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18/04/2008 | FRANCE | N°06/05468

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0045, 18 avril 2008, 06/05468


COUR D' APPEL DE BORDEAUX

CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU : 18 avril 2008

(Rédacteur : Monsieur Robert MIORI, Président)

IT

No de rôle : 06 / 05468

Monsieur Hakim X...
(bénéficie d' une aide juridictionnelle Totale numéro 2006 / 21428 du 01 / 02 / 2007 accordée par le bureau d' aide juridictionnelle de BORDEAUX)

c /

Monsieur Jean- Pierre Y...
L' AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avoués : Décision déf

érée à la Cour : jugement rendu le 17 octobre 2006 par le Tribunal de Grande Instance de PERIGUEUX suivant déclaration d' appel du 02 novemb...

COUR D' APPEL DE BORDEAUX

CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 18 avril 2008

(Rédacteur : Monsieur Robert MIORI, Président)

IT

No de rôle : 06 / 05468

Monsieur Hakim X...
(bénéficie d' une aide juridictionnelle Totale numéro 2006 / 21428 du 01 / 02 / 2007 accordée par le bureau d' aide juridictionnelle de BORDEAUX)

c /

Monsieur Jean- Pierre Y...
L' AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avoués : Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 octobre 2006 par le Tribunal de Grande Instance de PERIGUEUX suivant déclaration d' appel du 02 novembre 2006

APPELANT :

Monsieur Hakim X..., demeurant... 24750
CHAMPCEVINEL

Représenté par la SCP Annie TAILLARD et Valérie JANOUEIX, avoués à la Cour
assisté de Maître MARSAT avocat au barreau de PERIGUEUX

INTIMÉS :

Monsieur Jean- Pierre Y..., demeurant... 24750 BOULAZAC

Représenté par la SCP FOURNIER, avoués à la Cour assisté de Maître MARIS avocat au barreau de PERIGUEUX

L' AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR 6 rue Louise Weiss 75013 PARIS CEDEX 13

Représenté par la SCP RIVEL et COMBEAUD, avoués à la Cour assisté de Maître GAILLARD avocat au barreau de PERIGUEUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du Nouveau Code de Procédure Civile, l' affaire a été débattue le 21 février 2008 en audience publique, les avocats ne s' y étant pas opposés, devant Monsieur Robert MIORI, Président chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Robert MIORI, Président,
Monsieur Patrick GABORIAU, Conseiller,
Madame Edith O' YL, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l' arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l' article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de PERIGUEUX du 17 octobre 2006.

Vu la déclaration d' appel de Monsieur X....

Vu les conclusions de Monsieur X... déposées le 2 novembre 2006.

Vu les conclusions de Monsieur Y... déposées le 21 juin 2007.

Vu les conclusions de l' Agent Judiciaire du Trésor déposées le 1er juin 2007.

Vu l' ordonnance de clôture du 7 février 2008

Objet du litige :

A la suite de la destruction volontaire par explosion du débit de boissons " Le Pub " appartenant à Monsieur X... survenue le 8 juillet 1996, les soupçons se sont portés sur les frères Z....

Ces derniers ont été placés sur écoute téléphonique.

L' enquête a révélé qu' ils avaient été informés de ces écoutes par Monsieur Y... fonctionnaire de police.

Si un non lieu est intervenu au profit des frères Z..., Monsieur Y... a par contre été condamné pénalement pour violation du secret professionnel d' abord par le Tribunal Correctionnel de PERIGUEUX puis par la Cour d' Appel de BORDEAUX. Ces deux juridictions ont déclaré recevable la constitution de partie civile de Monsieur X... et ont condamné Monsieur Y... à lui verser 20 000 francs de dommages et intérêts.

Par arrêt du 30 mars 2004, la Cour de Cassation a cependant cassé dans ces dispositions civiles l' arrêt de la Cour d' Appel de BORDEAUX du 22 mai 2003 au motif que l' atteinte au secret professionnel n' était pas la cause directe du préjudice invoqué par Monsieur X....

C' est dans ces circonstances que ce dernier a par actes d' huissier des 26 août et 24 octobre 2005 fait assigner Monsieur Y... et l' Agent Judiciaire du Trésor devant le Tribunal de Grande Instance de PERIGUEUX afin d' obtenir la condamnation de chacun d' eux à lui verser 11 000 euros de dommages et intérêts outre une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par jugement du 17 octobre 2006 auquel il y a lieu de se reporter pour un exposé plus circonstancié des éléments de la procédure, le tribunal a débouté les parties de leurs demandes respectives.

Monsieur X... a relevé appel de cette décision.

Il en poursuit l' infirmation et sollicite le bénéfice des demandes dont il avait saisi les premiers juges en portant à 2 000 euros la somme réclamée au titre de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Monsieur Y... et l' Agent Judiciaire du Trésor concluent respectivement au débouté de Monsieur X... de ses demandes, et à sa condamnation à verser à chacun d' eux une indemnité de 1 500 euros sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Motifs de la décision :

Sur la demande formulée contre Monsieur Y... :

Pour obtenir l' infirmation de la décision entreprise Monsieur X... soutient qu' il existait de sérieuses présomptions de participation aux faits des frères Z..., que la révélation par Monsieur Y... de la surveillance téléphonique aux intéressés a fait obstacle à la mise en oeuvre des investigations, ce qui l' a fait perdre une chance de voir l' instruction aboutir, et qu' il est fondé à obtenir la réparation de son préjudice sur le fondement des dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil.

Monsieur Y... maintient pour sa part que Monsieur X... n' établit pas le lien entre la faute, et le dommage, que le non lieu ne résulte pas de la faute qu' il a commise, que lorsque le lien entre la chance perdue et le préjudice est très mince celui- ci n' est pas réparé que la réparation ne peut être que partielle et que faute de justifier des dommages et intérêts escomptés le demandeur doit être débouté de ses demandes.

L' arrêt de la cour de cassation du 30 mars 2004, rendu au visa des articles 2 et 3 du Code de Procédure Pénale, qui ne rendent l' indemnisation possible qu' en présence d' un lien direct entre l' infraction et le dommage n' interdit pas à Monsieur X... de réclamer devant la juridiction civile la réparation d' un préjudice indirect résultant de la faute commise.

S' il n' existe en effet pas de lien direct entre le dommage occasionné par l' explosion et la violation du secret professionnel survenue postérieurement, il n' en résulte pas moins que Monsieur Y... peut être condamné à réparer le préjudice résultant de ce que, en raison des fautes qu' il a commises, des éléments utiles à la poursuite de l' enquête n' ont pu être obtenus.

La faute ainsi commise pouvant avoir occasionné à la victime un préjudice moral, il importe peu que Monsieur X... ait pu être indemnisé par sa compagnie d' assurances, comme le soutient l' Agent Judiciaire du Trésor, ou que l' intéressé ne verse aucune pièce démontrant quel a été le coût des réparations réellement restées à sa charge.

La lecture de l' ordonnance de non lieu révèle qu' il n' a pas été établi que les frères Z... se trouvaient à PERIGUEUX le jour des faits. Il a même été démontré que deux d' entre eux se trouvaient en Corse ce jour là.

L' ordonnance de non lieu mentionne cependant qu' une conversation entre Serge et Gérard Z... a donné l' impression qu' ils se savaient écoutés ce qui a conduit les enquêteurs à les interpeller rapidement.

Il apparaît donc que la faute commise par Monsieur Y... a perturbé le déroulement de l' enquête et n' a pas permis d' avoir d' autres éléments nécessaires à la manifestation de la vérité.

C' est dès lors à bon droit que Monsieur X... soutient que la violation du secret professionnel commise par Monsieur Y... l' a privé d' une chance de voir compléter l' enquête.

Il en est résulté pour l' intéressé un préjudice qui sera réparé par l' attribution d' une indemnité de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur la responsabilité de l' Etat :

La faute commise par Monsieur Y..., qui a été pénalement sanctionné par violation du secret professionnel, est constitutive de la faute lourde prévue par l' article L 141- 1 du code de l' Organisation Judiciaire dans la mesure où l' existence des écoutes a été révélée par un fonctionnaire de police à des personnes suspectées d' avoir commis une grave infraction.

Il importe peu à ce titre que Monsieur A... ne soit pas Officier de Police Judiciaire étant précisé qu' il avait bien celle de fonctionnaire de police.

Il importe peu non plus qu' il n' ait pas lui même participé à l' enquête.

Les moyens invoqués de ce chef par l' Agent Judiciaire du Trésor ne seront donc pas retenus.

C' est par contre à juste titre qu' il fait valoir que Monsieur X... qui doit être indemnisé par Monsieur Y... ne peut être indemnisé deux fois.

Il convient dès lors de condamner l' Agent Judiciaire du Trésor à payer in solidum avec Monsieur Y... à Monsieur X... la somme de 3 000 euros sus mentionnée.

Les intéressés seront sous la même solidarité condamnés à payer 1 000 euros à Monsieur X... sur le fondement de l' article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par ces motifs :

Infirme la décision attaquée.

Statuant à nouveau.

Condamne in solidum Monsieur Y... et l' Agent Judiciaire du Trésor à payer à Monsieur X... une indemnité de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts et une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l' article 700 du nouveau code de procédure civile.

Les condamne aux dépens qui seront distraits conformément aux dispositions de l' article 699 du nouveau code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Robert MIORI, Président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

Hervé GOUDOT Robert MIORI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0045
Numéro d'arrêt : 06/05468
Date de la décision : 18/04/2008

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2008-04-18;06.05468 ?
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