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15/06/2010 | FRANCE | N°08/07561

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 15 juin 2010, 08/07561


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 15 JUIN 2010



(Rédacteur : Monsieur Claude Berthommé, Conseiller)

(PH)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 08/07561











Monsieur [B] [O]



c/



La S.A.S. Manpower France













Nature de la décision : AU FOND











Notifié par LRAR le :
>

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :





Décision déférée à la Cour : jugement rendu...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 15 JUIN 2010

(Rédacteur : Monsieur Claude Berthommé, Conseiller)

(PH)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 08/07561

Monsieur [B] [O]

c/

La S.A.S. Manpower France

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 novembre 2008 (R.G. n° F 07/00988) par le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux, section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 24 décembre 2008,

APPELANT :

Monsieur [B] [O], né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 4], de

nationalité Française, demeurant [Adresse 3],

Représenté par Maître Wilfried Méziane loco Maître Silvère Marvie, avocats au barreau de Bordeaux,

INTIMÉE :

La S.A.S. Manpower France, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 2],

Représentée par Maître Lionel Herscovici loco S.C.P. Annick Pérol - Philippe Raymond - Alexandre Khanna & associés, avocats au barreau de Paris,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 mai 2010 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Paule Descard-Mazabraud, Président,

Madame Raphaëlle Duval-Arnould, Conseiller,

Monsieur Claude Berthommé, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Martine Massé.

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant contrat à durée déterminée signé le 09 juillet 2003, la SAS Manpower France (la SAS), entreprise de travail temporaire, a engagé M. [B] [O] en qualité de conducteur de poids lourds pour la durée du 07 juillet au 26 septembre 2003, pour une rémunération horaire de 7,62 € bruts et une durée mensuelle de travail de 151,67 heures, soit une rémunération mensuelle brute de base de 1.155,72 € outre prime de repas et majorations.

La SAS a engagé M. [O] en vue de sa mise à la disposition de la SNC Prodirest, entreprise utilisatrice avec laquelle elle a signé un contrat de mission motivé par un accroissement temporaire de son activité pour cette même période du 07 juillet au 26 septembre 2003.

Par lettre recommandée du 17 août 2003 adressée à la SAS, M. [O] a contesté le décompte de sa rémunération figurant aussi bien sur le premier bulletin de paie remis le 04 août 2003 que sur le bulletin de paie rectifié adressé le 16 août 2003 ; il a conclu cette lettre en imputant à la SAS la rupture anticipée unilatérale de son contrat de travail.

À compter du 18 août 2003, M. [O] ne s'est plus présenté à son travail.

Par plusieurs courriers, la SAS a vainement présenté à M. [O] des demandes réitérées de reprendre son travail.

Après convocation du salarié à un entretien préalable, la SAS lui a notifié par lettre recommandée du 12 septembre 2003 son licenciement pour faute grave d'absence injustifiée à son poste de travail.

Par ordonnance du 02 octobre 2003, la formation des référés du conseil de prud'hommes, saisie dès le 03 septembre 2003 à la requête de M. [O], a pris acte du paiement au salarié de 147,15 € de rappel de salaire et de 123,71 € au titre d'indemnité de congés payés et de repos compensateur lui restant dus.

Par requête du 07 mai 2007, M. [O] a présenté au conseil de prud'hommes une demande au fond tendant à obtenir de la SAS un autre rappel de salaire, des heures supplémentaires, des indemnités de repas, des indemnités pour repos compensateurs, des majorations pour les heures de nuit, une indemnité de précarité d'emploi, des dommages et intérêts pour rupture anticipée de contrat à durée déterminée, des dommages et intérêts pour travail dissimulé et une somme sur le fondement de l'article 700 du code procédure civile.

Par jugement du 24 novembre 2008, le Conseil de Prud'hommes a débouté le salarié de la plupart de ses chefs de demande, mais a condamné la SAS à lui payer :

- 212,99 € à titre d'indemnités de repas,

- 200,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 24 décembre 2008, le conseil de M. [O] a régulièrement relevé de ce jugement.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions écrites déposées au greffe le 10 novembre 2009, développées oralement à l'audience et auxquelles il est expressément fait référence, M. [O] demande à la Cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Manpower à lui payer la somme de 212,99 € à titre d'indemnité de repas,

- infirmer le jugement pour le surplus,

et, statuant à nouveau,

- dire et juger que la demande de paiement des arriérés de salaire, accessoire de salaire et des heures supplémentaires est recevable et bien fondée,

- dire et juger que la prise d'acte de rupture est imputable à la société Manpower,

- dire et juger que la société Manpower a intentionnellement dissimulé les nombre d'heures de travail effectué par lui,

en conséquence,

- condamner la société Manpower à lui payer les sommes suivantes :

* 1.600,20 € de juste dommages et intérêts pour rupture anticipée du contrat de travail,

* 6.934,35 € au titre du travail dissimulé,

* 906,78 € à titre de rappel de salaire,

* 105,50 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

* 448,77 € à titre d'indemnité de précarité,

* 968,98 € au titre des heures supplémentaires,

* 54,02 € au titre des majorations de salaire pour les heures de nuit,

* 212,99 € d'indemnité de repas,

* 80,01 € d'indemnité de repos compensateur,

- condamner la société Manpower à lui payer la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Manpower aux entiers dépens.

Il soutient qu'il a fourni les relevés de ses heures de travail effectuées au service de l'entreprise utilisatrice Prodirest et qu'il n'a pas reçu la rémunération correspondant à son temps de travail effectif ; qu'en application de l'article L 1251-18 du code du travail, en sa qualité d'entreprise de travail temporaire, la SAS employeur est

tenue de lui payer les heures de travail effectuées au service de l'entreprise utilisatrice du salarié ; que le salaire effectivement versé ne le rémunère pas pour l'ensemble des jours de la semaine de la période du 07 juillet au 17 août 2003 ; qu'ont été omises plusieurs majorations pour heures supplémentaires et pour heures de nuit ; que restent encore dues, outre les indemnités de repas, des indemnités de congés payés et des indemnités pour repos compensateurs non pris ; que la prise d'acte de la rupture, en raison du manquement de l'employeur à ses obligations, produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'à titre de dommages et intérêts pour rupture aux torts de l'employeur, la SAS lui doit une somme égale aux salaires à percevoir jusqu'au terme du contrat ; que lui sont également dues l'indemnité de précarité et l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

Par conclusions écrites parvenues au greffe le 08 janvier 2010, oralement exposées à la barre et auxquelles il est expressément fait référence, la SAS demande à la Cour de :

- confirmer que M. [O] a été intégralement rémunéré des heures qu'il a effectuées, conformément aux relevés d'heures établis par la société Prodirest,

- débouter M. [O] de ses diverses demandes de rappel de salaire et de congés payés,

- débouter M. [O] de son rappel d'indemnité de fin de mission,

- débouter M. [O] de sa demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

- constater que la prise d'acte de la rupture du contrat de mission de M. [O] produit les effets d'une démission,

- débouter M. [O] de sa demande de dommages et intérêts pour une rupture abusive de son contrat de mission,

par ailleurs, il est demandé à la Cour de réformer le jugement qui lui est déféré en ce qu'il l'a condamnée à verser à M. [O] la somme de 212,99 € à titre d'indemnité de repas,

- débouter M. [O] de sa demande d'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [O] à payer à la société Manpower France la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [O] aux dépens.

Elle fait valoir que, selon l'article L 1251-21 du code du travail, les conditions d'exécution du travail comprenant limitativement la durée du travail, le travail de nuit, le repos hebdomadaire et les jours fériés, la santé et la sécurité au travail, le travail des femmes, des enfants et des jeunes travailleurs, sont de la seule respon-sabilité de l'entreprise utilisatrice du travailleur temporaire et non de celle de l'entreprise de travail temporaire, juridiquement employeur du salarié ; qu'elle a rémunéré M. [O] en fonction des relevés d'heures transmis par l'entreprise utilisatrice de ce travailleur temporaire ; qu'il n'y a eu de sa part aucune intention de dissimuler ni le nombre d'heures effectives de travail de M. [O], ni le nombre d'indemnités journalières de repas auxquelles il avait droit ; qu'en l'absence de tout manquement de sa part aux obligations de l'employeur, la rupture du contrat de travail à l'initiative de M. [O] produit les effets d'une démission.

À l'audience, la Cour a invité les parties à présenter leurs observations sur l'éventuelle application d'office des dispositions de l'article L 1234-4 du code du travail relatives au remboursement des indemnités de chômage. Leurs conseils s'en sont rapporté à justice, n'étant pas contesté que l'entreprise employait habituellement plus de onze salariés à l'époque de la rupture.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'entreprise tenue responsable des conditions d'exécution du travail en matière de travail temporaire

Selon l'article L 1251-21 du code du travail, pendant la durée de la mission, l'entreprise utilisatrice est responsable des conditions d'exécution du travail, telles qu'elles sont déterminées par les dispositions légales et conventionnelles applicables au lieu de travail.

Pour l'application de ces dispositions, les conditions d'exécution du travail comprennent limitativement ce qui a trait :

1° À la durée du travail ;

2° Au travail de nuit ;

3° Aux repos hebdomadaires et aux jours fériés ;

4° À la santé et la sécurité au travail ;

5° Au travail des femmes, des enfants et des jeunes travailleurs.

Il résulte de cet article, comme l'ont exactement retenu les premiers juges, que la responsabilité des conditions d'exécution du travail temporaire n'incombait pas à la SAS mais à l'entreprise utilisatrice, la SNC Prodirest.

Dès lors que la SAS a rémunéré M. [O], en fonction des relevés transmis par l'entreprise utilisatrice, des heures de travail qu'il a effectuées de jour ou de nuit ainsi que des indemnités pour repos compensateurs auxquels a eu droit le salarié, elle n'a manqué envers ce dernier à aucune de ses obligations légales ou conven-tionnelles d'employeur.

En conséquence, la Cour confirme le jugement en ce qu'il a condamné la SAS à payer à M. [O] 212,99 € au titre d'indemnités de repas contractuellement dues et en ce qu'il a rejeté les chefs de la demande de M. [O] concernant le paiement de rappel de salaires au titre d'heures normales, d'heures supplémentaires, de majorations pour heures supplémentaires et pour heures de nuit, d'indemnités pour repos compensateur non pris, pour congés payés.

Sur l'imputabilité de la rupture

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.

Et la démission doit résulter de la volonté sérieuse, claire et non équivoque du salarié de rompre le contrat de travail.

En l'espèce, par sa lettre recommandée du 17 août 2003, M. [O] à mis fin au contrat de travail en invoquant des manquements de la SAS à ses obligations légales, conventionnelles et contractuelles d'employeur.

Toutefois, comme il vient d'être rappelé, la SAS n'a pas de responsabilité en matière de conditions d'exécution du travail temporaire et elle n'a donc méconnu aucune obligation concernant la durée du travail, le travail de nuit, les repos hebdomadaires ou les jours fériés.

En conséquence, la Cour confirme le jugement en ce qu'il a dit que la rupture du contrat de travail à l'initiative de M. [O] produisait les conséquences d'une démission.

Sur l'indemnité de fin de contrat (ou de précarité)

Selon l'alinéa premier de l'article L 1243-8 du code du travail, lorsque, à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salarie, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation.

Selon l'article L 1243-10 (4°) du même code, l'indemnité de fin de contrat n'est pas due en cas de rupture anticipée du contrat due à l'initiative du salarié, sa faute grave, ou en cas de force majeure.

En conséquence, la cour confirme le jugement en ce qu'il a débouté M. [O] de sa demande de paiement d'une indemnité de fin de contrat à durée déter-minée ou de précarité.

Sur l'indemnité pour travail dissimulé

Selon l'article L 8223-1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours en commettant une dissimulation d'emploi salarié en mentionnant intentionnellement sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, fait prévu par l'article L 8221-5 (2°), a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

En l'espèce, la responsabilité de la mention d'un nombre d'heures de travail critiqué par le salarié incombe à l'entreprise utilisatrice et non à l'entreprise de travail temporaire.

Dès lors que la SAS justifie avoir mentionné sur le bulletin de paie le nombre d'heures de travail relevé par l'entreprise utilisatrice, aucune intention de dissimuler le temps de travail effectif du salarié ne peut lui être imputée.

En conséquence la cour confirme le jugement en ce qu'il a rejeté le chef de la demande de M. [O] tendant à obtenir condamnation de la SAS à lui verser une indemnité forfaitaire de six mois de salarie pour travail dissimulé.

Sur les autres chefs de demande

M. [O] qui succombe pour le tout doit être condamné aux dépens d'appel.

Il n'apparaît pas inéquitable de confirmer le jugement en ce qu'il a alloué à M. [O] une somme pour la première instance sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et condamné la SAS aux dépens de première instance.

Pour l'appel, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

' confirme en toutes ses dispositions le jugement du Conseil de Prud'hommes de Bordeaux rendu le 24 novembre 2008,

' rejette tout autre chef de demande des parties, plus ample ou contraire au présent arrêt,

Y ajoutant :

' rejette les demandes de condamnation à verser, pour l'appel, une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamne M. [B] [O] aux dépens d'appel.

Signé par Madame Marie-Paule Descard-Mazabraud, Président, et par Madame Chantal Tamisier, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. Tamisier M-P Descard-Mazabraud


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 08/07561
Date de la décision : 15/06/2010

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°08/07561 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-06-15;08.07561 ?
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