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23/05/2013 | FRANCE | N°12/04044

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 23 mai 2013, 12/04044


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



--------------------------











ARRÊT DU : 23 MAI 2013



(Rédacteur : Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller)



SÉCURITÉ SOCIALE



N° de rôle : 12/04044



CT









SA SAFEN

c/

Madame [H] [O]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/12429 du 19/07/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANC

E MALADIE DE LA GIRONDE

















Nature de la décision : AU FOND







Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de pro...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 23 MAI 2013

(Rédacteur : Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller)

SÉCURITÉ SOCIALE

N° de rôle : 12/04044

CT

SA SAFEN

c/

Madame [H] [O]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/12429 du 19/07/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 01 juin 2012 (R.G. n°2011/630) par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GIRONDE, , suivant déclaration d'appel du 06 juillet 2012,

APPELANTE :

SA SAFEN

agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 2]

représentée par Maître Fabien ROUMEAS, loco Maître Alain DUMAS, avocats au barreau de LYON,

INTIMÉES :

Madame [H] [O]

née le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 1]

de nationalité Française, Profession : Aide à domicile,

demeurant [Adresse 1]

représentée par Maître Carole LECOCQ-PELTIER, avocat au barreau de BORDEAUX

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE,

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 3]

représentée par Maître Pierre-Emmanuel BAROIS, loco Maître Max BARDET, avocats au barreau de BORDEAUX,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 14 février 2013, en audience publique, devant Monsieur Jean-Paul ROUX, Président chargé d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Paul ROUX, Président,

Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller,

Madame Isabelle LAUQUE, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Chantal TAMISIER,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

******

EXPOSE DU LITIGE et PRETENTIONS DES PARTIES

Mme [O] a été embauchée par la SA SAFEN en qualité d' agent de service hospitalier, selon contrat de travail à durée indéterminée daté du 1er janvier 2007.

Le 11 avril 2007, Mme [O] a été victime d'un accident du travail ayant marché sur une aiguille qui se trouvait au sol dans la chambre de résidentes où elle faisait le ménage.

Le 12 avril 2007 , l'employeur a régularisé une déclaration d'accident du travail à laquelle était joint le certificat médical initial signé par le Docteur [R], établi le jour de l'accident.

Le 1er juin 2007, Mme [O] a été placée en arrêt de travail pour cause de maladie.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la GIRONDE a reconnu le caractère professionnel de sa maladie et a pris en charge l'accident et la nouvelle lésion ayant justifié l'arrêt de travail du 1er juin 2007 .

L'état de santé de Mme [O] a été déclaré consolidé au 31 mai 2008, date reportée au 22 août 2008 suite à une contestation de celle-ci.

Le 13 février 2009, Mme [O] a été licenciée par la SARL SAFEN en raison de son inaptitude au travail, qui a été contestée par l'intéressée devant de Conseil de Prud'hommes de BORDEAUX.

Par lettre du 20 juillet 2010, Mme [O] a invoqué la faute inexcusable de son employeur.

La tentative de conciliation n'ayant pas abouti, Mme [O] a saisi, le 25 mars 2011, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BORDEAUX.

Par jugement en date du 1er juin 2012 , le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale, a :

- Rejeté l'exception de prescription soulevée par la SAFEN,

- Déclaré en conséquence Mme [O] recevable en sa demande,

- Dit que l'accident du travail dont Mme [O] a été victime le 11 avril 2007 est dû à une faute inexcusable de son employeur, la SA SAFEN,

-Avant dire droit,

- Ordonné une expertise, dont les frais seront avancés par la CPAM de la Gironde,

- Commis pour y procéder le Docteur [K] et défini sa mission,

- Débouté Mme [O] de sa demande de provision à valoir sur son indemnisation complémentaire,

- Déclaré opposable à la SAFEN les décisions de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident du travail survenu le 11 avril 2007 et de la nouvelle lésion déclarée le 29 juin 2007,

- Rappelé que la CPAM récupérera auprès de la SAFEN les sommes dont elle aura fait l'avance au titre de son indemnisation complémentaire,

- Ordonné l'exécution provisoire du Jugement,

- Réservé les demandes formulées au titre de l'article 700 du CPC et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991,

- Renvoyé l'affaire à une audience du 27 novembre 2012 à 9h00 et réservé les dépens.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour d'appel , la SA SAFEN a interjeté appel de cette décision.

Dans le dernier état de ses écritures développées oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer, la SA SAFEN demande à la Cour de dire que son appel est recevable et bien fondé, mais que la demande de Mme [O], engagée par lettre datée du 3 juillet 2010 suite à l'accident du 11 juillet 2007, est irrecevable.

Subsidiairement, elle sollicite de la Cour qu'elle juge que Mme [O] ne rapporte pas la preuve qu'elle a été victime d'une faute inexcusable de sa part et de la débouter de ses fins, demandes et conclusions, qu'elle juge que la décision de prise en charge dudit accident du travail lui est inopposable et que la CPAM sera sans recours à son encontre si elle devait confirmer sur la faute inexcusable .

Très subsidiairement, la SA SAFEN demande à la Cour si elle devait confirmer le jugement déféré de dire qu'il y a lieu d'évoquer le litige sur l'indemnisation de Mme [O], de constater que la CPAM a consolidé Mme [O] sans séquelle indemnisable et de dire irrecevables et mal fondées les demandes de Mme [O] au titre de la perte de gains professionnel, du préjudice permanent et de fixer conformément le préjudice démontré à la demande au titre du préjudice moral.

Enfin, elle souhaite que Mme [O] soit déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et qu'elle soit déboutée de ses demandes au titre des frais irrépétibles et sur le fondement de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle et qu'il soit statué ce que de droit sur les dépens.

Par conclusions déposées au greffe, Mme [O] demande à la Cour de confirmer le jugement déféré, et à titre principal, de condamner la Société SAFEN à lui payer la somme de 17 816,31 euros à titre de dommages intérêt en réparation de l'intégralité des préjudices subis du fait de sa faute inexcusable de son employeur.

A titre subsidiaire, Mme [O] sollicite de la Cour qu'elle lui alloue à titre provisionnel la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de ses différents préjudices et qu'elle renvoie les parties devant le TASS de la Gironde afin qu'il soit statué sur la réparation intégrale des préjudices subis.

En tout état de cause, elle demande que la SA SAFEN soit condamnée à lui payer la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du CPC, ainsi qu' à payer à Maître [Z] la somme de 2 500 euros par application des dispositions de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle; et que les dépens soient laissés à la charge de la Société SAFEN .

Enfin, Mme [O] demande à la Cour de déclarer l'arrêt à intervenir commun à la CPAM de la Gironde et de débouter la Société SAFEN de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Par conclusions déposées au greffe de la Cour , la CPAM demande à la Cour à titre principal de statuer ce que de droit sur la prescription, et subsidiairement, dans l'hypothèse où la Cour jugerait que l'accident du travail survenu à Madame [O] est dû à la faute inexcusable de son employeur, de préciser, le cas échéant, le quantum de la majoration du capital ou de la rente à allouer à Mme [O] en tenant compte de la gravité de la faute commise et non du préjudice subi, de fixer le montant des sommes à allouer en réparation des préjudices subis et de condamner la SA SAFEN à lui rembourser les sommes dont elle aura fait l'avance au bénéfice de Madame [O], en ce compris les éventuels frais d'expertise médicale.

En tout état de cause, la CPAM sollicite de la Cour qu'elle juge que la prise en charge de l'accident du travail de Madame [O] est opposable à son employeur et qu'elle statue ce que de droit sur les dépens et les frais irrépétibles sans les laisser à sa charge.

MOTIFS DE LA DÉCISION:

L'appel, interjeté dans les formes et le délai de la loi, est recevable.

* Sur la prescription biennale

Selon l'article L 431-2 du code de la sécurité sociale :'Les droits de la victime ou de ses ayants droit aux prestations et indemnités prévues par le présent livre se prescrivent par deux ans à dater :

1°) du jour de l'accident ou de la cessation du paiement de l'indemnité journalière ;

2°) dans les cas prévus respectivement au premier alinéa de l'article L. 443-1 et à l'article L. 443-2, de la date de la première constatation par le médecin traitant de la modification survenue dans l'état de la victime, sous réserve, en cas de contestation, de l'avis émis par l'expert ou de la date de cessation du paiement de l'indemnité journalière allouée en raison de la rechute ;

3°) du jour du décès de la victime en ce qui concerne la demande en révision prévue au troisième alinéa de l'article L. 443-1 ;

4°) de la date de la guérison ou de la consolidation de la blessure pour un détenu exécutant un travail pénal ou un pupille de l'éducation surveillée dans le cas où la victime n'a pas droit aux indemnités journalières. (...)'.

La SA SAFEN fait valoir que la demande de Mme [O] aux fins de voir reconnaître sa faute inexcusable est prescrite sur le fondement du texte ci-dessus cîté dans la mesure où elle a effectué une déclaration d'accident sur la seule foi des déclarations de Mme [O] pour une blessure apparemment sans gravité n'ayant engendré aucun arrêt de travail, et que la date de l'accident survenu le 11 avril 2007 ne figurant pas sur l'arrêt de travail délivré à Mme [O] le 1er juin 2007 , il s'agit d'une rechute et non pas d'une nouvelle lésion non interruptive de prescription de sorte que la prescription biennale est acquise Mme [O] ayant saisi la CPAM par lettre datée du 3 juillet 2010.

Mme [O] fait valoir qu'elle a été placée en arrêt de maladie à compter du 1er juin 2007 en raison d'une nouvelle lésion déclarée au titre de l'accident du travail initial.

Elle expose qu'elle a marché sur une seringue, que l'une des occupantes de la chambre était atteinte de l'hépatite B et qu'elle a déveploppé un état dépressif car le doute quant à l'absence de contamination n'a pu être levé que longtemps après.

Mme [O] soutient que son état de santé a été déclaré consolidé le 31 mai 2008 suite à cet accident du travail et que son action n'est pas prescrite.

La CPAM expose que la consolidation date du 22 août 2008 et la demande de reconnaissance de la faute inexcusable date du 22 juillet 2010, et qu'elle s'en remet sur la question de la prescription.

Mme [O] s'est piquée au pied droit, le 11 avril 2007, ayant marché sur une aiguille souillée qui a transpercé son sabot, alors qu'elle faisait le ménage dans une chambre occupée par deux résidentes du centre de soins où elle travaillait.

Elle s'est rendue aux Urgences et un protocole de dépistage de maladies infectieuses a été mis en place.

Le 31 mai 2007, les analyses sanguines pratiquées sur Mme [O], produites aux débats, n'ont pas révèlé d'anomalies. Le Docteur [M] , médecin du travail, a toutefois écrit à Mme [O] le 13 juin 2007 que ' les résultats de l'analyse de sang sont normaux. Le protocole de surveillance prévoit d'autres analyses à faire encore 3 et 6 mois après votre incident exposant au sang' de sorte que Mme [O] a pu être définitivement tranquillisée concernant une éventuelle contamination au mois d'octobre 2007 .

Le certificat médical initial signé le 1er juin 2007, par le Docteur [G], mentionne ' Piqûre accidentelle aiguille souillée; état dépressif réactionnel'.

Les certificats de prolongation ont été établis pour une raison identique.

L'état de santé de Mme [O] a été déclaré consolidé, au regard de son état dépressif le 22 août 2008.

Il résulte de ce qui précède que Mme [O] a développé un syndrome dépressif consécutif à une piqûre lui ayant fait craindre une contamination sanguine, de sorte que cet état dépressif constitue nécessairement une nouvelle lésion liée à l'accident du travail du 11 avril 2007.

Il s'avère que la prescription biennale applicable en matière de faute inexcusable court à compter soit du jour de l'accident, soit du jour de la clôture de l'enquête, soit du jour de la cessation du paiement des indemnités journalières . En l'espèce la date de cessation du paiement des indemnités journalières est celle de la consolidation de l'état de santé de Mme [O] soit le 22 août 2008 .

Dans la mesure où la CPAM a été saisie par lettre datée du 22 juillet 2010 d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable, cette demande n'était pas prescrite et le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

* Sur la faute inexcusable

En application de l'article L 452-1 du code de la sécurité sociale, l'employeur est tenu envers le salarié d'une obligation de sécurité de résultat. Le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

La faute commise par l'employeur doit être une cause nécessaire à l'accident.

La SA SAFEN fait valoir que les circonstances de l'accident ne sont pas clairement établies ni démontrées par Mme [O], que Mme [O] n'a contracté aucune maladie infectieuse, mais l'expertise réalisée sur exécution provisoire a permis d'établir qu'elle a développé une pathologie mentale, alors que la CPAM a consolidé Mme [O] sans séquelle indemnisable.

Elle expose qu'au vu de la jurisprudence de la Cour de Cassation du 8 juillet 2004, que le salarié doit rapporter la démonstration que l'employeur avait conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

La SA SAFEN soutient qu'elle a établi un plan de prévention avec l'administration du Centre de PODENSAC qui ne prévoit pas de risque de contamination dans la mesure où ses intervenants ne travaillent pas dans un service de maladies infectieuses, que le fait qu'une aiguille ait pu se trouver sur le sol ne peut résulter que d'une négligence du personnel hospitalier dont elle ne peut être tenue pour responsable, que le port de chaussures correctes empêche d'être blessé et qu'aucune aiguille n'est susceptible de percer un sabot, suffisant pour un personnel de nettoyage dans un lieu ouvert au public, que Mme [O] n'a pas veillé à sa propre sécurité.

Mme [O] fait valoir qu'au vu de la jurisprudence de la Cour de Cassation du 28 février 2002, et de la jurisprudence ' amiante' étendue aux accidents de contamination sanguine, l'employeur est tenu envers le salarié à une obligation de sécurité de résultat et que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable.

Elle expose que le fait qu'elle ait été piquée constitue un manquement à une obligation de sécurité, le fait que l'accident soit survenu au service d'un donneur d'ordre n'étant pas une cause d'exonération, que l'employeur n'a pris aucune mesure destinée à éviter un risque de piqûre.

En l'espèce, Mme [O] a été employé parle centre de soins de la [Adresse 4] à compter du 1er septembre 2006 au 31 décembre 2006, puis par la SA SAFEN selon contrat à durée indéterminée du 1er janvier 2007 au 13 février 2009, en qualité d'agent de service.

Il ressort des propres termes de la déclaration d'accident du travail rédigée par l'employeur que 'Mme [O] venait de nettoyer la chambre d'une patiente lorsqu'elle s'est plantée une aiguille de perfusion sous le pied, celle-ci a transpercé son sabot' et que même en l'absence de témoin de l'accident, aucune réserve n'a été émise par la SA SAFEN au moment des faits .

Le témoignage de la chef d'équipe de Mme [O] qui a emmenée l'intéressée à l'hôpital de [Localité 2] et le certificat de médecin du SAMU ne remettent pas en cause la réalité de la piqûre , ni les circonstances de l'accident telles que décrites par Mme [O], que la Cour juge établies.

La Cour rappelle que l'employeur est tenu vis à vis de sa salariée d'une obligation de sécurité de résultat qui est suffisante pour que sa responsabilité soit engagée alors que d'autres fautes, éventuellement commises par le personnel hospitalier, auraient pu concourir au dommage.

Dans la mesure où le travail de nettoyage effectué par Mme [O] avait lieu dans un centre de soins manipulant nécessairement du matériel médical et donc une attention spécifique de la part du personnel de nettoyage, la SAFEN aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé sa salariée. Aucun élément n'est produit aux débats de nature à établir que les mesures nécessaires pour l'en préserver, le plan de prévention étant insuffisant en ce sens.

Ainsi que l'a justement relevé le Conseil de Prud'hommes, la SA SAFEN aurait du notamment équiper son personnel de chaussures adaptées ne pouvant être transpercées par une aiguille.

En conséquence, il ne peut être considéré que la SA SAFEN a pris les mesures suffisantes, pour prévenir les dangers auxquels était exposée Mme [O] , qu'elle ne pouvait ignorer, et compte tenu des travaux auxquels était affecté sa salariée.

C'est la raison pour laquelle il convient, par confirmation du jugement entrepris, de reconnaître que la maladie professionnelle dont a été atteint Mme [O] est due à la faute inexcusable de son employeur.

* Sur la majoration du capital et de la rente.

Dans la mesure où la SA SAFEN a commis une faute inexcusable dans le cadre de ses obligations d'employeur vis à vis de sa salariée, il convient de fixer à son maximum la majoration de l'indemnité en capital attribuée à la victime conformément aux dispositions de l'article L 452-2 alinéa 2 du code de la sécurité sociale et de dire que la CPAM devra verser cette majoration de capital .

* Sur l'inopposabilité du caractère professionnel de la maladie

Selon l'article R441-10 du code de la sécurité sociale :'La caisse dispose d'un délai de trente jours à compter de la date à laquelle elle a eu connaissance de la déclaration d'accident ou de trois mois à compter de la date à laquelle elle a eu connaissance de la déclaration de maladie professionnelle pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie.

Il en est de même lorsque, sans préjudice de l'application des dispositions du chapitre Ier du titre IV du livre Ier et de l'article L. 432-6, il est fait état pour la première fois d'une lésion ou maladie présentée comme se rattachant à un accident du travail ou maladie professionnelle.

Sous réserve des dispositions de l'article R. 441-14, en l'absence de décision de la caisse dans le délai prévu au premier alinéa, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu.'

Aux termes de l'article R441-11 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure au décret du 29 janvier 2009 :'Hors les cas de reconnaissance implicite, et en l'absence de réserves de l'employeur, la caisse primaire assure l'information de la victime, de ses ayants droit et de l'employeur, préalablement à sa décision, sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de leur faire grief.

En cas de réserves de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse, hors le cas d'enquête prévue à l'article L 442-1, envoie avant décision à l'employeur et à la victime un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. '

La SA SAFEN fait valoir qu'elle a été déboutée à tort de sa demande d'inopposabilité du caractère professionnel de la maladie de Mme [O] au motif que les dispositions de l'article R 441-11 ne seraient pas applicables lorsque la demande porte sur de nouvelles lésions survenues avant consolidation et déclarées au titre de l'accident du travail, ce qui autorise à la CPAM à dissimuler à l'employeur des situations susceptibles de lui faire grief.

Elle expose qu'elle a reçu une lettre datée du 17 août 2007 adressée par la CPAM, dont la date n'est pas certaine , lui précisant que la décision sur le caractère professionnel de la nouvelle lésion interviendrait le 27 août 2007 et qu'elle n'a pas pu bénéficier d'un délai utile pour faire valoir ses droits.

La CPAM fait valoir que l'instruction ne se justifie qu'en cas de réserve de l'employeur ou lorsque le caractère professionnel de l'accident paraît contestable et que sa finalité est de recueillir des éléments d'information en cas de doute quant à la réalité ou le caractère professionnel de l'accident, qu'elle a reconnu de façon implicite le caractère professionnel de l'accident.

Elle soutient que , concernant la nouvelle lésion, elle n'a pas d'obligation légale d'initier une nouvelle procédure d'instruction.

Au visa de l'article R. 441-11 précité, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, la CPAM informe l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision. Toutefois ces dispositions ne s'appliquent pas dans les cas de reconnaissance implicite et en l'absence de réserve de l'employeur.

Avant l'entrée en vigueur du décret du 29 juillet 2009, la CPAM pouvait contester le caractère professionnel de l'accident, dans les 30 jours à compter de la date où elle en a eu connaissance, faute de quoi elle reconnaissait implicitement la maladie professionnelle.

En l'espèce, l'accident du travail de Mme [O] est survenu le 11 avril 2007 et a été déclaré le 12 avril 2007 par l'employeur.

Dans la mesure où il n'est pas allégué que l'une des parties à la présente procédure ait formé une contestation dans le délai d'un mois, le caractère professionnel de la lésion est établi à l'égard de Mme [O] par la reconnaissance implicite qui en a été faite par la CPAM.

Concernant la nouvelle lésion ayant fait l'objet d'une déclaration auprès de la CPAM, le 1er juin 2007, il ne résulte pas des textes précités ni d'une autre disposition du code de la sécurité sociale que la CPAM doit respecter une procédure d'information vis à vis de l'employeur .

C'est la raison pour laquelle la Cour considère que la CPAM a pris sa décision dans des conditions telles que celle-ci est opposable à l'employeur.

La décision déférée sera, en conséquence, confirmée de ce chef.

* Sur le droit à indemnisation de Mme [O]

Dans la mesure où Mme [O] a été victime d'une faute inexcusable de la part de son employeur, il en résulte un droit à indemnisation en sa faveur au visa de l'article L 452-3 du code de la sécurité sociale, justifiant l'expertise ordonnée avant-dire droit en première instance .

Il appartient au tribunal de connaître les conclusions de l'expert afin statuer à propos de ces préjudices, sans qu'il y ait lieu d'évoquer le litige devant la présente Cour.

Une provision d'un montant de 5.000 € sera toutefois allouée à ce titre à Mme [O], la décision déférée étant réformée de cet unique chef.

La CPAM lui versera ladite provision, à charge pour elle d'en récupérer le montant contre la SA SAFEN.

* Sur les autres demandes

L'équité et les circonstances de la cause commandent de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Mme [O] qui se verra allouer la somme de 1.000 € à ce titre, somme à régler par la SA SAFEN .

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

- REFORME le jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BORDEAUX en date du 1er juin 2012, uniquement en ce qu'il a débouté Mme [O] de sa demande de versement de provision à valoir sur son indemnisation complémentaire,

Et statuant de nouveau de ce chef

- FIXE la provision à valoir sur l'indemnisation des préjudices complémentaires de Mme [O] à la somme de 5.000 €,

- CONFIRME la décision déférée pour le surplus

Y ajoutant,

- DIT que la SA SAFEN devra payer à Mme [O] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- DIT qu'en application des articles L 144-5 et R 144-10 du Code de la sécurité sociale, il y a lieu de ne prononcer aucune condamnation aux dépens.

Signé par Madame Myriam LALOUBERE, Conseillère, faisant fonction de Présidente, en l'absence de Monsieur le Président Jean-Paul ROUX, empêché, et par Chantal TAMISIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. TAMISIER Myriam LALOUBERE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 12/04044
Date de la décision : 23/05/2013

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°12/04044 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-23;12.04044 ?
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