La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/09/2013 | FRANCE | N°12/04338

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 24 septembre 2013, 12/04338


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



--------------------------







ARRÊT DU : 24 SEPTEMBRE 2013



(Rédacteur : Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller)

(PH)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 12/04338











Mademoiselle [K] [M]



c/



SARL Aldi Marché Cestas



SARL Aldi Marché Toulouse













Nature de la décision : AU FOND











Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :





Déc...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 24 SEPTEMBRE 2013

(Rédacteur : Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller)

(PH)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 12/04338

Mademoiselle [K] [M]

c/

SARL Aldi Marché Cestas

SARL Aldi Marché Toulouse

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 juin 2012 (RG n° F 11/0006) par le Conseil de Prud'hommes - formation paritaire - de Libourne, section Commerce, suivant déclaration d'appel du 20 juillet 2012,

APPELANTE :

Mademoiselle [K] [M], née le [Date naissance 1] 1981 à [Localité 1], de

nationalité Française, demeurant [Adresse 1],

Représentée par Maître Justine Normand substituant Maître François Ruffié, avocats au barreau de Libourne,

INTIMÉES :

SARL Aldi Marché Cestas, siret n° 403 092 620 01321, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 2],

SARL Aldi Marché Toulouse, siret n° 414 598 946 00021, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 3],

Représentées par Maître Laurence Munier, avocat au barreau de Bordeaux,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 juin 2013 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Maud Vignau, Président,

Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller,

Monsieur Jean-Pierre Franco, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière.

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Melle [K] [M] a été embauchée par la SARL Aldi Marché Toulouse en qualité d'assistante de magasin à temps complet par contrat de travail à durée indéterminée en date du 5 janvier 2009 à effet immédiat.

Le 13 mai 2009 le magasin de [Localité 2], dans lequel travaillait Melle [M], faisait l'objet d'un vol à main armée, victime d'un accident du travail Melle [M] était placée en arrêt maladie jusqu'au 17 mai 2009 puis du 1er au 13 juin 2009 et du 17 juin au 14 juillet 2009.

Le 20 mai 2009 la SARL Aldi Marché Toulouse lui notifiait un aver-tissement à la suite d'un entretien qui s'est déroulé le 13 mai 2009.

Le 1er juillet 2009 le contrat de travail de Mme [M] était transféré à la SARL Aldi Marché Cestas en application des dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail.

Le médecin du travail, après l'avoir déclarée temporairement inapte le 17 juin 2009, déclarait Melle [M] apte lors de la visite de reprise du 15 juillet 2009 puis inapte à tous les postes de l'entreprise pour danger grave et immédiat en un seul examen le 24 juillet 2009.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 7 août 2009 Melle [M] était convoquée à un entretien préalable à son éventuel licenciement le 18 août 2009.

La SARL Aldi Marché Cestas lui notifiait son licenciement pour inaptitude le 20 août 2009.

Le 14 janvier 2011, Melle [M] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Libourne pour obtenir la condamnation solidaire des sociétés Aldi Cestas et Aldi Toulouse à lui payer des dommages-intérêts pour préjudice moral, pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, pour non-respect de la procédure de licenciement, pour manquement de l'employeur à l'obligation d'exécuter le contrat de travail de bonne foi et en paiement de l'indemnité spéciale de licenciement et de diverses créances salariales.

Par décision en date du 22 juin 2012, le Conseil de Prud'hommes a débouté Melle [M] de l'ensemble de ses demandes.

Le 20 juillet 2012, Melle [M] a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 5 décembre 2012, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, Melle [M] conclut à la réformation du jugement entrepris.

Elle demande à la Cour de dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et forme, dès lors, les demandes en paiement des sommes suivantes à l'encontre de 'l'employeur' :

- 5.673,38 € de dommages intérêts pour manquement à l'obligation d'exécuter le

contrat de travail de bonne foi,

- 22.692,00 € nets de CSG et de CRDS pour manquement à l'obligation de

reclassement et défaut de consultation des délégués du personnel,

- 2.106,54 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 210,65 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 454,00 € à titre d'indemnité spéciale de licenciement,

- 2.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 26 avril 2013 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la SARL Aldi Marché Cestas et la SARL Aldi Marché Toulouse demandent la confirmation du jugement entrepris et la condam-nation de Melle [M] à payer à chacune d'elles la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION

* Sur l'exécution de mauvaise foi du contrat de travail :

Il incombe à Melle [M] de rapporter la preuve des manquements de l'employeur à l'exécution de bonne foi du contrat de travail qu'elle invoque pour solliciter le paiement de dommages-intérêts.

À cet égard, elle ne produit aucune pièce de nature à établir qu'elle a été victime de brimades, de pressions tels des refus de pause, absence de monnaie dans la caisse etc... . Elle ne justifie pas davantage d'une quelconque surcharge de travail ou d'une modification du nombre réel des heures travaillées.

Contrairement aux affirmations de Melle [M], Mme [O] caissière présente dans le magasin lors du vol à main armée le 13 mai 2009, confirme les propos de l'employeur selon lesquels une aide psychologique a été proposée aux salariés après ces faits. Melle [M] ne justifie nullement avoir été contrainte de reprendre rapidement le travail, elle ne démontre pas que l'employeur a posé des obstacles à sa prise de rendez-vous auprès d'un spécialiste, là encore, ses affirmations ne sont étayées par aucune pièce.

Par ailleurs, il apparaît que c'est à la suite d'erreurs de caisse commises le 12 mai 2009 que l'employeur l'a reçue en entretien le 13 mai 2009, avant le braquage qui a eu lieu en fin de journée. On ne peut considérer que caractérise un manquement de l'employeur à l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail la décision de celui-ci de notifier à la salariée une sanction d'avertissement le 20 mai 2009 laquelle ne fait au demeurant l'objet d'aucune demande en annulation.

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Melle [M] de sa demande en paiement de dommages-intérêts à ce titre.

* Sur la rupture du contrat de travail :

Il n'est pas contesté que le transfert du contrat de travail de Melle [M] de la SARL Aldi Marché Toulouse à la SARL Aldi Marché Cestas s'étant fait par application volontaire des dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail, ainsi que cela résulte de la lettre adressée à la salariée le 26 mai 2009, le respect des règles protectrices relatives au licenciement pour inaptitude consécutive à un accident du travail s'impose.

Or, en application des dispositions de l'article L 1226-10 du code du travail, lorsque le salarié victime d'un accident du travail est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités et prend en compte, après avis des délégués du personnel, des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. L'emploi proposé doit être aussi comparable que possible de l'emploi précédemment occupé au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagements du temps de travail.

L'avis des délégués du personnel doit être recueilli après la deuxième visite de reprise ou après la visite de reprise constatant le danger immédiat, et avant que soit initiée la procédure de licenciement, soit en l'espèce après le 24 juillet 2009 et avant le 7 août 2009.

Melle [M] qui relève qu'aux mois de juillet et août 2009 la SARL Aldi Marché Cestas comptait plus de 11 salariés se prévaut de l'absence de recueil de l'avis des délégués du personnel.

La SARL Aldi Marché Cestas reconnaît qu'au moment de la déclaration d'inaptitude de la salariée il n'y avait pas de délégués du personnel dans cette société, nouvellement créée à ses dires, et que les élections des délégués du personnel n'ont eu lieu qu'au mois de juin 2010.

Or, Melle [M] produit des documents recueillis auprès du site 'société.com' duquel il résulte que la SARL Aldi Marché Cestas est immatriculée depuis le 8 décembre 1995.

En application des dispositions de l'article L 2312-2 du code du travail la mise en place des délégués du personnel est obligatoire si l'effectif de la société a atteint 11 salariés et plus pendant 12 mois, consécutifs ou non, au cours des trois années précédentes.

Seul l'employeur est en possession des éléments qui permettent de vérifier si les conditions de la tenue obligatoire des élections des délégués du personnel prévues par l'article L 2312-2 sont ou non réunies.

Or, la SARL Aldi Marché Cestas se contente de produire les pages 5, 6 et 7/8 du registre des entrées et des sorties du personnel qui concernent les mouvements de celui-ci à compter du 1er juillet 2009 ; étant observé que l'absence des pages 1 à 4 confirme que la société avait bien une existence et une activité avant le 1er juillet 2009. La SARL Aldi Marché Cestas qui se garde de fournir l'intégralité du registre du personnel ne met pas la Cour en mesure de constater que la mise en place des délégués du personnel n'était pas obligatoire.

La preuve du caractère non obligatoire de l'organisation des élections des délégués du personnel n'étant pas rapportée il y a lieu de constater que la SARL Aldi Marché Cestas qui ne saurait se soustraire à son obligation de recueillir l'avis des délégués du personnel au motif de leur absence, dès lors que leur mise en place était obligatoire et qu'aucun procès-verbal de carence n'a été établi, doit être condamnée au paiement de l'indemnité prévue par l'article L 1226-15 du code du travail.

Il convient de rappeler que l'omission de la formalité substantielle de consultation des délégués du personnel et que la méconnaissance par l'employeur des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte ne sont sanctionnées que par une seule et même indemnité au titre de l'article L 1126-15 susvisé.

A l'examen des bulletins de salaire il apparaît que le salaire mensuel brut de Melle [M] s'est élevé en moyenne à 1.735,67 € bruts.

En conséquence, réformant le jugement déféré il y a lieu de condamner la SARL Aldi Marché Cestas, seul employeur au moment du licenciement, à payer à Melle [M] la somme de 20.828,04 € à titre de dommages intérêts avec intérêts courant au taux légal à compter de ce jour en application des dispositions de l'article 1153-1 du code civil.

* Sur l'indemnité compensatrice :

En application des dispositions de l'article L 1226-14 du code du travail le salarié licencié pour inaptitude consécutive à un accident du travail et impossibilité de le reclasser est en droit de prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue par l'article L 1234-5 du même code à l'exclusion de l'indemnité conventionnelle. Melle [M] ayant moins de deux ans d'ancienneté au moment de son licenciement le montant de l'indemnité compensatrice égale un mois de salaire soit 1.735,67 €. L'employeur justifie lui avoir versé à ce titre la somme de 1.675,72 €, en conséquence, réformant le jugement déféré il convient de condamner la SARL Aldi Marché Cestas à payer à Melle [M] la somme de 59,95 € bruts au titre du solde de l'indemnité compensatrice avec intérêts courant au taux légal à compter du 14 janvier 2011 en application des dispositions de l'article 1153 du code civil.

* Sur l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis :

L'indemnité spéciale prévue par l'article L 1226-14 du code du travail et dont le montant est égal à l'indemnité prévue par l'article L 1234-5 du code du travail n'a pas la nature de préavis. En conséquence, Melle [M] est mal fondée à prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés sur préavis. Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de ce chef de demande.

* Sur l'indemnité spéciale de licenciement :

L'article L 1226-14 du code du travail prévoit que la rupture du contrat de travail dans le cas prévu par l'article L 1226-12 du même code ouvre droit pour le salarié au paiement d'une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L 1234-9 du présent code.

L'ancienneté de Melle [M] au moment du licenciement était de sept mois et 15 jours, et non de huit mois, elle pouvait donc prétendre au paiement d'une indemnité spéciale de licenciement d'un montant de 437,33 € bruts qui lui a été réglée. Le jugement déféré sera, dès lors, confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande à ce titre.

* Sur les autres demandes :

L'équité et les circonstances de la cause commandent de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Melle [M] qui se verra allouer la somme de 1.200 € à ce titre.

La SARL Aldi Marché Cestas qui succombe conservera la charge de ses frais irrépétibles et sera condamnée aux dépens de la procédure de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

' Confirme partiellement le jugement déféré en ce qu'il a débouté Melle [M] de ses demandes en paiement de dommages intérêts pour manquement à l'exécution de bonne foi du contrat de travail, en paiement d'une indemnité spéciale de licenciement et d'une indemnité compensatrice de congés payés sur préavis.

Et, statuant de nouveau :

' Condamne la SARL Aldi Marché Cestas à verser à Melle [M] la somme de 20.828,04 € (vingt mille huit cent vingt huit euros et quatre centimes) à titre de dommages intérêts avec intérêts courant au taux légal à compter de ce jour, et celle de 59,95 € (cinquante neuf euros et quatre vingt quinze centimes) bruts avec intérêts courant au taux légal à compter du 14 janvier 2011.

' Condamne la SARL Aldi Marché Cestas à verser à Melle [M] la somme de 1.200 € (mille deux cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

' Condamne la SARL Aldi Marché Cestas aux dépens de la procédure de première instance et d'appel.

Signé par Madame Maud Vignau, Président, et par Madame Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A-M Lacour-Rivière M. Vignau


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 12/04338
Date de la décision : 24/09/2013

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°12/04338 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-09-24;12.04338 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award