La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/11/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006952451

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0028, 24 novembre 2006, JURITEXT000006952451


AMP

DU 24 NOVEMBRE 2006 No DU PARQUET : 06/00594 No D'ORDRE :

X... Catherine PERE Didier INTERETS CIVILS

LE VINGT QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE SIX

LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX

En l'audience publique de la Troisième Chambre Correctionnelle tenue par :

Monsieur MIORI, Président,

Monsieur LE ROUX, Conseiller,

Madame CHAMAYOU-DUPUY, Conseiller,

En présence de Mademoiselle Y..., Substitut de Monsieur le Procureur Général.

Et avec l'assistance de Mademoiselle Z..., Greffier, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

ENTRE : Monsieur le Procureur Général près la Cour d'Appel de BORDEAUX

ET : X... Catherine âgée de 59 ans, demeurant ...

AMP

DU 24 NOVEMBRE 2006 No DU PARQUET : 06/00594 No D'ORDRE :

X... Catherine PERE Didier INTERETS CIVILS

LE VINGT QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE SIX

LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX

En l'audience publique de la Troisième Chambre Correctionnelle tenue par :

Monsieur MIORI, Président,

Monsieur LE ROUX, Conseiller,

Madame CHAMAYOU-DUPUY, Conseiller,

En présence de Mademoiselle Y..., Substitut de Monsieur le Procureur Général.

Et avec l'assistance de Mademoiselle Z..., Greffier, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

ENTRE : Monsieur le Procureur Général près la Cour d'Appel de BORDEAUX

ET : X... Catherine âgée de 59 ans, demeurant Connétable 16320 GURAT née le 15 Mars 1947 à SAINT SYMPHORIEN (37) filiation ignorée de nationalité française, divorcée, Exploitante agricole, Jamais condamnée,

INTIMÉE et appelante, citée le 30 août 2006 à personne, libre, présente, assistée de Maître BORDAS, avocat au Barreau d'Angoulême.

PERE Didier âgé de 65 ans, demeurant Connétable 16320 GURAT né le 23 Août 1941 à VILLEBOIS LAVALETTE (16) filiation ignorée de nationalité française, Huissier de Justice, Jamais condamnée,

INTIMÉ et appelant, cité le 28 août 2006 à personne, libre, présent, assisté de Maître BORDAS, avocat au Barreau d'Angoulême.

ET : PRADIER Colette épouse A..., demeurant LAMBOURY - 16320 GURAT PARTIE CIVILE, appelante et intimée, citée le 5 septembre 2006 à

personne (a refusé de signer), absente, représentée par Maître de CONTENCIN François, avocat au Barreau de Bordeaux.

A... Damian, demeurant LAMBOURY - 16320 GURAT

PARTIE CIVILE, appelante et intimée, citée le 5 septembre 2006 à personne (a refusé de signer), présente, assistée de Maître de CONTENCIN François, avocat au Barreau de Bordeaux.

RAPPEL DE LA PROCEDURE

Par actes reçus au Secrétariat-Greffe du Tribunal de Grande Instance d'Angoulême, les parties civiles, PRADIER Colette et A... Damian, en date du 11 mai 2005 et les prévenus, X... Catherine et PERE Didier, en date du 18 mai 2005, ont relevé appel des dispositions civiles d'un jugement contradictoire, rendu par ledit Tribunal le 04 Mai 2005, à l'encontre de X... Catherine et de PERE Didier, lequel, après avoir renvoyé des fins de la poursuite, sans peine ni dépens, chacun des prévenus a, pour ce qui concerne les intérêts civils :

- condamné, solidairement, A... Damian et PRADIER Colette épouse A... à payer à Maître PERE Didier, la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice moral ainsi qu'une somme de 1 000 euros au titre de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale,

- condamné, solidairement, A... Damian et PRADIER Colette épouse A... à payer à X... Catherine, la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice moral.

- vu l'article 475 du Code de Procédure Pénale, condamné A... Damian et PRADIER Colette épouse A... aux dépens.

Sur ces appels et selon citations de Monsieur le Procureur Général, l'affaire a été appelée à l'audience publique du 13 Octobre 2006, la Cour étant composée de Monsieur MIORI, Président, Monsieur LE ROUX,

Conseiller et Monsieur B..., Vice-Président placé, assistée de Mademoiselle Z..., Greffier,

A ladite audience, les prévenus ont comparu et leur identité a été constatée ;

Monsieur le Vice-Président B... a fait le rapport oral de l'affaire ;

Les prévenus ont été interrogés ;

La partie civile, A... Damian, a été entendue ;

Maître de CONTENCIN, avocat, a développé les conclusions des parties civiles, PRADIER Colette épouse A... et A... Damian ;

Madame le Substitut de Monsieur le Procureur Général a été entendue en ses réquisitions ;

Maître BORDAS, avocat, a présenté les moyens de défense des prévenus ;

X... Catherine et PERE Didier ont eu la parole les derniers.

SUR QUOI

Le Président a informé les parties présentes que l'affaire était mise en délibéré à l'audience publique du 24 novembre 2006.

A ladite audience, Monsieur le Président a donné lecture de la décision suivante :

Les appels sont recevables pour avoir été régularisés dans les formes et délais de la loi, le 11 mai 2005 par les parties civiles et le 18 mai 2005 par les prévenus.

Les appels des prévenus sont limités aux dispositions civiles de la décision déférée.

Didier PÉRÉ, prévenu, est cité à personne. Il comparaît et est assisté de son conseil. Il sera statué à son égard par décision contradictoire.

Par conclusions déposées le 13 octobre 2006, il sollicite la confirmation de la décision déférée ainsi que la condamnation des

parties civiles à lui payer les sommes de 10 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et 2 000 euros en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Catherine X..., prévenue, est citée à personne. Elle comparaît et est assistée de son conseil. Il sera statué à son égard par décision contradictoire.

Par conclusions déposées le 13 octobre 2006, elle sollicite la confirmation de la décision déférée ainsi que la condamnation des parties civiles à lui payer les sommes de 10 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et 3 000 euros en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Damian A... et Colette PRADIER épouse A..., parties civiles, sont citées à personne. Ils comparaissent et sont assistés de leur conseil. Il sera statué à leur égard par décision contradictoire.

Par conclusions déposées le 13 octobre 2006, ils demandent la réformation de la décision déférée et la condamnation solidaire des prévenus à leur payer les sommes de 150 000 euros à titre de dommages et intérêts et de 10 000 euros en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Le Ministère Public requiert la confirmation de la décision déférée. Il fait valoir que si la prescription retenue par le tribunal pour renvoyer les prévenus des fins de la poursuite n'était pas retenue par la Cour, il n'en resterait pas moins que l'existence d'un faux ne serait pas démontrée.

Par citation directe du 1er décembre 2004, les époux A... avaient engagé des poursuites contre Catherine X... pour usage de faux et

escroquerie au jugement et contre Didier PÉRÉ pour complicité d'escroquerie au jugement.

Ils exposaient que, dans le cadre d'un contentieux portant sur un bail rural qui leur avait été accordé par Catherine X..., alors que l'affaire était pendante devant la Cour, la bailleresse avait demandé à Didier PÉRÉ, huissier de justice, de réaliser un constat, en vue de démontrer que les locataires continuaient à utiliser certains locaux.

Les époux A... considéraient que ce constat, réalisé le 28 janvier 1998, deux jours avant l'audience des plaidoiries, aurait emporté la conviction des magistrats lors de l'arrêt du 5 juin 1998 ainsi que pour les arrêts refusant la révision de la première décision les 4 mars 2003 et 10 mai 2004, alors qu'il aurait délibérément omis de mentionner que Catherine X... utilisait le garage, objet du litige.

Ils soutenaient que tant Didier PÉRÉ que Catherine X... auraient été conscients des omissions du constat et que cette dernière, qui l'avait utilisé à plusieurs reprises, et Didier PÉRÉ qui l'avait dressé, se seraient rendus coupables des infractions qui leur étaient reprochées.

Statuant sur l'action publique, le Tribunal renvoyait les prévenus des fins de la poursuite, au motif que les faits, objets de la poursuite, étaient atteints par la prescription prévue par l'article 8 du Code de Procédure Pénale. Les dispositions pénales de la décision déférée sont désormais définitives.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes des époux A... :

Tout d'abord, les époux A... contestent que la prescription des faits reprochés soit acquise.

Sur ce point, la Cour relève que Catherine X... a utilisé le constat litigieux à plusieurs reprises. Si son usage ayant abouti à l'arrêt du 5 juin 1998 doit être considéré comme ayant largement dépassé le délai de prescription prévu par l'article 8 du Code de Procédure Pénale, tel n'est pas le cas des usages de ce constat lors des procédures ayant abouti aux arrêts de 2003 et 2004. Il est, en effet notamment, établi que le constat fait partie des pièces produites par elle en annexe de ses conclusions du 8 mars 2004.

En conséquence, à supposer que le constat présente des mentions ou des omission pouvant être qualifiées de fausses, la prescription triennale ne saurait être considérée comme acquise en ce qui concerne l'usage de ce document.

Il appartient cependant à la Cour de vérifier si les faits imputés aux prévenus par les parties civiles peuvent donner lieu à une qualification pénale.

Les infractions d'usage de faux, d'escroquerie au jugement et de complicité supposent qu'il soit démontré que le constat du 28 janvier 1998 puisse être qualifié de faux.

Le procès-verbal de constat du 28 janvier 1998 établi par Didier PÉRÉ à la demande de Catherine X... mentionne les points suivants :

Catherine X... y déclare :

"Le 11 janvier 1996, le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux d'Angoulême a prononcé la nullité du congé que j'avais fait délivrer le 17 août 1994 pour le 29 septembre 1998 à Monsieur et Madame Damian A... mes fermiers de l'exploitation rurale de Connétable.

"J'ai relevé appel de cette décision et mon adversaire vient de déposer des conclusions aux termes desquelles il prétend que j'utilise certains bâtiments notamment un vieux pigeonnier, une chambre à grains et un garage. Or, ils continuent à les utiliser selon le bail de 1973.

"Il est donc dans mon intérêt de démonter que ces affirmations sont inexactes et que mes fermiers ne satisfont pas à leurs obligations d'entretien. C'est pourquoi, je vous demande de bien vouloir vous rendre sur place afin d'y procéder à toutes constatations utiles."

Maître Didier PÉRÉ a pu constater la présence de nombreux objets dans le vieux pigeonnier et l'état d'abandon du jardin, de la serre et d'un fossé. En ce qui concerne le garage, il a mentionné :

"GARAGE

"Outre le petit matériel de jardin déposé par Madame X... avec l'accord de Monsieur A... (24 décembre 1993), je note la présence de :

"Quatre grands pneus de moissonneuse batteuse

"Une ridelle métallique de remorque

"Divers vieux pneus, une cuve à gas-oil sur pieds, des objets hétéroclites (courroies, bidons, ferraille, etc...)"

Le constat avait pour objectif de répondre à l'affirmation des époux A... selon laquelle ils avaient abandonné la jouissance du garage depuis le 29 septembre 1989. Les époux A... ne contestent nullement la présence des objets cités par l'huissier, minimisant seulement leur importance et leur quantité.

Les époux A... considèrent que ce procès-verbal de constat contient des omissions graves qui seraient constitutives d'un faux. Ainsi, ils précisent qu'à l'époque où il a été dressé, Catherine X... entreposait dans le garage un tracteur et une automobile qui ne sont nullement mentionnés dans cet acte.nsi, ils précisent qu'à l'époque où il a été dressé, Catherine X... entreposait dans le garage un tracteur et une automobile qui ne sont nullement mentionnés dans cet acte.

Pour être constitutives d'un faux, les constatations figurant dans le constat établi par l'huissier doivent être contraires à la réalité.

Le fait que l'huissier n'ait pas constaté la présence d'autres objets, qu'il n'avait pas reçu pour mission d'inventorier, ne peut donc à lui seul constituer un faux.

En l'espèce, l'objet du constat consistait à décrire la quantité et la nature du matériel pouvant appartenir aux époux A..., en contradiction avec les termes de leurs conclusions civiles. Or, il n'est nullement contesté que le procès-verbal de constat fasse une présentation réelle de l'état du garage, une fois les objets de Catherine X... enlevés. Un autre constat, établi en la présence de Damian A... le 30 décembre 1998, aboutit aux mêmes constatations. Au demeurant, Didier PÉRÉ a rédigé le constat du 28 janvier 1998 avec la prudence qu'implique cet acte et son utilisation future, puisqu'il se garde bien d'indiquer la propriété des objets signalés qu'il ne pouvait attester, et qu'il précise bien que Catherine X... a la jouissance partielle du garage.

Ainsi, il n'est nullement établi que le procès-verbal de constat du 28 janvier 1998 ait altéré la vérité, les constatations effectuées correspondant à la réalité des faits qui y sont mentionnés. En l'absence de démonstration de la fausseté de ce constat, les infractions d'usage de faux ou d'escroquerie au jugement par l'utilisation ultérieure de cet acte ne sont pas plus caractérisées. Il en résulte qu'aucune infraction ne peut être reprochée à Didier PÉRÉ ou à Catherine X....

Il y a lieu, en conséquence, de débouter les époux A... de l'ensemble de leurs demandes.

Sur les demandes de Didier PÉRÉ :

La Cour confirmera la décision déférée ayant condamné les époux

A... à payer à Didier PÉRÉ des dommages et intérêts en application de l'article 472 du Code de procédure pénale.

En effet, il résulte de l'ensemble des éléments ci-dessus exposés qu'à l'origine de la mise en mouvement de l'action publique, les époux A... ont abusé de leur droit d'agir en justice en mettant, de mauvaise foi ou, pour le moins de manière téméraire en mouvement, l'action publique.

Il s'avère, en effet que, dès la lecture par eux du contenu du constat, ils avaient nécessairement connaissance que celui-ci ne comportait pas de constatation contraire à la vérité, ce qui aurait dû les inciter à ne pas engager de poursuites pénales à l'encontre de leurs adversaires qu'ils savaient, dès l'origine, vouées à l'échec. A ce titre, la Cour dispose d'éléments suffisants pour fixer le montant des dommages et intérêts revenant à Maître PÉRÉ en réparation du préjudice qu'il a subi de ce chef à la somme de 6 000 euros.

Par contre, la Cour réformera la décision déférée en ce qu'elle a condamné les époux A... à payer à Didier PÉRÉ une indemnité au titre des frais irrépétibles, l'article 475-1 du Code de procédure pénale ne pouvant pas être appliqué à l'encontre des parties civiles. Sur les demandes de Catherine X... :

La Cour confirmera la décision déférée ayant condamné les époux A... à payer à Catherine X... des dommages et intérêts en application de l'article 472 du Code de procédure pénale.

En effet, il résulte de l'ensemble des éléments ci-dessus exposés qu'à l'origine de la mise en mouvement de l'action publique, les époux A... ont abusé de leur droit d'agir en justice. A ce titre, la Cour dispose d'éléments suffisants pour fixer le montant des dommages et intérêts revenant à Catherine X... à la somme de 4 500 euros.

Par contre, la Cour déboutera Catherine X... de sa demande au titre des frais irrépétibles, l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale ne pouvant pas être appliqué à l'encontre des parties civiles. PAR CES MOTIFS

LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement et contradictoirement,

Déclare les appels recevables,

Statuant dans les limites des recours limités aux dispositions civiles,

Déboute Damian A... et Colette PRADIER de l'ensemble de leurs demandes,

Confirme la décision déférée en ce qu'elle a condamné Damian A... et Colette PRADIER à réparer le préjudice de Didier PÉRÉ et de Catherine X... sur le fondement des dispositions de l'article 472 du Code de Procédure Pénale,

La réforme quant aux montants fixés et à l'indemnité retenue au titre de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale et, statuant à nouveau de ces chefs,

Condamne Damian A... et Colette PRADIER à payer à titre de dommages et intérêts :

- à Didier PÉRÉ la somme de 6 000 euros,

- à Catherine X... la somme de 4 500 euros.

Déboute Didier PÉRÉ et Catherine X... de leurs demandes sur le fondement des dispositions de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale,

Le présent arrêt a été signé par Monsieur MIORI, Président et

Mademoiselle Z..., Greffier présent lors du prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0028
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006952451
Date de la décision : 24/11/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2006-11-24;juritext000006952451 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award