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21/06/2012 | FRANCE | N°11/01721

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 21 juin 2012, 11/01721


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 21 JUIN 2012

fc

(Rédacteur : Monsieur Jean-Paul ROUX, Président)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 11/01721

















Madame [H] [L]



c/



SA EDF - CRC ANGOULEME





















Nature de la décision : AU FOND






>Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 m...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 21 JUIN 2012

fc

(Rédacteur : Monsieur Jean-Paul ROUX, Président)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 11/01721

Madame [H] [L]

c/

SA EDF - CRC ANGOULEME

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 mars 2011 (R.G. n°F10/0201) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANGOULEME, Section Industrie, suivant déclaration d'appel du 17 mars 2011,

APPELANTE :

Madame [H] [L]

née le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 4]

de nationalité Française

Profession : comptable,

demeurant [Adresse 1]

représentée par Maître Sophie ROBIN-ROQUES, avocat au barreau de CHARENTE

INTIMÉE :

SA EDF - CRC ANGOULEME,

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 3]

représentée par Maître Elise GALLET loco Maître Pierre LEMAIRE, avocats au barreau de POITIERS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 mai 2012 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Paul ROUX, Président de chambre,

Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller,

Madame Katia SZKLARZ, Vice Présidente placée,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Florence CHANVRIT adjoint administratif faisant fonction de greffier

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

I. Saisine

1 - Madame [H] [L] a régulièrement relevé appel le 18 mars 2011 du jugement qui, prononcé le 4 mars 2011 par le Conseil de prud'hommes d'Angoulême, l'a déboutée de ses demandes à l'encontre de la SA EDF-CRC Angoulême,

Madame [H] [L] sollicite, outre l'allocation de la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, l'infirmation du jugement et la condamnation de la SA EDF-CRC Angoulême à lui payer

- la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

- la somme de 60.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice de carrière,

- la somme de 123.159,92 euros à titre de rappel de salaire,

2 - La SA EDF-CRC Angoulême sollicite pour sa part, outre l'allocation de la somme de 3.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la confirmation du jugement déféré,

II . Les faits et la procédure .

Madame [H] [L], qui est entrée au service de la SA EDF-CRC Angoulême le 1er décembre 1982, en qualité d'employée qualifiée, et qui, en dernier lieu, exerçait les fonctions d'appui administratif-assistant secrétaire classifiées plage H-Groupe Fonctionnel 7, a saisi le Bureau de conciliation du Conseil de prud'hommes d'Angoulême le 15 juin 2010 de demandes en réparation des préjudices résultant selon elle de la mauvaise exécution du contrat de travail par l'employeur,

SUR QUOI LA COUR

Vu les conclusions contradictoirement échangées, déposées à l'audience par Madame [H] [L] et par la SA EDF-CRC Angoulême , alors visées par le greffier et développées oralement,

Attendu que Madame [H] [L] fait plaider, à l'appui de son appel,

- que, tout d'abord, elle a été victime durant le cours de sa carrière, d'une attitude harcelante de la part de son employeur qui, résultant

- de mutations d'office qui, outre qu'elles ne répondaient pas aux conditions prévues par la circulaire PERS 212 du 30 novembre 1951, ont eu pour effet de la déclasser,

- d'entraves au juste traitement de ses requêtes,

- et de la non-application à son égard du dispositif M3E, pourtant appliqué à l'ensemble des autres salariés, qui a eu pour conséquence une rupture de l'égalité professionnelle à son détriment et son maintien délibéré en plage H,

a eu pour effet de dégrader ses conditions de travail, sa dignité et sa santé,

- que, ensuite, l'ensemble de ces faits lui ont également, en ne lui permettant pas une évolution comparable à celle des autres agents placés dans la même situation, occasionné un préjudice de carrière certain,

- et que, enfin, elle a subi ainsi, dans la limite des 5 dernières années, une perte de salaire, selon l'évolution du niveau de rémunération qui aurait dû être le sien, d'un montant de 123.159,92 euros,

Attendu que la SA EDF-CRC Angoulême fait valoir, pour sa part, que l'ensemble des prétentions de Madame [L] sont sans fondement dés lors

- que, tout d'abord, sur sa classification, celle-ci a exercé toutes les voies de recours statutairement disponibles qui se sont toutes soldées par un rejet de sa demande de reclassement de son poste en Groupe Fonctionnel 8,

- que, ensuite, les mutations d'office, qui ne peuvent entraîner un avancement d'échelle, ont été effectuées dans le strict respect de la circulaire PERS 212,

- que, par ailleurs, les règles d'avancement ont été respectées dans la limite des butées d'ancienneté qui n'ont été atteintes qu'une fois, mais jamais dépassées,

- que, d'autre part, le harcèlement moral allégué n'est pas établi dés lors que les mutations d'office invoquées ont été faites dans le respect des dispositions de la circulaire PERS 212, que le remplacement de Madame [L] en 1991 résultait de sa promotion d'agent technique à agent comptable et que ses tâches ne lui ont pas été retirées en mars 2000, ses activités n'ayant pas changé avec la réforme de l'année 2000,

- et que, enfin, la discrimination alléguée n'est pas plus établie dés lors qu'elle a été évaluée chaque année, que son reclassement en 2000 était conforme à sa position d'agent de maîtrise antérieure et que les éléments de comparaison produits aux débats permettent de constater que l'évolution de la carrière de Madame [L] se situe dans la moyenne de celle des autres agents,

* * * * *

Attendu que Madame [L] fait tout d'abord grief à l'employeur d'avoir, en la 'mutant d'office' à six reprises sans respecter les règles statutaires régissant les mutations d'office, porté atteinte à l'évolution normale de sa carrière et notamment

- en 1991, en la mutant d'office à l'issue d'un arrêt maladie en raison de ce que le poste qu'elle occupait précédemment au service contentieux des assurances était attribué à une salariée intérimaire initialement engagée pour la remplacer et d'ailleurs reclassé au niveau GF8,

- en 2000, en la mutant d'office en raison de la réforme de structure intervenue au sein de l'entreprise alors que ses tâches, qui n'avaient pas été supprimées, étaient confiées à d'autres agents classés GF8 et GF9 et que son poste était pesé M3E en GF10,

- et en 2005, 2006 et 2010, en la mutant d'office dans des conditions similaires alors, également, qu'elle se trouvait, pour la dernière, en arrêt maladie pour maladie professionnelle,

Attendu qu'il convient toutefois de constater que, selon les règles posées par la circulaire PERS 212 pour les mutations et les changements d'affectation et les documents produits, la mutation de 1991 résultait d'une affectation, souhaitée par Madame [L], à un poste de comptable et que les mutations ultérieures, qui répondaient à des nécessités de service résultant de réorganisations de l'entreprise, n'ont entraîné, sauf pour celle de 2006 qui a été acceptée par l'intéressée, ni changement d'affectation, ni changement de résidence,

Attendu qu'il ne peut dés lors pas être imputé à l'employeur un usage irrégulier, au regard des dispositions de la circulaire PERS 212, de ces mutations et changements d'affectation, rien n'étant pas ailleurs produit aux débats par Madame [L] sur les conséquences, en terme de carrière, des différentes mutations dont elle a fait l'objet,

Attendu que Madame [L] fait par ailleurs grief à l'employeur d'avoir, d'une part, fait entrave au traitement des justes requêtes qu'elle a adressées aux différentes commissions du personnel en remettant tardivement la fiche décrivant, au demeurant de manière incomplète, ses activités, d'avoir, d'autre part, décidé son déclassement en la maintenant, lors de l'adoption de la M3E, en plage H, niveau exécution, alors qu'elle relevait auparavant du niveau 7 qui était le niveau maîtrise et d'avoir, enfin, méconnu les règles d'avancement statutaires en la maintenant, pendant 20 ans au même groupe fonctionnel,

Attendu qu'il convient toutefois de constater que, tout d'abord, hormis un retard dans la transmission de la fiche de renseignement lors de l'examen de la première requête, les fiches de renseignement décrivant les activités de Madame [L] ont été, selon ce que les procès-verbaux de ces commissions mentionnent, établies au terme d'une enquête paritaire et approuvées par les représentants du personnel, que, ensuite, les tâches qui y sont mentionnées ne relèvent pas de la définition donnée par le PERS 591 sur le comptable relevant du groupe fonctionnel 8, que, par ailleurs, la classification en GF7 de la plage H concernant les agents de maîtrise, à la différence des GF 3 à 6, qui concernent les agents d'exécution, il n'y a pas eu, ainsi, de déclassement lors de la mise en place de la M3E et que, enfin, Madame [L] a bien profité d'une évolution de ses niveaux de rémunération, qui ne sont pas à confondre avec les groupes fonctionnels, conforme aux règles statutaires qu'elle rappelle elle-même,

Attendu qu'il en résulte que les griefs ainsi articulés sur ces points à l'encontre de l'employeur ne peuvent pas plus être retenus et que Madame [L] ne pourra qu'être déboutée de ses demandes relatives à un harcèlement moral dont rien ne permet ainsi de présumer de l'existence,

Attendu que Madame [L] fait également grief à l'employeur d'avoir méconnu le principe 'à travail égal, salaire égal' dés lors qu'il ressort des pièces produites par la SA EDF CRC que les autres salariés qui se trouvaient dans la même situation qu'elle en 1991, soit GF7 NR8, avaient en 2010 un NR de 130 à 165 alors qu'elle même plafonnait à un NR 105,

Attendu que l'employeur fait valoir sur ce point qu'il a toujours respecté les règles statutaires d'avancement à l'égard de Madame [L] et ce dans la limite des butées d'ancienneté,

Attendu, cependant, que si l'employeur produit un certain nombre de tableaux tendant à démontrer que la carrière de Madame [L], comparée à la carrière des 31 agents qu'il a sélectionnés comme présentant, en termes d'âge, d'ancienneté, de formation initiale et de métier, un profil comparable à celui de la salariée, se situe dans la moyenne de l'ensemble de ce panel, force est de constater que Madame [L] est toutefois la seule des sept agents compris dans ce panel et classés comme elle en plage H (GF 3 à 7), à avoir, depuis le 1er janvier 2008, un niveau de rémunération de 105 alors que cinq de ces agents classés en GF 6 (exécution) ont un niveau de rémunération compris entre 115 et 125 et que les deux agents classés en GF 7 (maîtrise) comme elle ont un niveau de rémunération de 120 et 130,

Attendu qu'il en ressort que Madame [L] a bien ainsi subi, dans l'évolution de sa rémunération, par rapport aux autres agents que l'employeur a proposé lui-même à titre de 'comparants', une progression indiciaire a minima que la SA EDF CRC n'explique pas par des raisons objectives et pertinentes, se contentant d'indiquer qu'elle a respecté, à l'égard de cette salariée, les butées d'ancienneté,

Attendu, cependant, qu'au regard du respect du principe "à travail égal, salaire égal", la seule circonstance qu'une salariée progresse, sur le plan indiciaire, dans le respect des butées d'ancienneté statutaires ne saurait suffire à elle seule à justifier des différences existant avec la progression indiciaire des autres salariés effectuant un même travail ou un travail de valeur égale,

Attendu qu'il en résulte, tout d'abord, que l'inégalité salariale invoquée par Madame [L] par rapport à ses collègues effectuant le même travail ou un travail de valeur égale est ainsi établie et qu'il convient de lui allouer, en réparation du préjudice moral subi à ce titre, la somme de 15.000 euros au regard de la durée de cette inégalité,

Attendu qu'il convient, par ailleurs, pour mettre fin à cette inégalité, de dire que Madame [L] devra être classée, comme ses collègues classés en GF 7, à l'indice 115 à compter du 1er juillet 2005, à l'indice 125 à compter du 1er janvier 2008 et à l'indice 130 à compter du 1er janvier 2010, la SA EDF-CRC étant condamnée à lui payer les rappels de salaire afférents à ces indices,

Attendu enfin que ni l'équité ni des raisons économiques ne justifient de dispenser la SA EDF-CRC Angoulême de l'application, pour les procédures de première instance et d'appel, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

Reçoit Madame [H] [L] en son appel du jugement rendu le 4 mars 2011 par le Conseil de prud'hommes d'Angoulême,

Infirmant partiellement ce jugement et statuant à nouveau,

Condamne la SA EDF-CRC Angoulême à payer à Madame [H] [L] la somme de 15.000 euros au titre du préjudice moral résultant de l'inégalité salariale qu'elle a subie pendant toute sa carrière,

Ordonne le classement de Madame [L] à l'indice 115 à compter du 1er juillet 2005, à l'indice 125 à compter du 1er janvier 2008 et à l'indice 130 à compter du 1er janvier 2010,

Condamne la SA EDF-CRC Angoulême à payer à Madame [H] [L] les rappels de salaire afférents à ces indices,

Condamne la SA EDF-CRC Angoulême à payer à Madame [H] [L] la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette comme inutiles ou mal fondées toutes demandes plus amples ou contraires des parties,

Condamne la SA EDF-CRC Angoulême aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Signé par Monsieur Jean-Paul ROUX, Président, et par Chantal TAMISIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. TAMISIER Jean-Paul ROUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 11/01721
Date de la décision : 21/06/2012

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°11/01721 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-06-21;11.01721 ?
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