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19/01/2010 | FRANCE | N°08/06651

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 19 janvier 2010, 08/06651


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 19 JANVIER 2010



(Rédacteur : Monsieur Francis Tcherkez, Conseiller)

(fg)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 08/06651











Monsieur [K] [U]



c/



La Caisse Régionale d'Assurance Maladie d'Aquitaine













Nature de la décision : AU FOND













Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :





Décision déf...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 19 JANVIER 2010

(Rédacteur : Monsieur Francis Tcherkez, Conseiller)

(fg)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 08/06651

Monsieur [K] [U]

c/

La Caisse Régionale d'Assurance Maladie d'Aquitaine

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 octobre 2008 (R.G. n° F 07/00963) par le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux, section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 13 novembre 2008,

APPELANT :

Monsieur [K] [U], né le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 4], de

nationalité Française, sans emploi, demeurant [Adresse 2],

Représenté par Maître Dominique Bouisson, avocat au barreau de Bordeaux,

INTIMÉE :

La Caisse Régionale d'Assurance Maladie d'Aquitaine, prise en la personne de son Directeur, domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 3],

Représentée par Maître Bertrand Favreau, avocat au barreau de Bordeaux,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 24 novembre 2009 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Paule Descard-Mazabraud, Président,

Madame Raphaëlle Duval-Arnould, Conseiller,

Monsieur Francis Tcherkez, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière.

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

M. [K] [U] est salarié depuis le 1er décembre 1978 de la CRAMA (caisse régionale d'assurance maladie d'Aquitaine) en qualité d'animateur de formation ;

A sa demande il a été placé en congé sabbatique à compter du 1er janvier 2005 ; après modification de la durée de ce congé, l'intéressé était prévu pour rejoindre l'entreprise le 1er mars 2006 ;

Ceci étant, il a repris le poste auquel il devait être affecté car il a estimé devoir reprendre le précédent qu'il avait quitté lors de sa demande de congés ;

L'employeur, après différentes négociations, sur le dernier refus opposé par l'intéressé a décidé de le licencier pour faute grave, il a saisi le conseil de discipline qui a donné un avis favorable et sur l'avis de ce dernier a prononcé ledit licenciement, par décision du 28 juillet 2006, au motif essentiel reproché au salarié d'avoir de manière réitérée, refusé d'effectuer toute activité depuis le 1er mars 2006, son comportement portant un préjudice grave au fonctionnement du service.

M. [U] a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux le 2 mai 2007 contestant ce licenciement et sollicitant des dommages intérêts à hauteur de 75 600euros, 54 600 euros d'indemnité de licenciement outre indemnités subséquentes au licenciement et des dommages intérêts pour préjudice moral de 500 euros ;

Il estime en effet que l'affectation en question était irrégulière au sens des dispositions de la convention collective (article 35 et 40).

***

Le conseil de prud'hommes par décision du 13 octobre 2008 a estimé que la procédure était régulière (respect notamment de l'article L. 3142 - 95 du code du travail) et que l'intéressé n'ayant fourni aucun travail depuis le 1er mars 2006 jusqu'en juillet 2006, le licenciement était justifié.

Régulièrement appelant, M. [U] reprend ses demandes initiales sauf à élever à 2 500 euros le montant des dommages intérêts fondé sur l'article 1 382 du code civil.

La CRAMA conclut à la confirmation du jugement entrepris estimant contrairement aux affirmations de l'intéressé, que la procédure suivie a été régulière et que le salarié n'a fait l'objet d'aucune discrimination.

Motifs de la décision :

Pour la clarté de l'analyse qui va suivre les articles de la convention collective liant les parties, invoqués, par M. [U], et sur l'interprétation desquels lesdites parties s'opposent, sont reproduites ci-après 'in extenso' :

'Article 40 :

Compte tenu des nécessités du service et à titre exceptionnel, le directeur peut accorder un congé sans solde d'une durée maximale d'un an ;

Ce congé peut être de 3 années au maximum dans le cas des agents qui sont chargés d'une mission de longue durée dans une organisation internationale, dans un pays étranger ou qui désirent contracter un engagement de servir dans les organismes sociaux des territoires français d'outre mer ou des états indépendants placés antérieurement sous la souveraineté, la tutelle ou le protectorat de la France.

A l'expiration du congé prévu à l'alinéa précédent, les agents servant dans les territoires français d'outre mer pourront, sur leur demande, obtenir une prolongation de 2 ans.

Ce congé peur être accordé, pour toute la durée de leur détachement, aux agents détachés dans un emploi dans un des organismes visés par l'article 1er de l'ordonnance n° 67 - 706 du 21 août 1967 ou au centre d'études supérieures de la sécurité sociale ou au centre de sécurité sociale des travailleurs migrants.

Dans les limites des délais ci-dessus, les agents bénéficiaires d'un congé sans solde resteront inscrits à l'effectif du personnel de leur organisme d'origine. Ils seront, à leur demande, réintégrés de plein droit dans ledit organisme.

Ils conserveront le bénéfice du coefficient qu'ils avaient au moment de leur départ et du traitement correspondant.

Les dispositions de la convention collective ne sont pas applicables aux agents bénéficiaires d'un congé sans solde, pendant la durée de ce congé, sous réserve toutefois des dispositions particulières.

Article 35 :

Tout agent appelé à effectuer un remplacement pour une période supérieure à un mois dans un emploi supérieur au sien perçoit, à dater de son entrée en fonction, une indemnité égale à la différence entre sa rémunération réelle et celle qu'il obtiendrait s'il avait été immédiatement titularisé dans sa nouvelle fonction.

La délégation temporaire dans un emploi supérieur ne pourra dépasser 6 mois dans une période d'un an de date à date, qu'elle soit effectuée en une ou plusieurs fois.

A l'expiration de ce délai, l'agent sera replacé dans ses anciennes fonctions ou sera l'objet d'une promotion définitive.

Toutefois, cette dernière mesure ne s'applique pas lors du remplacement des agents absents pour l'un des motifs suivants :

. article '40", 42, 44,46 et 47 de la présente convention ;

. article 43 dans la mesure où l'invalidité ne dépasse par 3 ans ;

. travail à temps partiel, y compris dans le cas où l'agent effectue plusieurs remplacements simultanés dans des emplois supérieurs au sien ;

. stage de formation professionnelle et de perfectionnement.

Dans les cas visés ci-dessus, au retour du titulaire du poste, l'agent qui a été délégué dans un emploi supérieur sera replacé dans sa fonction. Il occupera le premier emploi vacant correspondant à sa qualification professionnelle.

Pendant la durée de sa délégation, le remplaçant concourra normalement aux points de compétence dans son emploi ou à promotion dans un emploi supérieur.'

***

En regard de ces textes, il est exact, comme le relève M. [U] que dans le cadre de l'interprétation des conventions, telles que définies aux articles ll56 et suivants du code civil, en l'espèce applicables, les dispositions relatives au retour du salarié, dans son emploi doivent être analysées avec cohérence, laquelle se déduit de la lecture des textes applicables en regard de la situation considérée.

En effet, le visa de l'article 40 de la convention pour définir le statut du remplaçant (article 35) de la personne placée en congé sabbatique démontre à l'évidence que le remplaçant n'a aucune vocation à rester dans le poste qui lui a été attribué en remplacement d'un titulaire absent, lors du retour du titulaire dudit poste.

Par voie de conséquence, le maintien du remplaçant (en la circonstance, il s'agit d'une remplaçante) comme le souhaite la CRAMA dans ledit poste est contraire aux termes mêmes de la convention. Il se déduit naturellement et nécessairement de cette disposition, qu'elle a été retenue par la convention pour permettre au titulaire du poste de retrouver les fonctions qu'il occupait avant son absence légitime puisqu'elle prévoit les modalités de l'éviction de la remplaçante en considération du retour du titulaire du poste. Ces dispositions claires et destinées à l'efficacité de la résolution des situations en cause ne peuvent être autrement interprétées en considération des articles du droit positif susvisés et de l'article 1134 du code civil qui oblige l'exécution des conventions dans la bonne foi.

C'est à tort que le premier juge s'est placé dans l'application des dispositions de l'article L 3142-95 du code du travail qui prévoit le retour d'un salaire à l'issue d'un congé sabbatique dans l'entreprise à conditions égales à celles détenues avant son départ sans autre précision ;

Car en l'espèce, ce sont les dispositions de la convention collective qui s'appliquent et qui, par définition légale (article L. 2251-1 du code du travail), peuvent comporter des stipulations plus favorables aux salariés comme dans le cas d'espèce ;

Dès lors en considération des éléments du litige et des pièces versées aux débats, il se déduit que les règles à appliquer en l'espèce conduisaient tout naturellement à permettre à M. [U], comme il le soutient, à juste raison, de retrouver son poste ; le congé sabbatique institué par le législateur et précisé par le droit conventionnel, n'ayant pas vocation à permettre l'éviction d'un salarié de son emploi tel qu'il le détenait auparavant ;

l'intéressé aurait donc du retrouver son poste, la convention étant instituée sur ce point particulier pour éviter que le salarié soit à la merci de son employeur au retour d'un congé sabbatique ;

Ce point étant acquis, reste à analyser les éléments objectifs de la situation telle qu'elle est soumise à la cour.

Il s'établit que M. [U] était certes justifié à revendiquer une situation déterminée, mais il est constant que l'intéressé s'est muré dans une attitude négative et ne s'est pas mis à la disposition de l'employeur, ce qui est le corollaire des règles imposées à ce dernier dans le cadre d'une relation contractuelle ;

M. [U] s'est refusé à effectuer tout travail, sans attendre la résolution du litige dont la présente instance permet de relever les possibles difficultés d'interprétation;

L'intéressé s'est donc placé dans une situation d'insubordination qui est incompatible avec ses obligations naturelles de l'exécution de la relation contractuelle au plan fondamental.

Cette situation constitue pour le moins une cause réelle et sérieuse de rupture aux torts du salarié.

Le licenciement dont il a fait l'objet est donc justifié.

Ceci étant en considération de la nécessaire immédiateté de l'exclusion du salarié de l'entreprise qui conditionne un licenciement pour faute grave, l'attitude de l'employeur, qui a tergiversé, conduit à écarter la qualification de faute grave au sens que la loi attribue à un licenciement prononcé à ce titre.

Sur les conséquences :

Des observations qui précèdent, il s'établit que les demandes de M. [U] doivent être écartées en ce qu'elles soutiennent que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;

Dès lors, lesdites demandes en ce qu'elles portent sur les indemnités réclamées en considération de la situation alléguée et rejetée par la cour doivent être écartées ; observations étant faite que l'intéressé n'ayant pas effectué son préavis de son propre fait ne peut en solliciter le règlement.

M. [U] compte tenu de sa propre attitude ne peut demander des dommages intérêts pour préjudice moral qu'il n'établit d'ailleurs pas en lien de causalité directe.

Le calcul effectué sur l'indemnité conventionnelle de licenciement en application de l'article 55 de la convention collective n'est pas discuté en tant que tel, par l'intimée;

son règlement à hauteur de 54 600 euros n'est donc pas contesté et la demande de voir ce poste indemnitaire consacré par la cour sera donc retenu - en deniers ou quittances - à raison de l'imprécision des parties sur l'exécution de cette disposition conventionnelle.

La solution du litige étant dégagée, il n'y a lieu de statuer en surplus les demandes complémentaires des parties seront donc rejetées ;

Une allocation fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile n'est pas en l'espèce équitable ;

Chacune des parties succombe sur des demandes portant sur le fond du droit ; elles supporteront donc chacune la charge des dépens de première instance et d'appel par elle engagés.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant sur l'appel principal de M. [K] [U] et sur l'appel incident de la caisse régionale d'assurance maladie d'Aquitaine (CRAMA) ;

Réforme la décision entreprise,

Et statuant à nouveau,

Dit toutefois que le licenciement de M. [K] [U] est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

Dit que l'intéressé au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement est créancier de son employeur à hauteur de la somme de 54 600 euros (cinquante quatre mille six cents euros) ; en tant que de besoin, condamne la CRAMA à payer à M. [K] [U] ladite somme en deniers ou quittances valables ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Dit que chacune des parties supportera la charge des dépens de première instance et d'appel par elle engagés.

Signé par Madame Marie-Paule Descard-Mazabraud, Président, et par Madame Françoise Atchoarena, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

F. Atchoarena M-P Descard-Mazabraud


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 08/06651
Date de la décision : 19/01/2010

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°08/06651 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-01-19;08.06651 ?
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