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02/02/2010 | FRANCE | N°08/07150

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 02 février 2010, 08/07150


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 02 FÉVRIER 2010



(Rédacteur : Madame Marie-Paule Descard-Mazabraud, Président)

(PH)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 08/07150











Monsieur [H] [K]



c/



L'Association ADAIAQ-CFAI Aquitaine



La S.A.R.L. Groupement pour l'Industrie et les Métiers (G.I.M.)











Nature de la

décision : AU FOND













Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier ...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 02 FÉVRIER 2010

(Rédacteur : Madame Marie-Paule Descard-Mazabraud, Président)

(PH)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 08/07150

Monsieur [H] [K]

c/

L'Association ADAIAQ-CFAI Aquitaine

La S.A.R.L. Groupement pour l'Industrie et les Métiers (G.I.M.)

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 1er décembre 2008 (R.G. n° F 07/00495) par le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux, section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 04 décembre 2008,

APPELANT :

Monsieur [H] [K], né le [Date naissance 1] 1949, demeurant chez

Mme [F] [B] - [Adresse 4],

Représenté par Maître Florence Bachelet, avocat au barreau de Bordeaux,

INTIMÉES :

L'Association ADAIAQ-CFAI Aquitaine, prise en la personne de son Président M. [D], domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 2],

La S.A.R.L. Groupement pour l'Industrie et les Métiers (G.I.M.), prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 5],

Représentées par Maître Christophe Biais, avocat au barreau de Bordeaux,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 décembre 2009 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Paule Descard-Mazabraud, Président,

Madame Raphaëlle Duval-Arnould, Conseiller,

Monsieur Francis Tcherkez, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière.

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

M. [H] [K] a été engagé le 12 juillet 1977 comme animateur par l'organisme de formation AFIM 33 devenu AFPI Sud-Ouest.

Le 1er janvier 1990 il démissionnait de l'AFPI et était engagé par l'association ADAIAQ.

Le 1er avril 2003, il gardait son poste à l'ADAIAQ et était engagé par la société à responsabilité limitée Groupement pour l'Industrie et les Métiers.

Il était chargé de la structuration financière de l'AFPI Sud-Ouest.

Le 18 janvier 2006, ses deux employeurs lui notifiaient son licenciement pour faute grave. Il lui était reproché l'établissement d'une fausse facture.

Le 5 mars 2007, il a saisi le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux aux fins contester ces deux licenciements et demander à ses deux employeurs de lui verser des sommes à caractère indemnitaire, dans les termes suivants :

- à l'ADAIAQ

- 43.920,00 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

- 4.392,00 euros au titre des congés payés afférents

- 64.708,00 euros au titre de l'indemnité de licenciement

- 4.486,45 euros au titre de rappel de salaire

- 17.240,00 euros au titre de dommages-intérêts pour préjudice économique

- à la société GIM

- 6.678,00 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

- 667,80 euros au titre des congés payés afférents

- 2.226,00 euros au titre de l'indemnité de licenciement

- 5.440,00 euros au titre du préjudice économique.

Il demandait la condamnation solidaire de ses deux employeurs à 170.000 euros au titre du préjudice moral.

De leur côté, l'ADAIAQ et la société GIM demandaient que M. [K] soit débouté de toutes ses demandes et condamné à une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à des dommages-intérêts pour procédure abusive.

Par jugement en date du 1er décembre 2008, le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux, section Encadrement, a considéré que les faits reprochés à M. [K] avaient été reconnus par lui et que ces faits auraient pu avoir des conséquences graves pour les deux structures avec des retraits des conventions par l'Etat ou la Région.

Il a débouté M. [K] de ses demandes et l'a condamné à verser à chacune des parties une indemnité de 5.000 euros pour procédure abusive et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant de 1.000 euros.

M. [K] a régulièrement relevé appel du jugement.

Par conclusions développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, il maintient que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse et il reprend les demandes chiffrées formulées en première instance sauf à porter les dommages-intérêts pour préjudice économique à :

- 13.438 euros à la charge de la société GIM

- 71.612 euros à la charge de l'association ADAIAQ.

Par conclusions , développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, les deux employeurs demandent confirmation du jugement et formulent de nouvelles réclamations pour procédure abusive ainsi qu'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le conseil de M. [K] a été autorisé à déposer une note en délibéré sur les dernières pièces transmises par le GIM et l'ADAIAQ.

MOTIFS DE LA DECISION

Il ressort des documents et des explications des parties que M. [K] qui était formateur pour les métiers de l'industrie, a eu pour mission à partir de 1989 de monter un centre de formation des apprentis de l'Industrie géré par l'association pour le développement de l'apprentissage industriel en Aquitaine, ADAIAQ dont il est devenu directeur salarié.

Par la suite, va être créé le Groupement pour l'Industrie et les Métiers qui gèrera un certain nombre de services à la fois pour le centre de formation des apprentis et pour la formation continue adulte, M. [K] étant amené à travailler pour cette structure à raison d'un forfait de 55 jours par an, en qualité de directeur de la Formation Professionnelle.

Il avait pour mission de redresser la situation financière de l'association pour la Formation Professionnelle de l'Industrie, ce qu'il estime avoir réussi.

Après notification de mises à pied conservatoire, il a été l'objet de deux lettres de licenciement en date du 18 janvier 2006.

La lettre de licenciement adressée par le GIM dont les termes fixent les limites du litige est longuement motivée et reprend les éléments suivants :

il lui est reproché d'avoir ordonné le 14 décembre 2005, le paiement d'une facture de 14.950 euros par le centre de formation des apprentis au bénéfice de l'[3] correspondant à des prestations pour une durée de 70 heures datées du 6 juin 2005 au 12 octobre 2005, prestations faisant l'objet d'un dossier administratif de formation constitué par M. [U] incluant des états de présence présentant un caractère manifestement fictif.

Il était ajouté que M. [K] avait reconnu le caractère fictif de cette opération et qu'il entendait en assurer l'entière responsabilité.

L'employeur précisait que l'attention du GIM avait été attirée sur cette anomalie qui était susceptible de jeter le discrédit sur l'activité du centre de formation.

Il lui était reproché d'avoir fait établir une fausse facture pour un coût de 12.500 euros et d'avoir ainsi abusé de la mission de management général qui lui avait été confiée par l'AFPI Sud-Ouest.

Il lui était rappelé que cette prestation fictive avait été utilisée pour fausser le résultat prévisionnel de l'activité de l'AFPI Sud-Ouest.

La lettre de licenciement adressée par l'ADAIAQ à M. [K] dont les termes fixent les limites du litige, est longuement motivée et contient les éléments suivants :

il lui était reproché d'avoir ordonné le 14 décembre 2005, en sa qualité de directeur de CFAI le règlement d'une facture de 14.950 euros au bénéfice de l'AFPI. Sud-Ouest correspondant à des prestations fictives

il lui était reproché d'avoir usé et abusé de son autorité hiérarchique à l'égard de Mme [C] et d'avoir ainsi agi avec une intention dissimulatrice et à l'insu du service de l'ADAIAQ qui aurait du valider le dossier formation concerné.

il était mentionné qu'il déclarait reconnaître le caractère illicite des faits et assumer l'entière responsabilité de ces agissements.

L'employeur insistait sur le caractère dommageable et malveillant d'un tel acte.

Le motif de la rupture doit reposer sur des éléments matériellement vérifiables. En l'occurrence, il appartient à l'employeur, qui licencie pour faute grave, de rapporter la preuve de la réalité et de l'importance des griefs allégués telles qu'elles ne permettent pas le maintien du salarié dans l'entreprise.

Il ressort de ces deux lettres de licenciement que les deux employeurs de M. [K] lui reprochent un fait unique, à savoir d'avoir créé une facture corres-pondant à une prestation de formation fictive, qui devait être payée par l'ADAIAQ au profit de l'AFPI Sud-Ouest, structure dont M. [K] n'était pas le salarié mais auprès de laquelle il devait mettre en oeuvre des mesures de redressement économique.

Le GIM motivait son licenciement par l'entorse aux règles comptables et financières élémentaires qui lui portaient préjudice puisqu'il avait un rôle de prestataire de services et de contrôle sur ces diverses structures associatives en matière de formation, M. [K] ayant ainsi faussé les résultats prévisibles de l'AFPI Sud-Ouest et l'ADAIAQ faisait reproche à M. [K] d'avoir mis à sa charge des prestations qui n'étaient pas dues, ne correspondant à aucune prestation.

Le premier juge a mentionné plusieurs fois à l'appui de sa décision par laquelle il déboutait M. [K] de ses demandes que ce dernier avait reconnu la matérialité de ces agissements.

En cause d'appel, M. [K] conteste formellement avoir reconnu que cette facture était fictive. Il rappelle que par courrier en date du 8 mars 2006, valant contestation de son licenciement il a exposé qu'en réalité, une partie de la prestation de formation a été effectuée auprès de l'ADAIAQ mais qu'elle n'a pu être réalisée en totalité

Il prétend que cette prestation devait être réalisée par M. [U] qui devait accompagner et former Mme [C] et qu'elle a été effectuée en grande partie.

Il fait valoir que ces deux salariés avaient des responsabilités et qu'il ne peut être soutenu qu'ils lui étaient soumis sur le plan hiérarchique.

En dernier lieu, il fait valoir que cette facture n'a jamais été payée et il soutient qu'en réalité, il s'agit d'un montage destiné à trouver un prétexte à le licencier.

La facture litigieuse est produite aux débats et est à l'en-tête de l'AFPI avec pour mention ADAIAQ Optimisation des parcours et du contrôle de gestion associé.

Il ressort des éléments du dossier que cette facture a effectivement été bloquée par le service comptable dans la mesure où d'une part elle n'était pas inscrite dans le compte correspondant et d'autre part, son montant excédait le plan de formation de l'ADAIAQ.

Ont été versés aux débats deux compte-rendus d'entretien entre le directeur du GIM M. [T] et les deux salariés dont le nom figure dans les lettres de licenciement, M. [U] et Mme [C] dont il ressort que cette facturation ne correspond pas réellement à une action de formation, les deux salariés s'étant bornés à des échanges informels sur leurs pratiques professionnelles et qu'il s'agissait en réalité d'effectuer un transfert de fonds d'une structure vers l'autre.

D'ailleurs, M. [K] a lui même écrit le 4 janvier 2006 un texte ainsi rédigé :

'L'AFPI Sud-Ouest a émis le 15 novembre 2005, une facture d'un montant de 12.500 euros à l'intention de l'ADAIAQ, facture que j'ai fait mettre en règlement.

Cette facture est sans correspondance avec la réalité des prestations de formation ou de conseils.

J'ai pris cette initiative de mon propre chef ainsi que les consignes données à cet effet à mes collaborateurs et j'en assume donc l'entière responsabilité.'

Si M. [K] est par la suite revenu sur cette présentation des faits, en estimant qu'en réalité, la prestation existait bien mais qu'elle était incomplète, il n'a jamais pu donner une explication cohérente sur la raison qui l'avait guidée à écrire ce texte et s'il dit avoir été victime de pressions, il ne justifie d'aucune contrainte qui aurait pu l'inciter à le faire ayant attendu plus d'un an avant de saisir le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux.

En raison des éléments apportés, il y a lieu de constater que la réalité des faits, établissement d'une fausse facture sur une association est constitutive d'une faute grave, d'autant que M. [K] occupait un poste stratégique au coeur de cet ensemble d'associations et de sociétés et que les faits qui lui sont reprochés et qui n'ont pu être commis que parce qu'il exerçait des responsabilités dans plusieurs structures ne permettaient pas la poursuite du contrat de travail dans des conditions normales, même eu égard au passé professionnel sans tâche de l'intéressé.

Par de justes motifs que la Cour fait siens, le premier juge a à juste titre

considéré que le licenciement de M. [K] était fondé sur une faute grave et l'a débouté de l'ensemble de ses demandes. Le jugement sera confirmé sur ce point.

En revanche, il ne peut être considéré qu'un salarié cadre dans une structure depuis de longues années qui y a fait un parcours sans incidents antérieurs, ait une attitude fautive en saisissant le Conseil de Prud'hommes après un licenciement pour faute grave.

La condamnation de M. [K] à une indemnité pour procédure abusive en première instance sera réformée, car sans fondement.

De même l'équité commande de ne pas allouer d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ni en première instance ni en appel et le jugement sera également réformé sur ce point.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

' réforme partiellement le jugement déféré en ce qu'il a condamné M. [K]

à une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à des dommages-intérêts pour procédure abusive,

et statuant à nouveau :

' déboute le GIM et l'ADAIAQ de leurs demandes de ce chef,

' confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions,

' dit n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' dit que les dépens de la procédure d'appel seront à la charge de M. [K].

Signé par Madame Marie-Paule Descard-Mazabraud, Président, et par Madame Françoise Atchoarena, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

F. Atchoarena M-P Descard-Mazabraud


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 08/07150
Date de la décision : 02/02/2010

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°08/07150 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-02-02;08.07150 ?
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