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21/12/2007 | FRANCE | N°05/04225

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre civile 1, 21 décembre 2007, 05/04225


ARRET RENDU PAR LA

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

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Le 21 décembre 2007,

PREMIÈRE CHAMBRE SECTION B

No de rôle : 05/04225

LA S.A.R.L. MANURIBE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

c/

LA COMMUNE DE RIBERAC, prise en la personne de son Maire domicilié en cette qualité à la Mairie de ladite commune,

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avoués

Rendu par mise à disposition au greffe, les parties en ayant

été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450-2o alinéa du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le 21 décembre 2...

ARRET RENDU PAR LA

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

---------------------------

Le 21 décembre 2007,

PREMIÈRE CHAMBRE SECTION B

No de rôle : 05/04225

LA S.A.R.L. MANURIBE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

c/

LA COMMUNE DE RIBERAC, prise en la personne de son Maire domicilié en cette qualité à la Mairie de ladite commune,

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avoués

Rendu par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450-2o alinéa du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le 21 décembre 2007,

Par Monsieur Louis-Marie CHEMINADE, Président

en présence de Madame Armelle FRITZ, Greffier,

La COUR d'APPEL de BORDEAUX, PREMIÈRE CHAMBRE SECTION B, a, dans l'affaire opposant :

LA S.A.R.L. MANURIBE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis 30-32, rue Roger Salengro - 94120 FONTENAY SOUS BOIS

Représentée par Maître Patrick LE BARAZER, Avoué à la Cour, et assistée de Maître Frédéric CHASTRES, Avocat au barreau de Bergerac,

Appelante d'un jugement au fond rendu le 05 juillet 2005 par le Tribunal de Grande Instance de PERIGUEUX suivant déclaration d'appel en date du 15 Juillet 2005,

à :

LA COMMUNE DE RIBERAC, prise en la personne de son Maire domicilié en cette qualité à la Mairie de ladite commune, sis Mairie - 7, rue des Mobiles de Coulmiers - 24600 RIBERAC

Représentée par la S.C.P Sophie LABORY-MOUSSIE et Eric ANDOUARD, Avoués Associés à la Cour, et assistée de Maître Alexandre ALJOUBAHI, Avocat au barreau de Périgueux,

Intimée,

Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause a été débattue, en audience publique le 15 Octobre 2007 devant :

Monsieur Louis-Marie CHEMINADE, Président,

Monsieur Pierre-Louis CRABOL, Conseiller,

Monsieur Michel BARRAILLA, Conseiller,

Madame Armelle FRITZ, Greffier,

Et qu'il en a été délibéré par les Magistrats du Siège ayant assisté aux débats :

Vu le jugement rendu le 05 juillet 2005 par le Tribunal de Grande Instance de PERIGUEUX, qui, après avoir ordonné la jonction de deux instances, a prononcé la résiliation d'un contrat de crédit bail liant la Commune de RIBERAC à la S.A.R.L. MANURIBE en vertu de deux actes authentiques des 28 mars 2001 et 14 mars 2003, a condamné la S.A.R.L. MANURIBE à payer à la Commune de RIBERAC une indemnité de résiliation fixée contractuellement à 20 % du capital restant dû à la date de la résiliation, tel qu'il résultait du tableau d'amortissement de l'emprunt contracté par le bailleur, augmentée du montant des indemnités dues au prêteur pour remboursement anticipé, outre une somme de 1.200,00 € par application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile, a débouté la S.A.R.L. MANURIBE de ses demandes, et l'a condamnée aux dépens ;

Vu la déclaration d'appel de la S.A.R.L. MANURIBE du 15 juillet 2005 ;

Vu les conclusions de l'appelante, signifiées et déposées le 15 novembre 2005 ;

Vu les dernières écritures de la Commune de RIBERAC, signifiées et déposées le 02 mai 2006 ;

Vu l'ordonnance de clôture du 01 octobre 2007 ;

DISCUSSION :

Selon acte reçu le 28 mars 2001 par Me Gilles Z..., notaire associé à RIBERAC (24), la Commune de RIBERAC a consenti à la S.A.R.L. MANURIBE un contrat de crédit bail immobilier portant sur deux bâtiments à usage industriel, d'une superficie totale de 1.170 m², situés 1 avenue de Royan, pour une durée de huit années à compter rétroactivement du 01 novembre 2000, moyennant un loyer mensuel de 6.261,00 F HT (954,48 €). Le contrat contenait une promesse de vente de ces biens à l'expiration du bail pour un prix de 22.500,00 F (3.430,10 €). Il était prévu que l'immeuble était destiné à la fabrication de vêtements, que pendant toute la durée du contrat, le crédit preneur ne pourrait affecter les lieux qu'à cette exploitation, et qu'il ne pourrait changer cette destination sans l'accord écrit et express du crédit bailleur. Selon acte reçu le 14 mars 2003 par le même notaire, la durée du contrat de crédit bail a été réduite au 28 février 2005, au lieu du 31 octobre 2008, en raison de deux subventions accordées par le Conseil général de la Dordogne à la Commune de RIBERAC et que celle-ci avait décidé d'inscrire en diminution du loyer dû par la S.A.R.L. MANURIBE.

A partir du mois d'octobre 2003, la S.A.R.L. MANURIBE a entrepris de licencier la quasi-totalité de son personnel, soit près de cinquante salariés, pour motif économique, en alléguant la perte de clients, qui avaient orienté leurs commandes vers des pays à faible coût de main d'oeuvre. Par lettre du 08 janvier 2004, le maire de RIBERAC lui a indiqué qu'il considérait qu'elle ne remplissait plus les conditions fixées au titre I du contrat de crédit bail et l'a mise en demeure de lui apporter la preuve, dans un délai de quinze jours, de ce qu'elle continuait une activité de fabrication de vêtements dans l'immeuble loué, lui faisant part de son intention, à défaut, d'engager une procédure de résiliation. Cette mise en demeure a été réitérée par deux actes d'huissier des 30 janvier et 16 février 2004. De son côté, la S.A.R.L. MANURIBE, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 14 janvier 2004, a levé l'option en vue d'acquérir les bâtiments, en proposant une vente immédiate.

Le 07 février 2005, la Commune de RIBERAC a fait assigner la S.A.R.L. MANURIBE devant le Tribunal de Grande Instance de PERIGUEUX, sur le fondement des articles 1184 et 1156 du Code civil, pour faire prononcer la résiliation du contrat de crédit bail aux torts du crédit preneur. Le 25 mars 2005, la S.A.R.L. MANURIBE a fait assigner la Commune de RIBERAC à jour fixe devant le même tribunal pour faire juger que la promesse de vente contenue dans le contrat de crédit bail était parfaite et pour faire ordonner la passation de la vente par acte authentique.

Par le jugement déféré, le tribunal, statuant sur ces deux instances, a prononcé la résiliation du contrat aux torts de la S.A.R.L. MANURIBE, au motif que compte tenu des investissements réalisés par la Commune de RIBERAC avec des deniers publics et du caractère modeste de la contrepartie demandée à la S.A.R.L. MANURIBE, à savoir un loyer mensuel inférieur à 1.000,00 € pour une superficie totale bâtie de 1.170 m², le bénéfice du crédit bail devait "nécessairement être considéré comme ayant été accordé dans un intérêt de service public consistant dans le maintien d'emplois stables dans une commune rurale", et que "la commune intention des parties sur ce point, même si elle n'a pas été expressément mentionnée dans le contrat de crédit bail doit manifestement être admise par le Tribunal au regard des dispositions de l'article 1156 du Code Civil". Le premier juge, après avoir noté que la S.A.R.L. MANURIBE avait licencié la quasi-totalité de son personnel et n'employait plus sur le site de RIBERAC que deux salariés se livrant à une activité réduite cessant chaque jour à 15 heures, a estimé qu'elle avait "failli à la double obligation qui lui incombait contractuellement de maintenir une activité de fabrication de vêtements employant un nombre significatif de salariés", et que cette carence ayant persisté plus de quinze jours à compter de la mise en demeure du 16 février 2004, la Commune de RIBERAC était fondée à faire prononcer la résiliation du contrat de crédit bail et à obtenir l'indemnité de résiliation forfaitairement fixée. Le tribunal a par ailleurs débouté la S.A.R.L. MANURIBE de ses demandes, en relevant que la résiliation de la convention aux torts du crédit preneur privait celui-ci de la possibilité de solliciter la levée de l'option, qui était expressément conditionnée au respect de ses obligations.

La S.A.R.L. MANURIBE fait grief au tribunal de s'être livré à une interprétation abusive de la commune intention des parties en retenant à tort que la conclusion du contrat avait été motivée par l'intérêt général et par des considérations sociales, alors qu'il s'était agi d'une simple opération financière pour la Commune de RIBERAC. Elle fait valoir que ni le contrat, ni les différentes délibérations de Conseil Municipal n'évoquent un maintien ou une création d'emploi, et que ce "pseudo critère" n'est apparu pour la première fois qu'au cours de la procédure judiciaire. Elle soutient que le premier juge ne pouvait, sous couvert d'interprétation, modifier des clauses contractuelles claires et précises, en les dénaturant et en portant atteinte à la force obligatoire des conventions. Elle reproche également au tribunal d'avoir procédé à une appréciation erronée de la situation de fait en estimant qu'elle avait manqué à ses obligations, alors que s'il est exact qu'elle a réduit son activité en raison de l'évolution du marché des vêtements, elle a continué d'employer sept salariés sur le site et à y poursuivre une activité de fabrication de vêtements, respectant ainsi la destination des lieux. Elle prie en conséquence la Cour d'infirmer le jugement, de débouter la Commune de RIBERAC de toutes ses prétentions, de dire que la promesse de vente est parfaite, d'ordonner la passation de la vente, et de dire qu'à défaut de comparution de la Commune devant le notaire désigné, l'arrêt à intervenir vaudra vente et transfert de propriété à son profit, sollicitant en outre les sommes de 25.000,00 € à titre de dommages et intérêts et de 7.500,00 € par application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

La Commune de RIBERAC estime que le tribunal a justement apprécié la commune intention des parties, le caractère exclusif de la destination des lieux à usage de fabrication de vêtements, démontrant, selon elle, que les cocontractants avaient entendu créer ou maintenir des emplois sur son territoire. Elle soutient par ailleurs qu'il n'existe plus d'activité de fabrication de vêtements dans les lieux depuis la fin de l'année 2003. Elle conclut en conséquence à la confirmation pure et simple du jugement, sollicitant une somme de 2.500,00 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Attendu que s'il est probable qu'en consentant à la S.A.R.L. MANURIBE un contrat de crédit bail immobilier à des conditions financières particulièrement avantageuses et en la faisant directement bénéficier, lors de la conclusion de l'avenant du 14 mars 2003, de subventions accordées par le Conseil Général, la Commune de RIBERAC a eu l'intention de favoriser la création ou le maintien d'emplois sur son territoire, rien ne démontre que cette intention ait été partagée par sa cocontractante, ni qu'elle soit entrée dans le champ contractuel, aucune mention ne figurant à cet égard dans le contrat ;

Attendu en revanche qu' il est clairement spécifié dans la convention de crédit bail du 28 mars 2001, que "l'immeuble objet des présentes est destiné à la fabrication de vêtements" (titre III, paragraphe 1 : page 25), que "pendant toute la durée du contrat de crédit-bail, le CREDIT-PRENEUR ne pourra affecter les biens loués, ainsi qu'il s'y oblige, qu'à l'exploitation indiquée au TITRE III du présent contrat" (titre I, paragraphe B, alinéa 1 : page 5), et que "cette destination ne devra faire l'objet d'aucun changement sans l'accord exprès et par écrit du CREDIT-BAILLEUR" (idem, alinéa 2) ; que ces dispositions ont été maintenues lors de la conclusion de l'avenant du 14 mars 2003 (paragraphe "CONDITIONS", alinéa b : page 4) ; que s'il est exact, ainsi que le souligne la S.A.R.L. MANURIBE, que le contrat de crédit bail ne comporte aucune obligation quant au nombre d'employé et au volume d'activité du preneur, le caractère impératif des dispositions précitées démontre néanmoins que les parties ont entendu que les locaux loués soient affectés à leur destination, à savoir la fabrication de vêtements, en totalité et pendant toute la durée du contrat, et non qu'il n'y soit exercé qu'une activité limitée ou symbolique ;

Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats qu'à partir du mois d'octobre 2003, la S.A.R.L. MANURIBE a licencié pour motif économique la quasi-totalité du personnel qu'elle employait jusque-là sur le site de RIBERAC ; que dans la lettre de licenciement adressée le 13 octobre 2003 à l'une de ses salariés, Patricia A... (pièce 8 de la production de l'intimée), elle invoque une perte de commandes de ses principaux clients, consécutive à une politique de délocalisation vers des pays à faible coût de main d'oeuvre dans le secteur du vêtement sur-mesures, et fait part de la nécessité dans laquelle elle se trouve de "réorganiser l'entreprise en fermant l'unité de production, (...) l'activité de production ne pouvant plus être sauvegardée", ajoutant qu'elle est dans l'impossibilité de reclasser la salariée "puisque l'unité de production ferme" ; que par ailleurs, la Commune de RIBERAC justifie de ce que par lettre du 20 octobre 2003, la S.A.R.L. MANURIBE a résilié à compter du 01 mars 2004 son contrat d'abonnement au service des eaux, afférent à l'immeuble loué ; qu'elle produit en outre une lettre d'un contrôleur du travail du 18 mai 2004 dont le rédacteur certifie qu'il s'est présenté le 08 mai 2004 en fin de matinée dans les locaux de la S.A.R.L. MANURIBE, route de Royan à RIBERAC, et qu'il a constaté la présence d'une seule salariée sur place, qui lui a déclaré qu'elle s'occupait de faire quelques retouches pour un magasin de son employeur situé à MARSAC (24) ; qu'elle communique également une lettre du 17 mai 2004 du contrôleur principal des impôts de RIBERAC, qui précise que la S.A.R.L. MANURIBE ne sera pas imposée au rôle général de la taxe professionnelle au titre de l'année 2004 sur la commune de RIBERAC, en rappelant que la taxe professionnelle est due par tout redevable qui exerce une activité au 1er janvier de l'année d'imposition ;

Attendu que la S.A.R.L. MANURIBE verse enfin aux débats deux procès-verbaux de constat d'huissier dressés de manière non contradictoire à sa requête le jeudi 26 février 2004 et le mercredi 19 janvier 2005 ; que dans le premier, l'huissier de justice certifie que s'étant rendu dans les locaux de la S.A.R.L. MANURIBE à RIBERAC à une heure qu'il ne précise pas, il a constaté que cette société ne semblait pas avoir repris d'activité, que les grilles étaient baissées en arrière des vitrines et de la porte d'entrée, que le portail principal coulissant était fermé, que le portail donnant accès au parking était ouvert, que seuls deux véhicules étaient garés sur ce parking, outre un fourgon à l'arrière, et que deux salariées seulement étaient présentes dans l'usine ; qu'il a réalisé un film de six minutes environ, gravé sur un cd-rom annexé à son procès-verbal, qui démontre que ces constatations ont eu lieu en milieu de journée, à une heure normale d'ouverture, et qui confirme abondamment ses indications écrites ; que dans le second constat, le même huissier rapporte que s'étant rendu dans les locaux de la S.A.R.L. MANURIBE à RIBERAC à 14 heures 55, il a constaté que le portail principal coulissant était fermé, que le portail donnant accès au parking était ouvert, que seuls deux véhicules étaient stationnés sur ce parking, qu'à l'intérieur se trouvaient les deux salariées déjà rencontrées lors du précédent constat qui lui avaient déclaré qu'elles étaient seules employées à l'usine et qu'elles quittaient leur travail à 15 heures, qu'il existait plusieurs dizaines de machines dont la plupart étaient couvertes par des housses ou des films en matière plastique, que de nombreuses chaises étaient posées sur les plateaux des machines qui semblaient désaffectées, qu'il existait au fond de l'atelier de nombreuses traverses de rayonnage démontées et stockées, ainsi que des équipements en partie démontés, que le magasin était fermé, avec ses grilles baissées, qu'il s'y trouvait des portants avec des ensembles de vestes et de costumes, que quelques rouleaux de tissus étant posés sur une table de découpe, et que personne ne se trouvait dans les bureaux ; qu'il a réalisé un film de près de dix minutes, gravé sur un cd-rom annexé à son procès-verbal, qui confirme abondamment ses constatations écrites ;

Attendu que la S.A.R.L. MANURIBE soutient que la demande de résiliation de son contrat d'abonnement d'eau a été faite par erreur ; qu'elle démontre que cette résiliation a été annulée au mois de mars 2004 et que le branchement a été rouvert ; qu'elle affirme par ailleurs n'avoir jamais cessé d'exercer son activité dans les lieux loués ; que pour en apporter la preuve, elle produit quatre procès-verbaux de constat d'huissier établis de manière non contradictoire à sa requête les 06 février, 23 juillet, 25 novembre 2004 et 22 février 2005 ; que dans le premier, l'huissier de justice indique s'être transporté dans les locaux de la S.A.R.L. MANURIBE à RIBERAC à une heure non précisée et avoir constaté que dans l'atelier de confection se trouvaient de nombreuses machines, que l'électricité était en état de fonctionnement et que deux salariées, Patricia B... et Marie-Françoise C..., travaillaient en produisant des vêtements ; que dans les deux autres constats, rédigés en les mêmes termes, le même huissier rapporte s'être rendu dans les locaux de la S.A.R.L. MANURIBE à RIBERAC à 8 heures 30, y avoir constaté la présence de deux employées qui lui ont déclaré avoir embauché comme tous les jours à 08 heures, et avoir noté la présence des machines nécessaires à l'activité de l'entreprise, reliées à l'électricité qui fonctionnait ; que des photographies annexées au constat du 03 juillet 2004 démontrent la présence de trois véhicules sur le parking ; que dans le constat du 25 novembre 2004, il est en outre noté que les employées façonnaient une commande d'écharpes et qu'il existait des lots de tissu en provenance d'Italie devant servir à la confection de vêtements ; que dans le dernier constat, l'huissier de justice note qu'il s'est présenté dans les locaux litigieux à 08 heures 30 et qu'il y a constaté la présence de deux salariées vaquant à leurs occupations habituelles, ainsi que de deux nouvelles machines, un ensemble de découpe et une tronçonneuse de biais, dont il a noté les références ; que la S.A.R.L. MANURIBE verse également aux débats les bulletins de salaires de décembre 2003 à mars 2004 de sept salariés dont elle indique qu'ils ont travaillé sur le site de RIBERAC, ainsi que des attestations de clients lui ayant passé des commandes au cours de l'année 2004, des bons de livraison de tissus à destination de son établissement de RIBERAC, une soixantaine de fiches de mesure établies au cours de l'année 2004 pour la confection de vêtements, et la copie d'un cahier manuscrit dont elle indique qu'il s'agit du livre des ventes de son magasin ; qu'enfin, elle justifie avoir été assujettie à la taxe professionnelle pour son établissement de RIBERAC au titre de l'année 2004 ;

Attendu qu'il ne peut être tiré aucune conclusion utile des conditions dans lesquelles l'abonnement au service des eaux a été résilié puis rétabli ; qu'en ce qui concerne les constats d'huissier, il convient de noter que ceux établis à la requête de la S.A.R.L. MANURIBE ne font que confirmer ceux dressés à la demande de la Commune de RIBERAC ; qu'en effet, dans tous les cas, de février 2004 à février 2005, il n'a été constaté, dans les locaux en litige, la présence que de deux salariées se livrant à quelques travaux de confection ; que les films annexés aux constats établis à la requête de la Commune de RIBERAC prouvent que les bâtiments étaient reliés à l'électricité ; que les photographies annexées au constat dressé le 23 juillet 2004 à l'initiative de la S.A.R.L. MANURIBE montrent la plupart des machines de l'atelier recouvertes d'une housse ou d'une matière plastique, dans l'état où elles apparaissent sur les films réalisés par l'huissier adverse ; que pour ce qui est des bulletins de salaires, seuls Patricia B..., Sébastien B... et Marie-Françoise C... ont été employés sur le site de RIBERAC ; que Nicole D... a été employée dans l'établissement de MARSAC SUR L'ISLE (24), ainsi qu'elle en atteste et que cela est précisé dans son contrat de travail, versé aux débats ; que les autres salariés dont les bulletins de salaire sont produits sont domiciliés dans le département de l' Indre-et-Loire et n'ont manifestement pas été employés à RIBERAC, comme l'a justement relevé le tribunal ; qu'en ce qui concerne les commandes, il n'est pas prouvé qu'elles aient été exécutées, aucune facture n'étant communiquée ; que par ailleurs, aucune mention ne permet d'établir que les fiches de mesure et la copie du cahier des ventes produites par l'appelante concernent l'établissement de RIBERAC ; qu'en revanche, il est démontré que des tissus en provenance d'Italie ont été livrés au cours de l'année 2004 dans cet établissement, que la S.A.R.L. MANURIBE a été assujettie à la taxe professionnelle pour l'année 2004 sur la commune de RIBERAC, et qu'elle a pris en location auprès de la S.A.R.L. TRANS METAL à partir du mois de novembre 2004 un caisson destiné aux déchets textiles de ses locaux de RIBERAC ; que toutefois, cette dernière circonstance doit être appréciée au regard du fait que la S.A.R.L. TRANS METAL a déclaré, en réponse à une sommation interpellative qui lui avait été signifiée le 21 janvier 2005 par un huissier de justice mandaté par la Commune de RIBERAC, que jusqu'au mois de mai 2004, elle avait donné en location à la S.A.R.L. MANURIBE une benne métallique de 15 mètres cube qui se trouvait en permanence sur le parking, que lorsque l'entreprise "était en pleine activité" cette benne était enlevée environ tous les deux mois, mais que désormais, il s'agissait d'un bac en matière plastique de 600 litres, entreposé à l'intérieur des locaux ;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que contrairement à ce que prétend la Commune de RIBERAC, la S.A.R.L. MANURIBE n'a pas cessé toute activité de confection dans les locaux litigieux de décembre 2003 jusqu'au terme du contrat de crédit bail, fixé au 28 février 2005 ; qu'elle n'a toutefois maintenu dans ces bâtiments qu'une activité extrêmement réduite, exercée par deux salariées, peut-être trois au début de l'année 2004 ; que dans la mesure où il résulte des articles de presse versés aux débats qu'elle employait 46 salariés sur ce site jusqu'au mois d'octobre 2003, il apparaît que ce maintien d'activité est sans aucun rapport avec son activité antérieure, avec la taille des locaux mis à sa disposition, d'une superficie totale de 1.170 m², et avec les prévisions contractuelles ; qu'en effet, le maintien d'une activité aussi limitée, comprenant de surcroît un travail de retouches pour le magasin de MARSAC SUR L'ISLE, ne satisfait pas à l'engagement, souscrit par le crédit preneur, d'affecter les locaux objet du crédit bail, pendant toute la durée de celui-ci, à l'exploitation d'une activité de fabrication de vêtements ; que compte tenu de la gravité de ce manquement contractuel, le crédit bailleur, qui a engagé son action avant le terme de la convention, est fondé à solliciter la résiliation de celle-ci ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé cette résiliation et en ce qu'il a condamné la S.A.R.L. MANURIBE à payer l'indemnité contractuellement prévue dans cette hypothèse ;

Attendu qu'il est prévu au contrat de crédit bail du 28 mars 2001 que "la réalisation de la promesse de vente est subordonnée à la parfaite exécution par le CREDIT-PRENEUR de chacune et de l'ensemble des clauses, charges et conditions stipulées sous le Titre I dans le présent contrat" (page 22, paragraphe 7) ; que compte tenu de la résiliation de la convention à ses torts, la S.A.R.L. MANURIBE n'est donc plus en droit de poursuivre la réalisation forcée de la promesse de vente ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de toutes ses demandes, et de rejeter la demande de dommages et intérêts supplémentaires qu'elle a formée devant la Cour ;

Attendu que la S.A.R.L. MANURIBE succombant en toutes ses prétentions, elle sera condamnée aux dépens de l'appel ; que par ailleurs, il serait inéquitable que la Commune de RIBERAC conserve à sa charge la totalité des frais irrépétibles exposés par elle à l'occasion de ce recours ; qu'il y a lieu de lui accorder une somme de 2.000,00 € en vertu de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR :

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Reçoit la S.A.R.L. MANURIBE en son appel ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 05 juillet 2005 par le Tribunal de Grande Instance de PERIGUEUX ;

Y ajoutant :

Déboute la S.A.R.L. MANURIBE de sa demande de dommages et intérêts supplémentaires formée devant la Cour ;

Condamne la S.A.R.L. MANURIBE à payer à la Commune de RIBERAC une somme de 2.000,00 € en vertu de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile ;

Condamne la S.A.R.L. MANURIBE aux dépens de l'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau code de procédure civile ;

Signé par Monsieur Louis-Marie CHEMINADE, Président, et par Madame Armelle FRITZ, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 05/04225
Date de la décision : 21/12/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Perigueux, 05 juillet 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2007-12-21;05.04225 ?
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