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19/12/2013 | FRANCE | N°12/02244

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 19 décembre 2013, 12/02244


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU :

fc

(Rédacteur : Monsieur Benoit MORNET, Conseiller,)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 12/02244

















Monsieur [U] [O]



c/



SA SOBODIS





















Nature de la décision : AU FOND







Notifié par LRAR le

:



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 mars 2012 (R.G. n°F10/...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU :

fc

(Rédacteur : Monsieur Benoit MORNET, Conseiller,)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 12/02244

Monsieur [U] [O]

c/

SA SOBODIS

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 mars 2012 (R.G. n°F10/0643) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, section commerce suivant déclaration d'appel du 16 avril 2012,

APPELANT :

Monsieur [U] [O]

de nationalité Française

Profession : Boucher

demeurant [Adresse 1]

représenté par Maître Claire MELIANDE loco Maître Julie MENJOULOU CLAVERIE, avocates au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SA SOBODIS,

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 2]

représentée par Maître Alain PAGNOUX, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 13 novembre 2013 en audience publique, devant Monsieur Benoit MORNET et Madame Catherine MAILHES, Conseillers chargés d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Benoit MORNET, Conseiller, faisant fonction de Président,

Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller,

Madame Catherine MAILHES, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Florence CHANVRIT adjoint administratif principal faisant fonction de greffier,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOS'' DU LITIGE

M. [O] a été engagé par la société Mutant Sud-Ouest par contrat de travail à durée indéterminée du 12 septembre 1996 en qualité de boucher ; son contrat de travail a été transféré à la société Sobodis (l'employeur) à compter du 1er janvier 1999.

M. [O] a signé deux avenants à son contrat de travail, l'un en date du 10 janvier 2001 avec la qualification de second boucher prévoyant l'application de la convention collective nationale de la boucherie, l'autre en date du 31 octobre 2005 avec la qualification de chef boucher.

Le 6 mars 2010, M. [O] a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de rappel de salaire.

Par jugement rendu le 26 mars 2012, le conseil de prud'hommes de Bordeaux a débouté M. [O] de sa demande.

M. [O] a relevé appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas critiquables.

M. [O] a été licencié pour faute grave par courrier du 24 janvier 2013.

Dans ses conclusions développées oralement à l'audience, il demande à la cour de condamner la société Sobodis à lui payer la somme de 41 216,21 euros et celle de 15.413,72 euros au titre de rappels de salaire d'avril 2006 à décembre 2012, la somme de 4 121,62 euros et celle de 1.541,37 euros au titre des congés payés afférents, la somme de 12.874,43 euros et celle de 4.541 euros au titre de la prime annuelle de 2004 à 2012, la somme de 111 747,84 euros titre de dommages et intérêts pour licenciement nul/et dans tous les cas dépourvu de cause réelle et sérieuse, dans l'hypothèse d'une condamnation de la société SOBODIS au paiement des rappels de salaire, la somme de 86 464,53 euros titre de dommages et intérêts pour licenciement nul/et dans tous les cas dépourvu de cause réelle et sérieuse en l'absence de condamnation de la société SOBODIS au paiement des rappels de salaire, la somme de 14 011,48 euros à titre d'indemnité de licenciement, dans l'hypothèse d'une condamnation de la société SOBODIS au paiement des rappels de salaire, la somme de 10 718,41 euros à titre d'indemnité de licenciement, en l'absence de condamnation de la société SOBODIS au paiement des rappels de salaire, la somme de 6 707,64 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 670,77 euros à titre de congés payés afférents, dans l'hypothèse d'une condamnation de la société SOBODIS au paiement des rappels de salaire, la somme de 5 131,16 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 613,12 € bruts à titre de congés payés afférents, en l'absence de condamnation de la société SOBODIS au paiement des rappels de salaire, et la somme de 1 710,39 euros à titre de rappel de salaire du fait de la mise à pied à titre conservatoire outre la somme de 171, 04 € bruts à titre de congés payés afférents.

Il demande enfin à la cour d'ordonner la remise des bulletins de salaires et documents de fin de contrat rectifiés sous astreinte et une indemnité de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il soutient que la société Sobodis ne lui a pas payé le salaire minimum conventionnel prévu dès lors que l'on exclu la part variable de la rémunération, que la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire n'a pas été dénoncée dans les formes de sorte qu'il doit bénéficier des avantages individuels acquis sous le bénéfice de cette convention collective, notamment la prime annuelle, que le licenciement prononcé à son encontre est nul pour avoir été prononcé pendant une période de suspension du contrat de travail, et à tout le moins sans cause réelle et sérieuse dans la mesure où la mutation proposée, et par lui refusée, avait pour conséquence une baisse de sa rémunération, la mise à pied conservatoire n'étant, en tout état de cause, pas justifiée.

Dans ses conclusions développées oralement à l'audience, la société Sobodis demande à la cour de confirmer le jugement déféré, de débouter M. [O] de toutes ses demandes, et de le condamner à lui payer une indemnité de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient qu'en l'absence de dispositions conventionnelles contraires, toutes les sommes versées en contrepartie du travail entrent dans le calcul de la rémunération à comparer au salaire minimum conventionnel, que l'avenant du 10 janvier 2001prévoit précisément la rémunération de M. [O] et l'application de la convention collective de la boucherie-charcuterie. S'agissant de la rupture du contrat de travail, l'employeur soutient que la mutation était licite au regard de la clause de mobilité du contrat de travail, et qu'en tout état de cause, la mutation est intervenue dans le même secteur géographique de sorte qu'elle ne peut s'analyser en une modification substantielle du contrat de travail ; la société ajoute que le refus de cette mutation et le refus de se rendre à la visite médicale de reprise constitue une faute grave justifiant le licenciement pendant la période de suspension du contrat de travail.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I- Sur les demandes relatives à l'exécution du contrat de travail

Aux termes de l'article 1134 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

1- sur la demande en rappel de salaire

La convention collective de la boucherie charcuterie fixe la rémunération minimum en fonction de la qualification du salarié.

La comparaison du salaire versé au minima conventionnel impose de prendre en considération toutes les sommes perçues par le salarié en contrepartie ou à l'occasion de son travail, sauf exception expressément mentionnée par la convention collective.

En l'espèce, l'article 6 de l'avenant signé par les parties le 31 octobre 2005 modifiant l'avenant du 10 janvier 2001, est ainsi rédigé :

'6°) RÉMUNÉRATION

Votre salaire brut est fixé à 1.258,58 euros par mois,

Outre votre rémunération brute mensuelle, vous bénéficiez :

- d'un forfait pour dépassement horaire, soit 97,70 euros par mois ;

- d'un % de 0,90% du chiffre d'affaire TTC du traditionnel ou du LS,

- d'un % de 1% de la valeur de la marge si celle-ci est supérieure à 27% du CA TTC,

- d'une prime d'hygiène versée au mois de novembre de l'année, en fonction des résultats obtenus aux audits d'hygiène dans l'année,

- d'une prime exceptionnelle versée au mois de novembre de l'année, en fonction des résultats d'exploitation obtenus pendant l'année (CA et marge)'.

Contrairement à ce que prétend M. [O], l'élément variable n'est pas un pourcentage global lié au chiffre d'affaire de la société puisque c'est le chiffre d'affaire du 'traditionnel' et du 'libre service' du rayon boucherie qui est visé dans cette rémunération contractuelle ; il s'agit donc d'un élément variable lié à la performance du boucher et à la marge dégagée dans l'exploitation de son propre rayon.

Il en est de même pour la prime d'hygiène, qui tend notamment à lutter contre la pratique illégale de 'la remballe', et qui est donc liée à la gestion du rayon boucherie.

Pour comparer le salaire versé à M. [O] au minima conventionnel, il convient donc en l'espèce de prendre en compte toutes les sommes perçues en contrepartie ou à l'occasion de son travail, en ce compris les éléments variables, à savoir les primes sur le chiffre d'affaire, sur le respect de l'hygiène, ainsi que le forfait heures supplémentaires.

Compte tenu de ces éléments, le salaire versé par la société Sobodis à M. [O] était supérieur au minimum conventionnel.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [O] de sa demande de rappel de salaire.

2- sur la demande de rappel de prime de fin d'année

Il résulte des pièces produites aux débats que durant la période de 15 mois consécutive au transfert d'entreprise de la société Mutant Distribution à la société Sobodis, l'employeur a maintenu la convention collective applicable à la société Mutant Distribution (convention collective de gros et de détail à prédominance alimentaire) qui prévoit la prime de fin d'année et la convention collective appliquée dans la société Sobodis (convention collective de la boucherie charcuterie) qui ne prévoit pas la prime de fin d'année, de sorte que la règle des avantages individuels acquis a été respectée.

M. [O] ne conteste d'ailleurs pas avoir perçu sa prime de fin d'année en 1999 et en 2000.

L'article L.122-12 alinéa 2 du code du travail, applicable à l'époque, ne faisait pas obstacle à ce qu'intervienne une novation du contrat de travail.

La lecture du document intitulé 'avenant au contrat de travail' signé par les parties le 10 janvier 2001 démontre qu'elles ont entendu conclure un nouveau contrat de travail puisque cet 'avenant' qui comporte trois pages et reprend la date d'engagement initial, précise en détail la qualification et le statut du salarié, le lieu d'application, la rémunération, l'obligation de réserve, la clause de non concurrence, la convention collective applicable, l'emploi et les attribution du salarié ainsi que ses activités professionnelles.

Le paragraphe consacré à la convention collective est ainsi rédigé :

'La convention collective applicable est la convention collective nationale de boucherie : boucherie - charcuterie, et boucherie hippophagique, triperie, commerce de volailles et gibiers du 12 décembre 1978 étendue par arrêté du 15 mai 1979".

Il résulte clairement de ces dispositions contractuelles que les parties ont entendu appliquer la convention collective de la boucherie à compter de janvier 2001 et qu'en acceptant ce nouveau contrat de travail, M. [O] a expressément accepté la modification des éléments de sa rémunération et notamment la suppression de la prime d'ancienneté.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [O] de sa demande au titre du rappel de prime de fin d'année.

II- Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail

1- sur la rupture du contrat de travail

Aux termes de l'article L. 1226-9 du code du travail, au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir son contrat de travail pour un motif étranger à la maladie.

Il résulte de l'article R. 4624-22 du code du travail qu'après une absence d'au moins 30 jours pour accident ou maladie (professionnel ou non), le salarié doit bénéficier d'une visite de reprise par le médecin du travail et que seul cet examen met fin à la période de suspension du contrat de travail.

En l'espèce, il résulte des pièces produites aux débats que l'employeur a souhaité utiliser la clause de mobilité inclue dans le contrat de travail pour imposer au salarié une mutation, à l'issue de son arrêt de travail, du magasin de [Localité 2] au magasin de [Localité 1].

Il résulte encore des courriers produits aux débats que M. [O] a manifesté à plusieurs reprise son opposition à la mutation envisagée.

Il résulte de ces éléments que le seul refus du salarié de se présenter à la visite de reprise organisée à [Localité 1], lieu d'affectation proposée dans le cadre de la mutation, laquelle ne pouvait prendre effet qu'après la visite de reprise, ne pouvait constituer la faute grave, seule susceptible de justifier un licenciement.

Dès lors que M. [O] ne s'était pas présenté à la visite de reprise organisée par l'employeur à [Localité 1], il appartenait à l'employeur d'organiser une visite de reprise à [Localité 2], lieu d'affectation du salarié au moment de l'arrêt maladie.

L'employeur ne peut pas plus reprocher au salarié le refus d'une mutation qui n'avait pas encore pris effet puisque le contrat de travail était encore en cours de suspension. Il est donc sans objet de rechercher si le refus de la mutation par le salarié était ou non justifié.

Il résulte des ces éléments qu'en rompant le contrat de travail pendant une période de suspension sans justifier ni d'une faute grave du salarié, ni de l'impossibilité de maintenir le contrat de travail, le licenciement prononcé contre M. [O] est nul.

2- sur les conséquences de la nullité du licenciement.

Sur la base d'un salaire mensuel brut de 2.565,58 euros, il convient de condamner l'employeur à payer à M. [O] la somme de 5.131,16 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et la somme de 513,12 euros au titre des congés payés afférents, la somme de 1710,39 euros à titre de rappel de salaire pour la mise à pied conservatoire et le somme de 171,04 euros au titre des congés payés afférents.

Compte tenu de son âge et de son ancienneté, il convient également de condamner la société Sobodis à payer à M. [O] la somme de 30.800 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice pour licenciement nul.

III- Sur les dépens et les demandes d'indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile

La société Sobodis succombant à l'instance, elle en supportera les dépens. Il convient en outre de condamner la société Sobodis à payer à M. [O] une indemnité de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire en dernier ressort :

CONFIRME le jugement rendu le 26 mars 2012 par le conseil de prud'hommes de Bordeaux en ce qu'il a débouté M. [O] de ses demandes de rappel de salaire et de prime de fin d'année ;

Y AJOUTANT :

Dit que le licenciement prononcé à l'égard de M. [O] est nul ;

CONDAMNE la société Sobodis à payer à M. [O] la somme de 5.131,16 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et la somme de 513,12 euros au titre des congés payés afférents, la somme de 1710,39 euros à titre de rappel de salaire pour la mise à pied conservatoire et le somme de 171,04 euros au titre des congés payés afférents

CONDAMNE la société Sobodis à payer à M. [O] la somme de 30.800 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice pour licenciement nul.

Signé par Monsieur Benoît MORNET, Conseiller, faisant fonction de Président, et par Gwenaël TRIDON DE REY , greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

G. TRIDON DE REY Benoît MORNET,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 12/02244
Date de la décision : 19/12/2013

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°12/02244 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-12-19;12.02244 ?
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