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29/03/2012 | FRANCE | N°11/00370

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 29 mars 2012, 11/00370


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 29 MARS 2012

fc

(Rédacteur : Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 11/00370

















Madame [H] [P]



c/



SOCIETE FRANCAISE DE GESTION HOSPITALIERE HOPITAL SERVICE





















Nature de la décision : AU

FOND







Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déféré...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 29 MARS 2012

fc

(Rédacteur : Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 11/00370

Madame [H] [P]

c/

SOCIETE FRANCAISE DE GESTION HOSPITALIERE HOPITAL SERVICE

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 novembre 2010 (R.G. n°F 09/00785) par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d'appel du 19 janvier 2011,

APPELANTE :

Madame [H] [P]

née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 5]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 2]

représentée par Maître Magali BISIAU, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SOCIETE FRANCAISE DE GESTION HOSPITALIERE HOPITAL SERVICE

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 3]

représentée par Maître Julie PLEUVRET loco Maître Guillaume ROLAND, avocats au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 25 janvier 2012 en audience publique, devant Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller, faisant fonction de Président et Madame Katia SKLARZ Vice Président placée, chargées d'instruire l'affaire, qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Paul ROUX, Président,

Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller,

Madame Katia SZKLARZ, Vice-Présidente Placée,

Greffier lors des débats : Madame Florence CHANVRIT adjoint administratif faisant fonction de greffier,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [H] [P] a été embauchée par la Clinique [4] en qualité d'agent de service à effet du 15 février 1982.

En juin 2005, la clinique [4] a décidé d'externaliser ses activités de nettoyage, d'accueil, de restauration et de maintenance qu'elle a confiées à la société COMPASS.

En 2008, la clinique [4] a réinternalisé les services accueil et standard et a confié le service de restauration à la société COMPASS et le service maintenance à la société ALTYS; la société HOPITAL SERVICES s'est vue confier le marché des prestations de bio nettoyage à compter du 1er décembre 2008.

67 salariées, dont Mme [H] [P], ont été reprises par la société HOPITAL SERVICES, qui estimant qu'elle se situait dans une application volontaire des dispositions de la convention collective nationale des entreprises de propreté et de services associés, s'est abstenue de maintenir les avantages que les salariés tenaient de leur précédent statut collectif.

Le 17 mars 2009, Mme [H] [P] a saisi le Conseil des Prud'Hommes de BORDEAUX pour voir condamner la SA HOPITAL SERVICES à lui conserver l'intégralité de ses acquis, en application des articles L 1224-1 et L 2261-14 du code du travail et afin de voir condamner, sous astreinte de 100€ par jour de retard, cette société à lui payer diverses sommes (RTT, régularisation de la CMP à hauteur de 10%), outre la somme de 3113,81€ de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier, la somme de 800€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, réclamant en outre la remise en conformité de bulletins de salaire.

Par jugement en date du 26 novembre 2010, le Conseil des Prud'Hommes de BORDEAUX, sous la présidence du juge départiteur, a dit que le transfert d'activité vers la SA HOPITAL SERVICE s'est fait dans les conditions de l'application volontaire de l'article L 1224-1 du code du travail et que Mme [H] [P] avait été remplie de l'intégralité de ses droits de salariée.

Il a débouté Mme [H] [P] de l'ensemble de ses demandes en la condamnant à régler la somme de 100€ à la SA HOPITAL SERVICES, et ce en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 19 janvier 2011, Mme [H] [P] a relevé appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 28 novembre 2011, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, Mme [H] [P] demande à la Cour de dire que la société HOPITAL SERVICES aurait du faire application des dispositions d'ordre public de l'article L 1224-1 du code du travail à l'occasion du transfert survenu le 1er décembre 2008.

Elle demande à la Cour d'ordonner à la société HOPITAL SERVICES de lui faire application pour l'avenir des avantages acquis suivants, et ce sous astreinte de 100€ par jour de retard

- 14 jours de RTT par salarié

- absence de délai de carence en cas d'hospitalisation

- délai de carence de 3 jours en cas d'arrêt maladie

- application de la subrogation avec maintien de salaire en cas d'arrêt maladie

- maintien de salaire pendant 240 jours à taux plein en cas de maladie

- jours spéciaux et délais de route

- garanties hospitalisation

- taux de retraite complémentaire à 10%

- mutuelle

- prime de service minimum

- prime d'ancienneté

- prime de parking

- prime de 13éme mois proratisée au temps de présence assimilé

- prime de fonction plateau technique.

Elle demande la condamnation de la société HOPITAL SERVICES à lui payer la somme 10.000€ de dommages et intérêts pour résistance abusive, outre celle de 2000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle sollicite la condamnation de la société HOPITAL SERVICES à lui remettre l'ensemble des bulletins de salaire rectifiés sous astreinte de 100€ de retard à compter du prononcé de la décision.

Elle demande enfin la condamnation de la société HOPITAL SERVICES à payer à son avocate, Me [L], la somme de 2000€ sur le fondement de l'article 37 de la loi de 1991 relative à l'aide juridictionnelle.

Par conclusions déposées le 23 janvier 2012 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la société HOPITAL SERVICES demande la confirmation du jugement entrepris.

En tout état de cause, elle conclut que les RTT ne constituent pas un avantage acquis et conclut au paiement de Mme [H] [P] solidairement avec les autres salariées appelantes à lui payer la somme de 1000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A la demande de la Cour, la société HOPITAL SERVICES répond sur les demandes d'application de tous avantages acquis faites par Mme [H] [P] et non développées par elle dans ses conclusions, en indiquant point par point ceux ou non appliqués par elle, explications notées dans les notes d'audience.

MOTIFS DE LA DECISION

* Sur l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail et sur ses conséquences.

Mme [H] [P] soutient qu'il y a bien eu transfert de son contrat de travail en application de l'article L.1224-1 du code du travail de la société COMPASS à la société HOPITAL SERVICES dans la mesure où il y a bien eu transfert d'une entité économique autonome de bio-nettoyage et de tout le personnel du service du service hospitalier qui y était affecté auprès de la société HOPITAL SERVICES alors que la société HOPITAL SERVICES maintient que l'activité de nettoyage pour laquelle elle a succédé à la société COMPASS ne constitue par une entité économique au sens de l'article précité au motif qu'aucun moyen matériel ni aucun savoir faire n'a fait l'objet de ce transfert, les salariés ayant simplement été maintenus dans leurs fonctions.

Cependant, la Cour estime que pour certains secteurs dans lesquels l'activité repose essentiellement sur la main d'oeuvre, une collectivité de travailleurs, que réunit durablement une activité commune, peut correspondre à une entité économique, susceptible de maintenir son identité par delà son transfert quand ce personnel met en oeuvre des connaissances techniques ou un savoir faire qualifié qui constituent ainsi un actif économique incorporel.

En l'espèce, les salariés affectés à l'activité de nettoyage au sein de la clinique [4], dont Mme [H] [P] développaient, selon les documents produits aux débats, une technicité et une expertise particulières dans le nettoyage dit de la 'pièce blanche' ou le 'bio-nettoyage' des plateaux techniques (bloc opératoire, salles de naissances, unité de soins intensifs, service endoscopie) et pouvaient adapter cette technicité au service d'une mise en oeuvre différente des processus de ce nettoyage par ses employeurs successifs.

En conséquence, la Cour infirme la décision des premiers juges et dit qu'il y a bien eu transfert du contrat de travail de Mme [H] [P], par l'application de plein droit de l'article L. 1224-1 du code du travail.

Mme [H] [P] demande à la Cour d'ordonner à la société HOPITAL SERVICES de lui faire application pour l'avenir, sous astreinte, des avantages acquis suivants:

- 14 jours de RTT par salarié

- absence de délai de carence en cas d'hospitalisation

- délai de carence de 3 jours en cas d'arrêt maladie

- application de la subrogation avec maintien de salaire en cas d'arrêt maladie

- maintien de salaire pendant 240 jours à taux plein en cas de maladie

- jours spéciaux et délais de route

- garanties hospitalisation

- taux de retraite complémentaire à 10%

- mutuelle

- prime de service minimum

- prime d'ancienneté

- prime de parking

- prime de 13éme mois proratisée au temps de présence assimilé

- prime de fonction plateau technique.

La Cour, après analyse des pièces versées aux débats note que certains de ces avantages ont été repris par la société HOPITAL SERVICES après négociation aux termes d'un protocole d'accord de fin de conflit du 20 mars 2009 qui reprend certains des avantages antérieurs dont disposaient les salariés et notamment

- jours de RTT: 13 jours plus le 1er mai sont accordés, dans le cadre d'un temps de travail hebdomadaire de 36 heures en moyenne (7 heures 12 par jour)

- indemnité de parking de 60€ sur présentation du justificatif

- congés payés

- prime d'expérience dans la convention collective appelée prime d'ancienneté

et qu'elle s'est engagée également, par ce même protocole du 20 mars 2009, à faire bénéficier les salariés du protocole d'accord signé le 13 novembre 2006 par la société COMPASS concernant

- la retraite complémentaire

- les congés payés et les congés supplémentaires pour ancienneté

- les jours fériés

- l'indemnité de licenciement

- les femmes enceintes

ainsi que du protocole signé le 15 mars 2007 par la société COMPASS concernant

- l'absentéisme

- la prime d'expertise ASH plateaux techniques

- la clause de non-mobilité.

Ainsi, la Cour ne peut qu'inviter la société HOPITAL SERVICES, sans application d'une quelconque astreinte, à faire bénéficier pour l'avenir à Mme [H] [P] des avantages acquis qui n'ont pas déjà fait l'objet d'un accord les intégrant dans la relation contractuelle avec la double précision que

- d'une part, les jours de RTT accordés résultent des modalités de l'organisation collective de travail mise en place: si la société COMPASS avait mise en place une durée légale de 35 heures hebdomadaires, la société HOPITAL SERVICE a organisé un temps de travail hebdomadaire de 36 heures en moyenne

- d'autre part, certains avantages repris par la société HOPITAL SERVICE se déclinent selon des modalités différentes sans désavantage pour le salarié (régularisation de 10% au titre de la CPM par exemple)

En outre, en tant que de besoin, la société HOPITAL SERVICES devra remettre à Mme [H] [P] l'ensemble des bulletins de salaire rectifiés en fonction des dispositions de cet arrêt, mais sans application d'une astreinte.

* Sur les autres demandes

La Cour fait droit à la demande de Mme [H] [P] de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la résistance pendant près de trois ans de la société HOPITAL SERVICE à l'application de dispositions d'ordre public du code du travail.

L'équité et les circonstances de la cause commandent de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera en conséquence alloué à Me [L], avocat, qui en fait la demande, la somme de 1200€ en application des dispositions de l'article 37 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens de première instance et d'appel que l'appelante, bénéficiaire de l'aide juridique, aurait exposés si elle n'avait pas eu cette aide.

Mme [H] [P], ne justifiant pas des dépenses irrépétibles qu'elle a pu avoir en sus des frais et honoraires déjà indemnisés, sera, quant à elle déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société HOPITAL SERVICE supportera les dépens de la procédure de première instance et de celle d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions

et statuant à nouveau

DIT QUE le transfert de l'activité de bio-nettoyage au sein de la clinique [4] vers la société HOPITAL SERVICES a emporté le transfert du contrat de travail de Mme [H] [P] par l'application de plein droit de l'article L. 1224-1 du code du travail.

ORDONNE à la société HOPITAL SERVICES, sans application d'une quelconque astreinte, de faire bénéficier pour l'avenir à Mme [H] [P] des avantages acquis qui n'ont pas déjà fait l'objet d'un accord les intégrant dans la relation contractuelle sous les précisions mentionnées dans les motivations.

DIT QUE la société HOPITAL SERVICES devra remettre, en tant que de besoin, à Mme [H] [P] l'ensemble des bulletins de salaire rectifiés en fonction des dispositions de cet arrêt, mais sans application d'une astreinte.

CONDAMNE la société HOPITAL SERVICE à verser à Mme [H] [P] la somme de 800€de dommages et intérêts pour résistance abusive.

DEBOUTE Mme [H] [P] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE la société HOPITAL SERVICE à verser à Me [L] la somme de 1200€ en application des dispositions de l'article 37 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique

CONDAMNE la société HOPITAL SERVICE aux dépens de la procédure de première instance et d'appel

Signé par Monsieur Jean-Paul ROUX, Président, et par Chantal TAMISIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. TAMISIER Jean-Paul ROUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 11/00370
Date de la décision : 29/03/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-29;11.00370 ?
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