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29/10/2008 | FRANCE | N°05/05992

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0045, 29 octobre 2008, 05/05992


CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
--------------------------
ARRÊT DU : 29 octobre 2008
(Rédacteur : Monsieur Bernard LAGRIFFOUL)
IT
No de rôle : 05 / 05992
Madame Barbara X... épouse Y... (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2005 / 015539 du 06 / 10 / 2005 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)

c /
L'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG AQUITAINE-LIMOUSIN LA CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU VAR

COMPAGNIE AXA COURTAGE Madame Bénédicte Z... veuve A... Monsieur Mathieu A... Madame Lucie A... épouse B... Mademoisel

le Claire A... Monsieur Dominique A... Mademoiselle Clémence A...

Nature de la décision : ...

CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
--------------------------
ARRÊT DU : 29 octobre 2008
(Rédacteur : Monsieur Bernard LAGRIFFOUL)
IT
No de rôle : 05 / 05992
Madame Barbara X... épouse Y... (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2005 / 015539 du 06 / 10 / 2005 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)

c /
L'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG AQUITAINE-LIMOUSIN LA CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU VAR

COMPAGNIE AXA COURTAGE Madame Bénédicte Z... veuve A... Monsieur Mathieu A... Madame Lucie A... épouse B... Mademoiselle Claire A... Monsieur Dominique A... Mademoiselle Clémence A...

Nature de la décision : EXPERTISE
Grosse délivrée le :
aux avouésDécision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 janvier 2001 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 09 février 2001
APPELANTE :
Madame Barbara X... épouse Y... née le 07 Novembre 1962 à PARIS de nationalité française demeurant... SUR YEVRE

Représentée par la SCP GAUTIER et FONROUGE, avoués à la Cour assistée de Maître Raymond BLET avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉS :
L'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG AQUITAINE-LIMOUSIN agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, place Amélie Raba Léon 33000 BORDEAUX
Représenté par la SCP FOURNIER, avoués à la Cour assisté de Maître MICHAUD de la SCP MICHAUD-RAVAUT avocats au barreau de BORDEAUX
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU VAR agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, rue Emile Ollivier ZUP LA RODE 83082 TOULON CEDEX
Représentée par la SCP Luc BOYREAU et Raphael MONROUX, avoués à la Cour assistée de la SCP FAVREAU et CIVILISE, avocats au barreau de BORDEAUX

INTERVENANTS :
COMPAGNIE AXA COURTAGE prise en la personne de son représentant légal dont le siège social est 25 Quai des Chartrons BP 540 33005 BORDEAUX CEDEX

Madame Bénédicte Z... veuve A... agissant en qualité d'héritière de Monsieur Lucien A... née le 18 Mai 1948 à CAUDERAN de nationalité française demeurant...

Monsieur Mathieu A... agissant en qualité d'héritier de Monsieur Lucien A... né le 16 Juillet 1977 à BORDEAUX (33000) de nationalité française demeurant...

Madame Lucie A... épouse B... agissant en qualité d'héritière de Monsieur Lucien A... née le 15 Décembre 1978 à BORDEAUX (33000) de nationalité française demeurant... CANADA

Mademoiselle Claire A... agissant en qualité d'héritière de Monsieur Lucien A... née le 02 Août 1982 à BORDEAUX (33000) de nationalité française demeurant ...

Monsieur Dominique A... agissant en qualité d'héritier de Monsieur Lucien A... né le 28 Juillet 1984 à BORDEAUX (33000) de nationalité française demeurant...

Mademoiselle Clémence A... agissant en qualité d'héritière de Monsieur Lucien A... née le 09 Juin 1987 à BORDEAUX (33000) de nationalité française demeurant...

Représentés par la SCP CASTEJA-CLERMONTEL et A..., avoués à la Cour assistés de Maître VIGNES loco de Maître LACAZE avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 10 septembre 2008 en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Robert MIORI, Président, Monsieur Bernard LAGRIFFOUL, Conseiller, Madame Danièle BOWIE, Conseiller,

qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT
ARRÊT :
- contradictoire
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile. FAITS ET PROCEDURE :

Madame Barbara Y... a été hospitalisée du 20 au 23 juillet1988 dans le service du docteur I... pour une suspicion de grossesse extra-utérine.
Le 2 août 1988, elle a consulté le docteur A..., gynécologue, qui a infirmé ce diagnostic.
De fortes douleurs étant réapparues du 28 au 29 août 1988, une laparotomie a dû être effectuée en urgence par le docteur A... et le docteur J... pour grossesse extra-utérine rompue. Un hémopéritoine d'environ deux litres a été découvert et évacué lors de cette intervention et a nécessité le transfert en urgence de la malade à l'hôpital Pellegrin, où elle a été de nouveau transfusée.
Par la suite, un diagnostic d'hépatite C a été établi en 1992.
Postérieurement aux interventions de 1988, sont apparus de nombreuses adhérences dans la cavité abdominale et des kystes ovariens qui ont nécessité plusieurs opérations.
Par ordonnance du 8 juillet 1996, le juge des référés a désigné les docteurs L... et M... en qualité d'experts. Ceux-ci ont établi un pré-rapport le 7 avril 1997 et leur rapport définitif le 20 novembre 1997.
Par acte d'huissier en date du 21 octobre 1998, Madame Y... a fait assigner devant le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX le docteur A..., son assureur l'UAP et le CRTS de BORDEAUX pour voir :
- retenir la responsabilité du docteur A... pour les dommages causés dans le domaine gynécologique,- retenir les responsabilités solidaires du Centre Régional de Transfusion Sanguine (CRTS) et du docteur A... en ce qui concerne les conséquences de l'hépatite C résultant selon elle des transfusions reçues et rendues nécessaires par la faute du praticien.

Madame Y... a également appelé dans la cause les Caisses Primaires d'Assurance Maladie de la Gironde et du Var, mais seule cette dernière a constitué avocat.
Le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX a, par jugement en date du 9 janvier 2001 :
- déclaré le docteur A... entièrement responsable des conséquences de l'intervention gynécologique pratiquée sur la personne de Madame Y... ;
- condamné in solidum le docteur A... et la Compagnie AXA COURTAGE, venant aux droits de l'UAP, à payer à Madame Y... la somme de 150. 000 F en réparation de son préjudice,
- débouté Madame Y... de ses demandes en ce qui concerne sa contamination par le virus de l'hépatite C,
- débouté les Caisses Primaires d'Assurance Maladie de la Gironde et du Var de leurs demandes,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné in solidum le docteur A... et la Compagnie AXA COURTAGE à payer à Madame Y... la somme de 4. 000 F sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Madame Barbara X..., épouse Y..., a interjeté appel par déclaration en date du 9 février 2001 ;
Cette Cour a, par arrêt avant-dire-droit prononcé le 23 mars 2004, ordonné une nouvelle expertise médicale de Madame Y... ;
Une ordonnance en remplacement d'expert est intervenue en date du 23 mars 2006 ;
Madame Bénédicte Z..., veuve de Monsieur Lucien A..., Monsieur. Matthieu A..., Madame Lucie A..., épouse B..., Mademoiselle Claire A..., Monsieur Dominique A... et Mademoiselle Clémence A..., agissant en qualité d'héritiers de Monsieur Lucien A... décédé le 11 février 2007, ont signifié le 12 juin 2007 un acte de reprise d'instance après décès ;
Le professeur Bernard K... a déposé son rapport d'expertise le 9 août 2007 ;
Madame Y..., appelante, a signifié et déposé le 24 octobre 2007 ses conclusions récapitulatives No 3 ;
L'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG, intimé, a signifié et déposé ses conclusions le 22 novembre 2007 ;
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Var, intimée, a signifié et déposé ses conclusions le 9 janvier 2008 ;
La Compagnie AXA COURTAGE SA., Madame Bénédicte Z..., veuve de Monsieur Lucien A..., Monsieur Matthieu A..., Madame Lucie A..., épouse de Monsieur Patrice B..., Mademoiselle Claire A..., Monsieur Dominique A... et Mademoiselle Clémence A..., intimés, ont signifié et déposé leurs conclusions le 25 juillet 2008 ;
L'ordonnance de clôture est intervenue en date du 27 août 2008 ;
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Madame Y..., appelante, conclut à l'infirmation du jugement déféré et à l'application de l'article 102 de la loi du 4 mars 2002. Elle demande en conséquence la condamnation de l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG AQUITAINE LIMOUSIN, qui vient aux droits du CRTS de BORDEAUX, à lui payer sur le fondement des articles 1157 et 1147 et suivants du code civil les sommes de :
-68. 602, 06 € au titre du préjudice spécifique de contamination,-30. 000 € au titre du préjudice d'agrément,-15. 000 € au titre de l'IPP,-4. 573, 47 € au titre de l'ITT,-12. 195, 92 € au titre du prix de la douleur,-3. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle demande enfin qu'il soit statué ce que de droit sur la réclamation de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Var.
L'appelante, qui se fonde sur l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 et sur les rapports d'expertise judiciaire, soutient que :
- il existe une présomption d'imputabilité de la contamination par le virus de l'hépatite C ayant pour origine la transfusion de produits sanguins,- les objections apportées par l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG AQUITAINE LIMOUSIN ne sont pas de nature à lever cette présomption ni à tout le moins le doute sur la contamination par la transfusion,- elle doit donc être indemnisée sans possibilité d'exonération de sa responsabilité contractuelle pour l'E. F. S. puisqu'il ne peut prouver que le sang livré était exempt de tout vice.

Elle fait par ailleurs valoir que :
- l'éventualité d'une guérison ou d'une stabilisation définitive est exclue,- elle a fait l'objet d'une aggravation de son état entraînant des douleurs morales très importantes, un préjudice d'agrément énorme, une IPP évaluée par l'expert entre 5 et 10 %, une ITT d'une durée de six mois et un prix de la douleur évalué à 1 / 5.

L'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG demande :
- la confirmation du jugement entrepris,
- le débouté de Madame Y... et de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Var de l'ensemble de leurs demandes,

- et, subsidiairement, la réduction de celles de Madame Y....
A titre infiniment subsidiaire, il sollicite la condamnation solidaire des consorts A..., es qualités, et d'AXA COURTAGE, es qualités, à le relever indemne de toutes condamnations à son encontre.
L'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG fait valoir que :
- en ce qui concerne l'imputabilité, il existe un doute quant à l'origine de la contamination de Madame Y..., le risque proportionnel apparaissant particulièrement infime à l'expert alors que Madame Y... a été exposée à d'autres sources de contamination
-sur les dispositions légales applicables, sa responsabilité ne peut être retenue en vertu de l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 par le seul fait qu'un seul donneur sur 38 n'a pu être retrouvé alors même qu'il rapporte la preuve d'une exposition de la victime à d'autres sources de contamination.
- à titre subsidiaire, sur le préjudice, les demandes de Madame Y... sont très excessives au regard du préjudice évalué par l'expert.
- à titre infiniment subsidiaire, si l'imputabilité de la contamination de Madame Y... aux transfusions sanguines dont elle a fait l'objet était établie, la responsabilité de cette contamination incomberait au docteur A..., les interventions chirurgicales au cours desquelles les transfusions sanguines litigieuses sont intervenues ayant pour cause l'erreur de diagnostic de ce médecin qui est ainsi le fait générateur de la contamination de Madame Y....
L'EFS soutient donc, sur le fondement des articles 1251 et 1382 du code civil, que le docteur A... et son assureur AXA COURTAGE sont tenus in soliudum à réparer l'ensemble des préjudices de Madame Y... alors que dans les rapports entre co-obligés, le non-fautif dispose d'un recours intégral à l'encontre du fautif et alors que, la faute du docteur A... ayant été établie, aucune faute ne peut lui être opposée n'étant tenu qu'à une obligation de sécurité-résultat dont seul le manquement pourrait engager sa responsabilité.
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Var demande qu'il soit constaté que son recours est exclu du protocole d'accord organismes sociaux et entreprises d'assurances du 24 mai 1983. Elle sollicite donc la condamnation de l'EFS, venant aux droits du CRTS de BORDEAUX, à lui payer les sommes de :
-28. 413, 53 € au titre des dépenses de santé actuelles exposées pour le compte de son assurée Madame Y...,
- les dépenses de santé futures au fur et à mesure qu'elles seront exposées à moins qu'il ne préfère se libérer par le paiement immédiat du capital représentatif d'un montant de 1. 384, 56 €,
-926 € au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion due de plein droit en vertu de l'article 376-1 du code de la sécurité sociale,
-300 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Var soutient qu'il existe un faisceau d'éléments permettant de retenir la responsabilité de l'EFS, la contamination de Madame Y... ayant pour origine les transfusions sanguines alors que l'EFS ne rapporte pas la preuve de ce que les produits sanguins administrés seraient exempts de tout vice ou d'une cause étrangère, et le doute devant profiter à Madame Y....
La Compagnie AXA COURTAGE et les consorts A... concluent au rejet de l'appel provoqué du CRTS à l'encontre des héritiers du docteur A... et d'AXA COURTAGE ainsi que de l'appel principal de Madame Y....
- A titre principal, sur les demandes de Madame Y..., ils soutiennent qu'il existe un doute quant à la contraction de l'hépatite C par la transfusion compte tenu des nombreuses interventions subies par Madame Y... antérieurement à l'intervention du docteur A... et alors que l'enquête transfusionnelle n'a pas permis d'établir que des produits contaminés aient pu lui être administrés lors des interventions litigieuses,
- A titre infiniment subsidiaire, sur l'appel en garantie du CRTS, ils font valoir que :
les fautes reprochées au docteur A... et au CRTS sont distinctes, erreur de diagnostic d'une part et sang vicié d'autre part,
si les fautes commises par le docteur A... ont entraîné la nécessité de transfusions, la contamination n'est intervenue qu'en raison de la livraison par le CRTS de sang vicié,
la cause de la contamination est donc totalement étrangère aux fautes commises par le docteur A..., le CRTS devant livrer un sang exempt de vice. MOTIFS DE L'ARRET :

Sur l'imputation de la contamination :
Aux termes de l'article 102 de la loi du 4 mars 2002, " en cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que la contamination a pour origine une transfusions de produits sanguins labiles ou une injection de produits dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Le doute profite au demandeur. Cette disposition est applicable aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable. "
Le rapport d'expertise déposé le 9 août 2007 par le professeur K..., commis par arrêt avant dire droit de cette Cour, fait apparaître que :
- Madame Y... présente des anticorps anti virus C positifs à la date de la première détermination en 1990 et qui le sont toujours le 8 septembre 2006, lors de l'examen de la patiente,
- le diagnostic d'hépatite C a été posé en 1990 en raison d'une asthénie et de nausées ; ces troubles ont entraîné la réalisation d'un bilan biologique qui a objectivé une élévation des transaminases puis des anticorps anti virus C positifs,
- au jour de l'expertise :
Madame Y... avait toujours le virus C, elle gardait une asthénie et des troubles dyspeptiques, avec déclenchement de nausées par les odeurs de cuisine et dysgueusie, son poids étant stable à 62 kgs pour 1, 64 m,
l'examen clinique n'a pas apporté de notion supplémentaire, sur le plan biologique, les transaminases oscillent entre 1 et 2 fois la normale, il n'y a pas de critère biologique d'évolution cirrhogène, sur le plan virologique, la virémie est toujours positive ; il s'agit d'un génotype 1, il n'y a pas eu de nouvelle biopsie hépatique,- en ce qui concerne le diagnostic différentiel, il n'y a pas d'autre cause d'hépatopathie : pas d'alcool, pas d'autre médicament, pas de toxicomanie intraveineuse, pas de pratique médicale à risque en dehors des interventions, pas de tatouage, à signaler : un simple piercing auriculaire fait chez un bijoutier,- il y a eu deux protocoles thérapeutiques : le premier en 1995 : interféron plus délursan ; la patiente a été non répondeur en fin de traitement, en 2002, un second protocole thérapeutique était une bithérapie interféron péguilé ribavirine, stoppée au bout de six mois en raison d'effets secondaires, avec toujours le même profil de non-réponse,- il n'y a pas eu d'ordonnance de prescription des produits sanguins dérivés,- les résultats d'une première enquête transfusionnelle ont été donnés le 13 octobre 1997 par l'Etablissement de transfusion sanguine d'Aquitaine ; le listing des produits transfusés à la clinique Bel Air et à la maternité du CHR de Bordeaux fait apparaître des résultats négatifs pour tous les donneurs et les produits délivrés, sauf un donneur dont l'adresse était ignorée,- à la date du 3 août 2007 : l'enquête transfusionnelle n'est pas exhaustive puisque, sur 38 donneurs, 37 ont pu être revus et contrôlés HCV négatifs, dont 1 par test HCV de 1ère génération, Il manque la sérologie d'1 donneur, celui du dernier des 10 dons du fibrogène 87F613 : il s'agit d'un donneur travaillant dans l'humanitaire au Soudan actuellement, selon le dire du conseil de l'EFS, ce donneur aurait pris contact avec l'EFS et il ne serait pas porteur du VHC : ce point mérite vérification car en cas de confirmation, l'enquête transfusionnelle serait exhaustive et négative, cela d'autant plus qu'aucun autre facteur n'a pu être mis en évidence (en dehors des fausses couches à répétition avec des curetages en 79, 83 et 85), en l'état actuel de l'expertise, il faut attendre la confirmation du statut du dernier donneur : s'il est négatif, la contamination n'est pas d'origine transfusionnelle ; s'il est positif, il faudra comparer les génotypes,- en ce qui concerne le diagnostic différentiel, il n'y a pas d'autre cause d'hépatopathie :

pas d'alcool, pas d'autre médicament, pas de toxicomanie intraveineuse, pas de pratique médicale à risque en dehors des intervention, pas de tatouage, à signaler simplement : un simple piercing auriculaire fait chez un bijoutier et les fausses couches à répétition avec des curetages en 79, 83 et 86,- les répercussions psychologiques sont considérables : préjudice moral énorme, préjudice d'agrément énorme, souffrances physiques : elles ont été intégrées dans le pretium doloris,- les facteurs favorables d'évolution sont : le sexe féminin, l'absence d'alcool, l'absence d'obésité,- les facteurs défavorables sont l'âge supérieur à 40 ans,- dans ce contexte, l'état de santé de Mme Y... doit être considéré comme stabilisé : ITT : durée des hospitalisations, IPP : entre 5 et 10 % : pas de cirrhose et lésions histologiques modestes à la PHB de 93, pretium doloris : 1, 5 dans une échelle de 1 à 7 en raison de la biopsie hépatique.

Il résulte ainsi des constatations expertales que l'enquête transfusionnelle est incomplète à ce jour puisqu'il manque la sérologie d'un dernier donneur dont le statut, s'il s'avérait négatif permettrait d'exclure l'origine transfusionnelle de la contamination.
Le témoignage indirect rapporté par le conseil de l'EFS selon lequel ce donneur, qui travaillait dans l'humanitaire au Soudan au moment de l'expertise, aurait pris contact avec l'EFS pour indiquer qu'il n'était pas porteur du VHC démontre que cette personne est identifiée par l'EFS qui est en contact avec elle et il nécessite d'être vérifié.
Dans ces conditions, il apparaît nécessaire avant dire droit de commettre à nouveau le professeur K... afin que dans le cadre d'un complément d'expertise, il puisse rechercher la sérologie de ce donneur et, en cas de statut positif de ce dernier, procéder à la comparaison des génotypes pour permettre de déterminer si la contamination dont a été victime Madame Y... est ou non d'origine transfusionnelle.
Pour permettre à l'expert de mener à bien sa mission complémentaire, il sera préalablement enjoint à l'EFS de communiquer au professeur K... l'identité de ce donneur et son adresse actuelle ainsi que tous autres éléments permettant de rentrer directement en contact avec lui.
Sur les autres demandes :
Dans l'attente de cette mesure, il sera sursis à statuer sur les demandes.
Par ces motifs,
Avant dire droit au fond,
Ordonne un complément d'expertise et commet pour y procéder le professeur Bernard K...,..., 59462 LOMME CEDEX, avec mission de :
- rechercher la sérologie du dernier donneur des dix dons de fibrinogène 87F613,
- en cas de statut positif de ce donneur, procéder à la comparaison des génotypes pour déterminer si la contamination de Mme Y... est ou non d'origine transfusionnelle. Pour permettre à l'expert de mener à bien sa mission complémentaire, enjoint préalablement à l'EFS de communiquer au professeur K..., dans les deux mois du prononcé du présent arrêt, l'identité de ce donneur et son adresse actuelle ainsi que tous autres éléments permettant à l'expert de rentrer directement en contact avec lui.

Dit que l'expert déposera son rapport complémentaire dans les quatre mois à compter de l'avis de consignation.
Dit que Madame Barbara Y... consignera, à titre de provision complémentaire, la somme de 300 € à la Régie d'avances et de recettes de cette Cour dans les deux mois du présent arrêt.
Dit qu'en cas de refus ou d'empêchement de l'expert, il sera pourvu à son remplacement par simple ordonnance de Monsieur le Conseiller de la mise en état et que le déroulement de l'expertise se déroulera sous le contrôle de celui-ci.
Sursoit à statuer sur toutes les demandes.
Réserve les dépens.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Robert MIORI, Président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,
Hervé GOUDOT Robert MIORI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0045
Numéro d'arrêt : 05/05992
Date de la décision : 29/10/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX, 09 janvier 2001


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2008-10-29;05.05992 ?
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