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08/03/2012 | FRANCE | N°11/01893

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 08 mars 2012, 11/01893


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 08 MARS 2012

fc

Rédacteur : Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 11/01893

















Madame [Z] [C]



c/



SA LABORATOIRE DE BIOLOGIE VÉGÉTALE YVES ROCHER





















Nature de la décision : AU FOND
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Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour ...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 08 MARS 2012

fc

Rédacteur : Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 11/01893

Madame [Z] [C]

c/

SA LABORATOIRE DE BIOLOGIE VÉGÉTALE YVES ROCHER

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 mars 2011 (R.G. n°F09/76) par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage d'ANGOULÊME, Section Encadrement suivant déclaration d'appel du 23 mars 2011,

APPELANTE :

Madame [Z] [C]

née le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 9]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 5]

représentée par Maître Charlotte BELLET, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

SA LABORATOIRE DE BIOLOGIE VÉGÉTALE YVES ROCHER,

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 7]

représentée par Maître Michel PEIGNARD, avocat au barreau de VANNES

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 07 décembre 2011 en audience publique, devant Monsieur Jean-Paul ROUX, Président et Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire, qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Paul ROUX, Président,

Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller,

Madame Katia SZKLARZ, Vice-Présidente Placée,

Greffier lors des débats : Madame Florence CHANVRIT adjoint administratif faisant fonction de greffier,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [Z] [C], esthéticienne ayant déjà travaillé dans des centres de beauté YVES ROCHER a déposé sa candidature auprès de la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VÉGÉTALE YVES ROCHER le 26 février 2002 pour la direction d'un centre de beauté à [Localité 9] (03).

Suite à la proposition de la société YVES ROCHER de reprendre le fonds de l'Institut de [4] ([Localité 6]) prés d'[Localité 2], une convention de gérance libre a été conclue par contrat signé les 10 et 20 juin 2002 entre la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VÉGÉTALE YVES ROCHER et la SARL [Z] [C] en cours d'immatriculation et représentée par Mme [Z] [C], cette convention prenant effet le 4 juillet 2002 pour une durée de 3 ans et ayant pour objet l'exploitation d'un fonds de commerce de vente de produits de beauté, d'hygiène et de soins esthétiques, connu sous le nom d'INSTITUT DE BEAUTE YVES ROCHER exploité au Centre Commercial AUCHAN Lot n°7 [Localité 6] [Localité 6].

Il était prévu à la première page de ce contrat que dans le cas où la SARL [Z] [C] ne serait pas immatriculée pour quelle que raison que ce soit, le contrat sera réputé avoir été passé depuis sa date d'effet avec Mme [Z] [C].

Le 1er juillet 2002, Mme [Z] [C] a constitué avec son mari, titulaire de 40% des parts sociales, une SARL '[Z] [C]' enregistrée le 3 juillet 2002 ayant pour objet social principalement l'exploitation d'un institut de beauté et d'esthétique, la pratique de soins esthétiques, la vente de produits de parfumerie, de produits et articles de beauté, de produits diététiques et de santé et plus généralement tout ce qui se rapporte à la beauté....

L'article 4 des statuts de la SARL précisait que l'enseigne commerciale de la SARL [Z] [C] serait 'YVES ROCHER' et que le siège de la société était fixé

au Centre Commercial AUCHAN Lot n°7 [Localité 6] [Localité 6].

La SARL '[Z] [C]' a conclu les 18 et 24 novembre 2003 une nouvelle convention de location-gérance avec la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VÉGÉTALE YVES ROCHER pour l'exploitation d'un second Centre de Beauté situé [Adresse 3] pour une durée de 3 ans à compter du 7 novembre 2003.

Suite à un non-renouvellement le 14 mars 2005 par la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VÉGÉTALE YVES ROCHER du contrat portant sur l'exploitation du fonds situé à [Localité 6], la SARL '[Z] [C]' a conclu avec la SA YVES ROCHER une nouvelle convention de 3 années à compter du 4 juillet 2005.

Par courrier recommandé en date du 1er février 2008, la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VÉGÉTALE YVES ROCHER a dénoncé le contrat d'exploitation du Centre de Beauté de [Localité 6].

Le 18 février 2008, Mme [Z] [C] a saisi le Conseil des Prud'Hommes d'ANGOULEME pour obtenir la requalification du contrat de location gérance en contrat de travail et pour réclamer de ce fait des sommes au titre des indemnités de rupture et des dommages et intérêts, outre des sommes au titre des heures

supplémentaires et une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par courrier recommandé en date du 3 avril 2009, la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VÉGÉTALE YVES ROCHER a dénoncé le contrat d'exploitation du Centre de [Adresse 3] avec effet au 7 avril 2009.

Par jugement en date du 24 janvier 2011, le Conseil des Prud'Hommes d'ANGOULEME, sous la présidence du juge départiteur, a:

- dit que les relations entre Mme [Z] [C] et la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER s'analysent depuis le 10 juin 2002 en un contrat de succursale

- rejeté l'exception d'incompétence de la SA LBV YVES ROCHER

- dit que Mme [Z] [C] ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un contrat de travail avec la SA LBV YVES ROCHER

- dit que la rupture des relations contractuelles entre la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER et Mme [Z] [C] s'analyse en un licenciement de Mme [C] de son contrat de gérant de succursale

- dit que ce licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse

- condamné la SA LBV YVES ROCHER à payer à Mme [Z] [C] les sommes suivantes

* 12.948€ d'indemnité pour défaut de cause réelle et sérieuse de licenciement avec intérêt au taux légal à compter du jugement

* 6474€ d'indemnité compensatrice de préavis, avec les congés payés afférents (647,40€) avec intérêts au taux légal à compter du 23 février 2009

* 2697,50€ d'indemnité conventionnelle de licenciement avec intérêts au taux légal à compter du 23 février 2009

* 1500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile

avec capitalisation des intérêts échus pour une période supérieure à un an

- ordonné le remboursement de 6 mois d'indemnités chômage à POLE EMPLOI

- ordonné la remise de divers documents (certificat de travail, bulletins de salaire, attestations Assedic) dans les 2 mois de la signification du jugement sous réserve de l'application d'une astreinte de 75€ par jour de retard pendant 6 mois

- débouté Mme [Z] [C] de ses demandes de requalification en contrat de travail et de paiement de rappels de salaires, de congés payés hors préavis et d'heures supplémentaires.

Le 25 mars 2011, Mme [Z] [C] a relevé appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 7 décembre 2011, développées oralement quant aux quantum des condamnations sollicitées et auxquelles il est expressément fait référence, Mme [Z] [C] demande à la Cour de:

- constater qu'au-delà de l'apparence de la SARL [Z] [C], l'activité était en fait exercée personnellement par elle et juger que la SARL [Z] [C] était une société fictive

- se déclarer compétente

- dire qu'elle remplit toutes les conditions posées par les articles L 7321-2 et L 1221-1 du Code du Travail et donc bénéficie de toutes les dispositions du Code du Travail

- dire que la rupture du contrat est imputable à la SA LBV YVES ROCHER et requalifier cette rupture en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Elle demande en conséquence à la Cour de confirmer le jugement sur le principe des sommes allouées mais non sur leur quantum et demande à ce qu'il soit fait droit à toutes les demandes en paiement qui n'ont pas été retenues par les premiers juges

Ainsi, elle réclame à la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER les sommes suivantes :

- 83.127€ de rappel d'heures supplémentaires avec congés payés afférents

- 6720€ d'indemnité compensatrice de préavis de congés payés

- 3360€ d'indemnité conventionnelle de licenciement

- 8061€ d'indemnité de préavis, outre 806,10€ de congés payés afférents,

- 64.488€ de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

ces condamnations étant assorties des intérêts au taux légal avec capitalisation.

Elle réclame la remise des documents administratifs (certificat de travail, bulletins de paie, attestation Assedic) et le paiement de la somme de 10.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 7 décembre 2011 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER demande à la Cour de constater qu'elle a toujours eu comme co-contractante la SARL [Z] [C] qui n'était nullement fictive et que par ailleurs Mme [C] ne peut se prévaloir des dispositions des articles L 7321-2 et L 1221-1 du code du travail.

Elle demande dés lors à la Cour de renvoyer Mme [C] à se pourvoir devant la juridiction compétente, à savoir le Tribunal de Commerce de VANNES et de condamner Mme [C] à lui régler la somme de 10.000€ de dommages et intérêts outre 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire, elle demande à la Cour l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il l'a condamné à régler des indemnités de rupture et une indemnité pour défaut de cause réelle et sérieuse du licenciement et à titre infiniment subsidiaire de n'allouer que les sommes suivantes

* 2311,79€ au titre de l'indemnité de licenciement

* 3963,06€ au titre de l'indemnité de préavis outre les congés payés afférents

* 7926,12€ au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

MOTIFS DE LA DECISION

* Sur les relations contractuelles et la compétence de la juridiction prud'homale.

La SA LBV YVES ROCHER soutient toujours l'exception d'incompétence soulevée devant les premiers juges au profit du Tribunal de Commerce de VANNES.

Elle estime en effet, contrairement à ce qui a été décidé par le Conseil des Prud'Hommes d'ANGOULEME que les demandes présentées par Mme [C] à son encontre sont totalement dénuées de fondement dans la mesure où elle n'a aucune relation contractuelle avec Mme [C] mais avec la seule société SARL [Z] [C].

Mme [Z] [C] veut voir appliquer au litige les dispositions du code du Travail en indiquant que

- d'une part, la SARL dont elle était la gérante avait un caractère fictif et que l'activité était en fait exercée directement par elle, exploitant personne physique

- d'autre part, le contrat de gérance libre qui la liait à la société YVES ROCHER était un contrat de gérant de succursale soumis au dispositions du code du travail.

- Sur le caractère fictif de la SARL [Z] [C].

Les premiers juges ont considéré en effet que la SARL [Z] [C] n'avait pas un caractère fictif en retenant que

- la création de la société ressort bien de l'apport financier de deux associés en vue de fonder une société mettant en commun les moyens apportés, dans un but de gestion d'un fonds de commerce de beauté et d'esthétique, ce qui est conforme à l'activité exercée,

- Mme [C] ne rapporte pas la preuve que l'exercice réel de la fonction de directrice d'institut ait été subordonnée à la création d'une société,

- le surplus des observations de Mme [C] qui vise à démontrer l'existence d'un lien direct et intuitu personae entre elle-même et la société YVES ROCHER ne sont pas de nature à établir le caractère fictif de la société ... ces éléments pouvant exister avec une société ayant une existence réelle.

La Cour ne partage pas cette analyse et note, bien au contraire, que:

- la SARL [Z] [C], dont l'enseigne commerciale était 'YVES ROCHER', a été constituée concomitamment à la signature du contrat de location gérance et avait pour siège social l'adresse de l'institut YVES ROCHER confié à Mme [C] au centre commercial Auchan à [Localité 6]

- il était précisé dans le contrat de gérance libre signé entre la Société LABORATOIRES de BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER et la SARL '[Z] [C]' que dans le cas où la société ne serait pas immatriculée pour quelle que raison que ce soit, le contrat sera réputé avoir été passé depuis sa date d'effet avec Mme [Z] [C]

- les deux associés de la SARL [Z] [C] étaient Mme [Z] [S] épouse [C], gérante de la SARL et son mari dont il ne saurait être contesté qu'il n'avait aucune compétence ou aucun savoir-faire pour exercer une quelconque activité dans la SARL, ce qu'il n'a jamais fait d'ailleurs, et qu'il s'est donc retrouvé associé pour les besoins de la cause, sans un réel désir de collaboration volontaire et intéressée,

- la gérante libre se devait d'exploiter et de diriger personnellement le fonds et il est ainsi acquis que la société LBV YVES ROCHER entendait conclure avec Mme [C] intuitu personae en raison de ses qualités professionnelles reconnues, sa personne étant déterminante pour cela,

- la société LBV pouvait mettre un terme à la relation contractuelle en cas de substitution de toute personne à Mme [Z] [C], tant dans le capital social que dans la

direction de la société

- la société LBV YVES ROCHER faisait obligation à Mme [C] de lui communiquer ses chiffres d'affaires et bilans (article 5.7 du contrat de gérance libre),

- la SARL [Z] [C] n'a jamais exploité une autre activité ni avant l'exploitation de l'Institut YVES ROCHER ni après.

La Cour infirme, en conséquence, la décision des premiers juges, estimant que la SARL [Z] [C] était une société fictive imposée par la société LBV YVES ROCHER et apparaissait comme une façade pour tenter de masquer les relations contractuelles existant entre Mme [Z] [C] à titre personnel et la société LBV YVES ROCHER.

- Sur l'application de l'article L 7321-1 du code du travail.

Il convient maintenant de rechercher si dans ses relations personnelles avec la société LBV YVES ROCHER, Mme [Z] [C] exerçait ou non pour le moins des fonctions de gérant de succursale et après une longue analyse particulièrement détaillée sur les quatre conditions cumulativement nécessaires au sens des articles L 7321-1 et suivants du code du travail, le Conseil des Prud'Hommes d'ANGOULEME a considéré que les relations entre les parties s'analysaient bien en une relation de gérance de succursale, décision que la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER conteste fermement devant la Cour.

Ces quatre conditions

- exercice de l'activité dans un local fourni ou agréé par la société LBV YVES ROCHER

- existence d'une activité essentielle de vente de marchandises ou de denrées provenant la société LBV YVES ROCHER

- fourniture exclusive de ces marchandises ou denrées fournies par ladite société

- exercice de l'activité aux conditions et prix imposés par cette société

doivent s'apprécier au regard du contrat de gérance libre signé entre les parties dont l'objet était le suivant

Article 1 - Objet.

La société Yves Rocher donne en gérance libre à ...un fonds de commerce de vente, de produits de beauté, d'hygiène et de soins esthétiques, connu sous le nom d'INSTITUT YVES ROCHER....

Il est précisé que ledit fonds s'intègre dans le réseau des INSTITUTS DE BEAUTE YVES ROCHER et qu'à ce titre il devra respecter l'ensemble des normes relatives à l'identité propre et à l'uniformité de ce réseau et bénéficiera du savoir-faire développé par YVES ROCHER dans les conditions ci-après.

Article 2 - Dispositions générales

.... le fonds mis en location a pour objet principal d'assurer, sans contrat d'exclusivité, l'écoulement au détail des produits fabriqués ou distribués par elle (LA SA LBV YVES ROCHER).

Exercice de l'activité dans un local fourni ou agréé

Il n'est pas contesté tout d'abord que la société LBV YVES ROCHER a fourni à Mme [Z] [C] le local dans lequel elle exploitait son activité.

Existence d'une activité essentielle de vente de marchandises ou de denrées

Pour la société LBV YVES ROCHER, la SARL [Z] [C] se consacrait non seulement à la vente de produits mais aussi et surtout à l'activité de soins esthétiques et cette activité de soins n'était pas une activité annexe au regard de son chiffre d'affaires et de sa rentabilité: dés lors, pour elle, l'activité de la SARL n'était pas une activité essentielle de vente de marchandises ou de denrées.

Les premiers juges se sont livrés à une analyse pertinente que la Cour fait sienne en soulignant qu'il y a lieu de s'attacher non aux parts respectives de l'activité soins et de l'activité vente dans le résultat de l'entreprise mais aux parts de travail et du chiffre d'affaires de ces activités pour déterminer si l'activité vente constitue l'essentiel de l'activité de la succursale dont Mme [C] se prétend être gérante puis en constatant que

- l'activité vente représente de façon constante plus de 84% du chiffre d'affaires

- seul 30,5% du temps de travail global, gérante comprise, était consacré aux activités soins

- la marge brute de l'activité soins n'a jamais dépassé 35% voire parfois 40% de l'activité générale de la SARL.

De plus, Mme [C] n'exerçait aucune autre activité que celles prévues au contrat de gérance et l'activité de soins était elle aussi liée à l'écoulement des produits YVES ROCHER dans la mesure où tous les soins étaient faits aves ces seuls produits.

Le caractère essentiel de vente de marchandises ou de denrées dans l'activité, sans laquelle la SARL ne pouvait exister, est donc là encore établi par Mme [C].

Fourniture exclusive de ces marchandises ou denrées

Comme l'ont relevé les premiers juges, il ressort de l'article 2 du contrat de gérance que les relations contractuelles ont pour objet principal d'assurer, sans contrat d'exclusivité, l'écoulement au détail des produits fabriqués ou distribués par elle (LA SA LBV YVES ROCHER)

L'article 7 dudit contrat précise que

La présente location gérance comporte à la charge de la gérante libre l'engagement de s'approvisionner exclusivement auprès de la SOCIETE LBV YVES ROCHER....

La gérante libre s'oblige à ne pas approvisionner son Institut de Beauté YVES ROCHER et à ne pas vendre des produits qui n'auraient pas été approuvés expressément par la société LBV YVES ROCHER, sans avoir informé préalablement et par écrit la société de son intention de le faire, et en donnant à celle-ci la possibilité de déterminer si les caractéristiques et les qualités de ces produits sont comparables à ceux qu'elle a antérieurement approuvés et s'ils sont compatibles avec l'image de marque des instituts du groupe YVES ROCHER.

La Cour considère donc, comme les premiers juges, que le principe posé par ce contrat de gérance était une distribution exclusive des produits YVES ROCHER, la distribution

d'autres produits n'étant prévue qu'à titre exceptionnel à des conditions qui la rendaient dépendantes du bon vouloir de la société LBV YVES ROCHER et n'ayant jamais de fait été effectuée par Mme [C].

Mme [Z] [C] justifie en conséquence d'un approvisionnement exclusif de ses fournitures auprès de la société LBV YVES ROCHER.

Exercice de l'activité aux conditions et prix imposés

La lecture du contrat de gérance libre est édifiante à propos des conditions dans lesquelles l'activité de Mme [C] s'exerçait

Article 5 - Exploitation du fonds

La gérante libre reconnaît devoir maintenir et exploiter personnellement avec l'aide d'une ou plusieurs esthéticiennes, un ou plusieurs modules et cabines de soins esthétiques

YVES ROCHER dans lesquels seuls les produits expressément YVES ROCHER autorisés par la SOCIETE et les traitements et les méthodes de soins spécifiques mis au point et régulièrement améliorés par la société LBV YVES ROCHER pourront être respectivement utilisés et effectués. La gérante libre s'engage à ne pas pratiquer dans son INSTITUT YVES ROCHER des soins qui n'auraient pas été préalablement approuvés par écrit par ladite société.

La gérante libre reconnaît devoir exploiter son INSTITUT DE BEAUTE YVES ROCHER en conformité avec les procédures mises au point par la société LBV YVES ROCHER constituées des instructions existantes à la date de signature du contrat et qui pourront être amendées, complétées ou remplacées dans l'avenir à la seule initiative de celle-ci

Selon ce même document, ces procédures concernent sans que cette liste puisse être considérée comme limitative, la décoration des instituts de beauté YVES ROCHER, leur éclairage intérieur et extérieur, leur agencement, leur mobilier, l'aménagement et l'équipement des cabines de soins, la présentation des produits, les techniques de vente et de conseil, les méthodes de soins, campagnes publicitaires, la nature et la qualité des services, la comptabilité, les assurances et tout autre domaine que la société LBV YVES ROCHER considère comme approprié

les premiers juges ayant listé précisément l'exercice effectif de ces instructions, liste à laquelle la Cour renvoie.

Il ressort également des pièces versées aux débats que ces procédures faisaient l'objet de contrôles réguliers et d'instructions de rappel impératives, même sur des points de détail et que l'autonomie laissée à la gérante était ainsi très limitée: les premiers juges n'ont relevé que le choix de l'expert comptable ( qui intervenait cependant dans le cadre des procédures comptables établies par la société LBV YVES ROCHER et sous son regard) et le choix des collaboratrices (là encore fait dans les limites des instructions très détaillées données à la gérante).

D'autre part, le Conseil des Prud'Hommes d'ANGOULEME a fait une longue analyse très précise des conditions de prix dans laquelle la gérante libre exerçait son activité et là encore, la Cour adopte la même analyse en considérant que si les prix n'étaient pas formellement imposés mais seulement conseillés, toutes les pièces versées aux débats démontrent clairement d'une pratique tarifaire uniforme et imposée dans le réseau des centres de beauté YVES ROCHER, traduite par un Livre Vert (contenant produits et prix) et des campagnes promotionnelles (avec catalogues et prix promotionnels souvent impératifs), les clients du réseau YVES ROCHER étant destinataires de ces documents ce qui rendait illusoire toute politique tarifaire individuelle... sauf à la baisse.

D'autre part, si le système informatique prévoyait un prix catalogue tout en permettant un prix de vente forcé, ce prix de vente forcé ne pouvait se faire que par l'intermédiaire d'un bouton spécial PVF, dont l'utilisation était semble-t-il contrôlée par la société LBV YVES ROCHER, rendant la politique tarifaire d'établissement difficile à mettre en oeuvre pour la gérante pour de toute façon un faible montant.

Comme les premiers juges, la Cour estime que Mme [C] exerçait bien son activité aux conditions et prix imposés par le co-contractant.

En conclusion, la Cour confirme la décision des premiers juges en ce qu'ils ont considéré que les relations entre Mme [Z] [C] et la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER s'analysent bien en une relation de gérance de succursale telle que définie par le Code du Travail et que la juridiction prud'homale est en conséquence compétente pour en connaître.

* Sur les demandes de Mme [Z] [C]

Mme [Z] [C] soutient que toutes les dispositions du code du travail ainsi que celle de la Convention Collective de la Parfumerie Esthétique lui sont applicables et non certaines d'entre elles comme l'ont décidé les premiers juges qui lui ont dénié l'existence d'un contrat de travail avec la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER, et ce dans la mesure où elle remplit cumulativement les critères posés par l'article 1221-1 du code du travail comme celles posées par l'article L 7321-3 du code du travail.

Sur l'existence d'un contrat de travail ou sur l'application des dispositions de l'article L 7321-3 du code du travail

Les premiers juges ont rappelé à juste titre que l'existence d'un contrat de travail et d'une relation salariée repose, au-delà de la volonté exprimée par les parties et de la dénomination que celles-ci ont donnée à leur convention, sur les conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité et notamment sur le lien de subordination, caractéristique essentielle du contrat de travail.

Ce lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Le Conseil de Prud'Hommes d'ANGOULEME a considéré que malgré l'ampleur des ordres et des directives, compte tenu de l'autonomie subsistante et de l'absence de preuve du pouvoir de sanction de la société LBV YVES ROCHER, Mme [Z] [C] n'établissait pas de lien de subordination.

Cependant, il résulte de l'analyse faite au vu des très nombreuses pièces versées aux débats et développée ci-dessus que

- même si Mme [C] avait une légère autonomie, quoique encadrée par des directives précises et détaillées, pour embaucher et licencier son personnel et pour fixer les heures d'ouverture et de fermeture des magasins et des cabines de soins, elle n'avait, en fait, aucune réelle autonomie de direction, de gestion et d'organisation dans l'exploitation du fonds dont elle avait la charge: elle devait le diriger personnellement, respecter scrupuleusement les procédures et instructions, y compris publicitaires, de la SA LBV YVES ROCHER, informer et rendre compte de son chiffre d'affaires et verser une redevance.

- le local étant fourni par la SA LBV YVES ROCHER, cette société en imposait à Mme [C] les conditions d'exploitation.

- l'ensemble des prix étant imposé à la gérante, celle-ci ne pouvait mener une politique personnelle en matière de prix, de remise ou de cadeaux.

D'autre part, il résulte encore des pièces versées aux débats que la société LBV YVES ROCHER

- réalisait chaque année une étude de conformité du centre (contrôle de l'espace et de ses composantes, dans tous ses détails pratiques, y compris propreté, confort, hygiène, ambiance....)

- réalisait des études qualimétrie (contrôle des paramètres d'exploitation de l'institut) et des études qualité (contrôle de la qualité de l'ambiance, de la vente, de la tenue de caisse, du respect de l'image et de la marque, de l'accueil et du comportement, des techniques de vente et des conseils),

- organisait des tests et procédait aux bilans de compétence des esthéticiennes et vendeuses de l'institut,

- analysait les résultats commerciaux et le niveau des objectifs fixés par ses soins.

La société LBV YVES ROCHER disposait enfin d'un pouvoir de contrôle sur l'activité de Mme [C] et de sanction, la gérante encourant la résiliation du contrat, par lettre recommandée en cas de violation du contrat de gérance.

Il s'ensuit bien que les relations entre les parties caractérisent l'existence d'un lien de subordination de Mme [Z] [C] envers la société LBV YVES ROCHER et qu'il s'en déduit l'existence d'un contrat de travail entre les parties à compter du 4 juillet 2002, date de prise d'effet de la convention de gérance libre de l'Institut de beauté YVES ROCHER de [Localité 6].

Contrairement à ce qu'ont décidé les premiers juges, Mme [Z] [C] bénéficie donc de toutes les dispositions du code du travail ainsi que de celles de la Convention Collective de la Parfumerie Esthétique en dehors de l'accord n°6 qui a fait l'objet d'une annulation.

Il devient dés lors inutile pour la Cour d'examiner si les conditions de l'article L 7321-3 du code du travail sont remplies.

Sur le statut de Mme [Z] [C] et sur la rémunération de référence

Mme [C] revendique un statut de Directrice d'Institut pour une rémunération de référence de 2687€.

La société LBV YVES ROCHER ne peut sérieusement prétendre que Mme [Z] [C], à laquelle avait été fait un contrat de gérante libre, n'avait pas la responsabilité d'un institut de beauté pris en toutes ses composantes, humaines, commerciales et comptables.

Ainsi, les fonctions qu'a exercées dans les faits Mme [C] répondent bien à la définition du statut de cadre telle qu'elle ressort de la convention collective applicable.

La Cour reconnaît donc, comme les premiers juges l'ont fait, à Mme [C] le statut de Directrice d'Institut coefficient 270 (directrice d'établissement ayant sous son autorité de 7 à 10 salariés, ce qui correspond exactement à la situation de Mme [C]).

Il ressort des textes applicables qu'aucun minimum conventionnel garanti n'est prévu pour la rémunération des personnels d'encadrement coefficient 270.

En effet, l'arrêté du 4 août 2005 portant extension de l'accord du 27 avril 2004 a été annulé par l'arrêt du Conseil d'Etat du 27 avril 2006 et dés lors les seules dispositions applicables sont celles de l'accord n°4 du 17 juin 1994 étendu par arrêté du 17 août 1994; or, le minimum le plus élevé fixé par cet accord correspond au coefficient 200 pour une rémunération de 1260,75€, seul salaire de référence pour la société LBV YVES ROCHER.

Les premiers juges n'ont pas retenu ce salaire de 1260,75€ en considérant que la société LBV YVES ROCHER avait décidé d'appliquer volontairement les dispositions de l'avenant du 27 avril 2004 annulé depuis et que dés lors conformément à la grille contenue dans cet avenant, plus favorable que la convention collective en vigueur, la somme de 1900€ correspond au coefficient 270; cependant, Mme [Z] [C] revendique toujours devant la Cour une rémunération mensuelle de 2687€, somme que versait la société LBV YVES ROCHER à ses directrices salariées au sein de ses succursales

La Cour estime que doit être recherchée la solution la plus favorable à Mme [C] par référence à ce qui se pratiquait au moment de son activité pour un cadre de son niveau dans le réseau de distribution des produits YVES ROCHER et à ce propos,

Mme [C] cite le cas de l'une des directrices d'Institut, Mme [L], directrice de l'Institut de [Localité 8] qui, avant de devenir locataire gérante, avait un salaire de référence de 2687€.

Au regard des fonctions effectivement et réellement occupées par Mme [C] dans le réseau (deux instituts de beauté dirigés par elle de novembre 2003 à février 2008), des responsabilités exercées et aux chiffres de rémunération proposés dans le cadre la gérance (compte de charges remis par la SA LBV YVES ROCHER en début de contrat de gérance dans lequel la rémunération de la responsable de l'institut est estimée entre 4000€ et 5000€ par mois), la [4] estime que la somme de 2687€ comme salaire de référence doit être retenue en ce qu'elle a apparaît en rapport raisonnable avec une rémunération juste des fonctions exercées: la décision des premiers juges sera infirmée sur ce point.

Sur la rupture et ses conséquences indemnitaires.

En l'espèce, comme la Cour a estimé que Mme [Z] [C] et la SA LBV YVES ROCHER étaient liées par un contrat de travail entre les parties depuis le 4 juillet 2002, le courrier du 3 avril 2009 versé aux débats, informant Mme [C] de la résiliation du contrat d'exploitation du Centre de beauté d'[Localité 2] avec effet au 7 avril 2009, s'analyse en une rupture à l'iniative de l'employeur donc à un licenciement.

Or, comme l'ont justement décidé les premiers juges, ce courrier qui ne consiste qu'en une information de la résiliation du contrat avec la SARL [C] en raison du défaut de régularisation d'une créance de 88.477,25€ ne comporte aucune mention de

faits imputable à Mme [C] et donc de motif et il en résulte que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Mme [C] est dés lors fondée à demander une indemnité conventionnelle de licenciement telle que définie par la convention collective applicable (un quart de mois de salaire par année de présence), soit sur la base de la rémunération de référence retenue par la Cour, la somme de 3360€.

Cette somme portera intérêt légal à compter du 23 février 2009, date à laquelle les demandes de la salariée ont été portées à la connaissance de son employeur.

Mme [C], qui n'a pu exercer ses fonctions à compter de la rupture effective de son contrat le 9 avril 2009 et qui n'a pas commis de faute grave, est fondée à solliciter une indemnité compensatrice de préavis correspondant comme l'a jugé le Conseil des Prud'Hommes d'ANGOULEME à trois mois de salaire, soit sur la base de la rémunération de référence retenue par la Cour, la somme de 8061€ outre 806,10€ de congés payés afférents.

Ces sommes porteront également intérêt légal à compter du 23 février 2009, date à laquelle les demandes de la salariée ont été portées à la connaissance de son employeur.

Au moment du 'licenciement', Mme [Z] [C] avait prés de 7 ans d'ancienneté (6 ans et 9 mois) dans la société LBV YVES ROCHER.

Elle a payé sur ses économies personnelles la somme de 7622€ constituant le capital social et le fonds de roulement d'une société (placée en liquidation judiciaire depuis) jugée fictive par la Cour et elle ne recouvrera jamais cette somme de 7622€.

Elle n'a pas ménagé sa peine pendant toutes ces années, cumulant les inconvénients de son statut de gérante de SARL en assumant les difficultés des Instituts face à la société LBV YVES ROCHER et face à la BANQUE et les inconvénients d'une salariée recevant les instructions quotidiennes et la 'pression' de la société LBV YVES ROCHER, cette situation ayant eu immanquablement des répercutions dur sa vie de famille et sa santé.

Elle a brutalement perdu son emploi et s'est retrouvée sans ressources du 7 avril 2009 au mois de janvier 2010, date à laquelle elle justifie être devenue aide à domicile pour une rémunération mensuelle de 800€ pour 100 heures par mois.

Elle est caution solidaire avec son mari des engagements pris par la SARL [C] qui est ,aux termes des conclusions de la société LBV YVES ROCHER, débitrice de ladite société pour un montant total de 174.171,56€.

Compte tenu de tous ces éléments, la Cour estime que le préjudice subi par Mme [Z] [C] sera justement indemnisé par la somme réclamée par elle de 64.488€, somme qui portera intérêt légal à compter du présent arrêt.

Conformément aux articles L 1235-4 et L 1235-5 du Code du travail, la Cour confirme la décision des premiers juges qui a ordonné le remboursement par l'employeur fautif aux organismes sociaux concernés des indemnités de chômage qui ont dû être exposées pour le compte de Mme [Z] [C] à concurrence de six mois

Sur la demande au titre des heures supplémentaires et des repos compensateurs.

Les premiers juges ont débouté Mme [C] de ses demandes à ce titre mais sur la seule absence d'application de l'article L7321-3 du code du travail qui permet à un gérant de succursale de se voir appliquer la législation sociale en matière de durée du travail à la condition de remplir certaines conditions qu'ils n'ont pas trouvé réunies dans les relations de Mme [C], gérante de succursale, avec la société LBV YVES ROCHER; dans la mesure où contrairement aux premiers juges, la Cour a requalifié ces relations en contrat de travail, toutes les dispositions du code du travail, en ce compris celles concernant la durée du travail s'appliquent.

La Cour rappelle qu'en l'état du dossier, la rémunération de référence retenue pour Mme [C] en sa qualité de directrice d'Institut correspond à une amplitude horaire de 39 heures par semaine et de 169 heures par mois et que s'il y a heures supplémentaires, les 8 premières heures donneront lieu à une majoration de salaire de 25% et les heures au-delà à 50%.

S'il résulte des dispositions de l'article L 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge les éléments de nature à étayer sa demande.

La SA YVES ROCHER soutient toujours qu'elle n'a jamais imposé à Mme [C] d'une part d'ouvrir ses instituts pendant une amplitude extrêmement large et que celle-ci était libre de fixer elle-même ses heures de présence et ses temps de repos et de congés et de se faire remplacer par une de ses salariés.

Elle verse aux débats une seule attestation, celle d'une locataire gérante, Mme [J] qui affirme diriger son institut en ne travaillant que 35 heures par semaine et en prenant 5 semaines de congés par an: il est étonnant pour la [4] YVES ROCHER ne puisse trouver qu'une seule gérante sur un réseau de plus de 500 instituts pour attester pour elle.

Mme [C] affirme sans être contredite que

- l'institut du centre commercial [Localité 6] à [Localité 2], qu'elle a dirigé de juillet 2002 à février 2008, était ouvert du lundi au samedi de 9 à 20 heures, soit une amplitude de 66 heures par semaine,

- l'institut situé à [Adresse 3], qu'elle a dirigé de novembre 2003 à avril 2009 était ouvert du lundi au samedi de 9 heures 30 à 19 heures, soit une amplitude de 57 heures par semaine

- elle a géré personnellement, comme le lui imposaient les contrats de gérance, ces deux instituts distants de 10 kms, en parallèle de novembre 2003 à février 2008.

Elle verse également à l'appréciation de la Cour:

- l'attestation d'une esthéticienne, Mme [T] qui a travaillé sous sa direction de fin 2003 à 2008 qui affirme qu'elle était présente tous les jours d'ouverture de l'institut ainsi que les jours fériés et les dimanche de décembre, qu'elle était très investie dans l'Institut et à la marque YVES ROCHER très attachée, elle ne ménageait pas ses efforts et qu'enfin, elle n'a jamais pris plus de trois semaines de vacances

- les attestations d'esthéticiennes travaillant dans d'autres instituts du réseau YVES ROCHER démontrant à des époques diverses (2008 à 2011) l'ampleur du travail quotidiennement et systématiquement fournie par les locataires gérantes

- l'attestation de divers experts comptables d'institut qui indiquent tous que les locataires gérantes étaient contraintes de consacrer un minimum de 5 heures à du travail administratif chaque semaine.

Au total, la Cour considère que les heures supplémentaires retenues par Mme [C] s'avèrent raisonnables en ce

- qu'elle ne retient que 16 heures supplémentaires par semaine, soit 55 heures hebdomadaires de travail effectif alors qu'elle a dirigé deux instituts distants de 10 kms pendant 4 ans et demie,

- qu'elle a pris le soin de soustraire les jours fériés alors que l'Institut était ouvert certains jours fériés et dimanche.

Mme [C] a fait un calcul des sommes dues que la Cour fait sien pour être tout à fait pertinent en relevant que si la société LBV YVES ROCHER conteste le principe de paiement des heures supplémentaires, elle ne conteste pas le calcul fait par l'intéressée à hauteur de la somme de 83.127€ que la Cour la condamne donc à verser à Mme [C].

Aux termes de la convention collective applicable la durée du congé normal est de 2 jours et demi ouvrable .... soit 30 jours ouvrables.

Or, ainsi que l'atteste l'esthéticienne, Mme [T], qui a travaillé sous la direction de Mme [C] de 2003 à 2005, les congés de Mme [C] se limitaient à trois semaines par an, cette réalité étant corroborée par les contraintes auxquelles la gérante était soumise et par les nombreuses attestations des autres personnes travaillant dans les instituts du réseau YVES ROCHER.

La Cour là encore retient les calculs pertinents faits par Mme [C] qui est en droit de réclamer à la SA LBV YVES ROCHER 10 semaines de congés supplémentaires sur toute la période contractuelle, soit la somme de 6720€ au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés.

* Sur les autres demandes

La Cour confirme la décision des premiers juges qui a ordonné par application de l'article 1154 du code civil la capitalisation des intérêts échus pour une période supérieure à une année.

Il convient d'ordonner la remise par l'employeur dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt des documents suivants, tenant compte de l'arrêt de la Cour, mais sans application d'une astreinte:

- certificat de travail

- attestation Pôle Emploi

- bulletin de salaire tenant compte de la période de préavis.

La Cour rejette la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive présentée par la société LBV YVES ROCHER et ce dans la logique de cet arrêt qui a fait droit à l'ensemble des demandes de Mme [Z] [C]

L'équité et les circonstances de la cause commandent de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Mme [Z] [C] qui se verra allouer la somme de 5000€ à ce titre.

La SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER supportera les dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

REFORME PARTIELLEMENT le jugement déféré en ce qu'il a

- considéré que la SARL [Z] [C] n'était pas une société fictive

- dit que les relations entre Mme [Z] [C] et la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER n'était pas un contrat de travail

- fixé le salaire mensuel de référence de Mme [Z] [C] à la somme de 1900€

- alloué à Mme [Z] [C] la somme de 12.948€ d'indemnité pour défaut de cause réelle et sérieuse de licenciement, la somme de 6474€ d'indemnité compensatrice de préavis, avec les congés payés afférents (647,40€) et la somme de 2697,50€ d'indemnité conventionnelle de licenciement

- débouté Mme [Z] [C] de ses demandes de paiement de congés payés hors préavis et d'heures supplémentaires

et statuant de nouveau

DIT QUE la SARL [Z] [C] était une société fictive

DIT QUE les relations entre Mme [Z] [C] et la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER s'analyse en un contrat de travail pour un emploi de directrice d'institut avec un salaire mensuel de référence de 2687€.

CONDAMNE la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER à verser à Mme [Z] [C] les sommes suivantes

- 83.127€ de rappel d'heures supplémentaires

- 6720€ d'indemnité de préavis

- 3360€ d'indemnité conventionnelle de licenciement

- 8061€ d'indemnité de préavis, outre 806,10€ de congés payés afférents,

sommes qui porteront intérêt légal à compter du 23 février 2009

- 64.488€ de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, somme qui portera intérêt légal à compter du présent arrêt..

CONFIRME le jugement pour le surplus de ses dispositions

y ajoutant

DEBPOUTE la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive présentée par

ORDONNE la remise par l'employeur dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt des documents suivants, tenant compte de l'arrêt de la Cour, mais sans application d'une astreinte:

- certificat de travail

- attestation Pôle Emploi

- bulletin de salaire tenant compte de la période de préavis.

CONDAMNE la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER à verser à Mme [Z] [C] la somme de 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER aux dépens de la procédure d'appel

Signé par Monsieur Jean-Paul ROUX, Président, et par Chantal TAMISIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. TAMISIER Jean-Paul ROUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 11/01893
Date de la décision : 08/03/2012

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°11/01893 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-08;11.01893 ?
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