La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/06/2008 | FRANCE | N°07/02263

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0045, 18 juin 2008, 07/02263


COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 18 juin 2008

(Rédacteur : Madame Edith O'YL, Conseiller)

IT

No de rôle : 07 / 02263

LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES

c /

Monsieur Pierre Guy X...
Monsieur Daniel Y...
La Société SWISS LIFE PREVOYANCE ET SANTE

La Société SUISSE D'ASSURANCES GENERALES SUR LA VIE HUMAINE

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avouésDécision déférée à la Cour : jugement rendu l

e 28 mars 2007 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 02 mai 2007

APPELANTE :

LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 18 juin 2008

(Rédacteur : Madame Edith O'YL, Conseiller)

IT

No de rôle : 07 / 02263

LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES

c /

Monsieur Pierre Guy X...
Monsieur Daniel Y...
La Société SWISS LIFE PREVOYANCE ET SANTE

La Société SUISSE D'ASSURANCES GENERALES SUR LA VIE HUMAINE

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avouésDécision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 mars 2007 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 02 mai 2007

APPELANTE :

LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES pris en la personne
de son Mandataire Général pour les opérations en France, la Société LLOYD'S FRANCE SAS, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, 4 rue des Petits Pères 75002 PARIS

Représentée par la SCP Luc BOYREAU et Raphael MONROUX, avoués à la Cour assistée de Maître Romain SCHULZ loco de Maître XERRI HANOTE avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

Monsieur Pierre Guy X... né le 26 Octobre 1942 à COGNAC (16100), demeurant ...

Représenté par la SCP CASTEJA- CLERMONTEL et JAUBERT, avoués à la Cour assisté de Maître OLHAGARAY avocat au barreau de BORDEAUX

Monsieur Daniel Y... né le 28 Septembre 1950 à BERGA, demeurant ...

Représenté par la SCP RIVEL et COMBEAUD, avoués à la Cour assisté de Maître VILLETTE, avocat au barreau de LIMOGES

La Société SWISS LIFE PREVOYANCE ET SANTE, nouvelle dénomination de la Société SUISSE SANTE, Société Suisse d'Assurances Générales sur la Vie, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social, et domiciliée en tant que de besoin en son Centre Régional sis Parc Château Rouquet, 5 rue de Thalès à MERIGNAC (33700), représentée par ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au Centre Régional. 41 rue de Châteaudun- 75304 PARIS CEDEX 09

Représentée par la SCP FOURNIER, avoués à la Cour assistée de Maître LE ROY loco Maître GALLOT LE LORIER avocat au barreau de PARIS

INTERVENANTE :

La Société SUISSE D'ASSURANCES GENERALES SUR LA VIE
HUMAINE, ayant pour dénomination commerciale SWISS LIFE ASSURANCE ET RETRAITE, SA non membre de la CEE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, 40 Quai du Général Guisan 80220 ZURICH SUISSE

Représentée par la SCP FOURNIER, avoués à la Cour assistée de Maître LE ROYloco Maître GALLOT LE LORIER, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 avril 2008 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Robert MIORI, Président,
Madame Edith O'YL, Conseiller,
Madame Danièle BOWIE, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX en date du 28 mars 2007.

Vu l'appel interjeté le 2 mai 2007 par les SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S de LONDRES.

Vu leurs conclusions déposées au greffe de la cour et signifiées le 27 mars 2008.

Vu les conclusions déposées au greffe de la cour et signifiées le
25 mars 2008 par la SA SWISSLIFE PREVOYANCE ET SANT2 qui
forme appel incident et par la SA SUISSE D'ASSURANCES
GENERALES SUR LA VIE HUMAINE qui intervient volontairement aux
débats (sociétés LA SUISSE).

Vu les conclusions déposées au greffe de la cour et signifiées le
29 février 2008 par Monsieur Pierre X....

Vu les conclusions déposées au greffe de la cour et signifiées le
19 février 2008 par Monsieur Daniel Y....

Vu l'ordonnance de clôture en date du 2 avril 2008.

*
* *

A titre liminaire il sera donné acte à la SA SUISSE D ASSURANCES GENERALES SUR LA VIE HUMAINE de son intervention volontaire.

Monsieur Y... après avoir été agent général du LLOYD'S CONTINENTAL été nommé le 1er décembre 2001 agent général des sociétés LA SUISSE pour le département de la haute vienne.

Par un contrat de sous agence en date du 1er avril 2001 il avait donné mandat à Monsieur E... de rechercher les risques assurables en vue de la souscription de polices d'assurance, d'établir tout nouveau contrat, de remplacer ceux existant et de procéder éventuellement à l'encaissement, le sous agent s'obligeant à restituer les fonds encaissés ou quittances dont il demeure comptable jusqu'à leur remise dans les meilleurs délais.

Au cours de l'année 2002 Monsieur E... a établi de faux contrats d'assurance et effectué des détournements au préjudice de plusieurs clients dont Monsieur X... qui lui avait remis une somme de 50 000 €.

Monsieur Y... a mis fin au contrat de sous- agence le 19 novembre 2002 et a déposé plainte avec constitution de partie civile entre les mains du doyen des juges d'instruction de Limoges ; par jugement du Tribunal Correctionnel de Limoges en date du 2 juin 2006 Monsieur E... a été déclaré coupable d'abus de confiance.

Monsieur X... pour obtenir le remboursement de ses fonds a fait assigner devant le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX la société SUISSE ; celle- ci a appelé à sa garantie Monsieur Y... qui a lui même appelé à sa garantie son assureur responsabilité civile professionnelle, les souscripteurs du LLOYD'S de LONDRES.

Par le jugement critiqué le premier juge a entre autres dispositions :

- condamné la SA SWISS LIFE PREVOYANCE ET SANTE à payer à Monsieur X... la somme de 50 000 € et une somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Monsieur Y... à relever indemne la SWISS LIFE PREVOYANCE SANTE des condamnations prononcées au profit de Monsieur X...,
- condamne les souscripteurs du LLOYD'S de LONDRES à relever indemne Monsieur Y... et à lui payer une somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la responsabilité civile des sociétés la SUISSE :

Les sociétés LA SUISSE, dont l'appel incident doit être examiné en premier lieu par souci de logique, font valoir que leur responsabilité sur le fondement de l'article L 511- 1 du code des assurances ne saurait être retenue ; elles indiquent à cet effet qu'elles n'étaient pas les mandantes de Monsieur E..., auteur des détournements, et que Monsieur Y..., leur mandataire n'a commis aucune faute à l'égard de Monsieur X... ; elles estiment encore que Monsieur E... a agi en dehors de ses fonctions, qu'il ne pouvait être considéré comme le mandataire apparent de Monsieur Y... par Monsieur X... qui a agi avec imprudence et légèreté.

Aux termes de l'article L 511- 1 du code des assurances pour l'activité d'intermédiation, l'employeur ou mandant est civilement responsable, dans les termes de l'article 1384 du code civil, du dommage causé par la faute, l'imprudence ou la négligence de ses employés ou mandataires agissant en cette qualité, lesquels sont considérés pour l'application du présent article comme des préposés nonobstant toute convention contraire.

Ainsi sa responsabilité ne peut être engagée du fait de son agent général que si ce dernier a commis à son égard une faute.

Certes Monsieur E... auteur des détournements opérés au préjudice de Monsieur X... n'était ni le préposé ni le mandataire de la SWISSLIFE mais le sous- agent de Monsieur Y... qui seul a la qualité de mandataire de cette compagnie.

Cependant Monsieur Y..., auquel certes ne peuvent être reprochés les détournements commis par Monsieur E..., a lui même commis des fautes dans l'exercice de ses fonctions ; celles ci sont mises en évidence par le propre courrier de que lui a adressé le 10 décembre 2002 la SWISSLIFE par lequel elle lui reproche d'avoir délégué à Monsieur E... les pouvoirs d'agent général qu'elle lui avait attribués à titre strictement personnel, lui confiant même des pouvoirs supérieurs à ceux qu ‘ elle lui avait délégués, et d'avoir manqué à ses obligations de contrôle et de suivi des activités de son sous- agent ; or il est patent que Monsieur Y... a manqué à ses devoirs de contrôle et de suivi des opérations effectuées par Monsieur E... et que ces manquements sont à l'origine du préjudice de Monsieur F....

Par ailleurs tant Monsieur Y... que Monsieur E... ont agi dans le cadre de leurs fonctions, à savoir au temps et lieu de leur travail.

Enfin il ne résulte que des seules affirmations des sociétés LA SUISSE, non étayées par un quelconque élément de preuve objectif, que Monsieur F... se serait montré imprudent, ne pouvait ignorer que Monsieur E... agissait hors de ses attributions et se serait même prêté à une opération douteuse ; il est à rappeler que Monsieur E... était le mandataire de Monsieur Y... et s'est fait remettre les fonds par Monsieur X... dans le cadre de ses fonctions lors de la souscription d'un contrat auprès des sociétés LA SUISSE ; rien ne pouvait laisser supposer à Monsieur X... que les fonds qu'il lui avait remis es qualité allaient être détournés.

Les fautes de leur agent général ayant permis les agissements délictueux de Monsieur E... à l'encontre de Monsieur X..., les sociétés LA SUISSE doivent indemniser en leur qualité de civilement responsables le préjudice subi par celui- ci.

Le jugement déféré sera en conséquence confirmé sur ce point.

Sur l'action récursoire de la SUISSE à l'encontre de Monsieur Y... :

Il résulte des pièces versées aux débats que Monsieur Y... a commis des fautes à l'égard de ses mandantes en confiant à Monsieur E... dans le cadre du sous mandat des pouvoirs qu'il ne pouvait déléguer, à savoir les pouvoirs de conclure de nouveaux contrats en disposant de leur papier à en tête et d'encaisser des fonds pour leur compte.

Sur la garantie des souscripteurs du LLOYD'S de Londres :

Le premier juge a estimé que les souscripteurs du LLOYD'S devaient garantir leur assuré, Monsieur Y..., en vertu du contrat responsabilité civile professionnelle en vigueur en 2002 et de la réclamation que Monsieur Y... leur a adressée le 19 novembre 2001.

Les souscripteurs du LLOYD's de LONDRES invoquent l'exclusion de garantie insérée dans le contrat en vigueur en 2004 et l'absence de toute réclamation de la part de leur assuré avant l'assignation qu'il a fait délivrer le 29 juin 2004 à la société STURGE INSURANCE AGENCIES LTD chargée de souscrire les polices en France pour leur compte et l'assignation qu'il leur a fait délivrer le 6 octobre 2004.

Les sociétés LA SUISSE ne peuvent invoquer le contrat no MG977179577 qui a été souscrit dans le cadre de la garantie financière prévue par l'article L 530- 1 du code des assurances et non dans le cadre de la responsabilité civile professionnelle (article L530- 2).

Le contrat responsabilité civile souscrit sur la base de la réclamation sous le no MG966117577 le 30 novembre 2000 auprès du LLOYD'S, garantissait les conséquences pécuniaires des réclamations formulées à l'encontre de l'assuré en conséquence d'actes ou omissions frauduleux émanant de tout ancien employé ou employé actuel.

En revanche le contrat souscrit sous le même numéro le 16 octobre 2003 à effet au 1er janvier 2004 à la suite de l'intervention de la loi du 1er août 2003, exclut de la garantie les réclamations formulées à l'encontre de l'assuré en raison de tout acte, erreur ou omission fautifs commis par un employé de l'assuré non lié à celui- ci par un contrat de travail, tel un collaborateur indépendant non salarié mais commissionné par celui- ci.

Contrairement à ce qui a été soutenu les conditions particulières de ce dernier contrat ont été signées par Monsieur Y..., dont l'attention avait été attirée par une lettre recommandée avec accusé de réception du 17 octobre 2003 sur les modifications apportées et notamment sur l'exclusion de la garantie quant aux agents non salariés.

Ces deux contrats étant fondés tous deux sur la base réclamation, il importe de rechercher à quelle date a été formulée la première réclamation pour savoir lequel d'entre eux doit s'appliquer.

Monsieur X... qui a demandé une modification du contrat souscrit par l'intermédiaire de Monsieur E... à la SUISSE a appris au début du mois de novembre 2002 qu'aucun contrat n'était enregistré à son nom.

Le 22 novembre 2002 Monsieur Y..., qui avait obtenu une confession de Monsieur E... et l'avait révoqué le 19 novembre précédent pour faute grave, écrivait au représentant du LLOYD'S en France, la STURGE INSURANCE AGENCIES LTD, «.. Suite à notre communication téléphonique de ce jour, je vous confirme que Monsieur E... sous- agent a détourné des espèces et des chèques chez plusieurs de nos clients :

- Monsieur X... Pierre … 50 000 € en juillet 2002, encaissement d'un chèque client (… …)
je vous joins la photocopie de la déclaration de Monsieur E... ainsi que la photocopie de son contrat de sous agent et de la lettre de révocation.. ».

Ce courrier vise effectivement un contrat no MG977179597 qui n'est pas un des deux contrats responsabilité civile professionnelle éventuellement applicable mais un contrat « garantie financière ».

Cependant, outre qu'il est patent au vu des pièces produites que la SUISSE a immédiatement répercuté sur son mandataire les réclamations que lui a adressées Monsieur X... ou son conseil courant novembre 2002, le LLOYD'S dûment informé du sinistre, dont il ne peut prétendre sérieusement qu'alors il n'existait pas, ne peut de bonne foi soutenir que ce courrier émanant de son assuré ne constitue pas une « réclamation » au sens des contrats responsabilité professionnelle souscrits par son assuré Monsieur Y... et se réfugier derrière une erreur de plume.

Il est à rappeler que la réclamation n'est en elle même soumise à aucun formalisme.

Cette réclamation étant intervenue alors que le contrat conclu le 30 novembre 2000 était en vigueur, le LLOYD's doit garantir la responsabilité de Monsieur Y... du fait de son sous agent.

Enfin l'exclusion de garantie figurant au contrat applicable selon laquelle l'assuré ne sera pas indemnisé pour toute réclamation formulée à son encontre « par un assureur ou une compagnie d'assurance en raison de tout acte, erreur ou omission fautif, commis dans l'exercice de leur activité en qualité d'agents d'assurance, à moins que cet assureur ou compagnie d'assurance n'ait obtenu un jugement contre l'assuré devant un tribunal compétent » ne peut faire obstacle à la garantie de Monsieur Y... par son assureur, seul le contrat à effet au 1er janvier 2004 exigeant une décision « définitive ».

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700
du code de procédure civile au profit de chacun des intimés à hauteur de 2000 €.

Les dépens seront supportés par l'appelant qui succombe.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

- Confirme le jugement du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX en date du 28 mars 2007.

- Condamne les SOUSCRIPTEURS DU LLOYD's à payer à Monsieur Y..., à Monsieur X..., chacun, et aux sociétés SWISS LIFE PREVOYANCE ET SANTE et SUISSE ASSURANCES GENERALES SUR LA VIE HUMAINE une somme totale de 2000 €.

- Les condamne aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Robert MIORI, Président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

Hervé GOUDOT Robert MIORI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0045
Numéro d'arrêt : 07/02263
Date de la décision : 18/06/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Bordeaux, 28 mars 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2008-06-18;07.02263 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award