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14/11/2007 | FRANCE | N°03/04363

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0044, 14 novembre 2007, 03/04363


ARRET RENDU PAR LA

COUR D' APPEL DE BORDEAUX

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Le : 14 Novembre 2007

DEUXIÈME CHAMBRE

No de rôle : 03 / 04363

S. A. ETABLISSEMENTS BEDOUT

c /

Société de droit allemand MAHILD DRYING TECHNOLOGIES

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avoués

Rendu par mise à disposition de l' arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l' article 450 du nouveau code de procédure

civile.

Le 14 Novembre 2007

Par Monsieur Philippe LEGRAS, Conseiller,

La COUR d' APPEL de BORDEAUX, DEUXIÈME CHAMBRE, a, dans l' a...

ARRET RENDU PAR LA

COUR D' APPEL DE BORDEAUX

--------------------------

Le : 14 Novembre 2007

DEUXIÈME CHAMBRE

No de rôle : 03 / 04363

S. A. ETABLISSEMENTS BEDOUT

c /

Société de droit allemand MAHILD DRYING TECHNOLOGIES

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avoués

Rendu par mise à disposition de l' arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l' article 450 du nouveau code de procédure civile.

Le 14 Novembre 2007

Par Monsieur Philippe LEGRAS, Conseiller,

La COUR d' APPEL de BORDEAUX, DEUXIÈME CHAMBRE, a, dans l' affaire opposant :

S. A. ETABLISSEMENTS BEDOUT agissant en la personne de son Président Directeur Général domicilié en cette qualité au siège social, sis33720 GUILLOS

représentée par la SCP LABORY- MOUSSIE et ANDOUARD, avoués à la Cour et assistée de Maître Michel DUFRANC, avocat au barreau de BORDEAUX

appelante d' un jugement (R. G. 2002F00441- 2002F01026) rendu le 16 mai 2003 par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d' appel en date du 11 août 2003,

à :

Société de droit allemand MAHILD DRYING TECHNOLOGIES, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social à 72622 NURTINGEN (ALLEMAGNE)

représentée par la SCP ANNIE TAILLARD et VALERIE JANOUEIX, avoués à la Cour et assistée de Maître Jean- Gabriel RECQ, avocat aux barreaux de PARIS et de STUTTGART (ALLEMAGNE)

intimée,

rendu l' arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue le 03 octobre 2007 devant :

Monsieur Jean- François BOUGON, Président,
Monsieur Bernard ORS, Conseiller,
Monsieur Philippe LEGRAS, Conseiller,
Madame Véronique SAIGE, Greffier,

et qu' il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ci- dessus désignés.

Par arrêt partiellement avant dire droit du 11 octobre 2004, auquel il convient de se reporter en ce qui concerne l' exposé du litige et les premiers motifs, la cour de céans a confirmé le jugement du tribunal de commerce de BORDEAUX du 16 mai 2003 qui avait :

- prononcé la résolution du contrat du 29 novembre 1999 aux torts et griefs exclusifs de la société MAHILD ;

- ordonné la restitution à la SA BEDOUT de l' acompte de 26. 678, 58 € avec intérêts de droit à compter du 13 mai 2002 ;

- ordonné la remise à la société MAHILD des éléments du séchoir aux frais de celle- ci ;

sauf :

- à condamner la société MAHILD DRYING TECHNOLOGIES à reprendre les éléments livrés sous astreinte de 500 € par jour de retard passé le délai de deux mois de notification de l' arrêt ;

- à surseoir à statuer sur la demande en dommages- intérêts et en paiement des pénalités contractuelles de la SA ETABLISSEMENTS BEDOUT, une expertise étant à cet égard ordonnée, confiée à monsieur Marc X... avec mission notamment de fournir tous éléments propres à déterminer les préjudices consécutifs aux retards de livraison et à la résolution de la vente du séchoir et en particulier l' existence et le coût des études, l' incidence du contrat de fourniture de gaz, la démolition des ouvrages édifiés pour recevoir l' installation du séchoir et le préjudice économique et commercial.

L' expert a déposé son rapport définitif le 28 décembre 2005.

La SA ETABLISSEMENTS BEDOUT, appelante, conclut en dernier lieu le 10 septembre 2007 à l' homologation partielle du rapport d' expertise et à la condamnation de l' intimée à lui payer les sommes de 30. 835 € HT (36. 878, 66 € TTC) au titre du préjudice matériel, de 817. 662 € HT (977. 923, 75 € TTC) au titre du préjudice commercial et de 18. 169, 20 € au titre du préjudice salarial et au débouté de l' intimée de ses demandes incidentes. Elle demande d' autre part une indemnité de 5. 000 € sur le fondement de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société de droit allemand MAHILD DRYING TECHNOLOGIES Gmbh, intimée et appelante incidente, conclut le 22 mai 2007 à titre principal à la confirmation du jugement en ce qu' il a débouté la SA BEDOUT de ses demandes en dommages- intérêts du fait de l' absence de lien de causalité entre le préjudice invoqué et la résolution de la vente. Subsidiairement elle conclut au débouté de celle- ci de sa demande au titre des pertes d' exploitation en constatant qu' elle a manqué à son obligation d' agir en bon père de famille, de sa demande au titre du manque à gagner sur la vente de sciage de bois de choix du fait que ce préjudice n' était pas prévisible, de sa demande au titre d' un préjudice salarial inexistant. Faisant valoir l' existence à son profit d' une créance de dommages- intérêts de 178. 249, 71 € au titre du préjudice économique subi du fait de la dépréciation du matériel elle conclut d' autre part à l' éventuelle compensation judiciaire des créances réciproques. Elle demande enfin 6. 000 € sur le fondement de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile.

M O T I F S E T D E C I S I O N

Attendu que l' intimée entend mettre en cause la valeur probante du rapport d' expertise en reprochant à l' expert des constatations succinctes sur la base du travail et de l' avis d' un sapiteur, monsieur Y..., expert employé par le Centre Technique du Bois et de l' Ameublement qui est un établissement interprofessionnel couvrant l' ensemble des industries du bois et de l' ameublement ;

mais attendu que la nécessité d' adjonction d' un sapiteur à l' expert est légitime dans un domaine particulièrement technique et spécialisé tel que celui de l' espèce, que rien n' indique que monsieur Y... ait en qualité de sapiteur en l' espèce un quelconque lien de subordination ou d' intérêt avec l' une des parties, le fait qu' il intervienne en qualité d' expert pour un organisme interprofessionnel dans son domaine de compétence apparaissant plutôt comme une reconnaissance de ses capacités ;

qu' il ne peut pas davantage être conclu que l' expert n' aurait pas accompli personnellement sa mission au motif qu' il a cru, par souci de simplification, pouvoir procéder sur des points techniques par renvoi aux études du sapiteur jointes en annexe à son propre rapport ;

attendu que l' arrêt partiellement avant dire droit s' étant prononcé sur la résolution de la vente du matériel livré par la société MAHILD aux torts du vendeur par application de l' article 1184 du Code civil l' intimée entend contester pour chaque élément de préjudice invoqué par l' appelante tant la matérialité du préjudice que le lien de causalité avec la résolution du contrat ;

qu' ainsi, s' agissant du préjudice matériel, elle fait valoir que la perte des investissements réalisés pour l' installation du séchoir MAHILD, et en particulier de la citerne à gaz, est le résultat du choix assumé par la société BEDOUT de tirer profit du changement de contexte intervenu dans l' approvisionnement énergétique du site entre novembre 1999 et mai 2004 dès lors que la desserte du site en gaz naturel décidée en avril 2000 et réalisée à la fin de l' année 2002 rendait inutiles les installations prévues pour un approvisionnement par citerne ;

qu' en ce qui concerne les autres travaux de génie civil elle observe qu' elle- même et la société CATHILD utilisent la même technologie de type conventionnelle en sorte que les installations annexes réalisées auraient pu servir pour le nouveau séchoir ;

mais attendu que ces arguments développés dans un dire du 12 décembre 2005 ont reçu de l' expert par le biais du sapiteur une réponse claire et complète, soit (page 14 du rapport) :

- le génie civil associé au séchoir est réalisé selon les plans du constructeur et est spécifique au matériel de chaque constructeur ;

- l' interchangeabilité des structures sur la dalle réalisée aux spécifications de MATHILD est fort peu probable sans modifications substantielles ;

- l' environnement du projet ayant changé de façon significative avec l' arrivée du gaz naturel et l' équipement d' entreprises concurrentes le choix du nouveau séchoir en fonction des réalités économiques visant à optimiser les coûts paraît justifié ;

- il ne paraît ni justifié ni techniquement possible de demander aux établissements BEDOUT de choisir, après quatre ans, une installation de séchage s' adaptant à l' infrastructure créée pour le séchoir MAHILD indépendamment de l' évolution de l' environnement ;

attendu que le montant de ce préjudice, résultant de la production de factures et non discuté en son quantum, sera arrêté à la somme de 30. 835 € HT incluant les travaux de génie civil, la démolition des ouvrages inutilisables, la location et fourniture de gaz inutile et les frais d' expertise technique, l' hypothèse d' une déduction de 3. 874 € liée à une subvention du Conseil Général, devenue caduque, n' étant pas retenue ;

attendu qu' en ce qui concerne le préjudice économique et commercial l' intimée conteste là encore un lien de causalité avec la résolution du contrat, estimant qu' il ne résulte pas de cette résolution mais du retard dans l' exécution du contrat, soit le fait que le séchoir n' a pas été livré et installé à temps, ce qui n' autoriserait la SA ETABLISSEMENTS BEDOUT à ne pouvoir prétendre à indemnisation que sur une période de cinq mois et demi (du 15 février 2000, date de livraison prévue dans son cahier des charges, à fin juillet 2000, date effective de la livraison) ;

que parallèlement elle reproche à l' appelante de n' avoir pas agi en bon père de famille afin de minimiser son préjudice et d' être elle- même par son inaction à l' origine de son propre préjudice, en l' occurrence de s' être dispensée d' étudier de bonne foi ses offres de réparation ou de remplacement et ainsi, à compter de fin juillet 2000, de s' être opposée à l' installation du séchoir livré, ou encore de n' avoir pas entériné son offre de résolution du contrat de vente avec restitution de l' acompte dont il lui était donné acte dans l' ordonnance de référé du 27 septembre 2001 et de ne pas avoir dès cette date passé commande d' un nouveau séchoir ;

mais attendu qu' il est constant et ressort des motifs de l' arrêt avant dire droit que la résolution du contrat de vente aux torts du vendeur est intervenue du fait de la non conformité du matériel à l' usage auquel il était destiné, en particulier du fait d' une capacité de chauffe inférieure à celle nécessaire au séchage des pins ;

que dès lors et cette non conformité existant dès l' origine il ne peut être imputé à l' acheteur, y compris sur le fondement de l' article 77 de la Convention de Vienne, d' avoir sursis à l' installation du séchoir, de ne pas avoir accepté une solution transactionnelle qui ne la remplissait pas de ses entiers préjudices et de ne pas avoir commandé un autre matériel avant de se voir fixée sur le sort du précédent par une première décision de justice ;

attendu qu' en ce qui concerne la consistance de son préjudice l' appelante entend voir retenue la perte d' exploitation liée au défaut de séchage de bois de choix issus de la tempête de décembre 1999, qu' elle évalue à 254. 712 € HT, cependant cette prétention développée par un dire du 5 décembre 2005 s' est vue opposer par l' expert le fait d' une part qu' il ne s' agissait pas d' une activité développée jusque là par la SA ETABLISSEMENTS BEDOUT, d' autre part qu' elle ne disposait pas de la capacité matérielle de stockage nécessaire à une valorisation optimale de ce type de sciage, et l' intimée observe au surplus à juste titre et visant l' article 1150 du Code civil que s' agissant d' une opportunité survenue après la vente il ne s' agissait pas d' un préjudice prévisible au moment de la conclusion du contrat ;

attendu ainsi que le préjudice économique et commercial qui sera retenu est lié à l' absence de capacité de séchage et donc de production de palettes séchées sur la période du 15 mars 2000 (mise en service du séchoir MAHILD prévue au cahier des charges) au 15 septembre 2004 (mise en service du séchoir CATHILD) soit 49 mois de production déduction faite des congés annuels ;

que sur la base des chiffres déterminés par l' expertise (annexe 7) et non utilement contestés de part et d' autre, soit :

- un nombre moyen de palettes séchées artificiellement produites de 6. 170 par mois ;

- une production maximum prévisible de palettes séchées avec le séchoir MAHILD de 19. 142 par mois ;

- une marge par palette de 0, 79 € ;

le montant de 238. 841 € HT de perte d' exploitation sera retenu ;

attendu que le troisième élément de préjudice apprécié par l' expert, le préjudice salarial, est aussi contesté par l' intimée au motif que, né avant la résolution du contrat, il ne résulterait pas de cette résolution, et par ailleurs elle oppose le fait qu' il ne s' agissait ni plus ni moins que du suivi d' une affaire commerciale relevant de la compétence du salarié habituellement désigné et non du chef d' entreprise lui- même ;

or attendu qu' il sera observé que le préjudice salarial est ici lié au suivi d' un dossier particulièrement contentieux pour lequel il peut être admis que le chef d' une entreprise de la dimension des ETABLISSEMENTS BEDOUT, même s' il délègue la rédaction de certains courriers, l' assume lui- même et qui, dans sa phase ne relevant pas du régime des frais irrépétibles, a commencé le 29 novembre 1999, date de l' établissement du cahier des charges du matériel, pour se terminer le 3 avril 2001, date de l' assignation en référé de la société MAHILD par la SA ETABLISSEMENTS BEDOUT devant le Président du tribunal de commerce de BORDEAUX ;

que sur la base raisonnable de sept heures par mois non contestée par l' appelante de même que le taux horaire de 36, 05 € ce préjudice sera, pour dix- huit mois, évalué à la somme de 4. 542, 30 € ;

attendu qu' à titre reconventionnel l' intimée entend faire valoir une créance résultant selon elle de la perte de valeur subie par son matériel qu' elle évalue à la somme de 47. 350 €, une compensation devant intervenir avec les sommes réclamées par l' appelante ;

or attendu que la dévalorisation du matériel du fait du temps écoulé depuis la livraison résulte de la résolution de la vente qui est intervenue aux torts de l' intimée et ainsi qu' il a été précédemment jugé il ne peut être reproché aux ETABLISSEMENTS BEDOUT d' avoir retardé la reprise de ce matériel qu' elle n' a d' autre part pas utilisé ;

que par ailleurs la cour a précisé dans son précédent arrêt que rien ne permettait d' établir que la SA ETABLISSEMENTS BEDOUT ait dégradé le matériel livré, ce point se trouvant définitivement jugé ;

qu' au surplus l' évaluation par l' intimée de la perte de valeur de son matériel ne repose sur aucune pièce ;

attendu en conséquence qu' en ce qui restait appelé la société MAHILD DRYING TECHNOLOGIES sera condamnée à payer à la SA ETABLISSEMENTS BEDOUT en réparation de son préjudice toutes causes confondues la somme totale de 274. 218, 30 €, ce par réformation ;

attendu que succombant dans l' évaluation de son préjudice l' appelante sera déboutée de sa demande d' indemnité supplémentaire sur le fondement de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile, le reste des dépens comprenant les frais d' expertise étant supporté par l' intimée qui succombe pour l' essentiel.

P A R C E S M O T I F S

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

– En ce qui demeure appelé : REFORME le jugement et CONDAMNE la société de droit allemand MAHILD DRYING TECHNOLOGIES à payer et porter à la SA ETABLISSEMENTS BEDOUT la somme de 274. 218, 30 € énoncée HT,

– DEBOUTE les parties de leurs demandes contraires et plus amples,

– DEBOUTE la SA ETABLISSEMENTS BEDOUT de sa demande d' indemnité supplémentaire sur le fondement de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile,

– CONDAMNE la société MAHILD DRYING TECHNILOGIES aux dépens d' appel incluant les frais d' expertise, dont distraction au profit de la SCP d' avoués LABORY- MOUSSIE et ANDOUARD.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean- François BOUGON, Président, et par Madame Véronique SAIGE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0044
Numéro d'arrêt : 03/04363
Date de la décision : 14/11/2007

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2007-11-14;03.04363 ?
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