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03/05/2012 | FRANCE | N°11/00444

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 03 mai 2012, 11/00444


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 03 MAI 2012

fc

(Rédacteur : Monsieur Jean-Paul ROUX, Président)



SÉCURITÉ SOCIALE



N° de rôle : 11/00444

















Monsieur [B] [O]

Monsieur [P] [F]



c/



SA GENERALI ASSURANCES IARD

GROUPAMA ASSURANCES

SCEA CHATEAU CADET

CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DE LA GIRONDE>










Nature de la décision : AU FOND







Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certi...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 03 MAI 2012

fc

(Rédacteur : Monsieur Jean-Paul ROUX, Président)

SÉCURITÉ SOCIALE

N° de rôle : 11/00444

Monsieur [B] [O]

Monsieur [P] [F]

c/

SA GENERALI ASSURANCES IARD

GROUPAMA ASSURANCES

SCEA CHATEAU CADET

CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DE LA GIRONDE

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 décembre 2010 (R.G. n°485/10) par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GIRONDE, section agricole, suivant déclarations d'appel des 21 et 31 janvier 2011,

APPELANTS :

Monsieur [B] [O]

né le [Date naissance 2] 1972 à [Localité 8] (Portugal) (99)

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 6]

représenté par Maître Frédéric TRAIN loco Maître Hélène OLIER, avocats au barreau de LIBOURNE

Monsieur [P] [F]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 9]

de nationalité Française

Profession : Gérant de société,

demeurant [Adresse 7]

représenté par Maître Bruno BOUYER, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉES :

SA GENERALI ASSURANCES IARD,

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 4]

représentée par Maître Capucine POTIER de la SCP NORMAND & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS

GROUPAMA ASSURANCES

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 3]

représenté par Maître Mandy BECQUE loco Maître Albin TASTE avocats au barreau de BORDEAUX

S.C.E.A. CHATEAU CADET

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 5]

représentée par Maître Valérie SEMPE, avocat au barreau de BORDEAUX

CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DE LA GIRONDE,

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 3]

représentée par Monsieur [E] [T] rédacteur juridique à la Caisse muni d'un pouvoir régulier

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 29 février 2012 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Paul ROUX, Président,

Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller,

Madame Katia SZKLARZ, Vice-Présidente Placée,qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Florence CHANVRIT adjoint administratif faisant fonction de greffier

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

*

****

Par jugement en date du 6 décembre 2010, le Tribunal des affaires de sécurité sociale de la Gironde a notamment

- ordonné la mise hors de cause de la société Groupama Assurances,

- déclaré le jugement opposable à la Caisse de mutualité sociale agricole de la Gironde, à la SA Generali Assurances et à Monsieur [F],

- alloué à Monsieur [B] [O], au titre de l'indemnisation complémentaire de l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale

- la somme de 10.000 euros au titre du préjudice moral et physique,

- la somme de 1.000 euros au titre du préjudice esthétique,

- la somme de 3.000 euros au titre du préjudice d'agrément,

- rejeté les autres demandes de Monsieur [O],

- rappelé que la Caisse de mutualité sociale agricole de la Gironde, qui versera directement à Monsieur [O] lesdites sommes, lesquelles porteront intérêts au taux légal à compter du jugement, les récupérera auprès de la Scea Château CADET, employeur de Monsieur [O],

- condamné la Scea Château CADET à payer à Monsieur [O] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Monsieur [B] [O] et Monsieur [P] [F] ont régulièrement relevé appel de cette décision par actes des 21 et 31 janvier 2011,

Ces deux appels ont été joints pour demeurer inscrits au rôle de la Cour sous le numéro 11-00444,

Monsieur [B] [O] sollicite, outre l'allocation de la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la condamnation de la Scea Château CADET et de son assureur à lui payer, en réparation des préjudices subis

- la somme de 150.000 euros au titre du préjudice professionnel permanent,

- la somme de 2.200 euros au titre du préjudice fonctionnel temporaire,

- la somme de 1.970 euros au titre du préjudice fonctionnel permanent,

- la somme de 10.000 euros au titre des souffrances endurées,

- la somme de 25.779 euros au titre des frais de remplacement du véhicule,

- la somme de 2.500 euros au titre du préjudice esthétique,

- la somme de 5.000 euros au titre du préjudice d'agrément,

Monsieur [P] [F] sollicite pour sa part

+ Statuant sur son appel principal

- qu'il soit dit que le jugement du 6 décembre 2010, à l'instar du jugement du 7 décembre 2009, doit être déclaré commun à la compagnie GROUPAMA CENTRE ATLANTIQUE ou quoi que soit GROUPAMA SA, assureur du tracteur conduit par Monsieur [O] lors de l'accident du 13 novembre 2006, ainsi que l'arrêt à intervenir sur l'appel principal de Monsieur [B] [O].

- la condamnation de la compagnie GROUPAMA CENTRE ATLANTIQUE ou quoi que soit GROUPAMA SA à lui payer la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel.

+ Statuant sur l'appel principal de Monsieur [O]

- qu'il soit jugé que Monsieur [B] [O] est irrecevable en ses demandes tendant à la condamnation directe de la SCEA CHÂTEAU CADET au versement des indemnités, en réparation des conséquences de son accident de travail, conformément aux articles L.451-1 à L.452-4 du Code de la sécurité sociale et 32 et 122 du code de procédure civile.

- que la Cour se déclare incompétente, au profit du Tribunal de Grande Instance de LIBOURNE, par application combinée des articles 34 et 37 de la Constitution du 4 octobre 1958,6 de la CESDH, 75 du code de procédure civile, L 211-3 du COJ, L 142-1 et L.451-1 à L.452-4 du Code de la sécurité sociale, pour connaître de la demande de la MSA tendant à voir mettre directement à la charge de l'employeur les sommes allouées en réparation des préjudices complémentaires, ne relevant pas de l'article L 452-3 du code de la sécurité sociale, et de la demande de la SCEA CHÂTEAU CADET, tendant, dans le cadre d'une action récursoire, à obtenir sa condamnation directe à la relever indemne de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre, au profit de Monsieur [B] [O].

- que Monsieur [O] soit jugé mal fondé en son appel; l'en débouter.

- qu'il soit jugé qu'il n'a jamais été l'employeur de Monsieur [B] [O] et qu'il soit statué en conséquence ce que de droit sur la demande de Monsieur [O] tendant à lui voir déclarer opposable l'arrêt à intervenir.

- qu'il soit jugé que Monsieur [O] ne justifie pas, au regard de l'emploi de man'uvre qu'il occupait au moment de l'accident et de l'absence de toute démarche de formation professionnelle, antérieurement à l'accident du 13 novembre 2006, avoir réellement subi un préjudice professionnel.

- qu'il soit jugé en outre que Monsieur [O] ne peut, sans porter atteint à l'obligation de loyauté découlant de l'article 10 du Code civil, invoquer l'existence d'un préjudice professionnel susceptible d'être démenti par l'activité professionnelle qu'il semble exercer actuellement, sans justifier de sa situation réelle depuis 2009, le droit à indemnisation d'un accident du travail, même imputable à une faute inexcusable, n'incluant pas celui à un enrichissement indu.

- le rejet en conséquence des demandes de Monsieur [O], tendant à l'obtention d'une somme de 150 000 euros au titre du préjudice professionnel permanent.

- le débouté de Monsieur [O] de sa demande d'indemnisation de préjudice fonctionnel temporaire et de préjudice fonctionnel permanent.

- qu'il soit statué ce que de droit sur la demande de Monsieur [O] tendant à l'allocation d'une somme de 10 000 euros au titre des souffrances endurées.

- qu'il soit jugé que Monsieur [O] ne démontre pas avoir été dans l'incapacité, depuis l'accident du 13 novembre 2006, de conduire le véhicule qu'il possédait antérieurement et n'établit pas davantage avoir dû faire l'acquisition d'un véhicule spécialement adapté pour pouvoir continuer à conduire, alors de surcroît que seuls les frais justifiés d'adaptation auraient pu éventuellement donner lieu à indemnisation.

- le débouté de Monsieur [O] de sa demande d'indemnisation liée à l'acquisition d'un véhicule, adapté au handicap.

- la confirmation du jugement entrepris en ce qui concerne l'indemnisation du préjudice esthétique et le rejet du surplus des prétentions de Monsieur [O] de ce chef.

- la confirmation également du jugement entrepris quant à l'indemnisation du préjudice d'agrément de Monsieur [O] et le rejet du surplus des prétentions formulées à ce titre par Monsieur [O].

- qu'il soit statué ce que de droit sur la demande d'indemnisation fondée sur l'Article 700 du code de procédure civile, en fonction des justificatifs produits.

- la condamnation de la SCEA CHÂTEAU CADET aux dépens.

- que l'arrêt à intervenir soit déclaré commune à GROUPAMA CENTRE ATLANTIQUE ou quoi que soit GROUPAMA SA et à la compagnie GENERALI ACCIDENT IARD.

La Scea Château CADET demande pour sa part,

- la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a

- écarté l'indemnisation de la perte ou de la diminution des possibilités de promotion professionnelles de Monsieur [O],

- déclaré irrecevable la demande concernant le préjudice professionnel temporaire et le déficit fonctionnel temporaire,

- le refus de prendre en considération des frais de véhicule adapté,

- qu'il soit statué ce que de droit sur le surplus des autres chefs de préjudice,

- que la décision à intervenir soit déclarée opposable tant à la SA Generali assurances IARD qu'à la société Groupama Assurances,

- la condamnation de Monsieur [F] à la garantir de toutes condamnations qui seraient mises à sa charge en réparation du préjudice subi par Monsieur [O] du fait de l'accident du travail dont il a été victime,

- subsidiairement, dans le cas où cette appel en garantie ne serait pas accueilli, que la décision à intervenir soit déclarée commune à Monsieur [F] et qu'il lui soit donné acte de ses réserves quant à l'action récursoire en garantie qui lui est ouverte à l'encontre de Monsieur [F], qui était alors son gérant,

La SA Generali assurances IARD demande quant à elle l'infirmation du jugement dont appel et, statuant à nouveau,

- qu'il soit jugé que la juridiction des affaires de sécurité sociale est incompétente rationae materiea pour connaître de la demande de Monsieur [O] tendant à ce que l'employeur et son assureur soient tenus de l'indemniser et que Monsieur [O] soit en conséquence débouté de cette demande en ce qu'elle est dirigée contre elle,

- que les demandes indemnitaires soient ramenées à de plus justes proportions,

- le débouté de Monsieur [O] de ses autres demandes indemnitaires,

- que l'arrêt à intervenir soit déclaré commun et opposable à la Caisse de mutualité sociale agricole de la Gironde, à Monsieur [F] et à la compagnie d'assurances GROUPAMA,

et la condamnation de Monsieur [B] [O] à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

La société Groupama Assurances sollicite pour sa part la confirmation du jugement déféré en ce qu'il l'a mise hors de cause,

La Caisse de mutualité sociale agricole de la Gironde demande quant à elle qu'il soit rappelé qu'elle sera amenée à récupérer auprès de la Scea Château CADET le montant de la majoration de la rente dans les conditions prévues à l'article L.452-2 du code de la sécurité sociale ainsi que, s'il y lieu, le montant de l'indemnisation des préjudices définis à l'article L.452-3 du même code et qu'elle n'est pas tenue de faire l'avance des sommes allouées en réparations des préjudices complémentaires qui ne relèvent pas de cet article,

SUR QUOI LA COUR

Attendu qu'il ressort des faits constants de la cause tels qu'ils sont établis par les écritures des parties et les documents versés aux débats

- que Monsieur [O] a été victime, le 13 novembre 2006, d'un accident du travail, le tracteur qu'il conduisait s'étant renversé sur lui,

- qu'il a souffert d'un syndrome de compression multi-radiculaire au niveau des deux membres supérieurs avec fracture non déplacée du tubercule majeur de l'épaule droite et de contusions multiples,

- que ses blessures on été déclarées consolidées le 10 septembre2008, avec une incapacité permanente partielle de 32% et que le médecin du travail l'a déclaré, le 30 septembre 2008, inapte définitif à son poste d'ouvrier agricole,

- que le Tribunal des affaires de sécurité sociale de la Gironde a, par jugement en date du 7 décembre 2009, dit que cet accident du travail était dû à la faute inexcusable de l'employeur et a ordonné une expertise médicale pour déterminer le montant de son indemnisation complémentaire,

- que, après dépôt du rapport de cette expertise, le Tribunal a rendu le jugement rappelé plus haut,

Attendu que Monsieur [B] [O] fait valoir, à l'appui de son appel, qu'il est fondé à demander la réparation

- tout d'abord, du préjudice professionnel qu'il subit en raison de l'importance de son handicap séquellaire qui le prive de toute possibilité d'exercer à la fois son métier d'ouvrier agricole dans lequel il pouvait espérer une promotion professionnelle et tout autre emploi de nature physique,

- ensuite, du préjudice résultant du déficit fonctionnel subi pendant 22 mois en raison de l'immobilisation de son membre supérieur droit par écharpe jusqu'au 19 janvier 2007 et des nombreuses séances de rééducation qui ont suivi,

- également, du préjudice résultant du déficit fonctionnel permanent considérable qu'il subit en lien avec le taux d'incapacité permanente partielle qui a été fixé à 32 % par le médecin conseil,

- d'autre part, des préjudices liés aux souffrances endurées, à son atteinte esthétique et à l'impossibilité de participer aux activités sportives qu'il pratiquait auparavant,

- et, enfin, de la nécessité d'acheter une voiture adaptée à son handicap,

Attendu que Monsieur [P] [F] fait plaider pour sa part, à l'appui de son appel,

- que, tout d'abord, le Tribunal ne pouvait, par le jugement déféré, modifier le jugement du 7 décembre 2009 en ce qu'il a, de manière définitive, déclaré la procédure opposable à la Compagnie GROUPAMA,

- ensuite, sur les demandes d'indemnisation,

- que, d'une part, Monsieur [O] ne justifie pas, au regard de l'emploi de manoeuvre qu'il occupait au moment de l'accident et de l'absence de toute démarche de formation professionnelle avant l'accident, avoir réellement subi un préjudice professionnel légitimant une indemnisation distincte de celle prévue par les textes du code de la sécurité sociale en la matière,

- que, d'autre part, le jugement devra être confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [O] de sa demande au titre du préjudice résultant du déficit fonctionnel temporaire pour les motifs qu'il contient et qui doivent être adoptés,

- que, par ailleurs, Monsieur [O] ne peut obtenir, au titre du déficit fonctionnel permanent une double indemnisation,

- que, également, l'indemnisation au titre des souffrances endurées et du préjudice esthétique doivent être confirmées,

- et que, enfin, les demandes d'indemnisation du coût d'achat d'un véhicule adapté et d'un prétendu préjudice d'agrément doivent être rejetées à défaut d'être justifiées,

- et, sur les demandes en paiement à l'encontre tant de la Scea Château CADET et de lui même

- que Monsieur [B] [O] est irrecevable en ses demandes tendant à la condamnation directe de la Scea Château CADET au versement des indemnités, en réparation des conséquences de son accident de travail, conformément aux articles L.451-1 à L.452-4 du Code de la sécurité sociale et 32 et 122 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE.

- et que la Cour est incompétente, au profit du Tribunal de Grande Instance de LIBOURNE, par application combinée des articles 34 et 37 de la Constitution du 4 octobre 1958,6 de la CESDH, 75 du code de procédure civile, L 211-3 du COJ, L 142-1 et L.451-1 à L.452-4 du Code de la sécurité sociale, pour connaître de la demande de la MSA tendant à voir mettre directement à la charge de l'employeur les sommes allouées en réparation des préjudices complémentaires, ne relevant pas de l'article L 452-3 du code de la sécurité sociale, et de la demande de la Scea Château CADET, tendant, dans le cadre d'une action récursoire, à obtenir sa condamnation directe à la relever indemne de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre, au profit de Monsieur [B] [O],

Attendu que la Scea Château CADET fait plaider pour sa part

- que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de Monsieur [O] en réparation de la perte de chance d'évolution professionnelle dés lors qu'il ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui résultant de son déclassement professionnel compensé par l'attribution d'une rente majorée, ses demandes en réparation d'un préjudice fonctionnel temporaire et d'un préjudice fonctionnel permanent qui sont déjà couverts par la réparation forfaitaire prévue par le code de la sécurité sociale et sa demande au titre des frais d'adaptation d'un véhicule automobile qui est injustifiée,

- que le jugement déféré doit être réformé en ce qu'il a indemnisé un préjudice esthétique soit-disant temporaire, qui ne peut se cumuler avec l'indemnisation d'un préjudice permanent, et un préjudice d'agrément qui n'est pas établi,

- que l'indemnité allouée au titre des souffrances endurées doit être revue au regard des critères d'évaluation habituellement retenus par la jurisprudence,

- et que, enfin, elle est bien fondée à demander à être relevée indemne de toutes condamnations à son encontre par Monsieur [F], auteur de la faute inexcusable, et le cas échéant par son assureur,

Attendu que la SA Generali assurances IARD soutient pour sa part

- tout d'abord,

- que les juridictions de sécurité sociale étant incompétentes pour connaître des relations assurés-assureurs, Monsieur [O] ne peut demander sa condamnation à relever et garantir son employeur,

- et que le maintien en la cause de la société Groupama, assureur du véhicule à l'origine de l'accident, s'impose au visa des dispositions de la loi du 5 juillet 1985 et de l'article 331 du code de procédure civile,

- ensuite,

- que les préjudices énumérés à l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale pourront être justement réparés par les indemnités qu'elle propose, étant retenu que Monsieur [O] doit être débouté de sa demande en réparation de la perte ou de la diminution des possibilités de promotion professionnelle qu'il invoque sans en justifier,

- et que le jugement déféré devra être confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [O] de ses demandes d'indemnisations complémentaires qui ne sont fondées ni en droit ni en fait,

Attendu que la société Groupama Assurances fait plaider quant à elle

- que, contrairement à ce que soutiennent Monsieur [F] et la société Generali, le jugement rendu le 7 décembre 2009 ne pouvait, en toute hypothèse, être frappé d'un appel immédiat dés lors que ni l'exception d'incompétence soulevée par Monsieur [F], ni la fin de non-recevoir qu'elle lui opposait n'ont mis fin à l'instance,

- et que, par ailleurs, sa mise en cause n'est pas juridiquement fondée dans une instance en faute inexcusable dés lors que, d'une part, le propriétaire du véhicule n'ayant pas été mis en cause par la Scea Château CADET ni par Monsieur [F], sa mise en cause en qualité d'assureur de ce véhicule n'est pas justifiée et que, d'autre part, selon les dispositions de l'article L.455-1-1 du code de la sécurité sociale, les accidents du travail impliquant un véhicule terrestre à moteur ne circulant pas sur une voie publique sont soumis aux seules dispositions du code de la sécurité sociale applicables aux accidents du travail,

Attendu que la Caisse de mutualité sociale agricole de la Gironde demande pour sa part

- qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle s'en remet à l'appréciation de la Cour sur l'évaluation des préjudices énoncés à l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale,

- et qu'il soit rappelé qu'elle n'a pas à faire l'avance des sommes allouées en réparation des préjudices complémentaires qui ne relèvent pas de l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale,

Attendu que la Cour se référera par ailleurs pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties aux dispositions de la décision dont appel en ce qu'elles ne sont pas contraires à celles du présent arrêt ainsi qu'aux conclusions visées ci-dessus en référence, déposées au dossier de la procédure et développées oralement à l'audience,

* * * *

Attendu, tout d'abord, sur les demandes, en cause d'appel, en garantie à l'encontre des compagnies d'assurance et de Monsieur [F] et sur la demande de Monsieur [F] en réformation du jugement déféré en ce qu'il a mis hors de cause de la société GROUPAMA, qu'il convient de constater que le Tribunal s'est, par son jugement rendu le 7 décembre 2009, déclaré incompétent au profit du Tribunal de grande instance pour apprécier 'de la garantie des compagnies d'assurances et de Monsieur [F] ou de leur mise hors de cause',

Attendu qu'il en résulte que, ce jugement,

- qui a ainsi statué sur les prétentions opposant d'une part les parties sur leurs demandes de garantie réciproques et d'autre part la société GROUPAMA à Monsieur [F] et à la Scea Château CADET qui l'avaient appelée en cause afin de lui rendre commun le jugement à intervenir

- et qui n'a fait l'objet d'aucune voie de recours, que ce soit immédiatement ou que ce soit concomitamment avec les appels formés par Monsieur [O] et Monsieur [F] à l'encontre du jugement rendu le 6 décembre 2010,

est ainsi définitif sur ces points, et que les demandes des parties de ces chefs seront rejetées comme irrecevables et le jugement déféré infirmé en ce qu'il a mis hors de cause la Société GROUPAMA,

Attendu, ensuite, sur la réparation des préjudices visés à l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale, qu'il ressort des conclusions de l'expertise réalisée par le docteur [Y] [I] que, pour Monsieur [O], âgé de 38 ans, et dont le taux d'incapacité permanente partielle a été fixé à 32%,

- les souffrances endurées doivent être évaluées à 4/7 en fonction du traumatisme initial, de l'hospitalisation, de la parésie des deux membres supérieurs, de l'immobilisation par écharpe du membre supérieur droit, de l'algodystrophie survenue dans les suites, de 100 séances de rééducation et des examens complémentaires,

- le préjudice esthétique doit être évalué à 1/7 en fonction de l'amyotrophie des fosses sus et sous scapulaires et de la partie supérieure du deltoïde droit,

- le préjudice d'agrément résulte de ce que celui-ci n'a pas repris la pratique antérieure de la pêche, de la natation et de la pétanque,

- il n'existe pas de préjudice professionnel,

Attendu que la nature des souffrances endurées et leur durée permettent de retenir, à titre d'indemnisation, la somme de 10.000 euros justement appréciée par les premiers juges,

Attendu que l'indemnisation du préjudice esthétique sera assurée, en raison de la nature des séquelles subsistantes et de l'âge de la victime, par l'allocation de la somme de 2.000 euros,

Attendu que l'indemnisation du préjudice d'agrément sera assurée, pour la privation pour Monsieur [O], en raison de la nature des séquelles physiques subsistantes, des activités de loisirs pratiquées avant l'accident, par l'allocation de la somme de 5.000 euros,

Attendu que le jugement déféré sera en conséquence réformé sur ces deux derniers points,

Attendu, sur les demandes de Monsieur [O] relatives tant à son préjudice professionnel résultant de ce que l'accident subi l'a privé de toute possibilité d'exercer son métier d'ouvrier agricole et tout autre métier manuel, ainsi que de toute perspectives de promotion professionnelle, qu'à son préjudice fonctionnel permanent résultant de la réduction, pour l'avenir, de son potentiel physique, que si l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 18 juin 2010, dispose qu'en cas de faute inexcusable, la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle peut demander à l'employeur, devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation d'autres chefs de préjudice que ceux énumérés par le texte précité, c'est à la condition que ces préjudices ne soient pas déjà couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale,

Et attendu que la rente dont bénéficie Monsieur [O] en application de l'article L.452-2 de ce code indemnisant d'une part les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité et d'autre part le déficit fonctionnel permanent, il en résulte que les dommages dont il demande ainsi réparation sont déjà indemnisés au titre du livre IV du code de la sécurité sociale et ne peuvent donner lieu à indemnisation sur le fondement de l'article L. 452-3 du même code,

Attendu que Monsieur [O] sera en conséquence débouté de ses moyens d'appel de ces chefs,

Attendu, sur le préjudice résultant du déficit fonctionnel temporaire, que, pour les mêmes motifs, et dés lors que les indemnités journalières servies à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle n'assurent pas la réparation du déficit fonctionnel temporaire qui inclut, pour la période antérieure à la date de consolidation, l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, Monsieur [O] est fondé à demander l'indemnisation de ce préjudice qui n'est pas au nombre des dommages couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale,

Attendu qu'il sera en conséquence fait droit à la demande de Monsieur [O] pour la somme qu'il sollicite qui fait une juste appréciation du préjudice subi de ce chef au regard de la durée de la maladie traumatique,

Attendu par ailleurs que le bénéfice du versement direct par la Caisse, prévu par le dernier alinéa de l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale, de la réparation des préjudices allouée à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle dus à la faute inexcusable de l'employeur, indépendamment de la majoration de rente, s'appliquant également aux indemnités réparant les préjudices non énumérés par ce texte, la Caisse de mutualité sociale agricole de la Gironde sera tenue de faire cette avance,

Attendu, d'autre part, sur les frais de véhicule automobile adapté, que Monsieur [O] n'apporte aux débats aucun élément permettant de constater la nécessité d'une adaptation de son véhicule automobile ni les adaptations apportées au véhicule automobile dont il fournit le devis d'achat,

Attendu que le jugement déféré sera confirmé sur ce point,

Attendu enfin qu'il convient, en équité, de condamner la Scea Château CADET à payer à Monsieur [B] [O] la somme de 1.200 euros en application, en cause d'appel, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, le jugement déféré étant également confirmé sur ce point, et les autres parties étant déboutées de leur demande à ce titre,

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Reçoit Monsieur [B] [O] et Monsieur [P] [F] en leur appel du jugement rendu le 6 décembre 2010 par le Tribunal des affaires de sécurité sociale de la Gironde, section agricole, et la Caisse de mutualité sociale agricole de la Gironde, la Scea Château CADET, la SA Generali assurances IARD et la société Groupama Assurances en leur appel incident,

Infirme partiellement ce jugement en ce qu'il a

- ordonné la mise hors de cause de la société Groupama Assurances,

- débouté Monsieur [B] [O] de sa demande au titre du déficit fonctionnel temporaire,

Le réforme en ce qu'il a alloué à Monsieur [B] [O], au titre de l'indemnisation complémentaire de l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale

- la somme de 1.000 euros au titre du préjudice esthétique,

- la somme de 3.000 euros au titre du préjudice d'agrément,

Le confirme en ce qu'il a

- déclaré le jugement opposable à la Caisse de mutualité sociale agricole de la Gironde, à la SA Generali Assurances et à Monsieur [F],

- alloué à Monsieur [B] [O], au titre de l'indemnisation complémentaire de l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale, la somme de 10.000 euros au titre du préjudice moral et physique,

- condamné la Scea Château CADET à payer à Monsieur [O] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

Déclare les parties irrecevables en leurs demandes relatives à la garantie des compagnies d'assurances et de Monsieur [F] ou de leur mise hors de cause,

Alloue à Monsieur [B] [O], au titre de l'indemnisation complémentaire de l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale,

- la somme de 2.000 euros au titre du préjudice esthétique,

- la somme de 5.000 euros au titre du préjudice d'agrément,

- la somme de 2.200 euros au titre du préjudice résultant du déficit fonctionnel temporaire,

Déboute Monsieur [B] [O] de ses autre demandes indemnitaires,

Rappelle que la Caisse de mutualité sociale agricole de la Gironde, qui versera directement à Monsieur [O] lesdites sommes, les récupérera auprès de la Scea Château CADET, employeur de Monsieur [O],

Y ajoutant,

Condamne la Scea Château CADET à payer à Monsieur [B] [O] la somme de 1.200 euros en application, en cause d'appel, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette comme inutiles ou mal fondées toutes demandes plus amples ou contraires des parties.

Signé par Monsieur Jean-Paul ROUX, Président, et par Chantal TAMISIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. TAMISIER Jean-Paul ROUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 11/00444
Date de la décision : 03/05/2012

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°11/00444 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-05-03;11.00444 ?
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