La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/03/2008 | FRANCE | N°07/00599

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0045, 05 mars 2008, 07/00599


COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
--------------------------
ARRÊT DU : 5 mars 2008
(Rédacteur : Monsieur Robert MIORI, Président)

No de rôle : 07 / 00599

IT

L'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG

c /

Madame Marie Claire Y... épouse Z... Madame Marie Claire Y... épouse Z... Madame Colette Z... divorcée A... Madame Colette Z... épouse A... Monsieur Eric Z... Monsieur Eric Z... Monsieur Vincent Z... Monsieur Vincent Z... Madame Valérie Z... Madame Valérie Z... Monsieur Jérôme A... Mademoiselle Emilie Z... Monsieur JérÃ

©my Z... Mademoiselle Laurie Anne X... Mademoiselle Lou Anne X... CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
--------------------------
ARRÊT DU : 5 mars 2008
(Rédacteur : Monsieur Robert MIORI, Président)

No de rôle : 07 / 00599

IT

L'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG

c /

Madame Marie Claire Y... épouse Z... Madame Marie Claire Y... épouse Z... Madame Colette Z... divorcée A... Madame Colette Z... épouse A... Monsieur Eric Z... Monsieur Eric Z... Monsieur Vincent Z... Monsieur Vincent Z... Madame Valérie Z... Madame Valérie Z... Monsieur Jérôme A... Mademoiselle Emilie Z... Monsieur Jérémy Z... Mademoiselle Laurie Anne X... Mademoiselle Lou Anne X... CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU LOT ET GARONNE

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :
aux avouésDécision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 décembre 2006 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 02 février 2007
APPELANTE :
L'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG, Etablissement Public venant aux droits et obligations de l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG AQUITAINE LIMOUSIN, pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,20, avenue du Stade de France 93218 LA PLAINE SAINT DENIS CEDEX

Représenté par la SCP FOURNIER, avoués à la Cour assisté de Maître RAVAUT avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉS :
Madame Marie Claire Y... épouse Z... née le 17 Mai 1943 à CASTELJALOUX (47700) de nationalité française Profession : Commerçante, demeurant ...
Madame Marie Claire Y... épouse Z..., es qualités d'héritière de Monsieur Z... Yves né le 07 Avril 1939 et décédé le 29 juin 2002 née le 17 Mai 1943 à CASTELJALOUX (47700) de nationalité française Profession : Commerçante demeurant ...
Madame Colette Z... divorcée A... née le 03 Avril 1961 à TONNEINS (47400) de nationalité française demeurant ...
Madame Colette Z... divorcée A..., es qualités d'héritière de Monsieur Z... Yves né le 07 Avril 1939 et décédé le 29 juin 2002 née le 03 Avril 1961 à TONNEINS (47400) de nationalité française demeurant ...
Monsieur Eric Z... né le 06 Février 1965 à TONNEINS (47400) de nationalité française demeurant ...
Monsieur Eric Z..., es qualités d'héritier de Monsieur Z... Yves né le 07 Avril 1939 et décédé le 29 juin 2002 né le 06 Février 1965 à TONNEINS (47400) de nationalité française demeurant ...
Monsieur Vincent Z... né le 21 Janvier 1966 à TONNEINS (47400) de nationalité française demeurant ...
Monsieur Vincent Z..., es qualités d'héritier de Monsieur Z... Yves né le 07 Avril 1939 et décédé le 29 juin 2002 né le 21 Janvier 1966 à TONNEINS (47400) de nationalité française demeurant ...
Madame Valérie Z... née le 27 Juin 1972 à TONNEINS (47400) de nationalité française demeurant ...
Madame Valérie Z..., es qualités d'héritière de Monsieur Z... Yves né le 07 Avril 1939 et décédé le 29 juin 2002 née le 27 Juin 1972 à TONNEINS (47400) de nationalité française demeurant ...
Monsieur Jérôme A... né le 31 Octobre 1983 à TONNEINS (47400) de nationalité française demeurant ...

Mademoiselle Emilie Z..., prise en la personne de son représentant légal Monsieur Eric Z..., née le 18 Août 1989 à TONNEINS (47400) de nationalité française demeurant ...
Monsieur Jérémy Z..., pris en la personne de son représentant légal Monsieur Eric Z..., né le 21 Juillet 1991 de nationalité française demeurant ...
Mademoiselle Laurie Anne X..., prise en la personne de son représentant légal Madame Valérie Z..., née le 13 Mai 2000 de nationalité française demeurant ...
Mademoiselle Lou Anne X..., prise en la personne de son représentant légal Madame Valérie Z..., née le 30 Avril 2002 de nationalité française demeurant ...
Représentés par la SCP GAUTIER et FONROUGE, avoués à la Cour assistés de Maître SIRGUE avocat au barreau de BORDEAUX
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU LOT ET GARONNE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,2 rue Diderot 47014 AGEN CEDEX
Représentée par la SCP Annie TAILLARD et Valérie JANOUEIX, avoués à la Cour assistée de Maître BOST avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 janvier 2008 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Robert MIORI, Président, Madame Josiane COLL, Conseiller, Madame Edith O'YL, Conseiller,

qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

-contradictoire

-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX du 6 décembre 2006.

Vu la déclaration d'appel de l'Etablissement Français du Sang.
Vu les conclusions de l'Etablissement Français du Sang déposées le 4 janvier 2008.

Vu les conclusions des consorts Z... déposées le 7 janvier 2008.

Vu les conclusions de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Lot et Garonne déposées le 2 janvier 2008.
Vu l'ordonnance de clôture du 9 janvier 2008.

Rappel des faits et de la procédure :

Monsieur Yves Z... qui est né le 7 avril 1999, a été opéré d'une colectomie le 13 septembre 1984. Au cours de cette intervention il a reçu des transfusions de produits sanguins.

Il est décédé le 29 juin 2002 des suites de complications liées à une hépatite C.
Saisi par Madame Marie-Claire Y... épouse Z..., Madame Colette Z... épouse A..., Monsieur Eric Z..., Monsieur Vincent Z..., Madame Valérie Z..., Monsieur Jérôme A..., Mademoiselle Emilie Z..., Monsieur Jérémy Z..., Mademoiselle Laurie-Anne X... et Mademoiselle Lou Anne X... (les consorts Z...) d'une demande dirigée contre l'Etablissement Français du Sang (EFS), le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX, par jugement du 6 décembre 2006 a :

-déclaré l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin responsable de la contamination de Monsieur Yves Z... par le virus de l'hépatite C suite à l'administration de produits sanguins ;
-condamné l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin à payer à Madame Marie-Claire Y... veuve Z... :
-la somme de 16 658,68 euros en réparation de son préjudice économique ;
-la somme de 35 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral lié à l'accompagnement puis à la perte de son époux Monsieur Yves Z... ;
-rejeté la demande de Madame Z... présentée au titre du remboursement des crédits ;
-condamné l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin à payer à la succession de Monsieur Yves Z... soit à Madame Marie-Claire Y... épouse Z..., Madame Colette Z... épouse A..., Monsieur Eric Z..., Monsieur Vincent Z..., Madame Valérie Z... :
-la somme de 100 000 euros au titre du préjudice spécifique de contamination éprouvé par Monsieur Yves Z... avant son décès : " 120 000 euros " ;
-la somme de 8 860,90 euros au titre de la perte de revenus liée à l'hépatite C subie par Monsieur Yves Z... entre sa mise en invalidité et son admission à la retraite ;
-condamné l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin à payer :
-à Madame Colette Z... épouse A... la somme de 12 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
-à Monsieur Eric Z... la somme de 12 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral
-à Monsieur Vincent Z... la somme de 12 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
-à Madame Valérie Z... la somme de 12 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
Condamné l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin à payer :
-à Monsieur Jérôme A... majeur né en 1983 la somme de 9 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
-à Mademoiselle Emilie Z... née en 1989 représentée par Monsieur Eric Z... la somme de 9 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
-à Monsieur Jérémy Z... né en 1991 représenté par Monsieur Eric Z... la somme de 9 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
-à Mademoiselle Laurie-Anne X... née en 2000 représentée par Madame Valérie X... la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
-à Mademoiselle Lou Anne X... née en 2002 représentée par Madame Valérie X... la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
Condamné l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin à payer aux consorts Z... la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Condamné l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin à payer à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Lot et Garonne :
-la somme de 43 370,52 euros montant des débours exposés pour le compte de son assuré Monsieur Yves Z... ;
-la somme de 910 euros par application de l'article L 376-1 du Code de la Sécurité Sociale.
Rejeté la demande de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Lot et Garonne présentée sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. L'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin a relevé appel de cette décision.

Son appel est limité au montant des indemnités accordées par le tribunal puisqu'il précise ne plus contester le lien de causalité entre le dommage et les transfusions sanguines qui sont intervenues.
Il sollicite.
-que les consorts Z... soient déboutés de leurs demandes au titre de la perte de revenus ;
-que les sommes allouées au titre du préjudice de contamination de Monsieur Z... et du préjudice moral des consorts Z... soient réduites ;
-que les petites filles de Monsieur Z... Mesdemoiselles Laurie-Anne X... et Lou Anne X... soient déboutées de leurs demandes ;
-que la créance de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Lot et Garonne soit réduite aux seuls débours directement en lien direct avec le traitement de l'hépatite C de Monsieur Z....
Les consorts Z... demandent que le jugement soit confirmé sauf à majorer le montant de certaines indemnisations.
Ils réclament en conséquence que l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin soit condamné à payer :
1-aux ayants droit de Monsieur Z... pris en leur qualité d'héritiers (Colette, Eric, Vincent, Valérie et Marie-Claire) les sommes suivantes au titre de :
P. E. V. : (préjudice lié à des pathologies exclusives) 120 000,00 euros
P. G. P. A. (perte de gains professionnels actuels) 13 506,54 euros
D. F. T. (déficit fonctionnel temporaire) 79 400,00 euros
2-à Madame Marie-Claire Y... veuve Z... en son nom personnel :
Préjudice économique (crédits) 9 318,92 euros
Pertes de revenus 16 658,68 euros
Préjudice d'accompagnement 20 000,00 euros Préjudice d'affection 35 000,00 euros

3-aux enfants de Monsieur Z..., Colette, Eric, Vincent et Valérie Z..., en leur nom personnel :
Préjudice d'affection 15 000,00 euros
4-aux petits-enfants de Monsieur Z... :
Emilie Z..., Jérémy Z... pris en la personne de leur
représentant légal 9 000,00 euros
Jérôme A... 9 000,00 euros
Laurie-Anne X..., Lou Anne X... pris en la personne de leur
représentant légal 5 000,00 euros
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Lot et Garonne conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné l'EFS à lui verser la somme de 43 221,75 euros au titre des dépenses de santé actuelles servies pour le compte de Monsieur Yves Z....
Elle sollicite :
-que l'indemnité qui lui sera allouée au titre de l'article 376-1 alinéa 8 du code de la sécurité sociale par application de la loi du 21 décembre 2006 soit fixée à 926 euros
-que les indemnités lui revenant portent intérêts à compter de ses premières conclusions déposées le 26 février 2004
-que l'EFS soit condamné à lui verser une indemnité de 400 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Motifs de la décision :

L'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin ne contestant plus sa responsabilité en ce qui concerne la contamination de Monsieur Yves Z... par le virus de l'hépatite C suite à l'administration de produits sanguins, il convient de confirmer sur ce point la décision entreprise et de condamner l'appelant à réparer le préjudice qui en est résulté.

Il reste à statuer sur les postes de préjudice pour lesquels les parties élèvent des contestations.

A Préjudice de la victime directe

1 La perte de gains professionnels actuels (PGPA)

Dans le rapport d'expertise sur lequel se fondent les parties pour déterminer le préjudice, le docteur I... souligne que l'incapacité temporaire totale liée à l'évolution de l'hépatite a été de 5 jours en septembre 1991 (hospitalisation pour bilan) et que les divers autres arrêts de travail et la mise en invalidité ne sont pas exclusivement liés à l'évolution de l'hépatite C mais à l'ensemble d'une pathologie intercurrente.

Le tribunal en a déduit que l'invalidité ne pouvait être que partiellement liée à l'hépatite dans la mesure où lorsque Monsieur Z... a été mis en invalidité en 1989, l'hépatite C n'avait pas encore été détectée (elle l'a été le 18 juin 1991) mais que l'intéressé pouvait déjà en présenter les symptômes (grande fatigalibilité notamment). Il en a déduit que la mise en invalidité ne saurait en conséquence être imputée en totalité à l'hépatite C, mais seulement dans une proportion de 50 % et qu'il convenait d'indemniser le préjudice pour la période du 1er janvier 1989 (date de la mise en invalidité) au 7 avril 1999, (soixantième anniversaire sur la base de 141,85 euros par mois soit 141,85 : 30 (jours) X 3748 (jours) = 17 721,79 : 2 = 8 860,90 euros.
L'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin maintient que la perte de salaire ne pouvait être calculée pour une période antérieure à l'incapacité temporaire fixée par l'expert au 18 juin 1991 et que la mise en invalidité étant antérieure de deux ans à la détection de l'hépatite C, elle ne saurait être rattachée aux conséquences de cette affection.
Les consorts Z... soutiennent pour leur part que la perte de salaire à été subie du 1er janvier 1989 jusqu'à la retraite, que si l'hépatite n'a été découverte qu'en 1991 Monsieur Z... en présentait les symptômes en 1989 ce qui est à l'origine de sa mise en invalidité et que la somme qui doit être prévue à ce titre sur la base de 216,22 euros par mois est de 216,22 / 30 (jours) X 3 748 (jours) = 27 013,08 : 2 = 13 506,54 euros.
Le rapport du Docteur I... précise très clairement que la mise en invalidité n'est pas liée exclusivement à l'évolution de l'hépatite C.
Il en résulte que l'hépatite C a eu, au moins pour partie, un rôle causal dans le placement sous le régime de l'invalidité.
Les pièces produites font ressortir qu'avant même l'intervention du 13 septembre 1984, Monsieur Yves Z... a subi des arrêts de maladie.
Dans un courrier en date du 2 novembre 1987, l'usine des tabacs de TONNEINS où Monsieur Yves Z... travaillait, précise qu'il a été placé en congé de longue durée le 21 mai 1984, et qu'il n'avait pas repris son activité à la date ou cette lettre a été établie.
Cet élément n'est cependant pas de nature à exclure que l'invalidité ait en partie pour cause l'hépatite C dans la mesure où le placement sous ce régime est intervenu le 21 mai 1989, soit bien après la transfusion qui a eu lieu en septembre 2004.
La découverte de l'hépatite C ayant eu lieu en 1991, c'est par ailleurs de manière inopérante que l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin fait valoir que les causes de l'invalidité décidée en 1989 ne sont pas précisées puisque en toute hypothèse il n'aurait pu être mentionné qu'elle proviendrait de cette hépatite qui n'avait pas encore été mise en évidence à cette date.
Il s'avère en outre que l'état de fatigue invoqué par Monsieur Yves Z..., lors de sa mise en invalidité peut parfaitement, pour partie au moins, provenir de l'hépatite C.
Ces éléments commandent de confirmer la décision du tribunal en ce qu'il a retenu que la mise en invalidité provenait dans une proportion de 50 % de l'hépatite C.
Les courriers versés au dossier en date des 7 juin et 13 octobre 1989, adressés par la SEITA, qui était son employeur, à Monsieur Yves Z..., révèlent cependant que son placement en invalidité est intervenu le 21 janvier 1989 et non le 1er janvier 1989.
L'indemnisation sera donc limitée à la période du 21 mai 1989 au 7 avril 1989 soit :
-mai 1989 9 jours
-juin à décembre 1989 210 jours (30 X 7)

-janvier 1990 à décembre 1998 3285 jours 365 X 9

-janvier à mars 1999 30 x 3 90 jours

-1er au 7 avril 1999 7 jours
Total 3 607 jours

Les consorts Z... prétendent que la perte annuelle de salaire a été de 17 019,75 francs soit 216,22 euros par mois et que devrait dès lors leur être accordée une somme de 13 506,54 euros.

Pour calculer la perte de 17 019,75 francs qu'ils invoquent les consorts Z... se fondent sur un revenu annuel de 762,89 francs obtenu en 1983.
Ce revenu perçu plus de 6 ans avant le placement en invalidité intervenu en 1989 ne saurait être pris pour référence alors qu'il n'est pas établi, ni soutenu que les arrêts de travail survenus de 1984 à 1988 résultent de l'hépatite C.
Ayant perçu un revenu de 85 804 francs en 1986, un revenu de 570 50 euros en 1987 et un revenu de 42 552 euros en 1988, il convient de prendre en considération la moyenne de ces 3 années soit 185 406 : 3 = 61 802 euros.
La perte annuelle subie par rapport à la pension d'invalidité est donc de 61 802-59 269 = 2 533 francs soit 386 euros soit 386 : 365 = 1,06 euros par jour, soit 3 817,06 euros pour 3 601 jours soit avec 50 % d'abattement 1 908,53 euros.

2 Sur la créance de la CPAM et les dépenses de santé actuelles :

Le tribunal a condamné l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin à lui payer 43 370,52 euros au titre des débours exposés par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie.

L'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin conteste la demande de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Lot et Garonne en faisant valoir qu'elle se contente de produire aux débats une liste de ses débours visant les dates d'hospitalisation qui n'apparaissent notamment pas dans les rapports des professeurs B...et C...que la cour n'est pas en mesure de considérer que ces hospitalisations sont en lien avec le traitement de l'hépatite C dès lors que Monsieur Z... a subi une popylose rectolitique et une éventration, et que l'on peut s'interroger sur les frais de transport en 1994 époque à laquelle la cirrhose n'était pas apparue.
C'est cependant par de justes motifs qu'il convient d'adopter que le tribunal a rejeté ces moyens, en retenant qu'il résultait d'un rapport du médecin conseil de la caisse que toutes les biologies hépatiques, sérologiques et virologiques réalisées depuis 1991 ainsi que toutes les échographies abdominales réalisées étaient afférentes à l'hépatite C et que les rapports des docteurs I...et D... justifiaient les demandes de la caisse.
Le jugement attaqué doit dès lors être confirmé en ce qu'il a condamné l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin à rembourser à la caisse de Sécurité Sociale les sommes qu'elle justifie avoir déboursées au titre des frais médicaux pharmaceutiques, de transport et d'hospitalisation qu'elle réclame.
La Caisse de Sécurité Sociale sollicitant à ce titre en cause d'appel non pas la somme de 43 370,52 euros que lui a attribué le tribunal mais celle de 43 221,75 euros, il convient de lui allouer cette dernière somme.
Les intérêts dus sur ce montant seront calculés à compter du 26 février 2004, qui correspond à la date des premières conclusions déposées à ce titre par l'intéressée.
Il appartient à la Caisse de Sécurité Sociale d'établir et de recouvrer l'indemnité forfaitaire qu'elle réclame selon les modalités prévues par l'alinéa 9 de l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale, c'est à dire selon les règles applicables aux cotisations de sécurité sociale.
La demande en paiement d'une indemnité de 926 euros qu'elle a formulée à ce titre sera par conséquent déclarée irrecevable.
Il lui sera par contre alloué l'indemnité de 400 euros qu'elle réclame sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

B Sur les préjudices extra patrimoniaux

Sur le préjudice lié à la pathologie évolutive :

Dans les motifs de sa décision le tribunal a précisé qu'il allouait à ce titre une idemnité de 100 000 euros aux consorts Z....

Il apparaît donc que c'est à la suite d'une erreur matérielle que dans le dispositif du jugement le tribunal après avoir condamné l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin à payer 100 000 euros en mentionnant cette somme en chiffres et en lettres, a ensuite fait figurer le chiffre de 120 000 euros sans autres précisions.
Les consorts Z... réclament en cause d'appel le versement de 120 000 euros ;
L'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin sollicite que la somme allouée à ce titre par le tribunal soit diminuée.
Le tribunal a justement souligné que le préjudice spécifique de contamination est un préjudice de caractère personnel qui comprend l'ensemble des troubles entraînés et résultant de la réduction de l'espérance de vie, de l'incertitude quant à l'avenir, de la crainte des souffrances ainsi que des perturbations de la vie intime familiale et sociale.
Il s'avère en outre que Monsieur Yves Z... a eu conscience de la gravité de son état et que son préjudice a été très important puisque l'hépatite C a évolué vers un processus mortel (cirrhose et cancer du foie).
Compte tenu de son âge à la date de la découverte de la contamination (52 ans) puis de l'évolution de son état, il convient de fixer à 100 000 euros l'indemnité réparant ce préjudice.
La décision entreprise sera donc confirmée de ce chef.

Sur le déficit fonctionnel Temporaire :

Les consorts Z... demandent le versement d'une somme de 79 420 euros correspondant au préjudice subi pendant 11 ans et 11 jours sur la base de 600 euros par mois.

La somme réclamée de ce chef correspond aux indemnités mensuelles habituellement allouées au titre de la gêne dans les actes de la vie courante.
Il y a dès lors lieu de faire droit dans son principe à la demande présentée par les consorts Z... de ce chef mais de la réduire de moitié pour tenir compte de ce que l'hépatite C n'est responsable que partiellement de ce préjudice soit :
79 420 : 2 = 39 710 euros

B Les préjudices des victimes indirectes

1 Préjudices patrimoniaux

Sur le préjudice économique relatif aux crédits :

Madame Z... sollicite que lui soit accordée une somme de 9 318,92 euros représentant le montant de la moitié des sommes qu'elle reste devoir aux organismes de crédit suivants : FACET, AG2R, CETELEM, Crédit Agricole (OPEN).

Il résulte des pièces produites que les refus de prise en charge des remboursements des crédits se fondent sauf pour le crédit CETELEM sur la nullité du contrat pour fausse déclaration intentionnelle, les époux Z... n'ayant pas signalé la maladie du mari.
Pour ce qui est du crédit CETELEM le refus se fonde sur le fait que la couverture du risque était exclue la maladie étant antérieure à la signature du contrat.
Il appartenait aux époux Z... de signaler l'existence du risque à l'organisme de crédit et en cas de refus de prêt de ne pas souscrire l'emprunt destiné à financer des achats de consommation courante.
Faute de l'avoir fait Madame Z... ne peut demander à être remboursée au titre de ces crédits, étant souligné que Monsieur Z... souffrait d'autres ennuis de santé que l'hépatite qui auraient dus être signalés, et que le préjudice économique de Madame Z... résultant de l'hépatite C a été indemnisé par le tribunal à hauteur d'une somme de 16 658,68 euros qui n'est discutée par aucune des parties.
Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté Madame Z... de la demande qu'elle avait présentée à ce titre.

Sur les pertes de revenus des proches :

Le tribunal a attribué de ce chef ainsi qu'il vient de l'être précisé, une somme de 16 658,68 euros qui n'est discutée par aucune des parties.

Il convient dès lors de confirmer la décision intervenue sur ce point.

2 Sur les préjudices extra patrimoniaux

a / Sur le préjudice moral et d'accompagnement de Madame Z... :

Le tribunal a accordé à Madame Z... une indemnité de 35 000 euros couvrant le préjudice d'accompagnement pendant la période de maladie traumatique jusqu'au décès et le préjudice d'affetion.

Madame Z... demande que lui soit allouée une indemnité de 20 000 euros pour le préjudice d'accompagnement et une indemnité de 35 000 euros pour le préjudice d'affection.
Compte tenu de la durée de la maladie et des circonstances dans lesquelles est intervenu le décès c'est de manière exacte que le tribunal a majoré l'indemnité de 25 000 euros qu'il aurait pu attribuer pour le préjudice d'affection d'une indemnité de 10 000 euros destinée à couvrir le préjudice d'accompagnement.
Il n'y a pas lieu dès lors d'indemniser plus fortement le préjudice de Madame Z....
L'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin est pour sa part mal fondé à soutenir que les premiers juges ont procédé à une double indemnisation en majorant le préjudice moral résultant de la dégradation de l'état de santé et du décès, et en majorant le préjudice de contamination du fait du décès, alors que le préjudice de contamination est un préjudice propre à la victime qui a été transmis à ses héritiers et que le préjudice moral d'accompagnement est subi par la veuve de Monsieur Z....
Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

B / Sur le préjudice moral des enfants :

La somme de 12 000 euros allouée à chacun des enfants du défunt en réparation de leur préjudice moral est justifié, il n'y a donc pas lieu de faire droit à leur demande tendant à la voir porter à 15 000 euros aucune circonstance ne justifiant qu'elle soit portée à ce montant.

C / Sur le préjudice moral des petits enfants :

Les indemnités de 900 euros allouées à Jérôme A... né en 1983, à Emilie Z... née en 1989, à Jérémy Z... né en 1991 sont justifiées dans la mesure ou ils ont été privés prématurément d'un être cher avec lequel ils avaient pu avoir des contacts proches.

Les indemnités réclamées par Laurie Anne X... qui est née en 2000 et qui n'a pu connaître son grand père que dans les derniers mois de sa vie et par Lou Anne X... qui est née le 3 avril 2002 soit quelques mois avant sa mort, survenue le 29 juin 2002, seront supprimées l'existence du préjudice moral subi par ces enfants âgés respectivement de 25 mois et de 2 mois au jour du décès n'étant pas établi.
L'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin sera condamné à payer aux consorts Z... une indemnité de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles qu'ils ont exposés en cause d'appel.

Par ces motifs :

La cour statuant publiquement et contradictoirement.

Infirme la décision entreprise en ce qu'elle a condamné l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin à payer :
1o) à Madame Marie-Claire Y... épouse Z..., à Madame Colette Z... épouse A..., à Monsieur Eric Z..., à Monsieur Vincent Z..., et à Madame Valérie Z... la somme de 8 860,90 euros au titre de la perte de revenus liée à l'hépatite C subie par Monsieur Yves Z... entre sa mise en invalidité et son admission à la retraite.
Statuant à nouveau sur ce point.
Condamne l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin à payer aux intéressés la somme de 1 908,53 euros au titre de la perte de revenus entre la mise en invalidité et l'admission à la retraite.
2o) à Mademoiselle Laurie-Anne X... et à Mademoiselle Lou Anne X... la somme de 5 000 euros chacune en réparation de leur préjudice moral et statuant à nouveau de ce chef.
Statuant à nouveau de ces chefs.
Déboute les intéressés de leur demande en réparation de leur préjudice moral.
3o) à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Lot et Garonne la somme de 43 370,52 euros au titre des débours exposés pour le compte de Monsieur Yves Z... et la somme de 910 euros en application de l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale.
Statuant à nouveau de ces chefs.
Condamne l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin à payer à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Lot et Garonne la somme de 43 221,75 euros au titre des dépenses de santé actuelles servies pour le compte de Monsieur Yves Z....
Déclare irrecevable la demande de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Lot et Garonne formulée sur le fondement de l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale.
Confirme pour le surplus la décision entreprise.
Y ajoutant.
Condamne l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin à payer à Madame Marie-Claire Y... épouse Z..., à Madame Colette Z... épouse A..., à Monsieur Eric Z..., à Monsieur Vincent Z..., et à Madame Valérie Z... une indemnité de 39 710 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire subi par Monsieur Yves Z... et aux consorts Z... une indemnité de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
Le condamne à payer à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Lot et Garonne une indemnité de 400 euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Dit que la somme principale de 43 221,75 euros due par l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Lot et Garonne portera intérêts au taux légal à compter du 26 février 2004.
Condamne l'Etablissement Français du Sang Aquitaine Limousin aux dépens qui seront distraits conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Robert MIORI, Président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Président, Le Greffier,

Robert MIORI Hervé GOUDOT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0045
Numéro d'arrêt : 07/00599
Date de la décision : 05/03/2008

Références :

ARRET du 19 novembre 2009, Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 19 novembre 2009, 08-16.172, Publié au bulletin

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Bordeaux, 06 décembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2008-03-05;07.00599 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award