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19/06/2008 | FRANCE | N°06/06177

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale, 19 juin 2008, 06/06177


ARRET RENDU PAR LA

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

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PP

Le : 19 juin 2008

CHAMBRE SOCIALE-SECTION B

PRUD'HOMMES

No de rôle : 06 / 6177

Madame Brigitte X...

c /

Société NOUVELLE CLINIQUE SAINTE MARIE
prise en la personne de son représentant légal

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'hui

ssier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :
Prononcé publiquement par mise à disposition au Greffe de la Cour, les pa...

ARRET RENDU PAR LA

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

--------------------------

PP

Le : 19 juin 2008

CHAMBRE SOCIALE-SECTION B

PRUD'HOMMES

No de rôle : 06 / 6177

Madame Brigitte X...

c /

Société NOUVELLE CLINIQUE SAINTE MARIE
prise en la personne de son représentant légal

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :
Prononcé publiquement par mise à disposition au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile,

Le 19 juin 2008

Par Monsieur Claude BERTHOMME,
en présence de Madame Chantal TAMISIER, Greffier,

La COUR D'APPEL de BORDEAUX, CHAMBRE SOCIALE SECTION B, a, dans l'affaire opposant :

Madame Brigitte X..., demeurant...,

Représentée par Maître Olivier BRUNET, avocat au barreau de LA CHARENTE,

Appelante d'un jugement (R. G. F05 / 250) rendu le 27 novembre 2006 par le Conseil de Prud'hommes d'ANGOULEME, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel en date du 11 décembre 2006,

à :

Société NOUVELLE CLINIQUE SAINTE MARIE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social Les Hauts de Lunesse-42, rue Chabernaud-16340 L'ISLE D'ESPAGNAC,

Représentée par Maître Patrick SCHITTECATTE, avocat au barreau de LA CHARENTE,

Intimée,

Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue en audience publique le 26 Mars 2008, devant :
Monsieur Benoît FRIZON DE LAMOTTE, Président,
Monsieur Claude BERTHOMME, Conseiller,
Monsieur Jean-François GRAVIE-PLANDE, Conseiller
Patricia PUYO, Adjoint Administratif faisant fonction de Greffier,

et qu'il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ci-dessus désignés,

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par contrat écrit du 29 mars 1992, la POLYCLINIQUE DE LA SOURCE à L'ISLE D'ESPAGNAC a engagé Madame Brigitte X... en qualité de Directeur Administratif pour une durée indéterminée.
En 2004, cette polyclinique a été cédée à la SOCIÉTÉ NOUVELLE SAINTE MARIE (la S. A.).

Par acte écrit du 1er septembre 2004, Madame Brigitte X... a été nommée " Directeur Adjoint chargé des ressources humaines et des programmes d'investissement ", sous l'autorité du Directeur des cliniques de la Mutualité de la Charente moyennant un salaire brut mensuel de 6. 050 € ; Madame Brigitte X... se voyait confier les missions suivantes :
- gestion des ressources humaines, recrutements, contrats, relations sociales, gestion des salaires, discipline et ceci en partenariat avec le Directeur des soins infirmiers pour les personnes des services de soins,
- personnel médical : élaboration et suivi des contrats, suivi de l'organisation des activités en liaison étroite avec le Directeur,
- investissements et travaux : élaboration, suivi et mise en oeuvre des programmes en liaison étroite avec le Directeur ; elle devait enfin suppléer le Directeur pendant les absences de ce dernier.
À cette date, la S. A. exploitait les anciennes cliniques SAINTE MARIE, CENTRE CLINICAL, né de la fusion de ÉMILE ROUX et SAINTE MARIE, la POLYCLINIQUE DE LA SOURCE.

Par lettre du 7 septembre 2005, la S. A. a écrit à Madame Brigitte X... :
Nous vous déchargeons de la fonction DRH que vous occupez aujourd'hui,
Vous serez chargée de la préparation et de l'organisation juridique vis à vis des Médecins (préparations des contrats, organisation matérielle des locaux,...),
Préparation des dossiers devant être présentés au CROSS,
À moyen terme, au départ de Madame A..., vous prendrez en charge le direction du Chalet de Beaumont. .

Le procès-verbal de la réunion des délégués du personnel du 8 septembre 2005 précise qu'à la question posée par un délégué sur les raisons de l'absence de Madame Brigitte X..., le Directeur, Monsieur B..., a répondu :
Madame X... est nommée à d'autres fonctions. Elle va s'occuper de l'ensemble des problèmes juridiques et organisationnels des contrats, des locaux et matériels des médecins, des séances des dossiers CROSS pour le regroupement et ce à temps plein. Elle prendra à terme la direction du moyen séjour. Madame D... se voir confier le poste de DRH sous l'autorité de Monsieur B.... .

Par lettre du 17 septembre 2005, Madame Brigitte X... a refusé les fonctions décrites dans la lettre de la S. A. du 7 septembre 2005.

Le 25 octobre 2005, la salariée reçut notification d'une mise à pied conservatoire et d'une convocation à un entretien préalable fixé au 3 novembre 2005 en vue d'un éventuel licenciement.

Par lettre du 28 novembre 2005, la S. A. a notifié à Madame Brigitte X... son licenciement pour faute grave pour les motifs suivants :
... En effet, depuis plusieurs semaines, nous sommes contraints de constater que la façon dont vous acquittez des tâches qui vous sont confiées et votre comportement, sont désormais tout à fait critiquables.
Les exemples suivants permettront de le comprendre à l'évidence :
Nous avons été contraints de constater que les dossiers des médecins, gérés par vos soins, étaient, pour le moins, incomplets ; Ceci s'est manifesté de la façon suivante :
- Absence d'avenants aux contrats du fait du non-suivi des déménagements.
- Présence dans les dossiers de deux contrats, originaux où il manque une page sur deux.
- L'absence de baux pour certains médecins a empêché les services comptables de facturer les
loyers et charges locatives, d'où un manque à gagner pour la clinique et une accumulation de retards.
Les lacunes qui étaient les vôtres sur ce terrain étaient à ce point importantes que votre direction a été contrainte de reprendre directement la gestion de ces dossiers, ce qui explique les constats faits plus haut ; Tout ceci révèle des manquements extrêmement graves aux missions qui vous sont confiées en votre qualité d'adjointe chargée des ressources humaines, manquements qui causent bien entendu un préjudice évident à notre société.
Ces éléments ne peuvent s'analyser qu'en des manquements volontaires à vos obligations professionnelles ou à des erreurs professionnelles consécutives à une mauvaise volonté délibérée de votre part de mener à bien certaines des missions essentielles qui vous sont confiées.
Les mêmes constats que ceux évoqués plus haut, s'agissant des dossiers des médecins traités par vos soins peuvent être faits relativement à la manière dont vous vous acquittez des missions correspondant à votre fonction DRH.
A ce titre également, un grand nombre de carences a été relevé :
- Absence d'organisation du service dans la mesure où aucune fiche de fonction n'est validée par les personnels, ce qui implique notamment que vous n'avez pas été reconnue, dans le

cadre de votre fonction, par ces mêmes personnels, ce qui a entraîné à son tour des difficultés extrêmement significatives dans l'organisation du service et dans l'efficacité de celui-ci à traiter les dossiers dont il a la charge.
- Vous avez commis une erreur dans l'application de la Loi Aubry, ce qui a entraîné 40. 000 Euros
de trop payé.
A plusieurs reprise, le contrôle que vous vous devez d'effectuer des bulletins de paie n'a pas été suffisamment exhaustif, ce qui est apparu relativement à l'oubli de deux paies de salariés au mois de juillet 2005.
Vous n'avez procédé à la mise en place d'aucun tableau de bord social dans votre service, ce qui ne permettait pas d'avoir une visibilité claire des missions confiées à celui-ci, et ne permettait pas une activité cohérente de ce dernier.
La conséquence de tout ceci est que nous avons été contraints de constater que vous ne vous étiez, à aucun moment et d'aucune manière, intégrée dans l'équipe de direction du fait des négligences dont vous avez fait preuve dans l'accomplissement de vos missions, lesquelles engendraient des dysfonctionnements dans la bonne marche de l'entreprise. Ceci ne peut s'expliquer, là encore, que par un manquement volontaire à vos obligations professionnelles et à une mauvaise volonté délibérée de tenir compte des consignes données par votre hiérarchie, compte tenu qu'à plusieurs reprises ces griefs et ces manquements ont été portés à votre connaissance en même temps qu'il était sollicité de votre part de réagir dans le bon sens, ce que vous n'avez jamais jugé utile de faire.
La conclusion de tout ceci est que vous étiez réellement dans l'incapacité de gérer le service dont vous aviez la charge ; Ceci s'est d'ailleurs traduit par le fait que vous avez sollicité un cabinet extérieur spécialisé en ressources humaines pour apprendre à mieux gérer une équipe de six personnes, ce qui, bien entendu, ne pouvait manquer d'avoir un coût pour la société.
De tels griefs et de tels manquements vont bien au-delà d'une simple notion d'insuffisance professionnelle. Ils révèlent, insistons sur ce point, des comportements et des attitudes particulièrement fautifs dans la mesure où ils correspondent à des manquements évidents et délibérés à vos obligations, telles qu'elles résultent de votre fonction et de vos missions, et dans la mesure également où les erreurs professionnelles relevées ci-dessus sont consécutives à une mauvaise volonté délibérée de votre part de tenir compte des consignes données par votre hiérarchie et d'assumer les missions qui vous sont confiées dans de bonnes conditions.
Une autre preuve de ce comportement fautif, s'il en était besoin, est que vous vous êtes même permis de détourner, pour

des raisons d'ailleurs parfaitement obscures mais qui ne peuvent s'expliquer que par la volonté de causer du trouble dans votre service et partant à l'entreprise en la privant de documents utiles à son activité, des documents qui appartiennent à la sôciété et qui étaient directement liés à votre fonction DRH, ce qui révèle un état d'esprit particulièrement critiquable et en inadéquation totale avec celui qui se doit d'être en vigueur au sein de notre société... .

Le 12 décembre 2005, Madame Brigitte X... a saisi le conseil de prud'hommes d'ANGOULÊME d'une demande tendant à la condamnation de la S. A. à lui payer diverses indemnités en suite de son licenciement qu'elle estimait dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 27 novembre 3006, le conseil de prud'hommes a statué ainsi :
- Dit que le licenciement de Madame Brigitte X... ne repose pas sur une faute grave, mais sur une cause réelle et sérieuse.
- Condamne la Société Nouvelle Clinique SAINTE-MARIE à payer à Madame Brigitte X... :
* 6. 695, 45 € brut au titre de la mise à pied conservatoire,
* 669, 54 € brut au titre des congés payés sur mise à pied,
* 37. 662 € brut au titre des 6 mois de préavis conventionnel,
* 3. 766, 20 € au titre des congés payés sur préavis,
* 65. 908, 50 € net au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
* 1. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Madame Brigitte X... a régulièrement interjeté appel de cette décision ;

Par ses dernières conclusions déposées le 14 mars 2008 développées à l'audience et auxquelles il est expressément fait référence, elle demande à la cour de confirmer le jugement sauf à lui allouer les sommes de :
* 94. 155 € nets en réparation du préjudice causé par le licenciement qui est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
* 6. 277 € de dommages-intérêts pour non-respect du délai de réflexion,
* 2. 000 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
Brigitte X... a régulièrement relevé un appel limité au seul chef de ce jugement disant que son licenciement avait une cause réelle et sérieuse et rejetant sa demande de dommages-intérêts de 94. 155 €. Oralement à l'audience, Brigitte X... précise qu'elle ne maintient pas en appel sa demande concernant le paiement de 13 jours de RTT qu'elle avait fait figurer dans ces conclusions du 14 décembre 2007.

De son côté, la S. A., par conclusions déposées le 10 mars 2008, oralement soutenues à la barre et auxquelles la cour se réfère expressément, formant appel incident, demande à la cour de :

- considérer que le licenciement pour faute grave notifié à Madame X... est parfaitement justifié,
- en conséquence, réformer le jugement du conseil de prud'hommes d'Angoulême en ce qu'il a considéré que le licenciement, s'il reposait bien sur une cause réelle et sérieuse, ne pouvait reposer sur une faute grave,
- en conséquence encore, débouter Madame X... de l'intégralité de ses demandes inhérentes à la rupture de son contrat et de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de 94. 155 euros,
- à titre éminemment subsidiaire et s'il en était besoin, confirmer a minima le jugement du conseil de prud'hommes d'Angoulême en ce qu'il a admis la réalité et le sérieux du licenciement tout en écartant la faute grave,
- débouter également Madame X... de sa demande concernant les jours de RTT et donc confirmer le jugement du conseil de prud'hommes sur ce point,
- la débouter de sa demande concernant l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- la condamner au paiement de 2. 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la régularité de la procédure de licenciement

Madame Brigitte X... fait d'abord valoir que la procédure de licenciement est irrégulière, la S. A. ayant pris sa décision de la licencier avant l'entretien préalable.

Toutefois, s'il est exact que l'employeur a convoqué Madame Brigitte X... à un entretien préalable à un licenciement, que cet entretien a eu lieu et a été suivi du licenciement sans qu'il soit établi que sa décision ait été arrêtée avant, au demeurant, Madame Brigitte X... invoque elle-même une tentative de transaction, la demande formée au titre de l'irrégularité de la procédure de licenciement doit être rejetée.

Sur la rupture du contrat de travail

Ainsi que le soutient la salariée :
- la S. A. ne lui a pas seulement proposé le 7 septembre 2005 de nouvelles fonctions, mais l'a dépossédée de la plupart de ses compétences conférées par le contrat dont elle bénéficiait depuis le 1er septembre
2004, au profit notamment de Madame Nathalie D..., sa collaboratrice, qui devenait DRH selon le procès-verbal de la réunion des délégués du personnel du 8 septembre 2005,

- avant cette décision, aucun grief précis ne lui avait té notifié par sa direction,
- le motif réel du licenciement repose sur son refus d'accepter la proposition du 7 septembre 2005, refus qui n'est pas évoqué dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige.

Il appartient quoi qu'il en soit à l'employeur de rapporter la preuve de la faute grave énoncée dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige.

Sur les contrats des médecins

Sur les absences d'avenants ou de contrats en général (1er grief selon l'appelante principale)
La S. A. fait état d'une liste de douze dossiers de médecins que son directeur a dû reprendre entièrement en octobre 2005 à défaut de tenue des contrats ou avenants rendus nécessaires en raison de différents déménagements ou transferts résultant du regroupement des trois cliniques.

Toutefois, la S. A. n'indique pas à partir de quels éléments elle a pu établir les contrats et avenants en question. Elle ne précise pas si ces médecins détenaient des contrats antérieurs ou des éléments provenant de la DRH, ou s'ils avaient simplement des courriers du précédent Directeur, Denis E....

Elle joint les courriels échangés entre Michel F... et la secrétaire du Directeur des cliniques entre mai et septembre 2005 rappelant la nécessité d'établir des contrats ou des avenants pour des médecins afin de permettre les appels de loyers et de charges.

À cela, Brigitte X... réplique que, si elle n'a pu établir les douze derniers avenants ou contrats de médecins, c'est qu'elle n'a pas obtenu avant le 26 septembre 2005 les éléments précis lui permettant de le faire.

Pour démontrer en effet qu'elle ne pouvait pas établir les contrats ou avenants des médecins en question tant que le précédent Directeur ne lui avait pas donné les éléments de prix de loyer négociés directement entre lui et les médecins, qu'il s'agisse de nouveaux médecins ou de médecins changeant de lieu d'exercice, d'une clinique à une autre, Brigitte X... fournit plusieurs courriels :
- le 10 mai 2005, elle doit répondre à Michel F... qui la questionne qu'elle n'a pas le contrat de bail concernant le Docteur G..., oncologue,
- le 5 septembre 2005, ni Michel F..., ni Brigitte X... ne savent qui est le Docteur H... présent aux côtés du Docteur Y... depuis le 1er septembre 2005,

- le 5 septembre 2005, Michel F... s'adresse directement à Monique I..., la secrétaire du Directeur des cliniques, pour signaler que son service comptable n'a pas les éléments de facturation des loyers et charges des médecins,
- les 26 et 28 septembre 2005, pendant que Brigitte X... est mise à pied, Michel F... continue d'envoyer des courriels à Monique I..., la secrétaire du Directeur des cliniques, pour rappeler qu'il n'a toujours pas reçu les éléments nécessaires.

La Direction des cliniques qui affirme que les dossiers de médecins repris en octobre n'étaient pas complètement renseignés, ne peut établir que la carence en soit imputable à Brigitte X.... En effet, elle n'établit pas que le précédent Directeur, Denis E..., lui avait fourni tous les éléments nécessaires à l'établissement des contrats et avenants et qu'elle serait restée inactive par mauvaise volonté délibérée comme elle l'affirme dans la lettre de licenciement.

Ce premier grief n'est pas établi.

Sur le caractère incomplet de deux contrats originaux (2ème grief selon l'appelante principale)
Sans être démentie, Brigitte X... affirme qu'elle a préparé une cinquantaine d'avenants aux contrats des médecins, d'une part, que les deux contrats originaux trouvés aux dossiers avec une page manquante sur deux ont été signés par Monsieur Jean-Paul Z..., président du directoire de la S. A. après validation par Denis E..., précédent Directeur des cliniques, d'autre part.

Ce deuxième grief ne peut en conséquence être retenu, ni comme faute grave, ni comme cause réelle et sérieuse de licenciement de Brigitte X....

Sur les manquements concernant le service DRH

Sur l'oubli de la paie de deux salariées en juillet 2005 (5ème grief selon l'appelante principale)
Deux paies sur 400 ont été omises en juillet 2005. Il s'agit de deux faits démontrés et avérés. Une seule des deux salariées était en CDD de recrutement récent pour lequel les informations avaient pu ne pas être
transmises à temps au service DRH. L'autre salariée, en CDI était embauchée depuis 1997 et rien n'indique qu'elle venait de reprendre son travail en juillet après une interruption.

Mais les conséquences négatives de ces faits ont été atténuées par versement à chacune des deux salariées d'un acompte significatif respectivement le 4 et le 5 août 2005.

Ce grief est réel mais il ne peut être constitutif ni d'une faute grave rendant impossible le maintien de Brigitte X... dans l'entreprise, ni à lui seul d'un motif sérieux de licenciement.

Sur le défaut d'organisation et sur les fiches de fonction établies avec l'aide d'un intervenant extérieur (3ème et 8ème griefs selon l'appelante principale)
Les pièces versées aux débats démontrent bien l'intervention du cabinet extérieur de M. J... qui a facturé 3. 000 € ses quatre interventions (25 et 26 janvier 2005, puis 2 et 3 février 2005) dans l'entreprise et a aidé à établir les fiches de fonction des six personnes composant l'équipe du service DRH.

Brigitte X..., sans être démentie sur ces points, indique que M. J..., est intervenu avec l'accord du Directeur de l'époque, Denis E..., d'une part, qu'une fois établies les fiches de fonction grâce à son intervention, elles n'ont pu être mises en application essentiellement en raison de l'attitude de Nathalie D... qui, souhaitant passer cadre, a refusé de signer la sienne et a ainsi donné le mauvais exemple à tout le service DRH, d'autre part.

Nathalie D..., nouvelle DRH des trois cliniques, atteste désormais contre Brigitte X... dont elle a pris la place.

Si l'organisation du service DRH sur les bases des fiches de fonction alors établies n'a pas été possible, malgré le coût de l'intervenant extérieur, ce fait n'est pas seulement imputable à Brigitte X.... Une large part en incombe à Nathalie D... et la S. A. ne peut ici retenir ce grief contre Brigitte X....

Sur l'erreur dans l'application de la Loi Aubry et le paiement de 40. 000 € de charges en trop (4ème grief selon l'appelante principale)
Sans être démentie, Brigitte X... mentionne que le trop versé d'une somme de 40. 000 € par oubli d'allégements de charges sociales prévus par la Loi Aubry concerne l'établissement Clinique Sainte Marie pour la période du 1er avril au 31 décembre 2004, donc commencée avant sa prise de fonction comme DRH au 1er septembre 2004.

La rectification a été faite en juin 2005 par l'expert comptable, alors que Brigitte X... était devenue DRH et la somme a été récupérée par la S. A. Sa trésorerie a été réduite de 40. 000 € jusqu'au 30 juin 2005 seulement.

Le fait matériel est avéré. En revanche, la S. A. ne fournit aucune autre raison objective de l'imputer à charge à Brigitte X... que sa nomination comme responsable de la DRH à partir du 1er septembre 2004. Il ne s'agit pas d'un grief justifié.

Ce manquement du 1er avril 2004, réparé en juin 2005, ne peut avoir ni le caractère d'une faute grave rendant impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise en septembre, octobre ou novembre 2005, ni le caractère d'une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Sur l'absence de mise en place par le service DRH d'un tableau de bord social, ce qui ne permettait d'avoir ni visibilité claire, ni activité cohérente en son sein (6ème grief selon l'appelante principale)

Sous ce libellé, la S. A. fait grief à Brigitte X... d'avoir diffusé régulièrement de simples données statistiques sur deux indicateurs seulement : l'état de l'effectif en équivalent temps plein (ETP) et le taux d'absentéisme dans chacune des cliniques, et non pas un véritable " tableau de bord social ".

À aucun moment la S. A. n'a versé aux débats une seule instruction précise donnée à Brigitte X... avant le 25 septembre 2005 pour lui signifier que les états diffusés par le service DRH ne suffisaient pas et que l'on attendait d'elle la diffusion d'un tel " tableau de bord social ".

Ce grief ne peut donc lui être imputable ni comme faute grave, ni comme motif réel et sérieux de licenciement.

Sur le détournement de documents utiles (9ème grief selon l'appelante principale)
La S. A. fait grief à Brigitte X... d'avoir emporté un classeur de documents appartenant à l'entreprise. Toutefois, seules deux attestations de salariées demeurées dans l'entreprise font état, celle de Nicole K..., secrétaire du service DRH, de la disparition d'un classeur le 8 septembre 2005, celle de Nathalie D..., adjointe au DRH, d'un acte volontaire de Brigitte X... emportant un classeur bleu sous son bras à l'heure du déjeuner le 7 septembre 2005.

Le bureau de Brigitte X... a été vidé par les soins du directeur des cliniques, Monsieur B..., entre le 4 et le 9 octobre 2005 de tous les documents et classeurs qu'il contenait ; il n'est pas démontré que Brigitte X... soit l'auteur de ce détournement ou de cette perte.

Sur l'absence de réaction dans le bon sens aux griefs et manquements portés à la connaissance de la salariée (7éme grief identifié par elle)
Comme le relève la salariée, elle n'a jamais été réprimandée et n'a donc jamais eu l'occasion de réagir à des griefs qui n'ont été ni exprimés ni portés à sa connaissance avant le 25 septembre 2005.

La S. A. soutient le contraire. Elle fait état de courriels de Michel F... sollicitant des renseignements nécessaires au service de comptabilité et qui ne lui parvenaient pas.

On ne peut toutefois pas assimiler les demandes de renseignements adressées par Michel F..., chef du service financier, à Brigitte X..., chef du service ressources humaines comme autant de rappels à l'ordre ou de réprimandes ayant une nature disciplinaire.

Il demeure qu'avant la " proposition " faite le 8 septembre 2005 à Brigitte X... de prendre des fonctions autres que celles de directeur adjoint chargée des ressources humaines, jamais son supérieur hiérarchique n'avait rien dit de la façon dont elle s'était acquittée de ses missions au sein du service RH.

Si elle a formellement refusé le 17 septembre 2005 cette " proposition ", elle n'a jamais été en mesure, du fait de la nomination de Nathalie D... à sa place dès le 8 septembre 2005, d'infléchir la conduite de ce service dont elle s'est trouvée dessaisie au moment même où elle apprenait que l'on attendait autre chose d'elle.

En réalité, la S. A. n'attendait plus rien d'elle. La S. A., dès la prise de fonctions du nouveau Directeur, Monsieur B..., avait reporté ses attentes sur Nathalie D....

Le seul grief relatif à l'oubli de la paie de deux salariées n'est pas sérieux.

Le licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse et le préjudice sera, par application de l'article L 122-14-4 devenu L 1235-3 du Code du travail, réparé comme il suit au dispositif.

PAR CES MOTIFS
LA COUR, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Réforme le jugement rendu le 27 novembre 2006 par le conseil de prud'hommes d'ANGOULÊME en ce qu'il a retenu que le licenciement de Brigitte X... avait une cause réelle et sérieuse,

Condamne la S. A. SOCIÉTÉ NOUVELLE SAINTE-MARIE à payer à Brigitte X... la somme de 75. 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la S. A. SOCIÉTÉ NOUVELLE SAINTE-MARIE à payer à Brigitte X... la somme complémentaire de 1. 000 € pour l'appel en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Confirme le jugement en toutes ses autres dispositions,

Rejette toute autre chef de demande des parties,

Condamne la S. A. SOCIÉTÉ NOUVELLE SAINT MARIE aux dépens d'appel qui comprendront les éventuels frais d'exécution.

Signé par Benoît Frizon de Lamotte, Président, et par Chantal Tamisier, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. Tamisier B. Frizon de Lamotte


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06/06177
Date de la décision : 19/06/2008
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes d'Angoulème, 27 novembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2008-06-19;06.06177 ?
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