La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/11/2011 | FRANCE | N°10/07215

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 03 novembre 2011, 10/07215


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



--------------------------







ARRÊT DU : 03 NOVEMBRE 2011

fc

(Rédacteur : Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller)



BAUX RURAUX



N° de rôle : 10/07215

















Madame [E] [I] veuve [N]



c/



Monsieur [J] [V]





















Nature de la décision : AU FOND






>













Notifié par LETTRE SIMPLE le :



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 novembre 2010 (R.G. n°51-09-0012) par le Tribunal paritaire des baux ruraux de BORDEAUX, suivant déclaration d'appel du 03 décembre 2010,







APPELANTE :



Madame [E] [I] v...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 03 NOVEMBRE 2011

fc

(Rédacteur : Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller)

BAUX RURAUX

N° de rôle : 10/07215

Madame [E] [I] veuve [N]

c/

Monsieur [J] [V]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LETTRE SIMPLE le :

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 novembre 2010 (R.G. n°51-09-0012) par le Tribunal paritaire des baux ruraux de BORDEAUX, suivant déclaration d'appel du 03 décembre 2010,

APPELANTE :

Madame [E] [I] veuve [N]

née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 3],

demeurant [Adresse 2]

représentée par Maître Roger MORAND MONTEIL, avocat au barreau de BERGERAC

INTIMÉ :

Monsieur [J] [V],

demeurant [Adresse 2]

représenté par Maître Philippe QUERON, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 septembre 2011 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Paul ROUX, Président de chambre,

Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller,

Madame Katia SZKLARZ, Vice Présidente placée,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie LACOUR-RIVIERE,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Suivant acte notarié en date du 28 avril 1992, M. [J] [V] a consenti à Mme [E] [I] veuve [N] un bail rural de 18 ans à effet du 1er avril 1992 portant sur une propriété viticole située à [Adresse 2] sur une superficie de 15 hectares 39 ares, un état des lieux ayant été fait le 20 septembre 1991.

Par décision en date du 11 décembre 2006, le Tribunal paritaire des Baux Ruraux de BORDEAUX a prononcé la résiliation du bail rural à effet du même jour.

Par requête en date du 15 octobre 2009, Mme [E] [I] veuve [N] a saisi le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux pour obtenir la somme de 130.12€ au titre des indemnités de sortie à partir d'un rapport établi par M. [K], expert judiciaire désigné par les parties sur la base d'un commun accord.

Mme [E] [I] épouse [N]

Par décision en date du 8 novembre 2010, le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BORDEAUX a rejeté les demandes indemnitaires de Mme [E] [I] veuve [N] mais a condamné M. [J] [V] à lui régler la somme de 27.370€ au titre de l'immobilier bâti outre les intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2008 et la somme de 1000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, condamnant également celui-ci aux dépens en ce compris les frais d'expertise.

Le Tribunal a, par contre, condamné Mme [N] à rembourser à M. [V] la somme de 3000€ représentant la vente du mobil home.

Le 7 décembre 2010, Mme [E] [I] veuve [N] a interjeté appel de cette décision

Par conclusions déposées le 4 juillet 2011, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, Mme [E] [I] veuve [N] conclut à la confirmation du jugement entrepris sur l'indemnité de sortie au titre des travaux effectués dans la maison et les dépendances à usage vinicole et réformation du jugement entrepris quant à l'indemnité de sortie au titre des replantations ou plantations supplémentaires, réclamant à M. [V] les sommes de 27.370€ et 50.750€ à ce titre, outre celle de 2000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle conclut enfin au débouté de M. [V] en sa demande concernant une somme de 3000€ dont il serait créancier à la suite de l'abandon d'un mobil home aux époux [N].

Par conclusions déposées le 6 septembre 2011 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, M. [J] [V] demande la confirmation du jugement entrepris sauf à débouter Mme [N] de sa réclamation au titre de l'indemnité du preneur sortant sur l'immobilier bâti, au titre de l'article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens (le coût de l'expertise amiable de M. [K] a été assumé en son temps d'un commun accord par moitié entre les parties).

Il sollicite enfin la condamnation de Mme [N] à lui rembourser la somme de 3000€ représentant la vente du mobil home et à lui payer la somme de 3500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION

* Sur la réclamation d'une indemnité au titre du preneur sortant.

Opposée à M. [V] dans un litige plus général de paiement de fermages qui a abouti à la résiliation du bail rural liant les parties, Mme [I] veuve [N]

a fait appel à M. [S] [K], ingénieur agronome et expert prés de la Cour d'Appel de BORDEAUX d'une demande d'estimation de l'indemnité au preneur sortant qu'elle estimait lui être due. M. [V] a accepté cette initiative.

M [K] a estimé cette indemnité en prenant le soin de préciser qu'il s'agissait d'estimations maximalistes pour une indemnisation potentielle, sous réserve que les conditions juridiques requises soient remplies, notamment celle touchant à la nécessaire autorisation du bailleur.

- Les plantations et replantations

Le bail signé par les parties désigne diverses parcelles de terre en nature de vigne blanche, vigne rouge et pré

- ensemble pour les vignes rouges 5 ha 63 a 88 ca

- ensemble pour les vignes blanches 4 ha 71 a

- ensemble pour les parcelles à planter 5 ha 4a 12ca.

Ce bail contient également un paragraphe concernant la plantation et la replantation des vignes:

Concernant les plantations nouvelles et renouvellements des vignes âgées par replantation, il est convenu en bailleur et preneur que le preneur assurera seul la charge des plantations et replantations nécessaires et autorisées par le bailleur, les frais étant entièrement à la charge du preneur.

A cet égard, il est précisé entre les parties que l'indemnité due à la sortie par le bailleur, dans le cas où des plantations auraient été effectuées sera fixée dans les conditions visées à l'article L 411-71-2° du code rural pour une durée d'amortissement égale à celle qui eut été retenue si le bailleur avait eu la charge de la plantation ou de la replantation.

. Les plantations nouvelles ont été échelonnées de 1993 à 2001, réalisées à la densité de 4000 pieds/ha et l'expert évalue l'indemnité du preneur sortant à la somme de 50.700€ selon des calculs que la Cour adopte.

La Cour considère, contrairement aux premiers juges que M. [V] doit bien cette somme à Mme [N].

En effet, il convient de déduire de l'analyse détaillée du bail rural liant les parties que M. [V] avait autorisé expressément dans ledit bail la plantation en vignes des parcelles à planter (ce qui parait somme toute assez logique concernant la location d'une propriété viticole) dans la mesure où dans le paragraphe concernant le fermage, il est prévu

- 46,11 hectolitres de vin blanc ......pour le fermage de la vigne blanche

- 66,15 hectolitres de vin rouge ..... pour le fermage de la vigne rouge

- 3600 litres de lait pour le fermage des terres

.....avec la précision suivante concernant ces terres

Ces terres devant être plantées en vigne par le preneur dans les cinq ans à venir et au rythme d'un hectare par an, le fermage calculé dés à présent en litres de lait, se trouvera au fur et à mesure de la mise en production des parcelles, remplacé par un fermage calculé, sur la valeur de 10 hectolitres à l'hectare en fonction de la superficie en production au moment du calcul du fermage.

. Les replantations ont été effectuées à la densité de 5000 pieds/ha en 1997.

L'expert précise qu'il s'agit de parcelles de cépages blancs, arrachés par le preneur et replantées en cépages rouges.

Selon l'expert, l'état des lieux du 20 septembre 1991 précisait que les vignes blanches des parcelles concernées étaient en bon état, bien armées, avec un pourcentage de manquants qui ne justifiait pas l'arrachage.

De plus, comme les premiers juges, la Cour considère que Mme [N] ne rapporte pas la preuve d'avoir obtenu une autorisation expresse (orale ou écrite) du bailleur pour effectuer ces replantations.

- Les bâtiments.

Le bail signé par les parties désigne la location d'une maison à usage d'habitation d'une superficie approximative de 165 m² et des bâtiments d'exploitation suivants: un chai-cuvier d'une superficie de 201 m² attenant à la maison d'habitation et un autre chai de construction récente d'une superficie de 545 m².

Aucun état des lieux d'entrée n'a été soumis à l'expert et n'est versé aux débats.

L'expert a noté que des travaux d'amélioration de l'immobilier bâti ont été incontestablement faits sur la maison d'habitation et sur les deux bâtiments d'exploitation.

L'intérieur de la maison a fait l'objet de transformations de certaines pièces et d'aménagement d'un étage en mezzanine; l'expert note que les prestations sont de qualité, avec des revêtements et des équipements à l'état quasi neuf, donnant à l'ensemble un confort dans les normes actuelles.

Concernant les bâtiments d'exploitation, les peintures intérieures du chai, en bon état dans l'ensemble, ont été réalisées par le preneur, dans l'annexe au hangar à matériel, M. [N] avait entrepris une construction en briques et maçonnerie qui est en état futur d'achèvement.

M. [V] affirme avoir largement contribué dans les améliorations apportées aux bâtiments d'habitation et d'exploitation soit en faisant réaliser des travaux soit en les finançant mais il conteste devoir une quelconque somme à Mme [N] faute pour elle d'avoir démontré que les travaux litigieux ont été réalisés par elle, étaient nécessaires et utiles pour l'usage du bien loué et qu'il les avait formellement autorisés.

Toutefois l'expert a noté en préalable à l'examen des lieux que Il semble pouvoir être convenu entre les parties que M. [V] a approvisionné les chantiers successifs et que Mme [N] et son époux ont réalisé les travaux, à l'exception de ceux réalisés sur la charpente par l'entreprise de M. [V], écartant les aménagements débutés à l'arrière de la mezzanine et la construction engagée en dessous du hangar appentis, selon lui paraissant avoir été exécutés sans concertation préalable.

Comme les premiers juges, la Cour reprend également cette analyse, sachant qu'aucun état des lieux d'entrée n'est versé aux débats et qu'il n'est pas contesté que les époux [N] aient du vivre d'abord dans un mobil home acheté à frais communs entre les parties, le temps de la réalisation de certains travaux nécessaires à l'habitabilité des lieux.

Pour chiffrer l'apport du preneur, l'expert a écarté les devis, estimant à juste titre que ceux-ci n'avaient été sollicités que pour donner des indications sur le coût de la main d'oeuvre; l'expert a ensuite évalué le temps de main d'oeuvre pour les postes de travaux concernés puis a retenu comme base horaire non le SMIC horaire x 1,5 (dans la mesure où une entreprise fournit une garantie sur les travaux effectués de nature à majorer le coût de la main d'oeuvre) mais le SMIC horaire x 0,5, raisonnement judicieux retenu par les premiers juges et confirmé par la Cour.

En conclusion, l'expert retient une indemnité au preneur sortant de 20.000€, somme que la Cour estime seule justifiée alors que les premiers juges ont retenu la somme de 27.370€ en tenant compte des aménagements débutés à l'arrière de la mezzanine et la construction engagée en dessous du hangar appentis, travaux que la Cour a écartés.

En conclusion, M. [V] devra verser à Mme [N] la somme de 70.700€ au titre de l'indemnité du preneur sortant, somme qui portera intérêt taux légal à compter du 17 décembre 2008 comme l'avait justement décidé le Tribunal Paritaire.

* Sur les autres demandes

M. [I] demande le remboursement de 3000€ au titre du mobil home d'une valeur initiale de 7000€ que, selon le rapport de l'expert, il avait financé pour les 3/4.

Mme [N] indique qu'il était convenu que ce mobil home resterait sa propriété sans avoir à faire un quelconque remboursement à M. [I] et que depuis 1997, ce mobil home ne se trouve plus sur la propriété sans que le preneur n'ait jamais rien réclamé.

Ce problème de droit commun n'est pas de la compétence de la juridiction paritaire des baux ruraux et la Cour renvoie les parties à mieux se pourvoir, infirmant la décision des premiers juges sur ce point.

L'équité et les circonstances de la cause commandent de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Mme [E] [N] née [I] qui se verra allouer la somme de 1000€ à ce titre.

M. [J] [V] sera condamné aux dépens de la procédure en ce compris les frais d'expertise, comme décidé par les premiers juges.

En effet, même si l'expertise a fonctionné à frais partagés entre les parties, la Cour considère au vu de la solution apportée à ce litige que Mme [N] est bien fondée à obtenir remboursement des frais qu'elle a engagé à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

REFORME PARTIELLEMENT le jugement déféré en ce qu'il a alloué à Mme

Mme [E] [I] épouse [N] la somme de 20.370€ au titre de l'indemnité du preneur sortant et en ce qu'il a condamné Mme [N] à rembourser la somme de 3000€ au titre de la vente du mobil home

et statuant de nouveau

CONDAMNE M. [J] [V] à verser à Mme [E] [I] épouse [N] la somme de 70.700€ au titre de l'indemnité du preneur sortant, somme qui portera intérêt taux légal à compter du 17 décembre 2008.

SE DECLARE incompétente pour connaître de la demande de M. [J] [V] de remboursement de la somme de 3000€ correspondant à la vente du mobil home.

CONFIRME le jugement pour le surplus de ses dispositions

CONDAMNE M. [J] [V] à verser à Mme [E] [I] épouse [N] la somme de 1000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE M. [J] [V] aux dépens de la procédure d'appel

Signé par Monsieur Jean-Paul ROUX, Président, et par Chantal TAMISIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. TAMISIER Jean-Paul ROUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 10/07215
Date de la décision : 03/11/2011

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°10/07215 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-11-03;10.07215 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award