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15/05/2008 | FRANCE | N°06/04129

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0045, 15 mai 2008, 06/04129


COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
--------------------------
ARRÊT DU : 15 mai 2008
(Rédacteur : Madame Edith O'YL, Conseiller)
IT
No de rôle : 06 / 04129

Monsieur Gérard, Pierre, Gabriel X... E. U. R. L. GEHEL PARTICIPATIONS

c /

Société Civile DU CHATEAU DE LANGOIRAN S. A. R. L. LANGOIRAN FINANCE Monsieur Nicolas Emmanuel Pascal Y... S. A. ANTEA Monsieur Robert Z... Maître Francis A...

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :
aux avouésDécision déférée à la Cour : jugement rendu le

27 juin 2006 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 02 août 2006

APPELANTS...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
--------------------------
ARRÊT DU : 15 mai 2008
(Rédacteur : Madame Edith O'YL, Conseiller)
IT
No de rôle : 06 / 04129

Monsieur Gérard, Pierre, Gabriel X... E. U. R. L. GEHEL PARTICIPATIONS

c /

Société Civile DU CHATEAU DE LANGOIRAN S. A. R. L. LANGOIRAN FINANCE Monsieur Nicolas Emmanuel Pascal Y... S. A. ANTEA Monsieur Robert Z... Maître Francis A...

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :
aux avouésDécision déférée à la Cour : jugement rendu le 27 juin 2006 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 02 août 2006

APPELANTS :

Monsieur Gérard, Pierre, Gabriel X..., demeurant... ...

E. U. R. L. GEHEL PARTICIPATIONS, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, Chemin du Val 78490 MONTFORT L AMAURY

Représentés par la SCP Annie TAILLARD et Valérie JANOUEIX, avoués à la Cour assistés de Maître Nicolas CARTRON loco de Maître QUERON avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

Société Civile DU CHATEAU DE LANGOIRAN, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, " le pied du Chateau " 33550 LANGOIRAN

S. A. R. L. LANGOIRAN FINANCE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,...
Monsieur Nicolas Emmanuel Pascal Y... né le 18 Novembre 1963 à NEUILLY SUR SEINE (92200) de nationalité française Profession : Exploitant agricole demeurant...
Représentés par la SCP TOUTON- PINEAU et FIGEROU, avoués à la Cour assistés de Maître Fabien DUCOS- ADER avocat au barreau de BORDEAUX
S. A. ANTEA, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, 19, avenue Léonard de Vinci Europarc 33600 PESSAC
Représentée par la SCP LABORY- MOUSSIE et ANDOUARD, avoués à la Cour assistée de Maître Stéphanie FOUGERAS loco Maître Marion RIVIERE avocat au barreau de BORDEAUX
Monsieur Robert Z... né le 01 Mars 1943 à TALENCE (33400) de nationalité française Profession : Professeur demeurant...

Représenté par la SCP GAUTIER et FONROUGE, avoués à la Cour assisté de Maître Lionel RIVIERE de la SCP RIVIERE- MAUBARET avocat au barreau de BORDEAUX Maître Francis A..., es qualité de mandataire liquidateur de la Société AXIOME, demeurant... 37000 TOURS

défaillant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 mars 2008 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Robert MIORI, Président, Monsieur Patrick GABORIAU, Conseiller, Madame Edith O'YL, Conseiller,

qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

- réputé contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX en date du 27 juin 2006.

Vu l'appel interjeté le 2 août 2006 par Monsieur Gérard X....
Vu ses conclusions récapitulatives déposées au greffe de la cour et signifiées le 17 décembre 2007.

Vu les conclusions déposées au greffe de la cour et signifiées le 19 février 2008 par la SC CHATEAU DE LANGOIRAN, la SARL LANGOIRAN FINANCE et Monsieur Nicolas Y... qui forment appel incident.

Vu les conclusions déposées au greffe de la cour et signifiées le 13 février 2008 par Monsieur Robert Z... qui forme appel incident.

Vu les conclusions de la SA ANTEA déposées au greffe de la cour et signifiées le 22 mai 2007.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 20 février 2008.
* * * Il sera statué par arrêt réputé contradictoire Monsieur G... liquidateur de la société AXIOME qui n'a pas constitué avoué ayant été cité à personne.

Le 29 juillet 1972 Monsieur Z... a acheté aux consorts H... les ruines d'un château datant du XIII ème siècle situé à LANGOIRAN au lieudit « le château » et la moitié indivise d'un chemin le bordant ; ce château est implanté sur une falaise en contrebas de laquelle se trouve une propriété viticole appartenant à la société civile du CHATEAU DE LANGOIRAN située au lieudit « le pied du château ».
Il est acquis que le sous sol de cette zone comprend de nombreuses carrières exploitées autrefois pour l'extraction de la pierre.
La propriété viticole qui appartenait aussi aux consorts H... a été vendue par ceux ci à la SAFER le 25 novembre 1988 qui l'a revendue le 29 décembre 1989 à la SCEA NESSER devenue ultérieurement la SC CHATEAU DE LANGOIRAN.
Les 7 et 10 novembre 1997 Monsieur X... et la Société GEHEL PARTICIPATION ont cédé à Monsieur Y... et à la SARL LANGOIRAN FINANCE l'intégralité des parts de la SC CHATEAU DE LANGOIRAN dont ils étaient devenus propriétaires en septembre 1995.
En 1996 la SC CHATEAU DE LANGOIRAN a entrepris des travaux d'agrandissement d'un chai situé en pied de falaise avec mise en place de cuves de vinification et de stockage ainsi que de champs d'épandage.
En 1998 elle a fait réaliser par la Société AXIOME sous la maitrise d'œ uvre de la Société ANTEA des travaux de comblement de certaines carrières et de reprofilage de la falaise.
Des fissures affectant le mur sud ouest du château, Monsieur Z... obtenait en référé la désignation de Monsieur I... qui, constatant la présence d'importantes fissures dans le mur sud ouest du château et son basculement vers le vide, a sollicité une consignation complémentaire afin de déterminer par un examen au géoradar l'origine de ces désordres et les travaux nécessaires pour y remédier ; par jugement du 19 mars 12002 cet examen a été ordonné aux frais avancés de la SC CHATEAU LANGOIRAN.
Par le jugement critiqué le premier juge, statuant au vu du rapport de Monsieur J... désigné en remplacement de Monsieur I..., a, entre autres dispositions :
- condamné la SC CHATEAU DE LANGOIRAN à payer à Monsieur Z... une somme de 36 806, 44 € avec indexation sur l'indice BT 01 outre 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- débouté Monsieur Z... de sa demande de réparation du trouble de jouissance
- sursis à statuer sur les sommes demandées au titre des travaux de consolidation du sous sol et invité les parties à s'expliquer sur la qualité à agir de Monsieur Z... pour réclamer le paiement de ces sommes
- rejeté les actions en garantie de la Société CHATEAU LANGOIRAN, de la SARL LANGOIRAN FINANCE et de Monsieur Y... à l'encontre de la Société ANTEA et de la Société AXIOME
- fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la Société ANTEA
- condamné in solidum Monsieur X..., la SARL GEHEL PARTICIPATIONS à garantir la Société CHATEAU LANGOIRAN, la SARL LANGOIRAN FINANCE et Monsieur Y... des ¾ des condamnations prononcées à leur encontre envers Monsieur Z...
- ordonné l'exécution provisoire du jugement à hauteur e la somme de 13 971. 89 € avec indexation sur l'indice BT O1 de la construction depuis le rapport de Monsieur J....
Monsieur X... tant en son nom personnel que venant aux droits de l'EURL GEHEL FINANCES, Monsieur Y..., la SC CHATEAU DE LANGOIRAN, la SARL LANGOIRAN FINANCES estiment que leur responsabilité dans les désordres affectant le château appartenant à Monsieur Z... ne saurait être retenue.

Sur l'origine des désordres et les demandes de Monsieur Z... :

Il est constant que sur la commune de LANGOIRAN existent de nombreuses carrières exploitées aux 18 ème et 19 ème siècles pour l'extraction de pierres et que divers effondrement y ont été constatés au fil du temps.

Les désordres affectant le château de Monsieur BIBONNE consistent en un déversement du mur de la façade sud ouest avec notamment une importante lézarde centimètrique en partie haute et diverses fissures.
Cette lézarde qui était apparue en 1986 à la suite d'événements climatiques a été rebouchée lors de travaux de confortement exécutés par la COFEX sous la maîtrise d'œ uvre des monuments historiques, après un diagnostic établi par le BRGM.
Elle s'est à nouveau ouverte lors des travaux d'extension des chais à vin, d'agrandissement du parking en pied de falaise et d'enfouissement de cuves de décantation et de champs d'épandage effectués entre mai et septembre 1996 par la SC CHATEAU LANGOIRAN située en contrebas ; au cours de ces travaux des galeries non répertoriées ont été découvertes qui ont été signalées au BRGM ; celui- ci a conseillé de les combler et d'effectuer des travaux sur le talus pour conforter le château.
Elle est réapparue en 1998 lors de la réalisation des travaux de comblement de galeries souterraines et au reprofilage de la falaise exécutés sous la maitrise d'œ uvre de la Société ANTEA entre décembre 1997 et mars 1999 par la société du CHATEAU LANGOIRAN dont Monsieur Y... et la SARL LANGOIRAN FINANCES étaient devenus propriétaires.
Monsieur J... explique que le déversement de la façade ouest du château est inhérent à un mouvement des fondations et consistant en l'effondrement récurrent d'anciennes galeries d'extraction de pierres calcaires situées sous l'enceinte du château ; il s'agit d'effondrement classiques de galeries non comblées en roche calcaire, qui est une pierre tendre litée dont les instabilités en voûte évoluent jusqu'en surface pour former des fontis.
Il a relevé qu'existaient d'une part des galeries dites de 2ème niveau situées entre les cotes 29 et 31 NGF utilisées autrefois comme champignonnières se situant sous la cour du château et sous la muraille, dont les parties instables ont été murées et remplies de sable mais de façon incomplète et d'autre part des galeries dites de 1er niveau entre 32. 5 et 35 NGF servant de chais à la société CHATEAU DE LANGOIRAN ; concernant ces dernières il a observé qu'existent une galerie principale qui part du bâtiment d'exploitation et, longue de 38 mètres, aboutit au niveau de la cour du château, ainsi que 4 boyaux plus étroits qui se développent vers le talus de la falaise, deux étant murés à 6 et 10 mètres et les deux autres s'achèvent sur des éboulements.
Les investigations faites par géoradar et sondages ont mis en évidence 4 anomalies :
- anomalie A à une profondeur de 5. 5 m en façade sud du château correspondant à la continuité murée de la première galerie de chais
- anomalie B à une profondeur de 1. 5 à 3 m en façade ouest vers l'angle sud ouest
- anomalie C et D en façade ouest entre 1, 5 et 5 m de profondeur correspondant à la continuité des deux dernières galeries de chais. Monsieur J... observe que la zone la plus critique concerne les galeries effondrées des chais du premier niveau où il a relevé des fissures évolutives en piédroits et en voûtes.

La responsabilité des désordres affectant le château incombe selon celui- ci :- majoritairement aux propriétaires des galeries qui s'effondrent par manque d'entretien et absence de comblement- pour partie au cabinet ANTEA pour défaut de conseil pour ce qui concerne le remblaiement des zones effondrées des galeries de chais- pour partie à l'importance des travaux d'élargissement de la falaise et d'effondrement des stampes effectués entre 1997 et 1999 qui ont pu provoquer des activations de mouvements par ébranlements du massif, ébranlements plus importants que ceux de 1996 en raison de leur proximité du château ;- pour partie au maitre de l'ouvrage de l'extension en 1996 qui a provoqué l'activation des premiers désordres par d'importants travaux de recul de la falaise et l'ébranlement du massif.

Monsieur X..., la SC CHATEAU DE LANGOIRAN, la SARL LANGOIRAN FINANCES et Monsieur Y... font valoir que la responsabilité de Monsieur Z... doit être retenue puisqu'il est propriétaire des galeries qui se sont effondrées et situées sous son château, la propriété du sol emportant celle du dessus et du dessous.
Certes ces galeries qu'elles soient de premier ou de second niveau se trouvent pour partie dans le sous sol de la propriété de Monsieur Z....
Toutefois ainsi que l'a relevé le premier juge l'expert ne retient pas seulement le mauvais entretien et l'absence de comblement de ces galeries mais aussi l'ébranlement apporté à celles- ci par les travaux effectués en 1996 et en 1997 / 1999.
Il est exact que les actes de vente du château médiéval et des parcelles l'entourant conclus entre Monsieur Z... et les consorts H... ne comportent aucune réserve quant à la propriété des galeries se trouvant sous le château et que l'acte de vente du domaine viticole intervenu entre les consorts H... et la SAFER ne vise nullement ces galeries et les chais à vin ou champignonnières qui y sont installés.
Cependant les accès de ces galeries qu'elles soient à usage de chais ou de champignonnières se trouvent exclusivement sur le domaine viticole de la Société CHATEAU DE LANGOIRAN et sont donc à son usage exclusif depuis 1972 ; celle- ci ne s'acquitte en outre d'aucun loyer et y a entrepris en 1996 et 1997 des travaux confortatifs d'importance, agissant ainsi à l'évidence en qualité de propriétaire et non au titre d'une simple tolérance.
Par ailleurs l'acte en date des 7 et 10 novembre 1997 par lequel Monsieur X... et l'EURL GEHEL PARTICIPATION ont vendu à Monsieur Y... et à la Société LANGOIRAN FINANCES leurs parts dans la Société du CHATEAU LANGOIRAN mentionne « le cédant et le cessionnaire déclarent que dans le patrimoine social de la société dont les parts font l'objet de la présente cession se trouvent des carrières à usage de caves et de chais de l'exploitation, certaines carrières situées sous le château médiéval de LANGOIRAN ; il apparaît que ces carrières nécessitent des travaux de consolidation pour éviter tous risques d'éboulement et tous mouvements de terrains susceptibles de frapper tant lesdites carrières que les bâtiments environnants et notamment ceux en surface … ».
C'est donc à bon droit que le premier juge a considéré que Monsieur Z... était fondé à invoquer ce titre, conforme à la possession exercée par la SC CHATEAU DE LANGOIRAN depuis 1972, pour renverser la présomption de propriété du sous sol de l'article 552 du code civil et a estimé que la SC DU CHATEAU DE LANGOIRAN était responsable des désordres causés au château de Monsieur BIBONNE tant en sa qualité de propriétaire des galeries que de maitre de l'ouvrage des travaux exécutés en 1996 et de 1997 à 1999.
Les appelants font encore valoir que les désordres affectant le château de Monsieur BIBONNE proviennent non pas de leurs travaux ou de leurs manquements mais des nombreux effondrements dont il a souffert au fil du temps ; s'il est exact que des effondrements ont affecté toute la zone de LANGOIRAN y compris le château et le domaine viticole, d'une part les effondrements visant le « pied du château » (1931- 1941) concernent non pas le château mais le lieudit situé en contrebas, ceux intervenus en 1986 et 1988 concernent au vu des plans versés aux débats des galeries situées sur la propriété viticole et d'autre part il n'est pas contestable que ce château féodal, ruiné lors de son achat par Monsieur Z..., a fait l'objet d'une restauration au moins partielle sous l'égide des monuments historiques et que les désordres relevés par Monsieur I... et par Monsieur J..., objets du présent litige, proviennent exclusivement des travaux et manquements à son devoir d'entretien des galeries de la SARL CHATEAU DE LANGOIRAN.
Par ailleurs contrairement à ce qu'ils soutiennent il ressort du rapport d'expertise que les travaux de la COFEX exécutés en 1986 ont été efficaces et que les désordres ne sont dus qu'aux travaux engagés ultérieurement par le domaine viticole.
Il ne saurait en outre être reproché à Monsieur Z... alors maire de LANGOIRAN d'avoir délivré le permis de construire relatif à l'extension de son chai à la SARL CHATEAU DE LANGOIRAN en 1996 ; en effet le BRGM avait alors estimé que ce projet était réalisable sous réserve de respecter certaines modalités.
Enfin il ne peut lui être fait grief d'avoir tardé à agir : si son assignation en référé est du 19 février 1999, il s'est plaint auprès de la Société CHATEAU DE LANGOIRAN dès 1996 des désordres occasionnés par ses travaux comme en témoigne l'échange de correspondances versé aux débats.
Monsieur J... a préconisé les travaux suivants en précisant que les frais de maîtrise d'œ uvre s'élèveraient à 9 % de leur montant :
- des travaux urgents de mise en place de tirants métalliques pour éviter le déversement de la façade ouest à hauteur de 12 818. 25 €
- des travaux de remise en état du château pour une somme de 20 249. 13 €
- des travaux de consolidation du massif par le comblement des cavités d'un montant de 110 249, 61 €.
A juste titre le premier juge, retenant l'entière responsabilité de la Société CHATEAU LANGOIRAN dont les travaux sont à l'origine des désordres affectant le château de Monsieur BIBONNE, a condamné celle- ci à lui payer de 12 818. 25 € et de 20 249. 13 € ainsi que les frais de maîtrise d'œ uvre afférents à ces travaux.
Il a sursis à statuer sur la demande de Monsieur Z... tendant à La condamnation de la Société CHATEAU LANGOIRAN à lui payer la somme de 110 249. 61 € au motif qu'il n'avait pas qualité pour faire des travaux dont il devrait assumer la responsabilité sur la propriété d'autrui et a ordonné la réouverture des débats pour permettre aux parties de s'expliquer sur cette fin de non recevoir.
Monsieur Z... demande à la cour en vertu de son pouvoir d'évocation la condamnation de la Société CHATEAU DE LANGOIRAN à effectuer les travaux de consolidation du massif préconisés par l'expert judiciaire dans un délai de trois mois à compter de l'arrêt à intervenir et qu'elle l'autorise pour ce faire à passer sur sa propriété et la désignation de celui- ci pour établir un constat de bonne fin des travaux.
Cependant le jugement déféré ayant ordonné sur ce point un sursis à statuer qui ne met pas fin à l'instance et ne constitue pas une mesure d'instruction, il n'y a pas lieu à évocation.
Formant appel incident, Monsieur Z... demande la condamnation de la SARL CHATEAU LANGOIRAN au paiement de la somme de 400 € par mois à compter du mois de juillet 1996 jusqu'à complète exécution des travaux préconisés par l'expert judiciaire en réparation de son préjudice de jouissance ; à cet effet il explique qu'il avait prévu des travaux d'extension de son habitation d'environ 40 % qui n'ont pu être réalisés du fait de la survenance des désordres.
L'ancienneté du contrat de prêt datant de 1991 et des devis dont certains remontent à 1985 et l'absence de toute date sur le plan de l'architecte qu'il produit ne permettent pas de retenir un quelconque lien de causalité entre les désordres affectant le château et la non exécution de cette extension ; il est à observer d'ailleurs qu'aucun élément n'établit que ces pièces concernent l'extension invoquée ; enfin les courriers que lui a adressés en 2001 le conservateur des monuments historiques lui demandant de lui faire connaître sa position sur la réalisation des travaux de restauration sur l'exercice 2001 compte tenu de leurs termes généraux ne permettent pas non plus de considérer qu'ils visent cette extension.
Aussi c'est en faisant une juste appréciation des faits qui lui ont été soumis que le premier juge a débouté Monsieur K... de ce chef de demande.
L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de celui- ci à hauteur de 1500 euros.

Sur les appels en garantie :

La SARL CHATEAU LANGOIRAN, Monsieur Y... et la SARL LANGOIRAN FINANCES demandent à titre principal à être relevés indemnes de toutes les condamnations prononcées à leur encontre au profit de monsieur Z... d'une part par les Sociétés ANTEA et AXIOME et d'autre part par Monsieur X... et par l'EURL GEHEL PARTICIPATION.

1) Sur l'appel en garantie à l'encontre des sociétés ANTEA et AXIOME

Monsieur Y... qui s'était porté acquéreur des parts de la SARL LE CHATEAU DE LANGOIRAN a chargé la SA ANTEA de définir l'état géotechnique de la falaise et des carrières souterraines en terme de stabilité, de déterminer les travaux confortatifs, de les quantifier et d'en estimer le coût et lui a ensuite confié au mois de décembre 1997 la maîtrise d'œ uvre et le suivi des travaux réalisés par la Société AXIOME.

La fin de non recevoir que soulève la SA ANTEA tirée de la clause de garantie du passif et de la clause prévoyant qu'en cas d'aggravation de la situation de la falaise et des galeries souterraines entre le début et l'achèvement des travaux les conséquences en seraient supportées par le cédant, insérées dans l'acte de cession de parts sociale des 7 et 10 novembre 1997 ne peut qu'être écartée : le fait que le cédant se soit engagé selon diverses modalités à supporter les conséquences de cette aggravation ne saurait en effet interdire que la responsabilité de la Société ANTEA puisse être recherchée ; la SC CHATEAU DE LANGOIRAN, Monsieur Y... et la SARL LANGOIRAN ont donc intérêt à agir à l'encontre de la SA ANTEA.
L'étude réalisée et les travaux préconisés par la Société ANTEA n'ont concerné qu'une zone très limitée à savoir la falaise le long du chemin d'accès sur une longueur de 40 mètres, m ^ me si comme le relève l'expert elle a parfaitement expliqué dans le corps de son étude le processus de déstabilisation des fondations du château et les risques potentiels d'effondrement encourus ; elle a en effet clairement souligné qu'au delà des confortements qu'elle préconisait le danger persistait et notamment en direction du château médiéval où existe tout un réseau de galeries souterraines étagées sur deux niveaux.
Les travaux qu'elle a préconisés et qui ont été mis en œ uvre comprenaient la dévégétalisation de la falaise, le comblement des galeries à leur débouché en falaise avec injection de coulis de béton, le reprofilage de la falaise avec effondrement des stampes entre galeries et sa confortation par peau de béton armé et ancré.
L'expert judiciaire tout d'abord s'étonne qu'elle n'ait pas proposé de stabiliser le fond de ces galeries (de premier niveau à usage de chais) situées sous l'assise du château qu'elle a stabilisées en falaise alors qu'il ne reste qu'une dizaine de mètres à traiter et que cette partie constitue la zone principale d'effondrement ; il estime que dans son étude ANTEA se devait au minimum d'envisager de murer les galeries des chais dans les zones effondrées et les remblayer ; ensuite il estime que l'importance des travaux ainsi exécutés a pu provoquer des activations de mouvements par ébranlements du massif, ébranlements plus importants que ceux occasionnés par les travaux de 1996.
Toutefois compte tenu du caractère limité de la mission confiée à la Société ANTEA et du signalement qu'elle a fait des dangers potentiels générés par les galeries se trouvant sous l'assise du château il ne peut lui être reproché d'avoir manqué à son devoir de conseil.
Certes les travaux qu'elle a préconisés et dont elle a suivi l'exécution ont ébranlé le massif d'une façon plus importante que les travaux exécutés en 1996.
Cependant d'une part l'expert a relevé que la société AXIOME n'a bénéficié d'aucune initiative dans la réalisation des travaux et les a exécutés conformément à ce qui lui a été demandé et d'autre part la SC CHATEAU DE LANGOIRAN, Monsieur Y... et la SARL LANGOIRAN FINANCES qui ne sont pas subrogés dans les droits de Monsieur Z..., ne rapportent pas l ‘ existence de fautes commises par les Sociétés ANTEA et AXIOME dans la conception ou l'exécution des travaux qui leur ont été confiés.
L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la Société ANTEA à hauteur de 1 500 €.

2) Sur l ‘ appel en garantie à l'encontre de monsieur X... tant en son nom personnel qu'au nom de la SARL GEHEL PARTICIPATION

La société CHATEAU DE LANGOIRAN, la SARL LANGOIRAN FINANCES et Monsieur Y... demandent à être relevés indemnes de toutes condamnations en raison des clauses insérées dans l'acte de cession de parts conclu avec Monsieur X... et la SARL GEHEL PARTICIPATIONS les 7 et 10 novembre 1997.

. Sur la garantie du passif

Dans cet acte de cession des parts sociales du CHATEAU DE LANGOIRAN les cédants se sont engagés envers les cessionnaires au maintien de la valeur des parts cédées à la date de sa signature et en conséquence à les dédommager de tout amoindrissement ou diminution de la valeur de l'actif ou de tout accroissement du passif de la société survenant postérieurement mais ayant une origine ou une cause antérieure aux présentes et résultant :
- soit d'un acte, d'une omission, d'un fait quelconque accompli, réalisé ou survenu en violation ou en contradiction avec les déclarations qui précèdent- soit d'une réclamation, revendication, obligation ou évaluation à l'encontre de la société n'ayant pas fait l'objet d'une provision.

Il est précisé d'une part que cette garantie a été consentie pour une période de 18 mois à compter du 10 novembre 1997 et que d'autre part pour sa mise en œ uvre, les parties conviennent que le cédant sera tenu informé par le gérant de la société et en son domicile de toute réclamation, de toute action contentieuse et de tout fait et événement générateur de cette garantie par lettre recommandée avec accusé de réception dans les 10 jours de la date à laquelle la société en aura connaissance.
Monsieur Z... a fait assigner en référé expertise la SARL CHATEAU DE LANGOIRAN, Monsieur Y... et la sarl LANGOIRAN FINANCES par acte du 19 février 1999 ; le 2 avril 1999 ceux ci ont pris soin de dénoncer par lettre recommandée avec accusé de réception l'action entreprise par Monsieur Z... à Monsieur X....
Cependant il est constant que le délai de 10 jours contractuellement prévu pour mettre en jeu cette garantie de passif était expiré.
Faute par eux d'avoir respecté les conditions de la mise en œ uvre de la garantie les cédants ne peuvent invoquer le bénéfice de celle- ci par application des dispositions de l'article 1134 du code civil.
Le jugement entrepris sera réformé sur ce point.

Sur la clause particulière relative aux carrières

Après qu'il ait été rappelé que dans le patrimoine de la société cédée se trouvent des carrières à usage de caves et de chais dont certaines situées sous le château, que celles- ci nécessitent des travaux de consolidation pour éviter tous risques d'éboulement et que Monsieur Y... a fait procéder par la SA ANTEA à une étude technique permettant de définir l'état géotechnique de la falaise et des carrières en termes de stabilité et de définir les travaux confortatifs et que le rapport a été remis à Monsieur X..., l'acte de cession mentionne :

« les parties ont convenu :- le cessionnaire fera réaliser à ses frais dans un délai de trois mois les travaux pour lesquels un coût estimatif prévisionnel lui a été remis par la société ANTEA dans le rapport susvisé- pour le cas où la situation de la falaise et des carrières souterraines viendrait à s'aggraver entre ce jour et celui de la fin de l'exécution des travaux pris en charge par le cessionnaire et pour lesquels le cédant conservera un droit de regard et la faculté de faire intervenir un expert le tout à ses frais, le cédant s'engage expressément à supporter les conséquences financières des éventuels préjudices envers la société CHATEAU DE LANGOIRAN et le propriétaire du château féodal de LANGOIRAN ; toute aggravation de la situation actuelle entrainant un coût supplémentaire par rapport au devis initial devra faire l'objet d'une expertise complémentaire de la société ANTEA dont les frais seront pris en charge par la SC CHATEAU DE LANGOIRAN ; en cas de contestation par monsieur X... il pourra faire procéder à ses frais à une contre expertise ; si à l'issue des ces deux expertises les parties ne parvenaient pas à un accord amiable, elles conviennent de s'en remettre à justice à frais communs pour nommer un troisième expert …. ».

Certes la procédure de désignation amiable d'expert et de contre expert n'a pas été suivie.
Toutefois comme l'a justement observé le premier juge le non respect de cette procédure amiable ne peut constituer un moyen d'irrecevabilité dans la mesure où une expertise judiciaire à laquelle cédant et cessionnaire ont été attraits a été organisée et a permis de définir contradictoirement les travaux nécessaires et leur coût ; il est à observer en outre que le cédant n'a pas mis en œ uvre la faculté qui lui était offerte de faire intervenir un expert à ses frais et ne peut soutenir ne pas avoir été informé des travaux réalisés.
L'expertise de Monsieur J... démontrant que les travaux préconisés par la SA ANTEA sont insuffisants et que les effondrements se poursuivent la garantie trouve à s'appliquer.
Cette garantie s'applique à l'aggravation des désordres survenus depuis 1997, liée à l'insuffisance des travaux.
En revanche les désordres liés à l'ébranlement du massif à l'occasion des travaux effectués par la Société CHATEAU LANGOIRAN en 1996 et de 1997 à 1999 ne sauraient être couverts par cette garantie.
Au titre de celle- ci Monsieur X... sera condamné à relever indemnes la SC CHATEAU DE LANGOIRAN, la SARL LANGOIRAN FINANCES et Monsieur Y... à hauteur de la moitié des condamnations prononcées à leur encontre.
L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

- Réforme le jugement en date du 27 juin 2006 en ce qu'il a condamné in solidum Monsieur X... et la SARL GEHEL PARTICIPATIONS à relever indemnes la SC CHATEAU DE LANGOIRAN, Monsieur Y... et à la SARL LANGOIRAN FINANCES des ¾ des condamnations prononcées à leur encontre au profit de Monsieur Z....

Statuant à nouveau.
- Condamne Monsieur X... tant en son nom personnel qu'ès qualités de gérant de l'EURL GEHEL FAINANCES à relever indemnes la SC CHATEAU DE LANGOIRAN, Monsieur Y... et la SARL LANGOIRAN FINANCES à hauteur de la moitié des condamnations prononcées à leur encontre au profit de Monsieur Z... au titre de l'aggravation des désordres survenus depuis 1997.
- Le confirme pour le surplus.
- Dit n'y avoir lieu à évoquer la demande de Monsieur Z... relative à la consolidation du massif.
- Condamne in solidum Monsieur X... tant es nom qu'ès qualité, la SARL CHATEAU LANGOIRAN, Monsieur Y... et la SARL LANGOIRAN FINANCES à payer à Monsieur Z... une somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- Condamne in solidum la SC CAHATEAU DE LANGOIRAN, la SARL LANGOIRAN FINANCES et Monsieur Y... à paye rune somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- Condamne Monsieur Z... tant es nom qu'ès qualité pour l'EURL GEHEL PARTICIPATION aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Robert MIORI, Président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

Hervé GOUDOT Robert MIORI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0045
Numéro d'arrêt : 06/04129
Date de la décision : 15/05/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Bordeaux, 27 juin 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2008-05-15;06.04129 ?
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