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10/03/2011 | FRANCE | N°10/03492

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 10 mars 2011, 10/03492


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 10 MARS 2011



(Rédacteur : Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 10/03492









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Monsieur [I] [F]



c/



La SAS OXALIS





















Nature de la décision : AU FOND







Notifi

é par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 mai 201...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 10 MARS 2011

(Rédacteur : Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 10/03492

fc

Monsieur [I] [F]

c/

La SAS OXALIS

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 mai 2010 (R.G. n°F09/335) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANGOULEME, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 31 mai 2010,

APPELANT :

Monsieur [I] [F]

né le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 4]

de nationalité Française

Profession : Secrétaire Général,

demeurant [Adresse 3]

représenté par Maître Jean-Philippe POUSSET, avocat au barreau de CHARENTE

INTIMÉE :

La SAS OXALIS

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

[Adresse 2]

représentée par Maître Olivier BRUNET, avocat au barreau de CHARENTE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 février 2011 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Paul ROUX, Président de chambre,

Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller,

Madame Katia SZKLARZ, Vice Président placée,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Florence CHANVRIT adjoint administratif, faisant fonction de Greffier,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

FAITS ET PROCEDURE

Suivant contrat à durée indéterminée du 18 octobre 2006, monsieur [I] [F] a été engagé par la société OXALIS (la société) en qualité de secrétaire général, statut cadre de la convention collective de l'imprimerie de labeur.

Il a été licencié le 19 juin 2009 pour motif économique après avoir accepté d'adhérer à une convention de reclassement personnalisée.

Contestant cette décision, le salarié a saisi, le 24 septembre 2009, le conseil des prud'hommes d'Angoulême aux fins de voir juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'obtenir le paiement d'indemnités de rupture et de rappels de salaires.

Par jugement du 17 mai 2010, le conseil, considérant que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, a débouté le salarié de ses demandes.

M.[F] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par conclusions écrites, développées oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer, l'appelant sollicite de la cour qu'elle réforme le jugement frappé d'appel, dise que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamne l'employeur à lui payer les sommes suivantes :

- 139.680 euros à titre d'indemnité pour licenciement abusif,

- 27.825 euros à titre d'indemnité pour intéressement personnalisé,

- 3555,90 euros à titre d'indemnité pour congé de repos d'ajustement,

- 59.531 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 11.174 euros à titre d'indemnité de préavis ou, à titre subsidiaire, 5820 euros à titre de rappel de préavis d'un mois,

- 11.640 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 4983 euros sur les rappels de salaires liés à la rupture du contrat de travail,

- 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures soutenues oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer, la société conclut à la confirmation du jugement et sollicite la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la saisine de la commission de conciliation

Aux termes de l'article 508 de la convention collective de l'imprimerie de labeur, en cas de conflit de quelque nature que ce soit, la partie la plus diligente adresse, par lettre recommandée, au secrétariat de la commission régionale à laquelle elle ressortit, une requête aux fins de conciliation, requête rédigée sur papier libre, exposant avec tous les éléments d'appréciation nécessaires le ou les points sur lesquels portent le litige.

En l'espèce, outre le fait que l'existence d'un conflit n'était pas caractérisée dans la mesure où M.[F] avait accepté d'adhérer à la convention de reclassement personnalisée, ce dernier qui, en sa qualité de secrétaire général de la société, ne pouvait ignorer les dispositions sus-visées, n'a pas pris l'initiative de saisir la commission.

Dés lors, le salarié ne peut valablement soutenir que le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse au motif que l'employeur n'a pas saisi la commission.

Le jugement sera, en conséquence, confirmé en ce qu'il a écarté ce moyen.

Sur le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement économique

Selon l'article L. 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ou une réorganisation de l'entreprise rendue nécessaire pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise.. Selon l'article  L. 1233-16 du même Code, la lettre de licenciement comporte l'énoncé des motifs économiques invoqués par l'employeur ; et mention doit y être faite de la priorité de réembauchage prévue par l'article L. 1233-45 et de ses conditions de mise en oeuvre.

La lettre de licenciement doit énoncer à la fois la raison économique qui fonde la décision et sa conséquence précise sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié. A défaut de ces mentions, la motivation de la lettre de licenciement est imprécise et le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse. Il en est de même si l'employeur n'a pas tenté de reclasser le salarié avant toute notification du licenciement.

En l'espèce, la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est, ainsi, rédigée :

'Compte tenu de vos fonctions nous avons eu l'occasion d'évoquer depuis de nombreux mois l'évolution de la situation d'Oxalis SAS, ses résultats et la nécessaire adaptation de son organisation pour sauvegarder sa compétitivité. Comme vous le savez, la réduction du périmètre du groupe s'est traduite par une diminution du volume de travail des services comptable et financier et par un résultat déficitaire d'Oxalis SAS, votre employeur. L'évolution récente et prévisible à court terme du groupe et des résultats d'Oxalis SAS qui en découlent impose une réorganisation qui se traduit par la suppression du poste que vous occupez.

Nous avons examiné les possibilités de reclassement qui pouvaient vous être proposées dans l'entreprise et le groupe et il s'avère que, d'une part la nature et le niveau de vos fonctions ne permettent pas de vous proposer un reclassement dans un poste de même catégorie que celui que vous occupez et que d'autre part la taille du groupe, désormais très limitée, n'offre pas d'autres possibilités y compris pour des postes de catégorie inférieure.

Dans ces conditions, votre emploi est supprimé.

Lors de l'entretien préalable, nous vous avons proposé d'adhérer à une convention de reclassement personnalisé conformément à l'article L321-4-2 du code du travail. Vous disposez d'un délai de 21 jours a partir de la date de l'entretien, soit jusqu'au 9 juillet 2009 inclus, pour nous faire part de votre volonté de bénéficier de ce dispositif.

Selon la loi, vous disposez d'une priorité de réembauchage.

Selon la loi, vous disposez à ce jour d'un droit au titre du DIF de 54 heures.

Il vous sera enfin loisible dans un délai de 10 jours à compter de la rupture de votre contrat de travail de renoncer au maintien de la couverture complémentaire prévoyance et santé valable pendant 9 mois au plus, moyennant cotisations y afférentes.

Quelle que soit votre décision d'adhérer ou non à cette CRP nous attirons votre attention sur la nécessité d'ores et déjà de tout mettre en oeuvre pour que tous les dossiers que vous gérez soient à jour et transmissibles sans délai afin que la continuité du service puisse être assurée après votre départ. Nous ferons un point sur cette question le 2 juillet 2009.'

Le salarié conteste, tout d'abord, la réalité des difficulté économiques alléguées.

En l'espèce, le licenciement est motivé par la réorganisation du groupe rendue nécessaire pour sauvegarder la compétitivité du groupe.

Il résulte d'un protocole amiable du 10 décembre 2007 que le groupe OXALIS a été contraint, à la suite d'un incendie ayant détruit l'une de ses filiales, la société SODIPA, de renégocier l'ensemble de ses crédits bancaires en s'engageant, notamment, à céder d'autres filiales.

C'est ainsi que la société SODIPA a été cédée en 2007, les sociétés MARTIN et FACEDIM l'ont été en 2008 et la société DELPIESSE a été placée en liquidation judiciaire en 2009.

À la date du licenciement, le groupe OXALIS était organisé comme suit :

- la Holding OXALIS chargée d'attributions financières et administratives pour le groupe

- la société ALAMIGEON ayant une activité de papeterie

- les vignobles [S] [R] et ses trois filiales : la SCEA château Bellerive, la SCEA château Varennes-Guimoniere, la SCEA YON-FIGEAC

La Holding ayant pris l'initiative du licenciement et les fonctions de M.[F] l'amenant à superviser l'ensemble des activités du groupe, les difficultés économiques doivent s'apprécier au niveau du groupe.

Selon le rapport des commissaires aux comptes, le groupe affichait au 31 décembre 2008, un résultat net de - 419.779,55 euros, de - 161.476 euros au 31 mars 2009 et de - 110.247 euros au 31 décembre 2009.

Cependant, les comptes de résultat des filiales en 2009 ne révèlent pas de déficit. Le rapport de gestion sur l'exercice 2009 indique, au contraire, que si l'activité viticole a connu un ralentissement, la production 2009 a été satisfaisante tant en qualité qu'en quantité et la société Alamigeon a connu un renforcement marqué de sa rentabilité.

En outre, les rapports d'audit versés aux débats ne mentionnent pas, en 2009, d'indicateurs économiques alarmants de nature à justifier une réorganisation du groupe et une suppression du poste de secrétaire général pour sauvegarder la compétitivité laquelle avait été restaurée par la cession des filiales en 2007 et 2008.

Au vu ces éléments, la Cour estime que le motif économique du licenciement n'est pas suffisamment caractérisé et prive le licenciement de cause réelle et sérieuse sans qu'il soit nécessaire d'examiner le moyen tiré du non respect de l'obligation de reclassement.

De ce chef, le jugement sera réformé.

Sur les conséquences financières de la rupture

M.[F] considère que son ancienneté dans l'entreprise doit courir à compter du 1er septembre 1990 date de sa première embauche au sein de la société.

L'article 210 de la convention collective prévoit que : 'l'ancienneté dans l'entreprise s'entend depuis le jour de l'entrée dans l'entreprise sans que soient déductibles les périodes d'absence qui n'ont pas pour effet de rompre le contrat de travail'.

Ces dispositions signifient qu'en cas de réembauche d'un même salarié sa nouvelle ancienneté court à compter de la nouvelle embauche sauf si les parties ont expressément convenu de faire état de l'ancienneté acquise lors de la première embauche.

En l'espèce, le premier contrat a été rompu le 11 juin 2004 par la démission du salarié ; celui-ci ne peut, donc, valablement prétendre à une reprise d'ancienneté du fait d'une nouvelle embauche le 18 octobre 2006 dés lors que les parties n'ont pas convenu du contraire.

La demande d'indemnité de licenciement calculée sur l'ancienneté alléguée ainsi que la demande de complément de préavis, de RTT et de gratification seront, en conséquence, rejetées et le jugement sera confirmé sur ce point.

S'agissant de l'indemnité compensatrice de préavis, il est de principe que l'adhésion à la convention de reclassement personnalisée ne fait pas obstacle au versement de la dite indemnité en tenant compte, toutefois, des sommes perçues au titre de la convention lorsque le licenciement pour motif économique est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Il sera, en conséquence, alloué à M.[F] la somme de 11.640 euros à ce titre, outre les congés payés afférents, soit 116,40 euros (RTT comprise) et la gratification pour un montant de 944 euros, étant observé que l'employeur ne donne aucune indication sur les sommes versées au titre de la convention de reclassement personnalisée.

En ce qui concerne la prime d'intéressement personnalisée, la lettre d'embauche de M.[F] du 19 septembre 2006 prévoit 'qu'au début de l'année 2008, un système d'intéressement personnalisé (hors système d'intéressement général propre à la société) sera mis en place au profit de M.[F] lui permettant de se constituer un complément de retraite.'.

Le seul défaut d'énonciation de cet engagement dans le contrat de travail signé postérieurement ne l'a pas remis en cause dés lors que le contrat ne contient pas de disposition contraire.

C'est, donc, à tort que les premiers juges ont rejeté cette demande dont le montant sera, toutefois, limité à deux mois de salaires par année travaillée, soit la somme de 14.575 euros pour les années 2008 et 2009.

En outre, par application de l'article L 1235-3 du code du travail, il sera alloué à M.[F] la somme de 32.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la régularisation des jours de RTT

En application de l'article 12 de la convention collective, les cadres supérieurs bénéficient d'une réduction du temps de travail actuel par l'octroi de jours de repos qui ne sauraient être inférieurs à 12 jours.

Par courrier du 10 juin 2009, M.[F] a contesté les dispositions de son contrat de travail ne prévoyant que 7 jours de RTT et a réclamé l'attribution de 5 jours supplémentaires par an.

L'employeur a répondu, le 16 juillet 2009, que la règle supposait la prise effective des jours de RTT et non leur paiement.

Mais, la convention collective n'opère pas une telle distinction.

Dés lors, il y a lieu de considérer que les dispositions du contrat de travail ne respectent pas les règles fixées par la convention collective.

Il sera, en conséquence, fait droit à la demande du salarié comme suit au dispositif de la présente décision et le jugement sera réformé sur ce point.

Par ces motifs,

La Cour,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté M.[F] de ses demandes concernant la saisine de la commission de conciliation, l'indemnité de licenciement et le complément d'indemnité de préavis, de RTT et de gratification

le réforme pour le surplus,

Statuant sur les points réformés,

Dit que le licenciement de M.[F] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la société OXALIS à payer à M.[F] les sommes suivantes :

- 11.640 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 116,40 euros pour les congés payés afférents,

- 14.575 euros au titre de la prime d'intéressement personnalisée,

- 32.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3555,90 euros au titre de la réduction du temps de travail,

- 944 euros au titre de la gratification,

Condamne la société OXALIS à payer à M.[F] la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société OXALIS aux dépens.

Signé par Monsieur Jean-Paul ROUX, Président, et par Chantal TAMISIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. TAMISIER Jean-Paul ROUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 10/03492
Date de la décision : 10/03/2011

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4B, arrêt n°10/03492 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-03-10;10.03492 ?
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