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20/07/2011 | FRANCE | N°11/03692

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, CinquiÈme chambre civile, 20 juillet 2011, 11/03692


COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 20 JUILLET 2011
(Rédacteur : Monsieur Robert MIORI, Président,)
No de rôle : 11/3692

Monsieur Gilles X...
c/
SCA GE MONEY BANK

Nature de la décision : AU FOND - jonction avec RG 11/3346

Décisions déférées à la Cour :
- jugement d'orientation rendu le 12 mai 2011 par le Juge de l'Exécution du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (RG 11/57) suivant déclaration d'appel du 03 juin 2011 (RG 11/3346),- assignation à jour fixe en date du 03 juin 20

11 (RG 11/3692),

APPELANT :
Monsieur Gilles X..., né le 14 Mai 1961 à ORAN (ALGERIE), de nationalité Fran...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
--------------------------

ARRÊT DU : 20 JUILLET 2011
(Rédacteur : Monsieur Robert MIORI, Président,)
No de rôle : 11/3692

Monsieur Gilles X...
c/
SCA GE MONEY BANK

Nature de la décision : AU FOND - jonction avec RG 11/3346

Décisions déférées à la Cour :
- jugement d'orientation rendu le 12 mai 2011 par le Juge de l'Exécution du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (RG 11/57) suivant déclaration d'appel du 03 juin 2011 (RG 11/3346),- assignation à jour fixe en date du 03 juin 2011 (RG 11/3692),

APPELANT :
Monsieur Gilles X..., né le 14 Mai 1961 à ORAN (ALGERIE), de nationalité Française, demeurant ...,
représenté par la SCP FOURNIER, avoués à la Cour, et assisté de Maître Sandra CATHELOT-CEBOLLERO, avocat au barreau de BORDEAUX,
et demandeur à l'assignation à jour fixe,

INTIMÉE :
SCA GE MONEY BANK, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social Tour Europlaza - La Défense 4 - 20 avenue André Prothin - 92063 PARIS LA DÉFENSE,
représentée par la SCP ARSENE-HENRY Corine LANCON Pierre, avoués à la Cour, et assistée de Maître Carine GODET loco Maître Thierry WICKERS de la SELAS EXEME ACTION, avocats au barreau de BORDEAUX,
et défenderesse à l'assignation à jour fixe,

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 29 juin 2011 en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Robert MIORI, Président,Monsieur Bernard ORS, Conseiller,Madame Béatrice SALLABERRY, Conseiller,qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Véronique SAIGE

ARRÊT :
- contradictoire,- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

OBJET DU LITIGE
Agissant sur le fondement d'un acte authentique en date du 25 avril 2006 reçu par maître C... notaire à Lesparre, la société GE Money Banque (la banque) a diligenté une procédure de saisie immobilière à l'encontre de M. X... devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bordeaux portant sur un immeuble situé ....
Par jugement en date du 12 mai 2011, le juge de l'exécution après avoir rejeté les contestations de M. X..., a constaté que le montant de la créance de la banque s'élevait en principal frais, intérêts, et autres accessoires à la somme de 33.567,36 euros au jour du commandement, ordonné la poursuite de la vente forcée de l'immeuble, fixé au 8 septembre 2011 la date de l'adjudication sur la mise à prix de 30.000 €, et condamné M. X... à payer à la banque une indemnité de 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
M. X... a relevé appel de cette décision.
Agissant en vertu d'une ordonnance rendue à sa requête le 30 mai 2011, M. X... a par acte d'huissier en date du 3 juin, remis au greffe le 7 juin, fait assigner à jour fixe la banque à comparaître à l'audience de la cour du 29 juin 2011 en lui signifiant ses conclusions déposées à l'appui de sa requête.

Dans ses conclusions annexées à sa requête et déposées par la suite au greffe le 7 juin 2011, M. X... demande :
« - à titre principal, de dire que la saisie immobilière est nulle et de nul effet, d'ordonner sa main levée, et de condamner la banque à lui verser une indemnité de 2.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;
- à titre subsidiaire, d'être autorisé à vendre 1000 m² du bien saisi à l'amiable au prix de 38.000 € et de lui accorder pour ce faire un délai de quatre mois ».

Pour obtenir l'infirmation de la décision attaquée, M. X... fait valoir :
- que ni les conditions générales, ni les conditions particulières, ni le tableau d'amortissement du prêt n'ont été signés par lui, ces documents étant seulement paraphés par le notaire en tant qu'annexe et seulement signés du créancier et que l'acte authentique ne saurait dès lors constituer un titre exécutoire au sens de l'article 3 de la loi du 9 juillet 1991, aucun élément ne permettant d'évaluer la créance qui n'est donc pas liquide, et qu'il doit des lors être donné mainlevée de la saisie faute par le créancier de disposer d'un titre exécutoire ;
- qu'il a déposé une demande de division du terrain auprès de la mairie dès avant l'audience d'orientation et qu'il a signé un mandat auprès d'une agence immobilière et publié des annonces sur Internet pour une somme de 45.000 € permettant de couvrir l'intégralité de la créance.
Le 27 juin 2011, la SCA GE Money Bank (la banque) a déposé des conclusions aux termes desquelles elle sollicite la confirmation du jugement entrepris et la condamnation de M. X... à lui verser une indemnité de 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient :
- que le 30 mars 2006 M. X... a bien signé les conditions générales, les conditions particulières et le tableau d'amortissement, que les documents qu'il a ainsi signés ne sont pas différents de ceux annexés à l'acte authentique, qu'il avait donc connaissance des conditions du prêt avant sa signature chez le notaire, et qu'elle dispose d'un titre exécutoire permettant d'évaluer la créance ;
- que M X... n'est pas recevable à élever des contestations concernant la copie exécutoire de l'acte notarié alors que par l'exécution volontaire qu'il en a fait, il a renoncé aux moyens et exceptions qu'il aurait pu soulever ;
- qu'aucune disposition n'impose que l'acte authentique soit joint aux actes de la procédure de saisie immobilière, que M. X... n'indique pas quel est le fondement juridique qui impose que les annexes de l'acte authentique soient signées par les parties à l'acte.
- que la demande de vente amiable ne peut prospérer dans la mesure où le juge de l'exécution ne peut autoriser que la vente amiable du bien saisi dans sa totalité.

MOTIFS DE LA DECISION
Le moyen de nullité invoqué par M. X... à l'égard de la procédure de saisie immobilière en raison de l'absence de validité de l'acte notarié servant de fondement à la poursuite a été formulé devant le premier juge qui l'a rejeté. C'est donc de manière inopérante que la banque rappelle qu'en application des dispositions de l'article 6 du décret du 27 juillet 2006, aucune contestation ni aucune demande incidente ne peut être formée après l'audience d'orientation prévue à l'article 49 du décret et que M. X... est irrecevable à soulever toute contestation qu'il n'aurait pas invoquée en première instance.
Le juge de l'exécution est, en application des dispositions de l'article L 213-6 du code de l'organisation judiciaire, compétent pour statuer sur les difficultés relatives aux titres exécutoires et les contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit, à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire. Il dispose donc du pouvoir de statuer sur la nullité d'un engagement résultant d'un acte notarié exécutoire invoquée pour absence de l'une des conditions requises par la loi pour la validité de sa formation.
Pour permettre au créancier le recouvrement de sa créance, le notaire établit une copie exécutoire, qui rapporte intégralement les termes de l'acte authentique qu'il a dressé. Il la certifie conforme à l'original et la revêt de la formule exécutoire.
Il en résulte que pour apprécier la validité du titre exécutoire le juge de l'exécution doit nécessairement statuer sur la régularité de la minute établie par le notaire, laquelle est intégralement reprise dans la copie exécutoire qui n'est que sa reproduction. Limiter le champ de la compétence du juge de l'exécution aux contestations portant sur la seule régularité de la copie exécutoire priverait en effet l'article L 213-6 du code de l'organisation judiciaire de sa portée puisque les conditions de formation et d'établissement du titre échapperaient alors à son contrôle.
Pour valoir titre exécutoire l'acte notarié doit non seulement remplir les conditions prévues par la loi concernant son contenu, mais il doit également satisfaire aux mentions qu'il renferme.
Même si l'article 22 du décret du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires n'exige pas que les pièces qui lui sont annexées soient signées par les parties, il n'en reste donc pas moins que cette signature est nécessaire lorsque l'acte prévoit expressément que les annexes ou certaines d'entre elles ont été signées par l'emprunteur.
Il résulte de l'article 3 de l'acte authentique que : « Les conditions générales du présent prêt sont demeurées ci-jointes et annexées après mention et après avoir été paraphées par l'emprunteur ».

En l'espèce, les conditions générales du prêt (et le tableau d'amortissement) qui ont été annexés à l'acte authentique sont seulement signées par le notaire. Elles ne sont donc pas paraphées par l'emprunteur. Dans un courrier du 22 septembre 2010 le notaire lui a d'ailleurs demandé d'apposer ses initiales en bas de chaque page et de les lui retourner « au plus vite la banque les lui réclamant ».
A défaut d'un tel visa, les conditions générales du prêt ne peuvent être appliquées.
Il importe peu à ce titre que l'emprunteur ait parfaitement eu connaissance de ces conditions générales et qu'il les ait signées quelques semaines auparavant, hors la présence du notaire, puisque celles qui sont annexées à l'acte ne comportent pas le visa de l'intéressé.
Le contrat ne peut en effet être considéré comme un titre exécutoire alors qu'il ne contient pas les conditions relatives à l'exigibilité anticipée du prêt et à la déchéance du terme dont l'intervention est seule de nature à rendre le solde du prêt exigible.
Le fait que le contrat ait été exécuté par le versement des fonds et par le remboursement d'une partie des échéances de l'emprunt n'interdit pas à M. X... de contester le caractère exécutoire du titre.
Le défaut de paraphe des conditions générales du contrat annexées à l'acte authentique alors que celui-ci prévoit expressément cette formalité, ne permet pas de les appliquer, ce qui prive le titre de son caractère exécutoire.
A défaut d'agir en vertu d'un titre exécutoire, la banque n'est pas recevable à diligenter la procédure de saisie immobilière qu'elle a mise en œuvre. La nullité de celle-ci sera en conséquence prononcée.

Il sera fait application au profit de M. X... des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Prononce la jonction des procédures (sur déclaration d'appel et à jour fixe) inscrites sous les numéros 11/03346 et 11/03692 du rôle de cette cour,
Infirme le jugement attaqué,
et statuant à nouveau :
Prononce la nullité de la procédure de saisie immobilière diligentée par la société GE Money Banque à l'encontre de M. X... concernant l'immeuble situé ... Medoc (33) cadastrée section AO sous le numéro 11 d'une superficie totale de 34 a 22 ca,
Ordonne la main-levée de cette saisie immobilière et dit que mention de cette main-levée sera portée en marge de la publication du commandement valant saisie, délivré par Me Stéphane D... , huissier de justice à Pauillac (33) en date du 31 décembre 2010, publié le 3 février 2011 au bureau des hypothèques de Lesparre Medoc, volume 2011 S No 6,
Condamne la société GE Money Bank à verser à M. X... une indemnité de 2.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
La condamne aux dépens ceux d'appel étant distraits conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Robert Miori, Président, et par Patricia Puyo, adjoint administratif principal faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : CinquiÈme chambre civile
Numéro d'arrêt : 11/03692
Date de la décision : 20/07/2011
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Analyses

- acte de prêt - conditions générales du prêt annexées à l'acte mais non paraphées par l'emprunteur - perte du caractère exécutoire du titre


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2011-07-20;11.03692 ?
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