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19/06/2008 | FRANCE | N°07/00610

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale, 19 juin 2008, 07/00610


ARRET RENDU PAR LA

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

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PP

Le : 19 Juin 2008

CHAMBRE SOCIALE-SECTION B

PRUD'HOMMES

No de rôle : 07 / 610

S. A. R. L. NATHALIS
prise en la personne de son représentant légal

c /

Madame Aurélie X... épouse Y...

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification

(acte d'huissier)

Certifié par le Greffier en Chef

Grosse délivrée le :

à :

Prononcé publiquement par mise à disposition au Greffe de la C...

ARRET RENDU PAR LA

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

----------------------------------------------

PP

Le : 19 Juin 2008

CHAMBRE SOCIALE-SECTION B

PRUD'HOMMES

No de rôle : 07 / 610

S. A. R. L. NATHALIS
prise en la personne de son représentant légal

c /

Madame Aurélie X... épouse Y...

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier)

Certifié par le Greffier en Chef

Grosse délivrée le :

à :

Prononcé publiquement par mise à disposition au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le 19 Juin 2008

Par Monsieur Patrick BOINOT, Conseiller,
en présence de Madame Chantal TAMISIER, Greffier,

La COUR D'APPEL de BORDEAUX, CHAMBRE SOCIALE SECTION B, a, dans l'affaire opposant :

S. A. R. L. NATHALIS, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social 19, Boulevard de Bury-16000 ANGOULÊME,

Représentée par Maître Max BARDET, avocat au barreau de BORDEAUX,

Appelante d'un jugement (R. G. F 06 / 64) rendu le 22 janvier 2007 par le Conseil de Prud'hommes d'ANGOULÊME, Section Commerce, suivant déclaration d'appel en date du 05 février 2007,

à :

Madame Aurélie X... épouse Y..., demeurant...,

Représentée par Maître Christelle BOTTREAU-ANDREU, avocat au barreau de BORDEAUX,

Intimée,

rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue en audience publique le 16 Avril 2008, devant :

Monsieur Benoit FRIZON DE LAMOTTE, Président,
Monsieur Patrick BOINOT, Conseiller,
Monsieur Jean-François GRAVIE-PLANDE, Conseiller,
Patricia PUYO, Adjoint Administratif faisant fonction de Greffier,

et qu'il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ci-dessus désignés.

***

FAITS ET PROCEDURE

Suivant contrat à durée indéterminée à temps partiel signé le 3 novembre 2000, Mme Aurélie X... a été engagée, à compter du 6 novembre 2000, en qualité de commerciale dans une agence immobilière d'Angoulême gérée par la société Nathalis (la société). Par avenant signé le 30 novembre 2001 et prenant effet le 1er décembre 2001, elle a occupé à temps complet un poste de commerciale / assistante commerciale. La société, ayant constaté que Mme X..., en dépit d'une diversification de son activité par adjonction des transactions immobilières aux locations selon avenant signé le 1er juin 2005, n'était pas parvenue à atteindre ses objectifs, a procédé à son licenciement pour cause réelle et sérieuse par lettre du 23 novembre 2005. Mme X... a saisi le Conseil de prud'hommes d'Angoulême.

Par jugement du 22 janvier 2007, le Conseil de Prud'hommes d'Angoulême a déclaré le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et il a condamné la société à payer à Mme X... la somme de 8 232 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et celle de 600 euros à titre d'indemnité allouée en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; et il a rejeté le surplus des demandes des parties.

La société a régulièrement interjeté appel de cette décision.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions écrites, développées oralement à l'audience, la société sollicite de la Cour qu'à titre principal, elle réforme le jugement frappé d'appel, juge que le licenciement de Mme X... repose sur une cause réelle et sérieuse, rejette la demande de Mme X... et la condamne à lui payer la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; subsidiairement qu'elle confirme le jugement en ce qu'il a réduit à de plus justes proportions la demande de dommages et intérêts de Mme X....
Exposant qu'un employeur peut licencier un salarié qui n'atteint pas les objectifs fixés dès lors que ceux-ci sont raisonnables, elle fait valoir que Mme X... n'a pas atteint ses objectifs contractuels alors qu'ils étaient réalisables et que cette insuffisance est due à des motifs inhérents à sa personne ; elle conteste le fait que les insuffisances reprochées résultent du caractère défavorable de la conjoncture ou du caractère économique du licenciement. Elle précise que Mme X... n'a pas réalisé les objectifs fixés en ce qui concerne la location, qu'ils étaient cependant atteints lorsqu'elle était motivée et qu'elle n'a pas voulu effectuer l'activité nouvelle de vente, l'absence de résultat étant avérée en ce domaine.

Oralement, la société fait valoir que c'est à l'audience que Mme X... conteste les chiffres des tableaux produits par elle ; elle demande à pouvoir s'expliquer de façon complémentaire sur ces chiffres, sauf à ordonner une mesure complémentaire.

Par conclusions écrites, développées oralement à l'audience, Mme X... sollicite de la Cour qu'elle rejette l'appel de la société, juge son licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et, en conséquence, condamne la société à lui payer la somme de 16 467, 72 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et celle de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle expose qu'elle n'a pu, pas plus que l'autre salariée qui travaillait avec elle, réaliser les objectifs d'adhésion fixés, même après adjonction de l'activité de transactions immobilières, qu'elle a refusé la proposition qui lui avait été faite par lettre du 24 octobre 2005 de voir son temps de travail réduit à mi-temps, et qu'elle a été licenciée pour non-respect des objectifs contractuels alors que l'autre salariée ne l'était pas. Affirmant qu'un employeur ne peut licencier un salarié en application d'une clause contractuelle prévoyant que la non-réalisation de l'objectif, pendant un certain temps, pourrait être considérée comme un motif de rupture du contrat de travail, elle fait valoir que les objectifs qui lui avaient été fixés étaient irréalisables, eu égard aux résultats des collègues de travail exerçant dans les mêmes conditions et à la conjoncture, tant interne qu'externe, affectant la branche d'activité du salarié concerné. Elle soutient que le motif de son licenciement n'est pas la non-atteinte des objectifs mais les difficultés économiques rencontrées par la société. Elle invoque le bénéfice de l'article L. 122-14-4 du Code du travail, compte tenu de son ancienneté de cinq ans et de l'appartenance de l'agence à un groupe plus important, et en précisant que la somme de 16 467, 72 euros qu'elle sollicite correspond à un an de salaire.

MOTIFS

Sur le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement
Selon l'article L. 122-14-3, devenu l'article L. 1235-1 du Code du travail, en cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles.

La lettre du 23 novembre 2005 qui détermine la cause du licenciement et fixe les limites du litige indique que cette cause est la suivante :

Nous vous rappelons que votre activité prévue au titre de l'exécution de ce contrat de travail, concernait la location de biens immobiliers.
L'avenant du 1er juin 2005 étendant vos activités de vente.

Concernant plus particulièrement votre fonction de commerciale, votre contrat de travail prévoyait en son article 3 la réalisation de l'objectif suivant :
un minimum de 25 adhésions par mois pour la partie location.
Or, nous avons pu constater que vous n'avez pas réalisé vos objectifs commerciaux, ceux-ci étant bien inférieurs aux 25 adhésions qui vous étaient contractuellement demandées.
Le 3 février 2004, nous étions dans l'obligation de vous notifier un premier avertissement en raison de vos résultats commerciaux très insuffisants.
En dépit de cet avertissement, vos résultats commerciaux se sont également révélés insuffisants à la fin de l'année 2004.
Ce fut la raison pour laquelle, le 5 janvier 2005, nous étions dans l'obligation de vous notifier un second avertissement en raison de vos résultats commerciaux médiocres pour l'année 2004.
Or, ce second avertissement ne vous a pas pour autant motivé, dans la mesure où, depuis le mois de septembre 2005, vos derniers résultats concernant la partie location de votre activité s'avèrent être très insuffisants :
- septembre 2005 : 16 adhésions
-octobre 2005 : 14 adhésions
Nous vous avions pourtant donné tous les moyens pour atteindre vos objectifs, notamment par le biais de la venue d'une formatrice, Mme A....
Lors de sa venue, vous aviez d'ailleurs curieusement réussi à augmenter le nombre d'adhésions.
Cela démontre que seul votre manque de volonté et de motivation est à l'origine de cette insuffisance de résultats.
Aussi, en dépit de ces deux avertissements et de nos multiples observations verbales, vous n'avez pas pour autant modifié votre comportement.
Par ailleurs, l'avenant du 1er juin 2005 conclu afin de vous permettre d'élargir votre activité à la vente de biens immobiliers, contenait également des objectifs que vous avez acceptés.
A ce titre, vous vous étiez engagée à effectuer 1 vente par mois ou un chiffre d'affaires minimum de 5 000 euros par mois.
Or, à ce jour, vous n'avez réalisé aucune vente.
Par ailleurs, ce même avenant prévoyait un objectif de 4 entrées de biens par jour.
Or, nous vous rappelons que vous n'avez réalisé que 9 entrées pour les mois de juin et juillet, aucune entrée au mois d'août 2005, et seulement 2 entrées pour le mois de septembre et 5 entrées pour tout le mois d'octobre 2005.
Ici encore l'absence de résultat est incontestable.
Elle démontre un désintéressement total de la partie vente de vos fonctions, que vous exercez depuis le mois de juin 2005.
Vous n'êtes pas censée ignorer que ces très faibles résultats mettent en péril la bonne marche de l'entreprise.

Vous avez d'ailleurs reconnu votre insuffisance lors de nos différents entretiens et notamment lors de l'entretien préalable.
En conséquence, compte tenu de votre incapacité à atteindre les objectifs contractuels qui vous étaient fixés, et ce en dépit de tous les moyens mis à votre disposition et de la patience dont nous avons fait preuve, nous sommes contraints de vous licencier pour cause réelle et sérieuse.

Par cette lettre, la société licencie Mme X... pour ne pas avoir atteint les objectifs contractuels fixés alors que, selon elle, ils étaient réalisables, et ce pour des raisons inhérentes à sa personne.

L'insuffisance de résultats, qui peut être établie par référence à la non-réalisation d'objectifs, contractuels ou non, mais réalistes (ou par comparaison des résultats du salarié avec ceux obtenus pour la même année par la quasi-totalité de ses collègues de travail) ne suffit cependant pas à légitimer le licenciement ; il faut que les mauvais résultats du salarié résultent d'une faute ou d'une insuffisance professionnelle. Et le licenciement est sans cause réelle et sérieuse lorsque l'insuffisance n'est pas imputable au salarié mais est due à la situation du marché ou à la décision de l'employeur de ne plus travailler avec certains clients importants.
Pour démontrer ce grief, la société invoque la non-atteinte des objectifs contractuels fixés, le caractère réalisable des objectifs et l'insuffisance des résultats pour raisons inhérentes à sa personne.
Mme X... ne conteste pas le défaut de réalisation des objectifs contractuels fixés. Cependant, sans qu'il soit nécessaire de contester les chiffres des tableaux produits par la société, il apparaît que, dans le domaine de la location, les résultats dont se prévaut la société, s'ils montrent que Mme X... n'atteignait pas les résultats de Mme B... qui lui a succédé ni même ceux de Mme C... avec qui elle a travaillé, témoignent de ce qu'elle n'a pas atteint les objectifs fixés seulement au cours de quelques mois et non de manière régulière. Notamment, si lui est reprochée une insuffisance de résultats durant l'année 2005, cette insuffisance a affecté, au cours de cette année, le mois de janvier, septembre, octobre et décembre et elle est restée faible ; en revanche, au cours des mois d'avril, mai et août, elle a obtenu des résultats supérieurs à ceux de Mme C....
De plus, il est étonnant, ainsi que le relève Mme X..., qu'elle ait reçu les félicitations de sa supérieure hiérarchique pour les mois d'août 2003 et juillet 2004 alors qu'au cours de ces deux mois, elle n'avait pas atteint les objectifs fixés.
Par ailleurs, tant dans le domaine de la location que dans celui de la transaction, la société, même en se prévalant des résultats de Mme B... qui a suivi Mme X..., ne démontre pas en quoi les résultats insuffisants reprochés à Mme X... résulteraient de sa faute ou de son insuffisance professionnelle, alors que celle-ci disposait de peu de moyens d'actions sur la clientèle et qu'il est avéré, comme le reconnaît la société, que le marché de l'immobilier sur place était difficile.
Au vu de ces éléments fournis par les parties, en application de l'article L. 122-14-3, devenu l'article L. 1235-1 du Code du travail, le licenciement de Mme X... par la société est sans cause réelle et sérieuse.

En conséquence, confirmant le jugement sur le principe du licenciement, la Cour décide que Mme X... a fait l'objet d'un licenciement abusif.

Sur le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Du fait de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement, Mme X... subit nécessairement un préjudice dont elle est bien fondée à demander réparation. Compte tenu de son ancienneté (plus de cinq ans), de son salaire au cours des six derniers mois de l'année, de la période de chômage qui a duré de la fin du mois de janvier au 3 mai 2006 et de ce que son nouveau salaire est inférieur de 150 euros à celui qu'elle percevait de la société, la Cour estime qu'elle sera justement indemnisée de ce préjudice par l'allocation de la somme telle que fixée par le Conseil de Prud'hommes.

PAR CES MOTIFS
LA COUR

Confirme le jugement du Conseil de prud'hommes d'Angoulême du 22 janvier 2007

Y ajoutant,

Condamne la société Nathalis à payer à Mme X... la somme de 1. 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

La condamne aux dépens d'appel.

Signé par Benoît Frizon de Lamotte, Président, et par Chantal Tamisier, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. Tamisier B. Frizon de Lamotte


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07/00610
Date de la décision : 19/06/2008
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes d'Angoulème, 22 janvier 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2008-06-19;07.00610 ?
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