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29/03/2011 | FRANCE | N°09/04753

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 29 mars 2011, 09/04753


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 29 MARS 2011



(Rédacteur : Madame Marie-Paule Descard-Mazabraud, Président)

(PH)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 09/04753











Mademoiselle [W] [P]



c/



SARL [Adresse 5]



SELARL [T] [E], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la SARL [Adresse 5]



CGEA de Bordeaux, mandataire de l'AG

S du Sud-Ouest









Nature de la décision : AU FOND









Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signif...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 29 MARS 2011

(Rédacteur : Madame Marie-Paule Descard-Mazabraud, Président)

(PH)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 09/04753

Mademoiselle [W] [P]

c/

SARL [Adresse 5]

SELARL [T] [E], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la SARL [Adresse 5]

CGEA de Bordeaux, mandataire de l'AGS du Sud-Ouest

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 juillet 2009 (R.G. n° F 08/02232) par le Conseil de Prud'hommes - formation paritaire - de Bordeaux, section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 06 août 2009,

APPELANTE :

Mademoiselle [W] [P], née le [Date naissance 3] 1980, demeurant [Adresse 4]

[Adresse 4],

Représentée par Maître Anne Couplan, avocat au barreau de Bordeaux,

INTIMÉS :

SARL [Adresse 5], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 1],

Représentée par Maître Sophie Dargacha-Sablé, avocat au barreau de Bordeaux,

SELARL [T] [E], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la SARL [Adresse 5], demeurant [Adresse 2],

CGEA de Bordeaux, mandataire de l'AGS du Sud-Ouest, pris en la personne de son Directeur domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 6],

Représentés par la SCP Philippe Duprat - Isabelle Aufort & Bertrand Gaboriau, avocats au barreau de Bordeaux,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 janvier 2011 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Paule Descard-Mazabraud, Président,

Madame Raphaëlle Duval-Arnould, Conseiller,

Madame Myriam Laloubère, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière.

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Melle [W] [P] a été engagée le 13 septembre 2003 par la société [Adresse 5] en qualité de responsable de cuisine.

Le 15 mars 2004, elle faisait l'objet d'un premier avertissement qu'elle contestait.

Elle était en arrêt maladie du 14 avril au 16 mai 2004 et lorsqu'elle se représentait à son travail le 17 mai, elle était renvoyée en congé.

Le 20 mai, elle indiquait qu'elle n'avait pu reprendre normalement son travail et finalement elle prenait acte de la rupture de son contrat le 28 mai 2004 et saisissait le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux le 1er juin.

Parallèlement, une procédure de redressement judiciaire était engagée à l'encontre de la société [Adresse 5].

Le contentieux prud'homal faisait l'objet de plusieurs mesures de radiation et le Tribunal de Commerce clôturait finalement la procédure pour apurement du passif le 28 mai 2008.

Melle [P] présentait deux types de demandes à la juridiction, d'une part des demandes d'heures supplémentaires et d'autre part des indemnités de rupture, la fin du contrat étant imputable à l'employeur.

Par jugement en date du 7 juillet 2009, le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux, section Encadrement, a relevé que Melle [P] ne justifiait pas de ce qu'elle avait été empêchée de reprendre son travail.

Il l'a déboutée de ses demandes tendant à voir déclarer la rupture imputable à l'employeur.

Sur ses réclamations au titre des heures supplémentaires il a estimé qu'elle n'apportait pas d'éléments suffisants pour étayer sa demande.

Il l'a également déboutée de ses demandes au titre du préjudice moral.

Il l'a condamnée à 100 euros au titre d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Melle [P] a régulièrement relevé appel du jugement.

Par conclusions déposées le 12 janvier 2011, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, elle soutient que la rupture de son contrat de travail est imputable à l'employeur et elle forme les demandes suivantes :

- 5.794,92 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 579,49 euros au titre des congés payés afférents,

- 10.941,30 euros au titre des heures supplémentaires,

- 1.094,00 euros au titre des congés payés afférents,

- 1.448,78 euros au titre des congés payés,

- 9.000,00 euros au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3.000,00 euros pour préjudice moral,

- 195,00 euros au titre de rappel de salaire,

- une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 7 décembre 2010, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, le CGEA soutient qu'en l'état de la procédure, le commissaire à l'exécution du plan doit être mis hors de cause.

Le CGEA quant à lui rappelle les limites légales de sa garantie.

Motifs de la décision

Sur les heures supplémentaires

Melle [P] présente une réclamation d'un montant de 10.941,30 euros sur la période du 13 septembre 2003 au 14 avril 2004.

Son contrat de travail en date du 13 septembre 2003, mentionnait une durée de travail de 169 heures mensuelles et un salaire net de 1.500 euros, ou salaire brut de 1.931,64 euros contrat régi par les dispositions de la convention collective des cafés, hôtels restaurants.

Les bulletins de paie mentionnent tous la durée de 169 heures mais sans

référence à des heures supplémentaires.

Au soutien de ses demandes, Melle [P] produit son agenda sur lequel sont portés jour après jour, les horaires de travail et les noms des salariés en repos. Ce document avec des mentions très précises sur le travail effectué et rédigé avec des stylos de couleurs différentes est conforté par des plannings précis présentés par Melle [P]. Au soutien de ces éléments, elle produit des attestations démontrant que la plupart du temps, elle était seule pour effectuer le travail en cuisine et justifiant de l'activité de restauration de la société [Adresse 5].

La liste du personnel permet de constater que seul M. [G] était salarié en cuisine avec Melle [P] jusqu'en février 2004 et qu'ensuite elle était seule.

En outre, M. [G] a été malade du17 octobre au 20 novembre.

De son côté, l'employeur qui ne justifie pas avoir tenu un document permettant de justifier des horaires de travail de ses salariés, se borne à dire que les horaires déclarés par Melle [P] sont invraisemblables et que le nombre de repas servis ne justifiait pas le travail revendiqué par la salariée.

En application de l'article L.212-1-1 devenu L.3171-4 du Code du Travail, si la charge de la preuve des heures effectivement travaillées par le salarié n'incombe spécialement à aucune des parties, l'employeur doit néanmoins fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Il appartient, cependant, à celui-ci de fournir préalablement des éléments de nature à étayer sa demande et à rendre vraisemblable l'accomplissement d'heures supplémentaires.

Si Melle [P] apporte des éléments de nature à rendre vraisemblable sa demande, en revanche, l'employeur ne justifie en rien des horaires effectivement réalisés.

Il sera donc fait droit à la demande de la salariée et il lui sera alloué 10.941,30 euros et les congés payés afférents soit 1.094 euros.

Sur la prise d'acte de rupture

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission. Il appartient, alors, au salarié de rapporter la preuve des faits fautifs qu'il invoque, sans qu'il soit tenu d'énoncer les motifs de la rupture au moment où il décide de rompre le contrat de travail.

En l'espèce, Melle [P] qui avait été en arrêt maladie jusqu'au 16 mai au soir, s'est présentée le 17 mai au matin et elle produit des attestations pour démontrer qu'elle n'a pu reprendre son travail du fait de l'opposition de M. [Y]. Elle s'est trouvée dans la même situation le lendemain et le 28 mai, elle a pris acte par écrit de la rupture de son contrat de travail, son employeur ne lui procurant plus de travail.

L'employeur a attendu le mois de juillet pour l'inviter à reprendre son poste, démontrant ainsi qu'il était parfaitement informé de ce que cette salariée qui n'était plus en arrêt maladie depuis le 16 mai n'avait pu reprendre son travail.

L'argument selon lequel Melle [P] qui était cadre aurait dû passer outre l'opposition de M. [Y] qui était simple serveur ne peut être retenu. En effet, Melle [P] n'avait pas un rôle de direction dans l'entreprise et M. [Y] lui a expliqué qu'un chef l'avait remplacée et qu'elle n'avait plus son poste.

Contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, Melle [P] démontre que l'employeur en lui interdisant de reprendre son poste, en ne lui fournissant pas de travail et en ne lui payant pas les heures supplémentaires effectuées a gravement manqué à ses obligations dans des conditions telles qu'elles rendent la rupture imputable à l'employeur.

Le jugement sera réformé sur ce point.

Il lui sera alloué l'indemnité compensatrice de préavis qui concernant un cadre engagé depuis plus de 6 mois est fixée à trois mois, soit 5.794,92 euros et les congés payés afférents soit 579,49 euros.

Melle [P] ayant rapidement retrouvé une situation professionnelle, la cour dispose d'éléments suffisants pour fixer à 3.000 euros les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Compte tenu des éléments ci-dessus exposés et des condamnations prononcées, Melle [P] ne justifie pas de l'existence d'un préjudice moral particulier.

L'examen de ces bulletins de paie démontre qu'elle n'a pas perçu de congés payés et il lui sera alloué 1.448,78 euros.

Enfin, elle doit également recevoir 195 euros au titre de rattrapage de salaires dans la mesure où elle était rémunérée légèrement en dessous de son contrat qui fixait la rémunération à 1.500 euros net.

La société [Adresse 5] remettra à Melle [P] des bulletins de paie rectifiés, et des documents de rupture conformes.

Un jugement constatant l'apurement du passif étant intervenu, il convient de mettre hors de cause le commissaire à l'exécution du plan.

Le CGEA n'est pas tenu à garantie, sinon à titre subsidiaire, la société étant in bonis.

L'équité commande de lui allouer 750 euros au titre de l'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

' réforme le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

et statuant à nouveau :

' condamne la société [Adresse 5] à verser à Melle [P] :

- 10.941,30 euros (dix mille neuf cent quarante et un euros et trente centimes) au titre des heures supplémentaires,

- 1.094,13 euros (mille quatre vingt quatorze euros et treize centimes) au titre des

congés payés afférents,

- 5.794,92 euros (cinq mille sept cent quatre vingt quatorze euros et quatre vingt

douze centimes) au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 579,49 euros (cinq cent soixante dix neuf euros et quarante neuf centimes) au

titre des congés payés afférents,

- 3.000,00 euros (trois mille euros) au titre des dommages-intérêts pour licenciement

sans cause réelle et sérieuse,

- 195,00 euros (cent quatre vingt quinze euros) au titre du rappel de salaire,

- 1.448,78 euros (mille quatre cent quarante huit euros et soixante dix huit centimes)

au titre des congés payés,

- 750,00 euros (sept cent cinquante euros) au titre de l'indemnité de l'article 700 du

code de procédure civile,

' dit que l'employeur devra remettre à Melle [P] des bulletins de paie rectifiés et des documents de rupture conformes,

' met hors de cause le commissaire à l'exécution du plan de la société [Adresse 5],

' dit que la garantie du CGEA ne serait retenue que si l'employeur était défaillant et qu'elle s'exercerait dans les limites des dispositions légales,

' dit que la société [Adresse 5] est tenue aux dépens de première instance et d'appel.

Signé par Madame Marie-Paule Descard-Mazabraud, Président, et par Madame Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A-M Lacour-Rivière M-P Descard-Mazabraud


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 09/04753
Date de la décision : 29/03/2011

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°09/04753 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-03-29;09.04753 ?
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