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12/05/2011 | FRANCE | N°10/03166

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 12 mai 2011, 10/03166


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 12 MAI 2011

fc

(Rédacteur : Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller)



SÉCURITÉ SOCIALE



N° de rôle : 10/03166





















La SA POLYREY



c/



La CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE

Monsieur [M] [I]











Nature de la décis

ion : AU FOND







Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Dé...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 12 MAI 2011

fc

(Rédacteur : Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller)

SÉCURITÉ SOCIALE

N° de rôle : 10/03166

La SA POLYREY

c/

La CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE

Monsieur [M] [I]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 mars 2010 (R.G. n°2008-408) par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de DORDOGNE, , suivant déclaration d'appel du 17 mai 2010,

APPELANTE :

La SA POLYREY

agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 3]

représentée par Maître Bruno FIESCHI loco Maître Philippe PLICHON, avocats au barreau de PARIS

INTIMÉS :

La CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège

social

[Adresse 1]

non comparante, non représentée, bien que régulièrement convoquée

Monsieur [M] [I]

demeurant [Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Maître Elisabeth LEROUX de la SCP TEISSONNIERE TOPALOFF LAFFORGUE, avocats au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 31 mars 2011, en audience publique, devant Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller chargé d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Paul ROUX, Président,

Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller,

Madame Katia SZKLARZ, Vice-Présidente Placée,

Greffier lors des débats : Madame Chantal TAMISIER,

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

FAITS et PROCEDURE

Mr [M] [I] a exercé son activité professionnelle au sein de la société POLYREY entre 1952 et 1981 en qualité d'ouvrier de fabrication.

Le 6 décembre 2007, il déclarait une maladie professionnelle auprès de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Dordogne en raison de l'exposition à l'amiante qu'il estimait avoir subi au sein de l'entreprise; le certificat médical joint à la déclaration faisait état de de plaques pleurales et d'épaississements pleuraux.

Le 3 avril 2008, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Dordogne a reconnu le caractère professionnel de sa maladie.

Le 22 août 2008, Mr [I] s'est vu octroyer un taux d'IPP de 10%;

Par jugement du 25 mars 2010, le Tribunal a reconnu que la maladie professionnelle dont est atteint Mr [I] était la conséquence de la faute inexcusable de la société POLYRE, a fixé au maximum la majoration de la rente versée à l'assuré, et a fixé l'indemnisation des préjudices à 25.000 euros s'agissant des souffrances endurées et 6000 euros pour le préjudice d'agrément; le TASS a, par ailleurs déclaré la reconnaissance de la maladie professionnelle opposable à la société POLYREY et a dit que l'action récursoire de la caisse était recevable.

La société POLYREY a régulièrement relevé appel de cette décision

LES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par conclusions récapitulatives développées à l'audience, et auxquelles il convient de se référer, la Société POLYREY demande à la cour de :

'Dire et juger Monsieur [I] mal fondé en toutes ses demandes, fins et conclusions, en ce qu'il n'est pas rapporté la preuve de la faute inexcusable alléguée à l'encontre de la Société POLYREY.

Subsidiairement, débouter Monsieur [I] de ses demandes d'indemnisation au titre de ses préjudices personnels.

Dire et juger que la majoration de la rente ne peut être mise à la charge de la société POLYREY.

Dire et juger que la CPAM n'a pas rempli son obligation d'information à l'égard de la société POLYREY.

Dire et juger que la preuve de l'existence des maladies professionnelles n'est pas rapportée dans les rapports CAISSE / EMPLOYEUR.

Dire et juger inopposable les décisions de prise en charge de la CPAM à la société POLYREY.

Dire et juger que l'ensemble des conséquences financières de la faute inexcusable ne peut pas être récupéré sur la société POLYREY par la CPAM.

En conséquence dire et juger la CPAM mal fondée en son action récursoire dirigée contre la Société POLYREY

Subsidiairement, enjoindre à la CPAM de produire aux débats sous astreinte définitive de 500€, par jour de retard, à compter du jugement à intervenir, toute pièce médicale ayant permis au médecin conseil, d'émettre un avis sur la maladie.

Commettre tel Expert qu'il plaira à la Cour de désigner, avec mission de se faire remettre l'entier dossier médical de Monsieur [I], décrire la maladie dont il aurait été atteint, au vu desdites pièces, du tout, dresser un rapport qui sera déposé au Greffe de la Cour pour être statué ce que de droit.

Surseoir à statuer au fond en attente du dépôt du rapport d'expertise médicale par l'expert désigné par la Cour.

Condamner la CPAM à payer à la société POLYREY une somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.'

Dans ses dernières écritures, développées à l'audience et auxquelles il convient de se référer, Mr [I] demande à la Cour de :

'Confirmer le jugement rendu par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PERIGUEUX le 25 mars 2010 en ce qu'il a :

Dit que la maladie professionnelle dont est atteint Monsieur [M] [I] est la conséquence de la faute inexcusable de son ancien employeur, la société POLYREY ;

Fixé au maximum légal la majoration de la rente versée à Monsieur [I] par la CPAM,

Dit que cette majoration suivra l'éventuelle évolution de son taux d'incapacité permanente partielle,

Statuant de nouveau :

Fixer l'indemnisation des préjudices complémentaires selon les modalités suivantes :

-Réparation du préjudice de la souffrance physique :35.000 euros

-Réparation du préjudice de la souffrance morale : 35.000 euros

-Réparation du préjudice d'agrément : 35.000 euros

Ordonner en outre à la société défenderesse de verser à Monsieur [I] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.'

La CPAM de la Dordogne, bien que régulièrement convoquée, n'a pas conclu, ni comparu.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le caractère professionnel de la maladie de Mr [I] et

l'inopposabilité de la décision de la caisse à l'égard de l'employeur

La société POLYREY soutient que la caisse n'a pas respecté le principe du contradictoire prévu à l'article R 441-1 du code de la sécurité sociale.

Mais, le premier juge a constaté d'une part, que la caisse avait informé l'employeur de l'instruction du dossier du salarié et que la société, par courrier du 21 janvier 2008, avait refusé de répondre aux demandes d'information complémentaires de la caisse sur la situation professionnelle de M.[I] au sein de l'entreprise, d'autre part que la caisse avait, par lettre du 20 mars 2008, informé la société qu'elle pouvait consulter le dossier du salarié avant que soit prise la décision sur la prise en charge de la maladie devant intervenir le 4 avril suivant.

L'employeur prétend, en outre, que la preuve de la pathologie de M.[I] n'est pas rapportée dans les rapports caisse/employeur car la caisse ne justifie pas de façon contradictoire de l'existence d'un examen tomodensitométrique et ne produit pas l'ensemble du dossier médical aux débats ce qui est contraire aux dispositions de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.

Mais, la société ne peut valablement soutenir cet argument alors qu'elle a été en mesure de consulter le dossier de la Caisse ayant fondé la décision de prise en charge, que la teneur de l'examen tomododensitométrique mentionné au tableau 30B des maladies professionnelles qui constitue un élément du diagnostic n'a pas à figurer dans les pièces du dossier de la caisse constitué en application de l'article R 441-13 du code de la sécurité sociale et qu'elle ne combat pas sérieusement la présomption d'imputabilité résultant du fait que M.[I] remplit les conditions fixées au tableau 30 des maladies professionnelles.

Le premier juge a estimé, par ailleurs, à bon droit, que la demande d'expertise sollicitée par l'employeur n'était pas justifiée dans la mesure où celui-ci avait eu connaissance de l'expertise médicale diligentée dans le cadre d'une instance devant le tribunal du contentieux de l'incapacité.

Le jugement doit, en conséquence, être confirmé sur ce point.

Sur la faute inexcusable de l'employeur

En vertu du contrat le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise ;

En application des dispositions de l'article L 452-1 du code de la sécurité sociale la victime d'un accident du travail peut prétendre à une indemnisation complémentaire lorsque l'accident est du, ne serait-ce que pour partie, à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitués, une telle faute étant caractérisée si l'employeur avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ;

En l'espèce, c'est par une motivation rigoureuse et pertinente que la cour adopte et qui n'est pas contredite en cause d'appel par l'argumentation de la société POLYREY, que les premiers juges ont exactement considéré que compte tenu des travaux et connaissances scientifiques établissant sans conteste la dangerosité de l'amiante, la société POLYREY avait ou aurait du nécessairement avoir conscience du danger auquel elle avait exposé Mr [I] en le faisant travailler, de 1952 à 1981 sans protection individuelle ou collective satisfaisante, dans des conditions le contraignant à l'inhalation de poussière d'amiante, laquelle est à l'origine de l'affection dont la Caisse primaire d'assurance maladie a reconnu le caractère professionnel.

De ce chef, le jugement mérite, donc, confirmation.

Sur les conséquences de la faute inexcusable

Faisant valoir que la rente versée au salarié au titre de l'incapacité permanente indemnise la perte de gains professionnels et le déficit fonctionnel permanent, que selon la nomenclature DINTILHAC les souffrances endurées et le préjudice d'agrément sont incluses dans le poste de préjudice du déficit fonctionnel permanent, et que le salarié ne rapporte pas la preuve de préjudices distincts de ceux déjà réparés par la rente, la société POLYREY demande à la Cour de rejeter les demandes d'indemnisation formées par M.[I] au titre des préjudices complémentaires.

Mais, en application de l'article L 452-3 du code de la sécurité sociale, la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle dûs à la faute inexcusable de l'employeur a le droit de demander, indépendamment de la majoration de la rente qu'elle reçoit, la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales endurées et de ses préjudices esthétique et d'agrément.

Conformément aux dispositions de la décision du conseil constitutionnel du 18 juin 2010, ce système d'indemnisation des conséquences de la faute inexcusable ne se confond pas avec le régime d'indemnisation de droit commun même s'il est, désormais, admis que la victime peut solliciter devant la juridiction de sécurité sociale à l'encontre du seul employeur la réparation des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.

Contrairement à ce que soutient l'employeur, la nomenclature DINTILHAC qui, au demeurant, ne repose sur aucune base légale, ne peut, donc, se substituer à la liste des préjudices énoncés par l'article L 452-3.

C'est, donc, à juste titre, que le premier juge a indemnisé, indépendamment de la majoration de la rente, les préjudices causés par les souffrances physiques et morales endurées et le préjudice d'agrément.

En ce qui concerne le montant des indemnités versées à la victime, le tribunal a fait une exacte appréciation des préjudices subis compte tenu des pièces médicales et des témoignages versés aux débats.

L'employeur invoque, enfin, le fait que le taux d'incapacité fixé à 20% par le tribunal du contentieux de l'incapacité au lieu de 10% par la caisse ne lui est pas opposable car il n'était pas partie à cette instance.

Toutefois, aux termes de l'article L 452-2 du code de la sécurité sociale, la majoration de la rente allouée en cas de faute inexcusable suit le taux d'évolution du taux d'incapacité de la victime peu important que ce taux soit fixé par la caisse ou par le tribunal du contentieux de l'incapacité.

Sur l'ensemble de ces points, le jugement sera confirmé.

L'équité commande d'allouer à M.[I] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Condamne en outre la société POLYREY à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 1500 euros à Mr [I] au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel en sus de ceux alloués en première instance.

Signé par Monsieur Jean-Paul ROUX, Président, et par Chantal TAMISIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. TAMISIER Jean-Paul ROUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 10/03166
Date de la décision : 12/05/2011

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°10/03166 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-05-12;10.03166 ?
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