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05/02/2008 | FRANCE | N°06/03431

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre civile 1, 05 février 2008, 06/03431


COUR D'APPEL DE BORDEAUX
PREMIERE CHAMBRE CIVILE- SECTION A
--------------------------

ARRÊT DU : 05 FEVRIER 2008
(Rédacteur : Franck LAFOSSAS, Président,)

No de rôle : 06 / 03431

S. A. DEADLINE
c /
LA TRESORERIE DE BORDEAUX EST

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :
aux avoués Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 juin 2006 (dossier no05 / 12028) par le Juge de l'Exécution près le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 03 juillet 2006

APPELANTE : >S. A. DEADLINE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis 14 rue He...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX
PREMIERE CHAMBRE CIVILE- SECTION A
--------------------------

ARRÊT DU : 05 FEVRIER 2008
(Rédacteur : Franck LAFOSSAS, Président,)

No de rôle : 06 / 03431

S. A. DEADLINE
c /
LA TRESORERIE DE BORDEAUX EST

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :
aux avoués Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 juin 2006 (dossier no05 / 12028) par le Juge de l'Exécution près le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 03 juillet 2006

APPELANTE :
S. A. DEADLINE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis 14 rue Henri Schnadt- L1019 LUXEMBOURG
représentée par la SCP RIVEL et COMBEAUD, avoués à la Cour, et assistée de Maître Marie- Laure AGOSTINI, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :
LA TRESORERIE DE BORDEAUX EST, agissant poursuites et diligences de Monsieur le Comptable du Trésor, domicilié en cette qualité rue du recteur Thamin BP 48-33015 BORDEAUX
représentée par la SCP MICHEL PUYBARAUD, avoués à la Cour, et assistée de Maître Thomas BAZALGETTE substituant Maître Pascale MAYSOUNABE, avocats au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 10 décembre 2007 en audience publique, devant la Cour composée de :
Franck LAFOSSAS, Président, Jean- Claude SABRON, Conseiller, Elisabeth LARSABAL, Conseiller,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Annick BOULVAIS

ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 al. 2 du Nouveau Code de Procédure Civile.

* * *

Faits et procédures antérieures :
La S. A Deadline de droit luxembourgeois est propriétaire d'un ensemble de biens immobiliers " Château le Pian " à Bouliac comprenant notamment le château avec deux façades principales, des bâtiments d'exploitation et des dépendances ainsi que les meubles et objets mobiliers les garnissant. Elle a deux locataires, la Société Château du Pian Eurl qui exerce une activité de location des salles de réception et de chambres d'hôtes et les époux B....
Par acte d'huissier en date du 8 octobre 2004, le Trésorier de Bordeaux Est a fait pratiquer une saisie- vente du mobilier des époux B... pour obtenir le paiement d'une somme en principal de 292. 876, 81 € correspondant au montant de la créance fiscale.
Par acte du 29 novembre 2005, la S. A Deadline a assigné devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bordeaux le Comptable du Trésor, Trésorerie de Bordeaux Est, aux fins de revendiquer la propriété des meubles saisis par l'huissier et qui n'appartiendraient pas aux époux B.... Le Trésorier de Bordeaux Est a fait valoir que le délai pour saisir le juge de l'exécution avait expiré le 21 décembre 2004 pour soulever l'irrecevabilité des demandes.
Par jugement du 20 juin 2006, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bordeaux a :. déclaré irrecevables les demandes de la S. A Deadline au motif que l'opposition ayant été formée le 12 octobre 2004, elle concernait soit les époux B... et la S. A Deadline, auquel cas la demande est irrecevable faute d'avoir saisi le juge de l'exécution dans les délais, soit elle ne concernait que les époux B... auquel cas la saisine de la S. A Deadline est irrecevable à défaut d'avoir exercé un recours préalable obligatoire,. condamné la S. A Deadline au paiement de 1. 000 € sur le fondement de l'article 700 ncpc.
Procédure d'appel :
Par acte remis au greffe de la Cour le 3 juillet 2006, la S. A Deadline a déclaré relever appel contre le Comptable du Trésor, Trésorerie de Bordeaux Est, du jugement ainsi rendu le 20 juin 2006 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bordeaux.
L'appelant précise dans ses dernières conclusions signifiées le 6 novembre 2006 que la décision déférée est critiquable parce que :. le 8 octobre 2004 lorsque les huissiers de justice se sont présentés pour saisir le mobilier appartenant aux époux B..., ces derniers leur ont indiqué qu'ils n'étaient propriétaires d'aucun meuble par divers documents. L'huissier en a accusé réception mais a procédé à la saisie des meubles. De plus, ils ont saisi les meubles loués par la Société Château du Pian Eurl en commettant une violation de domicile,. l'atteinte délibérée à la propriété d'autrui constitue une véritable voie de fait commise par l'huissier du Trésor Public qui a délibérément saisi des biens en sachant qu'ils appartenaient à un tiers. Il n'est donc pas fondé à lui opposer une quelconque irrecevabilité en application de l'adage la fraude corrompt tout,. les demandes de la S. A Deadline sont recevables car, si on considère que l'accusé de réception en date du 18 octobre 2004 concerne tant les époux B... que la S. A Deadline, les délais de saisine du juge de l'exécution sont inopposables à la concluante. En effet, l'accusé de réception ne satisfait pas aux obligations prévues par le Décret du 6 juin 2001 en vertu duquel il doit mentionner la date à laquelle, à défaut de décision expresse, la demande est réputée acceptée ou rejetée. D'autre part, l'avocat des époux B... a indiqué le 2 novembre 2004 qu'il intervenait pour la S. A Deadline laquelle revendiquait les meubles saisis et que les justificatifs d'achat du mobilier avaient été joints à sa correspondance du 12 octobre 2004. Dès lors, la S. A Deadline avait satisfait à son obligation de recours contentieux préalable et le Trésorier Payeur Général aurait dû accuser réception de la demande de la S. A Deadline en mentionnant expressément les délais et la date de naissance de la décision de rejet implicite. Faute d'avoir satisfait à ces exigences aucun délai de recours n'est opposable à la requérante,. en application des articles L 283 et R 283-1 du Livre des procédures fiscales, lorsque la propriété de tout ou partie des biens saisis est revendiquée par une tierce personne, elle peut s'opposer à la vente de ces biens en demandant leurs restitution. Il résulte de l'ensemble des documents communiqués tant aux huissiers lors de la procédure de saisie qu'au Trésorier de Bordeaux Est lors des différents recours gracieux que le mobilier était la propriété exclusive de la S. A Deadline. Par conséquent, le Trésorier de Bordeaux Est ne peut invoquer la théorie de l'apparence pour justifier la saisie.
Il est en conséquence demandé d'infirmer et déclarer recevable et bien fondée la demande de la S. A Deadline sur les meubles saisis, prononcer la nullité des actes de saisie pratiqués le 8 octobre 2004 par l'huissier de la Trésorerie principale de Bordeaux Est, outre lui allouer 3. 000 € au titre de l'article 700 ncpc.
Le Trésorier de Bordeaux- Est intimé, par ses conclusions signifiées le 27 août 2007, demande à la cour. à titre principal, constater que le délai de saisine du juge de l'exécution expirait le 21 décembre 2004, que la S. A Deadline exerce une action en nullité qui n'appartient qu'au débiteur. En conséquence, déclarer irrecevables les demandes de la S. A Deadline,. à titre subsidiaire, constater que la situation décrite par la S. A Deadline n'est qu'une apparence, en conséquence la débouter de ses demandes, fins et conclusions,. en tout état de cause la condamner au paiement de la somme de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 ncpc.
À cet effet il fait valoir :. par courrier du 12 octobre 2004, les époux B... ont indiqué au Trésorier de Bordeaux Est qu'ils n'étaient pas propriétaires du mobilier. Par courrier du 18 octobre, le Trésorier de Bordeaux Est accusait réception auprès de l'avocat en l'informant que le propriétaire allégué du mobilier devait présenter une requête en revendication, incluant les délais. Le 2 novembre, Maître Prémont confirmait être l'avocat de la S. A Deadline et estimait que les documents déjà transmis suffisaient à justifier la requête. Le Trésorier de Bordeaux Est était alors fondé à considérer que le recours du 12 octobre concernait à la fois les époux B... et la S. A Deadline et que cette dernière a été régulièrement informée des voies de recours. Par conséquent, la S. A Deadline ne pouvait contester la décision implicite de rejet qu'avant le 21 décembre 2004,. le courrier du 2 novembre 2004 ne peut constituer une opposition à poursuites car il ne contient aucune demande et ne motive pas précisément l'opposition ni ne fournit les justificatifs utiles conformément à l'article R 281-1 du livre des procédures fiscales. La seule opposition à poursuites formulée est celle du courrier du 12 octobre 2004. Soit on considère qu'elle vaut pour les époux B... et la S. A Deadline et la demande devant le juge de l'exécution est irrecevable car prescrite, soit on considère que cette opposition à poursuites ne vaut que pour les époux B... et alors le recours formé devant le juge de l'exécution est irrecevable pour défaut d'exercice d'un recours préalable obligatoire,. l'argumentation relative à l'application du décret du 6 juin 2001 est inefficace car il résulte de la loi du 12 avril 2000 que ces dispositions ne sont pas applicables aux demandes dont l'accusé de réception est régi par des dispositions spéciales,. les huissiers du Trésor public n'ont procédé aux opérations de saisie que dans la partie des locaux représentant le domicile des époux B.... De plus, en application de l'article 2279 c. civ., il existe une présomption de propriété des biens saisis entre les mains du débiteur,. les époux B... tentent d'organiser leur insolvabilité par divers montages juridiques.
Sur quoi, la Cour :
Le Trésorier intimé produit le courrier recommandé avec accusé de réception, daté du 12 octobre 2004 et intitulé " recours contentieux préalable ", par lequel le cabinet d'avocats Prémont, du barreau de Paris, conteste au nom de ses clients monsieur et madame B... la saisie du mobilier effectuée le 8 octobre 2004, dont il affirme que la SA Deadline est propriétaire. Ce courrier est accompagné de différentes pièces annexées et listées, destinées à prouver cette propriété.
Le Trésorier produit également la copie, non contestée, de son accusé de réception du 18 octobre par lequel il rappelle que l'absence de notification d'une décision dans le délai de 2 mois équivaut à un rejet et permet de saisir la juridiction compétente dans un délai de 2 mois, et dans lequel il rappelle quelques règles de procédure.
Il produit enfin son courrier du 18 octobre également non contesté par lequel il rappelle au cabinet d'avocat Prémont que son courrier du 12 octobre 2004 est établi au nom des époux B... et qu'il convient que la réclamation soit effectuée par le propriétaire du mobilier en question.
Par réponse du 21 octobre cet avocat se déclarait " extrêmement surpris " de la demande du 18 octobre en estimant avoir produit toutes les justifications nécessaires par son courrier du 12 octobre.
Répondant à cette réponse par télécopie du 28 octobre, le Trésorier demandait à ce cabinet d'avocat de lui confirmer qu'il agissait bien en sa qualité de conseil du propriétaire du mobilier, la société Deadline et lui demandait les justificatifs de cette propriété.
Sur cette question, l'avocat répondait par courrier recommandé avec accusé de réception du 2 novembre " je vous confirme également intervenir en qualité d'avocat de la société Deadline " et il estimait à nouveau suffisants les éléments de preuve déjà fournis.
Ces éléments démontrent que l'opposition du 12 octobre 2004 concernait à la fois les époux B... et la société Deadline, agissant par le même avocat, par un seul courrier commun. La demande formée par cette société devant le juge de l'exécution est donc postérieure à l'expiration des délais de prescription.
C'est à tort que l'appelante soutient que ces délais n'auraient pas couru faute de notification régulière au sens du décret du 6 juin 2001. En effet l'article 19 de la loi du 12 avril 2000 précise qu'elle ne s'applique qu'en l'absence de dispositions spéciales. Or les articles L 281, L 283, R 281-1 et R 283-1 et suivants du livre des procédures fiscales constituent ces régimes particuliers dérogeant à la règle générale. Et il n'est pas soutenu qu'ils n'aient pas été respectés.
Il ne peut non plus être considéré, comme le soutient l'appelante, que le courrier du 2 novembre 2004 ait constitué une opposition au nom de la société Deadline, à laquelle n'aurait pas répondu l'administration.
En effet ses termes, plus haut reproduits, ne contiennent aucune équivoque : ils ne présentent aucune demande, aucun argumentaire, et se limitent à confirmer que l'intervention du cabinet d'avocats, déjà faite et enregistrée " je fais suite à votre télécopie du 28 octobre 2004 ", concerne également les intérêts de la société Deadline.
Ainsi que l'expose le Trésorier cela ne peut valoir nouvelle et distincte opposition.
En conséquence l'action de la société Deadline doit être déclarée irrecevable faute d'avoir été exercée dans les délais suite au rejet de son opposition du 12 octobre 2004.
Et, de façon superfétatoire, même s'il devait être analysé que l'opposition du 12 octobre 2004 ne concernait que les époux B..., la société Deadline ne peut être déclarée recevable faute d'avoir présenté le recours préalable obligatoire.
Quant à la critique plus générale sur les conditions de la saisie, la société Deadline n'est pas recevable à contester un acte qui concerne les époux B....
Le premier juge avait exactement apprécié les circonstances de fait et de droit et sa décision sera confirmée.
L'appel a généré pour l'intimé des frais injustes non compris aux dépens qu'une somme de 2. 000 € viendra indemniser en vertu de l'article 700 ncpc.
Par ces motifs :
Confirme la décision déférée,
Condamne la société SA Deadline à payer au Trésorier de Bordeaux Est la somme de 2. 000 € (deux mille euros) au titre de l'article 700 ncpc,
Lui laisse la charge des dépens d'appel avec distraction au profit de la SCP Michel Puybaraud, avoué.
L'arrêt a été signé par le président Franck Lafossas et par Annick Boulvais, greffier auquel il a remis la minute signée de la décision.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 06/03431
Date de la décision : 05/02/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2008-02-05;06.03431 ?
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