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26/06/2008 | FRANCE | N°07/05663

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale, 26 juin 2008, 07/05663


COUR D'APPEL DE BORDEAUX
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PP

Le : 26 Juin 2008

CHAMBRE SOCIALE-SECTION B
PRUD'HOMMES
No de rôle : 07 / 5663
S. A. R. L. ALTEP INGENIERIE prise en la personne de son représentant légal, c / Monsieur Philippe-Olivier X... Monsieur Fabien Y...

Nature de la décision : Avant dire droit-EXPERTISE-Jonction au RG 07 / 5664
Notifié par LRAR le :
LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :
La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte

d'huissier)
Certifié par le Greffier en Chef
Grosse délivrée le :
à :

Prononcé publiquement par...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX
----------------------------------------------
PP

Le : 26 Juin 2008

CHAMBRE SOCIALE-SECTION B
PRUD'HOMMES
No de rôle : 07 / 5663
S. A. R. L. ALTEP INGENIERIE prise en la personne de son représentant légal, c / Monsieur Philippe-Olivier X... Monsieur Fabien Y...

Nature de la décision : Avant dire droit-EXPERTISE-Jonction au RG 07 / 5664
Notifié par LRAR le :
LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :
La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier)
Certifié par le Greffier en Chef
Grosse délivrée le :
à :

Prononcé publiquement par mise à disposition au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le 26 Juin 2008
Par Monsieur Benoît FRIZON DE LAMOTTE, Président, en présence de Madame Chantal TAMISIER, Greffier,

La COUR D'APPEL de BORDEAUX, CHAMBRE SOCIALE SECTION B, a, dans l'affaire opposant :
S. A. R. L. ALTEP INGENIERIE, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège Parc Cadéra Sud-Bât C-Avenue Ariane-33700 MERIGNAC,
Représentée par Maître Carole MORET, SELAFA BARTHELEMY et ASSOCIÉS, avocats au barreau de BORDEAUX,
Appelante de deux jugements (RG F04 / 233 et RG F04 / 232) rendus le 16 janvier 2006 par le Conseil de Prud'hommes d'ANGOULÊME, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel en date du 01 février 2006,
à :
1o) Monsieur Philippe-Olivier X..., demeurant...,
Représenté par Maître Dominique RUAN, avocat au barreau de BORDEAUX,
2o) Monsieur Fabien Y..., demeurant...,
Représenté par Maître Laurence TASTE-DENISE, SCP RMC et ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX,
Intimés,

rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue en audience publique le 14 Mai 2008, devant :

Monsieur Benoit FRIZON DE LAMOTTE, Président, Monsieur Patrick BOINOT, Conseiller, Monsieur Jean-François GRAVIE-PLANDE, Conseiller, Patricia PUYO, Adjoint Administratif faisant fonction de Greffier,

et qu'il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ci-dessus désignés.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

la SARL ALTEP INGENIERIE (la S. A. I), entreprise de conseil et de bureau d'études en ingénierie industrielle, a employé par contrats écrits à durée indéterminée, à temps complet :- d'une part à compter du 22 avril 2003 Monsieur X..., en qualité de directeur de développement, moyennant une rémunération brute de 3. 850 € portée en 2004 à 5. 200 €, outre un intéressement sur résultats,- d'autre part à compter du 18 juin 2001 Monsieur Y..., en qualité d'ingénieur projet moyennant une rémunération brute mensuelle portée en 2004 à 3. 400 €, ces contrats comportant une clause de non concurrence limitée à 6 mois, les relations entre les parties étant régies par la Convention Collective des bureaux d'études techniques et cabinets de conseils.

Monsieur X... a, par lettre du 15 avril 2004, démissionné à effet du 15 juillet 2004, ramené au 18 juin 2004 après accord de la S. A. I. ; il est, en juin 2004, entré au service d'une entreprise concurrente, la société CERGI AQUITAINE en cours de création en qualité de responsable d'agence.

Par lettre du 11 avril 2004, Monsieur Y... a démissionné de ses fonctions à effet au 15 juillet 2004 ; la S. A. I., par lettre du 20 avril 2004 a dispensé ce dernier de son préavis du 30 mai au 15 juillet 2004, et l'a délié de la clause de non-concurrence, il a rejoint la même entreprise concurrente la société CERGI AQUITAINE.

Le 16 septembre 2004, la S. A. I. a saisi le Conseil de prud'hommes d'ANGOULÊME d'une demande tendant à la condamnation de Monsieur X... à lui payer des dommages et intérêts pour ses activités déloyales dans l'exécution de son contrat de travail ; par jugement du 16 janvier 2006, le Conseil de Prud'hommes a : - débouté la S. A. I. de ses demandes,- condamné cette dernière à payer à Monsieur X... la somme de 1. 000 € par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure. Civile.

La S. A. I. a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Par ailleurs, le 16 septembre 2004, la S. A. I. a saisi le même Conseil de Prud'hommes de mêmes demandes contre Monsieur Y... ; par jugement du 16 janvier 2006, le Conseil de Prud'hommes a : - débouté la S. A. I. de toutes ses demandes,- condamné cette dernière à payer à Monsieur Y... les sommes de : * 5. 000 € à titre de dommages et intérêts par application de l'article 1382 du Code Civil, * 1. 000 € par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La S. A. I. a régulièrement interjeté appel de cette décision ; par conclusions écrites et développées à l'audience, elle demande à la cour de : - réformer les jugements rendus par le Conseil de prud'hommes d'ANGOULÊME le 16 janvier 2006,- ordonner la jonction des instances RG no 06 / 578 et RG no 06 / 577,- dire et juger que Monsieur X... a violé ses obligations de discrétion, de loyauté, de non-concurrence, d'exclusivité et de fidélité inhérente à l'exécution de son contrat de travail,- dire et juger que Monsieur X... s'est livré à une activité de concurrence déloyale à l'égard de la SARL ALTEP INGÉNIERIE pendant le temps de l'exécution de son contrat de travail,- dire et juger que Monsieur Y... a violé ses obligations de discrétion, de loyauté, de non-concurrence, d'exclusivité et de fidélité inhérente à l'exécution de son contrat de travail,- dire et juger que Monsieur Y... s'est livré à une activité de concurrence déloyale à l'égard de la SARL ALTEP INGÉNIERIE pendant le temps de l'exécution de son contrat de travail,- condamner conjointement et solidairement Monsieur Y... et Monsieur X... au paiement de : * 78. 000 € en réparation du préjudice subi dans le cadre de l'affaire Z..., * 174. 000 € en réparation du préjudice subi dans le cadre de l'affaire DAVID B..., * 94. 000 € en réparation du préjudice subi dans le cadre de l'affaire H2P S. A. S., * 20. 000 € en réparation du préjudice subi du fait des tentatives de désorganisation de la force commerciale de la société et de débauchage de personnel de la société, * 30. 000 € en réparation du préjudice subi du fait de la valeur des informations détournées de l'entreprise correspondant à un savoir-faire aussi bien au plan technique, que de gestion du personnel et devant servir à la mise en place d'une activité concurrente, * 30. 000 € en réparation du préjudice subi du fait du détournement de clientèle au profit d'une activité concurrente en utilisant les moyens mis à sa disposition par la société ALTEP, * 15. 750 € au titre du détournement de la base de données constituée par la société ALTEP, * 3. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,- débouter Monsieur Y... de ses demandes reconventionnelles,- condamner conjointement et solidairement Monsieur Y... et Monsieur X... aux entiers dépens et frais d'exécution. .

Messieurs X... et Y..., de leur côté, par conclusions écrites et développées à l'audience, demandent à la cour de confirmer les jugements et de : Dire et juger qu'il n'y a pas lieu à jonction des instances enrôlées sous les numéros 06 / 577 et 06 / 578, En tout état de cause, dire et juger qu'il n'y a pas lieu à condamnations solidaires, En conséquence, Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, Débouter la SARL ALTEP INGENIERIE de toutes ses demandes fins et conclusions.. , et faisant droit à l'appel incident de Messieurs X... et Y..., condamner la SARL ALTEP INGENIERIE en cause d'appel à leur payer chacun la somme de 10. 000 € de dommages et intérêts supplémentaires sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil, pour appel abusif, outre 3. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. .

A l'audience, les deux appels ont été joints.
DISCUSSION
La S. A. I. recherche la responsabilité solidaire de Messieurs X... et Y... à raison des fautes commises par ces derniers à propos de différents dossiers ou affaires qu'il convient d'examiner.

Affaire Z...- client de la DCN

Il est réclamé à ce titre 78. 000 € par la S. A. I.
La S. A. I. invoque à l'encontre de Messieurs X... et Y... des faits commis pendant l'exécution de leurs contrats de travail ; elle est recevable donc à rechercher la responsabilité contractuelle de ces derniers en raison de la faute lourde qu'elle invoque et qui implique la volonté de nuire.

La S. A. I. a l'appui de ses appels, fait valoir que cette faute lourde est caractérisée par le fait :- que Messieurs X... et Y... ont délibérément camouflé à leur direction les pertes subies dans ce dossier de conception d'un chariot élévateur pour la DCN, pertes s'élevant à 78. 000 € (112. 420 € coût, moins facturation 34. 971 €), imputées sur d'autres comptes, découvertes en 2004 ; toutefois, force est de constater :- que le contrat litigieux a été conclu dans le cadre d'une convention cadre, signée en 2002, antérieurement à l'engagement de Monsieur X... et même de la nomination de Monsieur Y... en qualité de responsable du bureau d'études,- que la pratique des imputations financières des pertes sur d'autres postes était courante selon l'attestation de Monsieur C...,- que la réalité des charges de chaque contrat pouvait être connue mensuellement par la simple utilisation du logiciel HOMVS dans le cadre du contrôle global de gestion,- qu'en tout cas, en l'espèce, n'est caractérisée aucune volonté de nuire des salariés.

Affaire DAVIS B...- autre client DCN

la S. A. I. réclame à ce titre 174. 000 €.
Pour les mêmes motifs que ceux retenus dans la précédente affaire, la S. A. I. est recevable à rechercher la responsabilité contractuelle des salariés pour faute lourde.
A l'appui de ses appels, la S. A. I. fait valoir que la faute lourde de Messieurs X... et Y... est caractérisée par le fait :- que les mauvaises cotations servant de base à la facturation du client ont engendré une perte de 174. 853 €,- que Monsieur X..., responsable de l'établissement d'ANGOULÊME, a couvert les agissements de Monsieur Y..., sans mettre fin aux pratiques de ce dernier ; toutefois :- l'audit invoqué par la S. A. I. pour justifier la perte invoquée est postérieur aux démissions et n'est pas produit,- quoiqu'il en soit, aucun élément du dossier ne vient établir la faute lourde des deux salariés.

Affaire H2P

La S. A. I. réclame à ce titre 94. 000 €.
Les faits reprochés par la S. A. I. s'étant déroulés pendant l'exécution du contrat de travail, la S. A. I. est recevable à rechercher la responsabilité contractuelle de Messieurs X... et Y... pour faute lourde.
A l'appui de ses appels, la S. A. I. reproche à Monsieur X... d'avoir omis de transmettre à sa direction la totalité du contrat conclu avec H2P le 13 novembre 2003 et en particulier la page comportant une pénalité de retard, ce qui ne lui a pas permis de mettre en oeuvre cette clause dont elle n'a eu connaissance que par H2P, la contraignant à accepter une transaction défavorable ; ces faits, à les supposer établis, ne caractérisent pas une intention de nuire.

Elle fait reproche à Monsieur Y... d'avoir dissimulé les retards accumulés dans la réalisation de l'opération, d'avoir accepté une remise de sa propre initiative, d'avoir augmenté son chiffre d'affaires pour percevoir un intéressement plus avantageux ; toutefois, Monsieur Y... fait justement valoir :- que la S. A. I. reconnaît que sa direction centrale était au courant des difficultés de ce dossier, pour avoir conclu M. D... avait connaissance des difficultés techniques de réalisation, il connaissait personnellement et de longue date le conseiller technique de la société H2P ,

- que les factures, avoirs, devaient être vérifiés par le contrôle de gestion, et qu'il n'avait pas le pouvoir d'établir lui-même ces factures,- qu'aucun élément du dossier n'établit qu'il ait augmenté fictivement le chiffre d'affaires (en le diminuant par la suite d'un avoir) pour augmenter son intéressement sur la marge brute, l'intéressement étant normalement calculé une fois le chiffre d'affaires réalisé, aucun calcul au demeurant n'étant d'ailleurs proposé sur l'enrichissement indu ainsi invoqué,- que la S. A. I. n'établit pas, à supposer même les griefs justifiés, la volonté de nuire qu'elle allègue.

Affaire MECAPLAST

Les faits spécialement reprochés à Monsieur Y... s'étant déroulés pendant l'exécution de son contrat de travail, la S. A. I. est recevable à rechercher la responsabilité contractuelle de ce salarié.
A l'appui de son appel, la S. A. I. fait valoir :- que Monsieur Y... n'a pas suivi normalement le contrat avec ce client, ce qui a été révélé par un audit réalisé en 2004, et a entraîné une sous facturation, puis en définitive la perte de ce client ; toutefois, quoiqu'il en soit de la réalité des griefs émis, la S. A. I. n'établit pas la volonté de nuire caractéristique de la faute lourde.

Sur les tentatives d'affaiblissement de la force commerciale

Les faits de tentative d'affaiblissement de la force commerciale invoqués par la S. A. I. reprochés à Monsieur X... s'étant déroulés pendant l'exécution de son contrat de travail, elle est recevable à rechercher la responsabilité contractuelle de ce dernier.
A l'appui de son appel, la S. A. I. fait valoir :- que l'agence d'ANGOULÊME était dotée de trois commerciaux, Madame E..., Monsieur F..., Monsieur G... (engagé en janvier 2004),- qu'avant son départ, Monsieur X... a cherché à faire licencier ces trois salariés,- qu'il était en conflit personnel avec Madame E...,- qu'il a invoqué des griefs subjectifs pour fonder ses demandes de licenciement qui n'avaient d'autre objet que l'affaiblissement de la force commerciale de l'entreprise, ce qui caractérise l'intention de nuire ; toutefois, il convient de constater :- que ces salariés n'ont pas été licenciés, et qu'il n'est justifié à cet égard d'aucun préjudice,- que la S. A. I. reconnaît que la demande de licenciement de Madame E... reposait sur des désaccords existants entre cette dernière et Monsieur X..., désaccords au demeurant très anciens,

- qu'il apparaît peu convainquant que Monsieur X... ait tenté de faire licencier Monsieur F... pour le faire engager par la suite par la société CERGY AQUITAINE,- que la proposition de prorogation de la période d'essai de Monsieur G... pouvait tout-à-fait être justifiée dans l'intérêt de l'employeur,- que ne sont donc pas établis les griefs de tentative de déstabilisation de la force commerciale de vente de l'établissement d'ANGOULÊME de la S. A. I.

Sur les tentatives de débauchage des salariés de la S. A. I.

Les faits de tentative de débauchage de salariés invoqués par la S. A. I. à l'encontre de Messieurs X... et Y... se seraient déroulés principalement pendant l'exécution du contrat de travail et accessoirement de façon limitée postérieurement ; ils présentent un caractère indivisible et la S. A. I. est donc fondée à rechercher la responsabilité contractuelle de ses salariés.
La S. A. I. à l'appui de ses appels fait valoir qu'ont été démarchés pour rejoindre CERGI AQUITAINE :- Monsieur H... en mars 2004, commercial,- Monsieur G... le 1er avril 2004, commercial,- Monsieur I..., ingénieur, en avril 2004,- Monsieur J..., dessinateur, et cela par Monsieur X...,- Monsieur C..., ingénieur, par Messieurs X... et Y... avant leur démission, et encore par Monsieur X... après sa démission ; la S. A. I. précise en outre que Monsieur X... profitait de ses fonctions pour assurer le recrutement des collaborateurs de son futur employeur CERGI AQUITAINE, ainsi, en a-t-il été de :- Mademoiselle K..., candidate spontanée au poste de juriste qui a été recrutée par CERGI AQUITAINE en qualité d'assistante de direction ; la S. A. I. ajoute que Monsieur X... a, avant sa décision, détourné des données et fichiers selon l'attestation de Monsieur G..., que Monsieur Y... a adressé à Monsieur X... par mails des 21 et 26 avril 2004, le cahier des charges de la société SEGUIN-MOREAU, sa propre cliente, outre des données techniques,

Monsieur X..., pour contester toute responsabilité, fait valoir :- qu'il n'a pas créé sa propre entreprise mais a été engagé par CERGI AQUITAINE en la seule qualité de salarié,- qu'il n'a jamais dénigré la S. A. I. auprès de quiconque,- que Monsieur C... a été contacté par Monsieur Y... et a été intéressé par la proposition à laquelle il ne donnera pas de suite, ayant reçu une promotion de la S. A. I.,- que Mademoiselle K... n'a jamais été salariée de la S. A. I., même s'il a pu la rencontrer à l'occasion d'un entretien d'embauche en sa qualité de directeur de l'établissement d'ANGOULÊME,

- qu'il n'est justifié en tout cas d'aucun préjudice,- que les données techniques qu'il a dû se faire remettre entraient dans le champ de sa compétence.

Monsieur Y... conteste les griefs qui lui sont faits, faisant valoir :- que de simples discussions avec des salariés ne peuvent être assimilées à des débauchages, s'agissant en outre de promesses d'ambauche non formalisées,- que n'est caractérisée aucune intention de nuire,- qu'il n'a jamais cherché à dissimuler quoi que ce soit.

Toutefois, ont attesté :- Monsieur H... : Monsieur X... m'a fait part en mars 2004 de sa volonté de quitter la société ALTEP INGENIERIE pour aller créer une filiale d'un bureau d'études sur la région Aquitaine. Il m'a proposé de le rejoindre en tant que responsable commercial... il m'a fait comprendre que certaines personnes d'ALTEP étaient susceptibles de le suivre. Il m'avait demandé d'être discret... .- Monsieur G... : Monsieur X... m'a convoqué le jeudi 1er avril 2004 dans les bureaux d'ALTEP INGENIERIE... avant toute chose il a insisté sur le fait que notre entretien était confidentiel et que je pourrais avoir des ennuis si je répétais ce qu'il avait à me dire. Il m'a annoncé son départ imminent de la société pour développer lui-même une société d'études et m'a proposé de le rejoindre... au poste de responsable commercial .- Monsieur C... : j'ai été sollicité par P. O. X... et F. Y... pour un poste au sein d'une société dans laquelle ils avaient été embauchés. Cette sollicitation a abouti à l'émission d'une promesse d'embauche signée par P. O. X... pour le compte de la société CERGY ... cette proposition m'a été faite fin mars début avril par Monsieur Y...... . Monsieur C... a ajouté : j'ai reçu un appel téléphonique de M. L... me demandant si je comptais rester au sein de la société ALTEP ou si je décidais de partir pour CERGY. Celui-ci avait connaissance des choix qui se présentaient à moi lors d'un repas qu'il avait partagé avec P. O. X... et F. Y..., alors qu'ils ne faisaient plus partie d'ALTEP. Monsieur L... était alors client d'ALTEP sur un projet innovant. Cet appel téléphonique a eu lieu début juin 2004... .- Monsieur I... a déclaré : J'atteste avoir reçu, de manière verbale, une proposition d'intégrer une nouvelle structure de la part de Messieurs X... et Y..., courant avril, proposition que j'ai déclinée .- Monsieur J... : Au sein de la société ALTEP je travaillais au bureau d'études avec Monsieur Y...... Ce dernier m'a proposé un poste comme dessinateur projeteur dans la société où il envisageait de rentrer. Cette demande a été faite courant avril, je n'y ai pas donné suite .- Monsieur M... : suite à une annonce de recrutement passée dans courrier cadres, j'ai reçu la candidature de Mademoiselle K... par mail. S'agissant d'une candidature à un poste juridique, celle-ci ne faisait

pas l'objet de nos besoins. J'ai été très surpris que le 13 avril en l'absence de Monsieur D..., Monsieur X... a reçu cette personne, d'autant qu'il en avait aucun besoin... et que la fonction juridique de l'entreprise qui aurait pu concerner cette personne n'entrait pas dans les attributions de Monsieur X... .

Ces attestations établissent que pendant l'exécution de leur contrat de travail, Messieurs X... et Y... ont tenté de façon massive de débaucher une part importante du personnel de la S. A. I.
Le fait, par ailleurs, pour Monsieur X..., quelques jours avant sa démission, de réclamer l'ensemble des fichiers commerciaux, est attesté par les mails produits par le témoignage de Monsieur G... qui a précisé A l'issue de la réunion commerciale du 1er avril 2004 dans les locaux d'ALTEP MERIGNAC, Monsieur X... m'a demandé de lui transmettre l'ensemble de mes fichiers commerciaux par mail. J'ai refusé cette demande hors norme. Il a alors profité de mon absence de mon bureau pour saisir mes dossiers papiers et les photocopier dans nos locaux en fin de matinée. J'ai constaté cette opération en le trouvant à la photocopieuse avec mes dossiers en copie... .
Par ailleurs, Monsieur Y... a reconnu devant huissier le 17 décembre 2004 que des documents techniques, plan, cahier des charges ou documentations provenant d'ALTEP INGENIERIE existaient et se trouvaient dans le bureau de Monsieur X..., elles ont été saisies par les services de gendarmerie lors de leur venue le mardi 14 , Monsieur X... étant alors salarié de CERGY AQUITAINE.

Ces éléments joints aux précédents, relatifs aux tentatives massives de débauchage commis de concert par les deux salariés caractérisent l'intention de nuire invoqué par la S. A. I. ; le préjudice subi à cet égard sera réparé comme il suit au dispositif.

Sur le détournement du client SEGUIN-MOREAU et du logiciel RANO

La S. A. I. fait valoir :- qu'elle avait pour client la société SEGUIN-MOREAU,- que le constat du 17 décembre 2004 démontre que CERGI AQUITAINE travaille pour SEGUIN-MOREAU,- que postérieurement à sa démission le 21 avril 2004, Monsieur Y... a transmis à Monsieur X... par courrier électronique le cahier des charges d'une affaire en cours d'études pour SEGUIN-MOREAU, sur la base d'un logiciel détourné,- que Monsieur Y... alors en fonction à la S. A. I., a réalisé des plans en son propre nom pour une consultation faite par SEGUIN-MOREAU concernant la réalisation d'une presse de cerclage,- que Monsieur Y... a sollicité MECAPLUS pour la modification d'une machine BARELL NOSE du client SEGUIN-MOREAU dont les plans avaient été initialement conçus par ALTEP ; ces faits sont contestés, sur ce point, au vu des éléments fournis par la S. A. I. dont les plans, une expertise s'impose dans les conditions qui suivent.

PAR CES MOTIFS La cour,

Confirme les jugements seulement en ce qu'ils ont débouté la société ALTEP INGENIERIE de ses demandes formulées au titre des préjudices subis dans les " affaires " Z..., DAVID B..., H2P S. A. S. (à propos des pénalités contractuelles de retard), MECAPLAST (à propos des retards et de la perte de ce client), la mise en difficulté du client H2P,
Le réforme pour le surplus,
Dit que Messieurs X... et Y... se sont rendus solidairement coupables de fautes lourdes en tentant de désorganiser la société ALTEP INGENIERIE par les tentatives massives de débauchage de son personnel pendant l'exécution de leurs contrats de travail,
Sursoit à statuer sur les autres demandes relatives au :- détournement du logiciel RANO,- détournement de plans, logiciel et clientèle,

Avant dire droit, Ordonne une expertise et Commet pour y procéder : A-Monsieur Jean-Jacques N...-...- Tél ...- avec mission de :- se faire remettre tous documents utiles, dont les plans établis par la SARL ALTEP INGENIERIE, ceux signés par Monsieur Y... seul,- fournir à la cour tous éléments propres à lui permettre de déterminer : 1o) si Messieurs X... et Y..., dans le cadre de leurs activités successivement exercées auprès des sociétés ALTEP INGENIERIE et CERGY AQUITAINE, ont détourné, au profit de la seconde, le logiciel et les plans utilisés et établis par la première, notamment à l'occasion de la modification de la machine BARELL NOSE, de l'élaboration d'une presse de cerclage construite par MECAPLUS, 2o) dans l'affirmative, les préjudices subis par la SARL ALTEP INGENIERIE,

B-Monsieur Jean-Jacques O...-...- Tél ...- en collaboration avec Monsieur N..., avec mission de :- se faire remettre tous documents utiles dont les comptes de la société ALTEP INGENIERIE,- fournir à la cour tous éléments propres à déterminer les préjudices subis par la société ALTEP INGENIERIE pour le cas où les détournements du logiciel, des plans, de la clientèle seraient établis.

Dit que la société ALTEP INGENIERIE consignera les sommes de 2. 500 € à titre de provision à valoir sur la rémunération de Monsieur N... et de 1. 500 € à valoir sur la rémunération de Monsieur O... auprès de la Régie d'Avances et de Recettes de la Cour, dans les deux mois de la présente décision,
Dit qu'à défaut de consignation dans le délai, la désignation de l'expert sera caduque, sauf prorogation du délai ou relevé de caducité,
Dit que les experts déposeront leur rapport commun au secrétariat greffe de la cour avant le 31 décembre 2008,
Dit qu'en cas de refus ou d'empêchement de l'expert, il sera pourvu à son remplacement par simple ordonnance du Président de la chambre sociale, chargé de surveiller les opérations d'expertise,
Condamne in solidum Messieurs X... et Y... à payer à la SARL ALTEP INGENIERIE une provision de 15. 000 €,
Réserve les dépens.
Signé par Benoît Frizon de Lamotte, Président, et par Chantal Tamisier, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
C. Tamisier B. Frizon de Lamotte


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07/05663
Date de la décision : 26/06/2008
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes d'Angoulème, 16 janvier 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2008-06-26;07.05663 ?
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