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11/09/2008 | FRANCE | N°07/01961

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale, 11 septembre 2008, 07/01961


ARRET RENDU PAR LA

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

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PP

Le : 11 septembre 2008

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

PRUD'HOMMES

No de rôle : 07/1961

Monsieur Jean-Louis X...

c/

La SOCIETE COMMERCIALE AUTOMOBILE DE L'ANGOUMOIS,

prise en la personne de son représentant légal

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par v

oie de signification (acte d'huissier)

Certifié par le Greffier en Chef

Grosse délivrée le :

à :

Prononcé publiquement par mise à disposition a...

ARRET RENDU PAR LA

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

----------------------------------------------

PP

Le : 11 septembre 2008

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

PRUD'HOMMES

No de rôle : 07/1961

Monsieur Jean-Louis X...

c/

La SOCIETE COMMERCIALE AUTOMOBILE DE L'ANGOUMOIS,

prise en la personne de son représentant légal

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier)

Certifié par le Greffier en Chef

Grosse délivrée le :

à :

Prononcé publiquement par mise à disposition au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le 11 septembre 2008

Par Monsieur Jean-François GRAVIE-PLANDE, Conseiller,

en présence de Madame Chantal TAMISIER, Greffier,

La COUR D'APPEL de BORDEAUX, CHAMBRE SOCIALE SECTION B, a, dans l'affaire opposant :

Monsieur Jean-Louis X..., demeurant ...,

Représenté par Maître Patrick HOEPFFNER, avocat au barreau de LA CHARENTE,

Appelant d'un jugement (R.G. F06/257) rendu le 19 mars 2007 par le Conseil de Prud'hommes d'ANGOULÊME, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel en date du 12 avril 2007,

à :

La SOCIETE COMMERCIALE AUTOMOBILE DE L'ANGOUMOIS, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social Z.A les Montagnes - 16430 CHAMPNIERS,

Représentée par la SCP BETHUNE DE MORO et POUSSET, avocats au barreau de LA CHARENTE,

Intimée,

rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue en audience publique le 28 Mai 2008, devant :

Monsieur Benoit FRIZON DE LAMOTTE, Président,

Monsieur Eric VEYSSIERE, Conseiller,

Monsieur Jean-François GRAVIE-PLANDE, Conseiller,

Patricia PUYO, Adjoint Administratif faisant fonction de Greffier,

et qu'il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ci-dessus désignés.

***

FAITS - PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mr Jean Louis X... a été engagé par la Société COMMERCIALE AUTOMOBILE DE L'ANGOUMOIS, (SCCA) à compter du 18 Avril 1997, en qualité de chef de Service après vente, Statut Cadre.

Le 16 Décembre 2004, il lui était remis en main propre une lettre de convocation à un entretien préalable au licenciement.

Consécutivement à cet entretien, la société SCAA notifiait à Mr X... une lettre valant mutation disciplinaire à l'établissement qu'elle exploitait à NIORT, en qualité de chef de Service après vente.

Par lettre en date du 20 Janvier 2005, Mr X... faisait connaître à son employeur qu'il refusait cette mutation.

Mr X... était licencié par lettre du 20 janvier 2005.

Il saisissait le Conseil de prud'hommes d'Angoulême le 19 Mai 2005, estimant son licenciement sans cause réelle et sérieuse et sollicitait la condamnation de la société SCAA à lui verser diverses indemnités en réparation du préjudice causé.

L'affaire fut radiée le 27 Mars 2006 puis réinscrite au rôle le 8 Septembre 2006.

Par jugement du 19 Mars 2007, le Conseil de Prud'hommes d'Angoulême déboutait Mr X... de l'intégralité de ses demandes.

Mr X... relevait appel du jugement par déclaration en date du 11 Avril 2007

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions écrites, développées oralement à l'audience, Mr X... sollicite de la Cour qu'elle réforme le jugement frappé d'appel, qu'elle dise et juge que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamne la Société SCAA à lui payer une somme de 84.000 € en dédommagement du préjudice subi ainsi que la somme de 3.471,67 € à titre de dommages intérêts pour non respect de la procédure de licenciement, enfin une somme de 3.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Mr X... soutient que sur la forme la procédure de licenciement suivie contre lui par la SCAA est irrégulière puisque la lette de licenciement n'a été précédée d'aucun entretien préalable et sur le fond, la Direction a

utilisé contre lui, en les dénaturant intentionnellement, des courriers de salariés, dont il était le supérieur hiérarchique.

Par conclusions écrites, développées oralement à l'audience, la société SCAA sollicite de la Cour qu'elle confirme le jugement frappé d'appel, rejette les demandes de Mr X... et le condamne à lui payer la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle fait valoir que Monsieur X... n'assumait pas correctement les responsabilités d'encadrement et de management qui lui étaient confiées. Qu'elle avait été saisie de la difficulté, directement, par courriers de certains des salariés travaillant dans le service de Mr X... et se plaignant de l'attitude de ce dernier à leur égard.

Qu'il y avait là une cause réelle et sérieuse de licenciement.

MOTIVATION

Sur le licenciement

Mr X... était convoqué à un entretien préalable par courrier en date du 16 Décembre 2004, remis en main propre à l'intéressé et rédigé dans les termes suivants : «Nous devons vous informer que nous sommes amenés à envisager à votre égard une mesure de licenciement... nous vous prions de bien vouloir vous présenter a nos bureaux de Champniers dans le bureau du signataire le 27 décembre 2004 à 11h pour un entretien sur cette éventuelle mesure. Nous vous précisons que vous avez la possibilité de vous faire assister lors de cet entretien par une personne de votre choix faisant partie de l'entreprise».

A la suite de l'entretien susvisé, Mr X... recevait, le 4 Janvier 2005 un courrier ainsi rédigé :

«Lors de notre entretien du 29 décembre 2004, nous vous avons exposé les faits que nous vous reprochons et qui nous ont conduits à envisager à votre égard une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement.

C'est votre attitude managériale inadmissible qui est la cause d'une telle procédure. En effet, vous occupez les fonctions de chef Après vente et à ce titre, vous avez la responsabilité de l'encadrement des collaborateurs. Vous devez gérer l'organisation du service qui passe par l'animation des équipes, la répartition des tâches. Cet encadrement doit nécessairement se faire dans le respect de l'être humain. Vos directives doivent être cohérentes et vous devez être à l'écoute de votre équipe. La communication est primordiale.

Nous avons reçu à la fin du mois de novembre 2004 un courrier signé conjointement des collaborateurs de l'atelier mécanique et carrosserie retraçant leur ras le bol. Il leur a fallu du courage pour s'exprimer de la

sorte. Ils en ont assez de subir des conditions de travail que vous rendez chaque jour de plus en plus désagréables. Ils ne veulent plus travailler avec vous car vos directives ont pour effet de dégrader leur condition de travail. La lettre que nous avons reçu est un appel au secours que nous prenons avec grand sérieux. Notre devoir est de veiller au bon fonctionnement de l'entreprise et nous considérons que vous avez manqué à vos obligations professionnelles.

Nous vous rappelons que nous avons déjà du intervenir en avril 2003 pour vous demander de cesser votre autoritarisme et d'agir plus humainement. La situation s'est temporairement rétablie mais vous n'avez pas su conserver les principes de management harmonieux puisque la situation s'est vite dégradée et qu'aujourd'hui, nous ne pouvons pas vous laisser au sein de l'atelier de Champniers sans compromettre gravement une situation déjà délicate. En effet, le management suppose l'adhésion des membres de l'équipe. Un chef de service doit savoir écouter, communiquer, motiver son équipe s'il veut des résultats et le bien être des salariés.

De tels faits nous laissent à penser que vous n'êtes pas en mesure d'assumer les responsabilités que nous vous avions confiées au sein de l'établissement de Champniers. C'est pourquoi nous vous proposons de vous muter, sans changement de statut, au sein de l'établissement de Niort, ceci en espérant que vous saurez saisir l'opportunité que nous vous offrons comme alternative à votre exclusion.

Vous disposez d'un délai de 5 jours ouvrés à compter de la réception en main propre ou de la première présentation postale pour accepter cette modification. Passé ce délai, et sans réponse de votre part, nous considérerons que vous avez refusé et engagerons une procédure de licenciement.

Si vous acceptez, veuillez nous retourner la présente lettre revêtue de la mention « bon pour accord » suivie de votre signature ainsi que les avenants joints signés de votre main (un exemplaire vous sera restitué par retour).

Cette lettre, constituant une proposition de sanction n'est pas à considérer comme une notification de sanction. Elle ne le deviendra que par votre acceptation...»

Par lettre en date du 7 Janvier, adressé par fax à son employeur, Mr X... écrivait alors : «Vous ne serez pas surpris que je sois surpris! Etonné même de la tournure des choses alors que vous m'aviez dit que vous envisagiez pour appliquer la même politique menée à Champniers. En aucun ca, vous n'avez parlé de "MUTATION DISCIPLINAIRE". De ce fait, ma réponse à votre courrier est NON; je refuse cette mutation ainsi que les propos écrits au sein de votre missive. Peut-être mettrez vous à exécution vos menaces mais sachez qu'en aucun cas je n'accepterai cette mutation. Recevez mes salutations».

La SCAA adressait en réponse à son salarié, le 20 Janvier 2005, une lettre de licenciement rédigée dans les termes suivants :

«Lors de notre entretien du 29 décembre 2004, nous vous avons exposé les faits que nous vous reprochons et qui nous ont conduits

à envisager à votre égard une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement.

Compte tenu de la gravité de la situation, nous avons décidé de vous licencier. Préalablement, nous vous avons proposé une mutation disciplinaire que vous avez refusé.

Les faits que nous vous reprochons et votre attitude désinvolte lors de l'entretien ne nous permettent pas de continuer la relation contractuelle. En effet, lors de l'entretien, vous nous avez dit que les faits rapportés par les salariés étaient sans importance, faits que vous n'avez pas nié.

Votre management est remis en cause par vos propres équipes et la collaboration est devenue maintenant impossible.

En effet, vous occupez les fonctions de chef Après vente et à ce titre, vous avez la responsabilité de l'encadrement des collaborateurs. Vous devez gérer l'organisation du service qui passe par l'animation des équipes, la répartition des tâches.

Cet encadrement doit nécessairement se faire dans le respect de l'être humain. Vos directives doivent être cohérentes et vous devez être à l'écoute de votre équipe. La communication est primordiale.

Nous avons reçu à la fin du mois de novembre 2004 un courrier signé conjointement des collaborateurs de l'atelier mécanique et carrosserie retraçant les difficultés qu'ils subissent chaque jour dans l'exécution de leur travail. La lecture de cette lettre est édifiante.

Lorsque nous vous avons fait part des remarques des salariés, vous nous avez dit de ne pas en tenir compte car pour vous, cela ne le nécessitait pas. Ainsi, le mal être de vos équipes vous est totalement étranger et vous ne vous remettez aucunement en cause.

Notre devoir est de veiller au bon fonctionnement de l'entreprise et nous ne considérons pas que les remarques des salariés sont anodines. Nous tenons compte de leurs observations et s'ils sont arrivés à une telle extrémité (nous écrire), c'est que la situation devenait inadmissible. Ils se sont exposés en faisant ainsi état de leurs déboires.

Nous vous rappelons que nous avons déjà du intervenir en avril 2003 pour vous demander de cesser votre autoritarisme et d'agir plus humainement. La situation s'est temporairement rétablie mais vous n'avez pas su conserver les principes de management harmonieux puisque la situation s'est vite dégradée et qu'aujourd'hui, nous ne pouvons pas vous laisser au sein de l'atelier de Champniers sans compromettre gravement une situation déjà délicate. En effet, le management suppose l'adhésion des membres de l'équipe. Un chef de service doit savoir écouter, communiquer, motiver son équipe s'il veut des résultats et le bien être des salariés.

De tels faits prouvent que vous n'êtes pas en mesure d'assumer les responsabilités que nous vous avions confiées. Aussi, nous avons pris la décision de vous licencier.

Votre contrat de travail se trouvera rompu à l'issue d'un préavis d'une durée de trois mois. Au cours de ce préavis, vous restez tenu de l'intégralité de vos obligations et notamment d'agir avec respect de l'être humain et professionnalisme auprès des équipes de collaborateurs. Nous considérerions comme très grave le fait de reporter les conséquences de la lettre des salariés sur lesdits salariés.

Dans les jours qui suivront la rupture, nous tiendrons à votre disposition vos documents de fin de contrat et votre solde éventuel...»

Selon l'article L. 122-14, alinéa 1er devenu l'article 1232-2 du Code du travail, «l'employeur ou son représentant qui envisage de licencier un salarié doit, avant toute décision, convoquer l'intéressé par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge en lui indiquant l'objet de la convocation. L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou de la remise en main propre de la lettre de convocation».

En outre, aux termes d'une jurisprudence constante, la lettre de licenciement détermine la cause du licenciement et fixe les limites du litige.

En l'espèce, il convient de constater que le motif de licenciement invoqué dans le courrier du 20 Janvier 2005 reprend celui qui avait entraîné la sanction de mutation disciplinaire refusée par MR X...;

En effet, si la lettre du 20 Janvier prend effectivement acte du refus de Mr X... d'être muté à NIORT, la SCAA ne motive pas le licenciement de Mr X... sur cette opposition de son salarié à la sanction disciplinaire dont il a fait l'objet de la part de sa hiérarchie, mais reprend les critiques initiales relatives à "l'attitude managériale" de Mr X... et à ses difficultés relationnelles vis à vis de certains des salariés soumis à son pouvoir hiérarchique.

Or, il est constant que de mêmes faits ne peuvent être invoqués pour fonder deux sanctions disciplinaires différentes.

La considération que la première sanction disciplinaire prononcée n'aurait pas été suivie d'effet n'autorise pas l'employeur à appliquer une nouvelle sanction aux mêmes faits.

Il est par ailleurs admis que l'employeur qui envisage de prononcer le licenciement au lieu de la sanction refusée, doit convoquer le salarié à un nouvel entretien préalable.

En l'espèce, il n'est pas discuté que la lettre de licenciement du 20 Janvier 2005 n'a été précédée d'aucune convocation à un nouvel entretien préalable.

Dès lors, le licenciement de Mr X... apparaît comme irrégulier en la forme et dépourvu de cause réelle et sérieuse au fond.

Sur le montant des indemnités de rupture

Du fait de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement, M X... a droit à une indemnité qui, en application de l'article L.122-14-4 du Code du travail, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Compte tenu d'une ancienneté de 8 ans, d' une période de chômage qui a duré 2 ans à la suite de son licenciement et d'un salaire mensuel brut, d'environ 3.400 € au moment de son licenciement, la Cour estime que Mr X... a droit à une indemnité qui peut être justement fixée à la somme de 40.000 € que la société SCAA doit être condamnée à lui payer.

Sur les autres chefs de demande

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Mr X... les frais exposés par lui et non compris dans les dépens. La Cour fixe à 1.500 € la somme que la SCAA doit être condamnée à lui payer à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement du Conseil de prud'hommes d'Angoulème

Et, statuant à nouveau,

Dit irrégulier en la forme et dépourvu de cause réelle et sérieuse au fond le licenciement de Mr Jean Louis X...,

Condamne la SCAA à payer Mr X... la somme de 40.000 €,

Déboute la SCAA de ses demandes reconventionnelles,

Condamne la SCAA à payer à Mr X... la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la SCAA aux dépens de première instance et d'appel.

Signé par Benoît Frizon de Lamotte, Président, et par Chantal Tamisier,, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. Tamisier B. Frizon de Lamotte


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07/01961
Date de la décision : 11/09/2008
Type d'affaire : Sociale

Références :

ARRET du 02 mars 2010, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 2 mars 2010, 08-44.902, Inédit

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes d'Angoulème, 19 mars 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2008-09-11;07.01961 ?
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