La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/01/2010 | FRANCE | N°09/04758

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale-section a, 26 janvier 2010, 09/04758


COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CHAMBRE SOCIALE-SECTION A
--------------------------
ARRÊT DU : 26 JANVIER 2010
(Rédacteur : Madame Raphaëlle Duval-Arnould, Conseiller) (PH)

PRUD'HOMMES
No de rôle : 09/ 04758
La S. A. S. Isoa
c/
Madame Naïma X... épouse Y...
La Société Entreprise de Nettoyage T. N. S.

Nature de la décision : AU FOND-CONTREDIT JONCTION des no 09/ 04758 et 09/ 04759

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :
La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéd

er par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :
Déc...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CHAMBRE SOCIALE-SECTION A
--------------------------
ARRÊT DU : 26 JANVIER 2010
(Rédacteur : Madame Raphaëlle Duval-Arnould, Conseiller) (PH)

PRUD'HOMMES
No de rôle : 09/ 04758
La S. A. S. Isoa
c/
Madame Naïma X... épouse Y...
La Société Entreprise de Nettoyage T. N. S.

Nature de la décision : AU FOND-CONTREDIT JONCTION des no 09/ 04758 et 09/ 04759

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :
La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 23 juillet 2009 (R. G. no F 08/ 00323) par le Conseil de Prud'hommes de Périgueux, section Commerce, suivant déclaration d'appel du 03 août 2009 et déclaration de contredit du 03 août 2009,
APPELANTE et DEMANDERESSE AU CONTREDIT :
La S. A. R. L. Isoa, prise en la personne de son Président Monsieur Salvatore Z..., domicilié en cette qualité au siège social, 2, rue Alfred Nobel, Z. A. E. le Landry 2-24759 Boulazac cédex,

Représentée par Monsieur Grégory Chatynski, salarié de la S. A. S. Isoa, muni d'un pouvoir spécial,
INTIMÉES et DEFENDERESSES AU CONTREDIT :
Madame Naïma X... épouse Y..., née le 1er janvier 1965 à Ma Ain Djemaa (Maroc), de nationalité Marocaine, profession agent d'entretien, demeurant ...
Représentée par Maître Marie-Claude Plisson, avocat au barreau de Périgueux,
La Société Entreprise de Nettoyage T. N. S, prise en la personne de sa représentante légale Madame Hélène B..., domicilié en cette qualité au siège social, Plateau de Pinsac-24330 Bassillac,
Représentée par Maître Alexandre Lemercier, avocat au barreau de Périgueux,
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 07 décembre 2009 en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Marie-Paule Descard-Mazabraud, Président,
Madame Raphaëlle Duval-Arnould, Conseiller,
Monsieur Francis Tcherkez, Conseiller,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Françoise Atchoarena.
ARRÊT :
- contradictoire
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Le 27 novembre 2008, Mme Naïma X..., épouse Y... a saisi le Conseil de Prud'hommes de Périgueux, section commerce, pour obtenir notamment l'annulation d'un accord de rupture pour vice du consentement et la condamnation solidaire de ses employeurs successifs, la S. A. S. Isoa et Mme Hélène B..., entreprise de nettoyage à l'enseigne T. N. S, en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnités de rupture.

A l'audience de conciliation du 12 janvier 2009, la S. A. S. Isoa a demandé que le dossier soit renvoyé devant le Conseil de Prud'hommes de Limoges, exposant qu'elle entendait assurer sa défense, représentée par son secrétaire général et directeur des ressources humaines, M. François C..., qui est également conseiller prud'homme employeur à la section encadrement du Conseil de Prud'hommes de Périgueux.
Le bureau de conciliation a, avant tentative de conciliation, renvoyé l'incident devant le bureau de jugement pour compétence par ordonnance du 19 janvier 2009.
Par jugement en date du 26 mai 2009, le Conseil de Prud'hommes de Périgueux sous la présidence du juge départiteur a considéré que M. C... n'était pas le représentant légal de la société, qu'il n'a pas la qualité de partie au procès et n'a aucun intérêt personnel au litige, que l'article 47 du Code de Procédure Civile n'est pas applicable, ni l'article 6-3 de la CEDH qui concerne le procès pénal, que la société ne peut priver la partie adverse de son juge naturel et légitime en lui imposant un changement de juridiction. Il a débouté la S. A. S. Isoa de sa demande, l'a invitée à changer de défenseur et renvoyé la procédure pour convocation devant le bureau de conciliation.
Le jugement ayant été notifié le 28 juillet 2009, la S. A. S. Isoa a formé contredit reçu au greffe le 5 août 2009 et appel du jugement le 3 août 2009 enregistrés au greffe de la Cour sous les numéros 09/ 04758 et 09/ 04759.
Par conclusions développées oralement auxquelles il est fait expressément référence, la S. A. S. Isoa demande de réformer le jugement, de renvoyer l'affaire devant le Conseil de Prud'hommes de Limoges, juridiction limitrophe, subsidiairement devant tout autre Conseil de Prud'hommes hors du ressort de la Cour d'appel de Bordeaux.
Entendue en ses observations au soutien de ses conclusions auxquelles il est fait expressément référence, Mme B... s'associe à la demande de renvoi du dossier devant le Conseil de Prud'hommes de Limoges.
Entendue en ses observations au soutien de ses conclusions auxquelles il est fait expressément référence, Mme Naïma X..., épouse Y... demande de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, de renvoyer l'affaire devant le bureau de conciliation du Conseil de Prud'hommes de Périgueux et de condamner la S. A. S. Isoa à lui payer les sommes de 2. 000 € à titre de dommages-intérêts et de 2. 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi que de déclarer l'arrêt commun et opposable à Mme B....
Pour plus ample exposé des circonstances de fait, de la procédure et des prétentions des parties, il convient de se référer au jugement déféré et aux conclusions des parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Dans l'intérêt d'une bonne administration de la Justice, il convient de joindre les deux procédures susvisées, dès lors que la S. A. S. Isoa a formé à la fois contredit et appel du jugement déféré, lesquels sont réguliers et recevables en la forme.
Invoquant les dispositions des articles 6-1 et 6-3 c de la CEDH, l'article 47 du Code de Procédure Civile et l'article L. 1453-2 du Code du Travail, la S. A. S. Isoa expose qu'elle entend faire assurer sa défense dans le présent litige par son secrétaire général et directeur des ressources humaines, M. C..., ne pouvant être privée, sans nécessité suffisante, du droit du libre choix de son défenseur, que M. C... est conseiller prud'homme au Conseil de Prud'hommes de Périgueux, section encadrement, collège employeur, président de sa section pour année 2009, qu'à ce titre, il lui est impossible de représenter la S. A. S. Isoa devant l'ensemble du Conseil de Prud'hommes de Périgueux.
Soulevant l'irrecevabilité du contredit, l'article 47 du Code de Procédure Civile n'étant pas applicable, Mme Y... réplique que la S. A. S. Isoa n'a donné un pouvoir de représentation en justice à M. C... que dans le but d'écarter la juridiction de Périgueux, qu'elle invoque à tort les dispositions de l'article 6-3 de la CEDH qui ne vise que le procès pénal, que la liberté de choisir son défenseur s'arrête lorsqu'il existe un conflit d'intérêt entre les parties.
Il n'est pas discuté, d'une part, que M. C... a la qualité de salarié de la S. A. S. Isoa, aux fonctions susvisées, sans détenir de mandat social, et qu'il n'est pas le représentant légal de la société, que son intervention dans la présente instance se situe sur la délégation de pouvoir que la S. A. S. Isoa, son employeur, lui a remise pour la représenter devant la juridiction prud'homale, que, d'autre part, en sa qualité de conseiller prud'homme, président de section, il ne peut, en application des articles L. 1453-2 et L. 1453-3 du Code du Travail, exercer une mission d'assistance ou de représentation devant le Conseil de Prud'hommes de Périgueux.
En premier lieu, aux termes de l'article 47 du Code de Procédure Civile, lorsqu'un magistrat ou un auxiliaire de justice est partie à un litige qui relève de la compétence d'une juridiction dans le ressort de laquelle celui-ci exerce ses fonctions, le demandeur peut saisir une juridiction située dans un ressort limitrophe. La même faculté appartient au défendeur.
Or, M. C... n'est pas partie au litige opposant la S. A. S. Isoa à Mme Y..., alors que, lui-même salarié de la société, il a reçu de son employeur délégation de pouvoir de le représenter afin de présenter ses moyens de défense dans le litige l'opposant à Mme Y.... Il n'a, dès lors, pas non plus, la qualité de défenseur de la société, mais en est son représentant devant la juridiction conformément aux dispositions de l'article R. 1453-2 1o du Code du Travail.
Il s'ensuit que les dispositions de l'article 47 du Code de Procédure Civile ne sont pas applicables en l'espèce et que le contredit est irrecevable, la voie de l'appel étant seule ouverte.
En second lieu, aux termes de l'article 6. 1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un Tribunal indépendant et impartial. Cette exigence implique qu'un conseiller prud'homme n'exerce pas de mission d'assistance ou de mandat de représentation devant le Conseil des Prud'hommes dont il est membre.

Dès lors que M. C... est mandaté par son employeur pour le représenter, soit par la S. A. S. Isoa qui entend se défendre elle-même, ce qui est son droit, qu'il a, en outre, en sa qualité de directeur des ressources humaines, signé certains actes dont l'acte de rupture litigieux, le Conseil de Prud'hommes de Périgueux ne saurait donc en toute impartialité et indépendance statuer dans ce litige, ce que consacre également l'article L. 1453-2 du Code du Travail en faisant interdiction aux conseillers prud'hommes de représenter les parties devant la section à laquelle ils appartiennent.

Il s'ensuit que le Conseil de Prud'hommes de Périgueux ne peut juger du présent litige pour ces raisons. En effet, il ne saurait être fait obligation à une partie de changer de défenseur, comme le premier juge a invité la S. A. S. Isoa à le faire, dès lors que l'article 19 du Code de Procédure Civile dispose que les parties choisissent librement leur défenseur soit pour se faire représenter, soit pour se faire assister suivant ce que la loi permet ou ordonne.
Il convient, par ailleurs, d'observer que si l'article 6-3 de la CEDH est applicable au procès pénal dont les règles de procédure sont quelque peu différentes de celles de procédure civile, la liberté du choix du défenseur est un principe qu'il appartient au juge de faire respecter. En l'espèce, Mme Y... n'invoque pas d'élément suffisant justifiant d'un intérêt supérieur qui viendrait en conflit, le juge naturel étant en la matière la juridiction prud'homale, seule étant en cause la localisation du Conseil de Prud'hommes compétent.
Or, dès lors que M. C... n'est pas personnellement partie au litige, le choix demandé du Conseil de Prud'hommes de Limoges situé hors ressort de la Cour d'appel ne se justifie pas. Il convient, dans ces conditions, réformant le jugement, de désigner le Conseil de Prud'hommes de Bergerac, juridiction prud'homale limitrophe la plus proche de Périgueux.
Dès lors qu'il a été partiellement été fait droit à la demande de la S. A. S. Isoa, l'attitude de celle-ci ne saurait être considérée comme dilatoire, n'ayant fait qu'user d'un droit. La demande de dommages-intérêts de Mme Y... doit donc être rejetée.
Les dépens du présent appel doivent suivre le sort de ceux de l'instance au fond. Toutefois, il convient d'accorder à Mme Y... une indemnité pour participation à ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Sur l'appel et sur le contredit de la S. A. S. Isoa contre le jugement du Conseil de Prud'hommes de Bordeaux en date du 26 mai 2009,

ordonne la jonction des procédures numéros 09/ 04758 et 09/ 04759,
déclare le contredit irrecevable au fond,
reçoit la S. A. S. Isoa en son appel,
réforme le jugement,
et statuant à nouveau :
renvoie le dossier de la procédure devant le Conseil de Prud'hommes de Bergerac, section commerce,
déboute Mme Y... de sa demande de dommages-intérêts,
condamne la S. A. S. Isoa à payer à Mme Naïma X..., épouse Y... la somme de 500 € (cinq cents euros) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
dit que les dépens du présent appel suivront le sort des dépens de l'instance au fond.
Signé par Madame Marie-Paule Descard-Mazabraud, Président, et par Madame Françoise Atchoarena, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

F. Atchoarena M-P Descard-Mazabraud


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale-section a
Numéro d'arrêt : 09/04758
Date de la décision : 26/01/2010
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2010-01-26;09.04758 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award