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01/09/2011 | FRANCE | N°10/05750

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 01 septembre 2011, 10/05750


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 1er SEPTEMBRE 2011

fc

(Rédacteur : Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 10/05750

















Mademoiselle [Z] [E]



c/



La SAS AGL FINANCES





















Nature de la décision : AU FOND




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Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement ren...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 1er SEPTEMBRE 2011

fc

(Rédacteur : Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 10/05750

Mademoiselle [Z] [E]

c/

La SAS AGL FINANCES

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 septembre 2010 (R.G. n°F 09/03323) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d'appel du 29 septembre 2010,

APPELANTE :

Mademoiselle [Z] [E]

née le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 4]

de nationalité Française

Profession : Assistante commerciale,

demeurant [Adresse 2]

représentée par Monsieur [P] [I], délégué syndical muni d'un pouvoir régulier,

INTIMÉE :

La SAS AGL FINANCES,

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 3]

représentée par Maître Christine MAZE, avocat au barreau de BORDEAUX,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 juin 2011 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Paul ROUX, Président de chambre,

Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller,

Madame Katia SZKLARZ, Vice Présidente placée

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Florence CHANVRIT, adjoint administratif, faisant fonction de Greffier,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

FAITS ET PROCEDURE

Suivant contrat à durée indéterminée du 14 avril 2009, madame [Z] [E] a été engagée en qualité de technicienne financière par la société AGL FINANCES (la société).

Le 7 septembre 2009, elle a été licenciée pour faute grave sans préavis.

Contestant cette décision, elle a saisi, le 24 novembre 2009, le conseil des prud'hommes de Bordeaux aux fins de voir juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'obtenir le paiement d'indemnités de rupture et de rappels de salaires, outre des dommages et intérêts pour harcèlement moral.

Par jugement du 6 septembre 2010, le conseil a requalifié la rupture en licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et a condamné l'employeur au paiement des sommes suivantes :

- 753,21 euros au titre des heures supplémentaires

- 75,32 euros pour les congés payés afférents,

- 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

et a débouté la salariée du surplus de ses demandes

Mme [E] a régulièrement interjeté appel du jugement.

Par conclusions écrites, développées oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer, l'appelante sollicite de la cour qu'elle confirme le jugement frappé d'appel en ce qui concerne le paiement des heures supplémentaires et le réforme pour le surplus. Elle demande à la Cour de condamner l'employeur au paiement des sommes suivantes :

- 1906,80 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 190,98 euros pour les congés payés afférents,

- 13.017 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

- 5000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice distinct résultant du harcèlement moral,

- 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures soutenues oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer, la société demande à la Cour d'infirmer le jugement, de dire que le licenciement repose sur une faute grave, de débouter Mme [E] de l'ensemble de ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur le licenciement

La faute grave est un manquement aux obligations contractuelles du salarié d'une gravité telle qu'elle rend impossible son maintien dans l'entreprise.

L'employeur qui allègue une faute grave doit en rapporter la preuve.

En l'espèce, la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est, ainsi, rédigée :

'Je fais suite, à l'entretien préalable à votre licenciement qui s'est déroulé le 2 septembre 2009.

J'ai décidé de vous licencier pour faute grave pour le motif suivant

Au terme de la suspension de votre contrat pour cause de maladie le 5 août 2009 vous deviez reprendre le travail le 6 août 2009.

Or, depuis plus d'un mois à la date de la présente, vous êtes absente de votre poste sans le moindre justificatif.

Vous n'êtes pas sans savoir, que compte tenu de la petite taille de notre entreprise, votre absence en perturbe le bon fonctionnement.

Lors de l'entretien préalable, vous n'avez donc aucune explication de nature à me permettre de modifier mon appréciation à ce sujet.

Eu égard à la gravité de la faute qui vous est reprochée, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible.

Par conséquent, votre licenciement prend effet immédiatement à la date du 7 septembre 2009 sans indemnité de. préavis.

Je vous invite à prendre attache avec l'entreprise afin de convenir d'un rendez-vous pour que vous, veniez chercher vos documents de fin de contrat (certificat de travail, solde de tout compte, attestation Pôle-Emploi).'

Si l'employeur a demandé à Mme [E], par courrier du 7 septembre 2009, de justifier son absence depuis la fin de son arrêt maladie, le 25 juillet 2009, il apparaît, cependant, que cette version des faits est réfutée par la salariée qui soutient qu'à l'issue de l'arrêt de travail, le gérant de la société, M.[U], lui avait demandé de ne plus revenir travailler.

À l'appui de cette allégation, elle produit aux débats un courriel signé de [O] [U] du 20 août 2009 et portant l'adresse électronique de Emprunt direct. Ce document est rédigé en ces termes :

'Salut grosse vache

Alors t'es contente que [C] t'ai appelé '

En tous cas sache que ca ne changera rien du tout !!!! j'attends toujours ta lettre de démission car après mon comportement tu dois bien comprendre que je ne veux plus voir ta gueule et qu'il est hors de question que je débourse un centime pour ton licenciement!!!!

Et pas la peine que tu me casses les couilles avec tes conneries de prud' homme parce que moi j'ai un avocat et je t'enfoncerai encore plus que je l'ai déjà fais et crois moi c'est possible"

Alors''' toujours pas les boules d'avoir quitté sofinco et ton petit cdi tranquille!!

je tiens quand même à te remercier grâce à toi j'ai pu monter ma boîte à moindre frais et qui aurait cru que tu serais assez naïve pour me suivre après que je t'ai recrutée pour Epargne sans frontière alors que je savais depuis des mois qu'on allait déposé le bilan!!

Pauvre conne! tu croyais vraiment que je t'avais recruté pour tes compétences'

Alors je te préviens envoie moi ta lettre et plus vite que ça, tu vas enfin bouger ton gros cul pour quelque chose!!!!!

Et t' avises pas d'essayer de me la faire à l'envers avec la [C] sinon tu vas voir ce que c'est du harcèlement, je vais te montrer ce que c'est moi une dépression grosse vache!!!!

Alors'''''' tu regrettes toujours pas'''' il aurait peut être été plus simple de coucher finalement!!!!

maintenant t'a plus rien, plus de boulot, plus d'argent et toujours pas de mec tu peux la faire ta dépression !!!!

Juste pour info change de secteur je t'ai grillé chez toutes les banques tu feras plus rien dans ce métier.

À bon entendeur salut !!!!!!!

PS: tes heures sup tu peux te les foutre au cul

[O].'

L'employeur prétend qu'il n'est pas l'expéditeur du courriel compte tenu de son caractère outrancier. Il s'étonne, en outre, qu'il ait été communiqué seulement au jour de l'audience de conciliation, le 13 janvier 2010, et qu'il ait été tardivement édité, soit le 19 octobre 2009.

La date d'édition de ce document et de sa communication dans le cadre du débat judiciaire sont sans incidence sur l'appréciation de sa validité.

À cet égard, il convient de relever que l'employeur ne rapporte pas la preuve que l'adresse de l'expéditeur mentionnée sur le courriel soit erronée ou que la boîte d'expédition de la messagerie de l'entreprise ait été détournée.

En tout état de cause, un tel détournement ne pourrait être imputé à Mme [E] qui n'était pas présente dans la société à la date de l'envoi du courriel.

Il y a lieu de considérer, en conséquence, que M.[U] est bien l'auteur et l'expéditeur de ce courriel dont la teneur apparaît conforme à sa personnalité ainsi que quatre autres salariés l'ont décrite à la présidente de la société dans une lettre ouverte du 17 décembre 2010 où les intéressés se plaignent de ' son comportement déconcertant, versant dans la violence verbale avec une attitude physiquement menaçante...'

Il résulte du courriel que M.[U] avait demandé, auparavant, à Mme [E], une lettre de démission afin d'éviter les frais d'un licenciement ; le ton et les expressions employés ne laissent aucun doute sur la volonté de l'employeur de rompre, par tous moyens y compris sous la menace, le contrat de travail de la salariée.

Dés lors, la cour estime, contrairement aux premiers juges, que la version de la salariée selon laquelle l'employeur lui a refusé l'accès aux locaux de l'entreprise à compter du 6 août est fondée et que, dés lors, le contrat de travail a été rompu à cette date sans motifs valables, la procédure de licenciement engagée postérieurement étant, de ce fait, privé de cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera, donc, réformé sur ce point et il sera alloué à Mme [E] une indemnité sur le fondement de l'article L 1235-5 du code du travail d'un montant de 5000 euros.

Bien que ne pouvant être juridiquement qualifiées de harcèlement moral, les circonstances de la rupture ont été brutales et vexatoires au point de rendre nécessaire la prise d'un traitement anti dépresseur par Mme [E] ; le comportement fautif de l'employeur a causé à la salariée un préjudice qui sera réparé par l'octroi de dommages et intérêts pour un montant de 4000 euros

En application de l'article L 1234-1, la salariée ne peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis dans la mesure où elle ne justifie pas d'une ancienneté supérieure ou égale à six mois et de l'existence d'une convention collective applicable à l'entreprise. De ce chef, le jugement sera confirmé.

Sur les heures supplémentaires

Selon l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les heures effectivement réalisées par le salarié. A vu de ces éléments et de ceux fournis préalablement au juge par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En l'espèce, les premiers juges, par des motifs pertinents que la cour adopte, a estimé, à juste titre, après avoir interrogé l'employeur à l'audience, que Mme [E] avait effectué des heures supplémentaires sur la période du 4 au 16 juin 2009 au cours de laquelle elle avait assumé, seule, le fonctionnement de l'entreprise ouverte six jours sur sept de 9h à 22h.

Le jugement sera, en conséquence, confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

L'équité commande d'allouer à Mme [E] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

La Cour,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne le bien fondé du licenciement

Statuant à nouveau sur ce point

dit que le licenciement de Mme [Z] [E] est dépourvu de cause réelle et sérieuse

condamne la société AGL FINANCES à payer à Mme [E] les sommes suivantes :

- 5000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 4000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant des circonstances brutales et vexatoires du licenciement

- 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société AGL FINANCES aux dépens.

Signé par Monsieur Jean-Paul ROUX, Président, et par Chantal TAMISIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. TAMISIER Jean-Paul ROUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 10/05750
Date de la décision : 01/09/2011

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°10/05750 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-09-01;10.05750 ?
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