforateur.

Les parties s'accordent quant au contenu du travail de Mme [D].

Les deux bras de Mme [D] ont donc été sollicités lors de chaque journée de travail, pendant 20 ans, de sa date d'embauche à la date de déclaration de maladie professionnelle.

Il résulte des documents médicaux produits par Mme [D] qu'elle a été hospitalisée le 17 janvier 2011 pour subir une intervention chirurgicale ' à type de ténotomie en VY d'allongement des tendons épicondyliens", à la suite de laquelle le docteur [C] a conclu ' cette pathologie est en lien avec ses activités professionnelles avec travaux réguliers répétitifs et ports de charges lourdes '.

Le 21 avril 2010, le docteur [N], médecin du travail, a constaté que la pathologie TMS ( épicondyalgies gauches) de Mme [D] [B] est en relation directe avec son emploi : "En effet son poste nécessite des gestes d'hyper-sollicitation du MSG avec répétitivité importante et cadence moyenne'.

Le Docteur [V] a émis, le 26 avril 2010, un avis similaire ' elle présente une épicondylite du coude gauche sévère, en rapport avec son travail (répétitif et port de charges avec classement de dossiers...)'.

La cour, qui n'est pas tenue par les avis des deux CRRMP, considère que lors de son activité professionnelle accomplie 20 années durant en qualité d'aide-comptable au sein de la librairie MOLLAT, Mme [D] a accompli avec son bras gauche des mouvements répétés de supination et prono-supination, ayant eu pour conséquence le développement d'une pathologie d'épicondylite du coude gauche et que les activités accomplies sont prévues au tableau 57 B des maladies professionnelles, de sorte qu'elle peut bénéficier de la présomption prévue à l'article L 461-1 précité et ce, d'autant plus qu'elle rapporte également médicalement la preuve d'un lien existant entre sa pathologie et son travail habituel.

Le jugement déféré sera en conséquence réformé en toutes ses dispositions, ainsi que la décision de la Commission de Recours Amiable de la CPAM du 20 juillet 2010.

Le bénéfice de la législation professionnelle sera, en conséquence, accordé à Mme [D].

* Sur les autres demandes

L'équité et les circonstances de la cause commandent de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Mme [D] qui se verra allouer la somme de 1.000 € à ce titre, somme à régler par la CPAM, qui sera déboutée de la même demande.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

INFIRME le jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la GIRONDE rendu le 16 octobre 2012, en toutes ses dispositions,

Et statuant de nouveau

DIT QUE la maladie déclarée par Mme [B] [D] le 28 octobre 2009, à savoir une épicondylite gauche prévue au tableau 57 B des maladies professionnelles, doit être prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels,

REFORME la décision de la Commission de Recours amiable du 20 juillet 2010 de la CPAM a qui conclu au rejet de la demande de prise en charge de Mme [D],

DIT QUE la CPAM de la GIRONDE devra payer à Mme [B] [D] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Signé par Monsieur Benoît MORNET, Conseiller, faisant fonction de Président, et par Gwenaël TRIDON DE REY , greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

G. TRIDON DE REY Benoît MORNET,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 12/06382
Date de la décision : 19/12/2013

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°12/06382 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-12-19;12.06382 ?
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