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14/11/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000007628018

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0107, 14 novembre 2006, JURITEXT000007628018


ARRÊT RENDU PAR LACOUR D'APPEL DE BORDEAUX--------------------------Le : 14 NOVEMBRE 2006CHAMBRE SOCIALE - SECTION APRUD'HOMMESNo de rôle : 04/05886La S.A. AEEIc/Monsieur Ludovic X... de la décision : AU FOND

RDA/PHNotifié par LRAR le :LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).Certifié par le Greffier en Chef Grosse délivrée le :à :

Prononcé publiquement par mise à disposition au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées

dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Cod...

ARRÊT RENDU PAR LACOUR D'APPEL DE BORDEAUX--------------------------Le : 14 NOVEMBRE 2006CHAMBRE SOCIALE - SECTION APRUD'HOMMESNo de rôle : 04/05886La S.A. AEEIc/Monsieur Ludovic X... de la décision : AU FOND

RDA/PHNotifié par LRAR le :LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).Certifié par le Greffier en Chef Grosse délivrée le :à :

Prononcé publiquement par mise à disposition au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le 14 NOVEMBRE 2006

Par Madame Raphaùlle DUVAL-ARNOULD, Conseiller, en présence de Mademoiselle France Y..., Greffier,

La COUR D'APPEL de BORDEAUX, CHAMBRE SOCIALE SECTION A, a, dans l'affaire opposant :

La S.A. AEEI, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, 12 bis, Avenue Jean Perrin - 33700 MERIGNAC,

Représentée par Maître Matthias WEBER loco Maître Pierre LEMAIRE, avocats au barreau de POITIERS,

Appelante d'un jugement rendu le 08 octobre 2004 par le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux, Section Industrie, suivant déclaration d'appel en date du 03 novembre 2004,

à :

Monsieur Ludovic Z..., né le 14 janvier 1969 à BORDEAUX (33), de nationalité Française, demeurant 11, Rue Vincent Van Gogh - 33140 VILLENAVE D'ORNON,

Représenté par Maître Sophie MARGUERY, avocat au barreau de

BORDEAUX,

Intimé,

Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue en audience publique le 03 octobre 2006, devant :

Madame Marie-Paule DESCARD-MAZABRAUD, Président,

Madame Raphaùlle DUVAL-ARNOULD, Conseiller,

Monsieur Roger NÈGRE, Conseiller,

Mademoiselle Françoise A..., Greffier,

et qu'il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ci-dessus désignés.*********

Monsieur Ludovic Z... a été engagé à compter du 9 octobre 2000 en qualité d'ouvrier électricien au coefficient 185, puis 210, par la S.A. Brunet, devenue ensuite la S.A. AEEI.

En octobre et novembre 2003, il réclamait la qualification de chef d'équipe correspondant au coefficient 250.

Le 16 décembre 2003, il démissionnait de son poste, tout en imputant la rupture à son employeur et saisissait le 19 décembre 2003 le Conseil de Prud'hommes.

La S.A. AEEI a relevé appel du jugement du Conseil de Prud'hommes de Bordeaux en date du 8 octobre 2004, qui, requalifiant en fonctions d'électricien chef d'équipe, niveau IV, position 1, coefficient 250 et la démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'a condamnée à payer à Monsieur Ludovic Z... les sommes de 2.280,70 ç à titre de rappel de salaire afférent à la qualification de chef d'équipe, de 8.500 ç à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L.122-14-4 du Code du Travail, de 2.800 ç à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 420 ç à titre d'indemnité légale de licenciement, de 30 ç à titre de rappel de salaire sur retenue injustifiée et de 600 ç au titre de l'article 700 du Nouveau

Code de Procédure Civile, ainsi qu'à lui remettre un certificat de travail et un bordereau Assedic conformes à la décision.

Les parties ont été entendues en leurs observations au soutien de leurs écritures, desquelles, vu les moyens exposés :

Par conclusions tendant à l'infirmation du jugement déféré, la S.A. AEEI demande de débouter Monsieur Ludovic Z... de l'ensemble de ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 2.000 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par conclusions tendant à la confirmation du jugement déféré excepté sur le montant des dommages-intérêts, Monsieur Ludovic Z... demande, sur appel incident, de condamner la S.A. AEEI à lui payer les sommes de 21.000 ç à titre de dommages-intérêts et de 1.500 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Pour plus ample exposé des circonstances de fait, de la procédure et des prétentions des parties, il convient de se référer au jugement déféré et aux conclusions des parties.DISCUSSIONSur la qualification de la rupture

Dans son courrier du 16 décembre 2003 de "démission sous contrainte", Monsieur Z... invoque trois manquements de l'employeur à ses obligations :

- refus de lui reconnaître le statut de chef d'équipe alors que depuis plusieurs mois, il exerce cette fonction, notamment sur les quatre chantiers Taverne de Maître Kanter, Garage Volkswagen à Villenave d'Ornon, Garage Volkswagen à Libourne et Seat à Libourne,

- affectation à un chantier de chauffage plomberie, alors qu'il est élec-tricien,

- retenue de 30 ç sur salaire constituant une sanction pécuniaire

interdite.

Il demande in fine la requalification de sa démission en licen-ciement abusif.

Il invoque devant la Cour les mêmes manquements de la S.A. AEEI.

Il convient de constater que ce courrier intitulée "lettre de démis-sion sous contrainte" doit s'analyser en une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié aux torts de l'employeur.

Or, lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.Sur la qualification de chef d'équipe et le rappel de salaire

Monsieur Ludovic Z... a été engagé en qualité d'ouvrier électricien coefficient 185, niveau II, promu, à une date non précisée au coefficient 210, niveau III position 1 de la convention collective du 8 octobre 1990. Celle-ci définit les critères du contenu de l'activité ainsi : "travaux de son métier réalisés à partir de directives, pouvant impliquer la lecture de plans et la tenue de documents d'exécution s'y rapportant. Peut être assisté d'autres ouvriers en principe de qualification moindre".

Monsieur Ludovic Z... soutient qu'en 2002 et au début 2003, il s'est vu confier des responsabilités de chef d'équipe sur les quatre

chantiers en cause ayant environ 10 personnes sous ses ordres et étant chargé de donner des instructions, de surveiller les horaires, de veiller à la sécurité du personnel sur le chantier et au respect des règles de sécurité. Il produit, pour en justifier, des attestations de salariés et ses propres courriers de réclamations, étant observé que ces derniers ne sauraient en eux-mêmes constituer une preuve des manquements de l'employeur.

La S.A. AEEI réplique qu'en parfaite adéquation avec sa qualification, Monsieur Z... était assisté de maximum quatre intérimaires ou salariés de qualification inférieure dans l'accomplissement de son travail ou guidait leur travail sans pour autant exercer les fonctions de chef d'équipe, que les attestations adverses ne font état que du chantier de la Taverne de Maître Kanter, chantier qui constituait un premier test avec des attributions de chef d'équipe à l'issu duquel, s'il était concluant, il serait envisagé sa nomination en qualité de chef d'équipe, que le chantier a dû lui être retiré au mois de juin 2003.

La convention collective définit le poste de chef d'équipe, coefficient 250, niveau IV position 1, revendiqué par Monsieur Z... de la manière suivante : "A partir de directives d'organisation générale : travaux complexes de son métier, ou organise le travail des ouvriers constituant l'équipe appelée à l'assister et en assure la conduite".

Il convient de constater que, tout en soutenant avoir exercé antérieurement des fonctions de chef d'équipe, Monsieur Z... ne revendique la qualification de chef d'équipe et le salaire correspondant qu'à compter de janvier 2003, date co'ncidant avec

celle du démarrage du chantier de la Taverne de Maître Kanter à Bordeaux.

Concernant la période antérieure à janvier 2003

En ce qui concerne le chantier du garage Volkswagen à Arveyres, et non pas Libourne, il ressort de la "fiche affaires" mentionnant l'ouverture du chantier à la date du 28 janvier 2000, des procès-verbaux de compte rendu de chantier depuis mai 2000 et du procès-verbal de réception du chantier du 8 janvier 2001 que Monsieur Z... ne pouvait être présent sur le chantier avant son embauche le 9 octobre 2000 et qu'après cette date, il a travaillé 188 heures, son nom n'apparaissant pas sur les compte-rendus de chantier. En outre, les attes-tations produites par le salarié ne mentionnent pas ce chantier. Il n'existe donc aucun élément concernant ce chantier susceptible de justifier de la revendication du salarié.

En ce qui concerne le chantier du garage SEAT à Arveyres, et non Libourne, il ressort de la "fiche affaires" et des comptes-rendus de chantier et du procès-verbal de réception de travaux que le chantier a duré du 30 novembre 2001 jusqu'en octobre 2002, sans que le nom du salarié n'y est mentionné, Monsieur Ludovic Z... ayant travaillé 148 heures et l'adjoint responsable de groupe mentionné étant Monsieur B....

En ce qui concerne le chantier du garage Volkswagen à Villenave d'Ornon, les compte-rendus ne sont pas versés aux débats. La "fiche affaires" fixe la date d'ouverture au 2 octobre 2001 et mentionne que Monsieur Z... a travaillé 447 heures et Monsieur C... 347 heures, les autres salariés men-tionnés ayant travaillé entre 10 et 53 heures chacun, le responsable de groupe en étant Monsieur D....

Seules, les attestations non circonstanciées de Monsieur E..., responsable de groupe, et de Monsieur F... affirment que Monsieur Z... a occupé des fonctions de chef équipe du 25 mai 2002 au 8 août 2003, le premier concernant les deux chantiers, le second celui du garage SEAT ainsi que trois autres chantiers non invoqués par Monsieur Z... dans ses écritures. La S.A. AEEI conteste l'attestation de Monsieur E... comme n'ayant pas eu la responsabilité de ce chantier.

Par ailleurs, Monsieur Z... verse aux débats cinq "factures" datées de décembre 2001 et février et mai 2002 d'interventions effectuées chez des clients. Cependant, ces documents ne sauraient être considérés comme des factures, sauf un, dans la mesure où n'y figure que le relevé des travaux effectués, sans mention de prix. Elles ne sauraient donc être retenues, dès lors que l'établissement de tels documents ne relève pas spécifiquement des fonctions de chef d'équipe.

Il en résulte que, pour ces trois chantiers antérieurs au 1er janvier 2003, il n'existe aucun élément susceptible de démontrer que Monsieur Z... exerçait des fonctions de chef d'équipe.

En ce qui concerne le chantier de la Taverne de Maître Kanter, la S.A. AEEI admet que Monsieur Z... a exercé certaines des fonctions de chef d'équipe à titre de test, ce que celui-ci conteste. Il ressort de la "fiche affaires" que le chantier a été ouvert le 14 janvier 2003, que Monsieur Z... a travaillé 644 heures. Au vu des compte-rendus de chantier, il a, entre le 29 janvier et le 23 juin 2003, représenté seul cinq fois l'employeur aux réunions de chantier

et une dizaine de fois son nom est mentionné après celui de Monsieur G..., responsable de groupe, sur une quarantaine de réunions.

Monsieur Z... produit, pour justifier des fonctions exercées, les attestations de Messieurs H..., Da Ernestho, électriciens de qualification inférieure à la sienne, et I..., intérimaire, ayant travaillés respectivement 748, 130 et 125 heures, au vu de la "fiche affaires" et l'attestation de Monsieur E... J..., l'attestation de Monsieur I... décrit les fonctions de Monsieur Z... qu'il désigne comme "responsable de chantier", les autres attestations n'étant pas circonstanciées. Pour s'y opposer, la S.A. AEEI produit l'attestation de Monsieur G..., responsable de groupe sur ce chantier, guère plus circonstanciée que les attestations adverses.

En revanche, le courrier adressé le 3 mai 2004 par l'architecte à la S.A. AEEI tend à établir que le test ou période probatoire invoqué par l'em-ployeur n'a pas été concluant. Monsieur Z... s'en défend ayant écrit qu'il avait "rendu le dossier" en juin, tandis que la S.A. AEEI réplique qu'elle a dû le retirer du chantier en raison de son comportement envers l'architecte et le client et du retard pris.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que Monsieur Z... a exercé, au cours des fonctions de chef d'équipe, au moins partiellement, entre le 14 janvier 2003 et fin juin 2003 sur le chantier de la Taverne de Maître Kanter, mais pas sur les autres chantiers antérieurs, ni postérieurement.

Dès lors, lorsque la période probatoire s'est avérée non concluante, l'employeur peut réintégrer le salarié dans ses fonctions antérieures. Les fonc-tions occupées au cours d'une période

probatoire ne sauraient entraîner la reconnaissance au profit de Monsieur Z... la qualification de chef d'équipe revendiquée, ni le salaire correspondant.

Le jugement sera donc réformé sur le montant du rappel de salaire alloué à ce titre.Sur l'affectation à un chantier de chauffage plomberie

Le Conseil de Prud'hommes a écarté ce grief au motif que la réalisation de l'installation électrique d'un système de climatisation sur le chantier du Crédit Mutuel rentrait dans l'exécution normale du contrat de travail de Monsieur Z..., ce qui est, en outre, justifié par l'attestation du salarié frigoriste, celle du responsable de groupe et le contrat de sous-traitance du lot plomberie chauffage. Monsieur Z... ne discute pas, ni n'invoque plus ce fait en appel.Sur la retenue sur salaire

Le 24 novembre 2003 à 14 heures, Monsieur K..., directeur de l'agence de Bordeaux, qui en atteste, a, lors d'un contrôle, constaté l'absence de Monsieur Z... du chantier du Crédit Mutuel pendant plus d'une heure, et selon les ouvriers présents qu'il a interrogés, depuis la reprise du travail à 13h30. Par lettre recommandée avec avis de réception du 28 novembre 2003, l'employeur mettait le salarié en demeure de justifier de son absence.

Monsieur Z... répondait qu'il s'était absenté pour aller aux toilettes dans un café, le chantier en étant dépourvu. Il admet dans ses écritures s'être absenté une heure. Toutefois, la S.A. AEEI produit des factures de location de WC chimiques pour la période concernée, étant, au demeurant, observé qu'une heure est un temps

plus que nécessaire pour se rendre dans un café proche.

Il en résulte que le salarié ne peut justifier son absence du chantier. Dès lors, la retenue sur salaire pour absence injustifiée est fondée et ne saurait constituer une sanction pécuniaire prohibée.

Le jugement sera réformé en ce qu'il a accordé au salarié le montant de la retenue de 30 ç.Sur les effets de la rupture

Il ressort de l'analyse ci-dessus des faits qu'aucun des man-quements à ses obligations contractuelles invoqués par Monsieur Ludovic Z... à l'encontre de la S.A. AEEI n'est justifié. Il s'ensuit que la rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié s'analyse en une démission. En conséquence, Monsieur Z... doit être débouté de ses demandes au titre de la rupture et le jugement réformé en toutes ses dispositions.

Sur les demandes accessoires

Monsieur Z... qui succombe en appel, doit supporter la charge des dépens. Il convient de laisser à la charge de chacune des parties ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Sur l'appel de la SA AEEI contre le jugement du Conseil de Prud'hommes de Bordeaux en date du 8 octobre 2004.

Réforme le jugement en toutes ses dispositions.

Et statuant à nouveau :

Dit que Monsieur Ludovic Z... ne pouvait prétendre à la qualification de chef d'équipe, niveau IV, position 1, coefficient 250.

Dit que la lettre de "démission sous contrainte" de Monsieur Ludovic Z... s'analyse en une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié ayant les effets d'une démission.

Déboute, en conséquence, Monsieur Ludovic Z... de l'ensemble de ses demandes.

Y ajoutant :

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Condamne Monsieur Ludovic Z... aux entiers dépens.

Signé par Madame Marie-Paule DESCARD-MAZABRAUD, Président, et par Mademoiselle France Y..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

F. Y...

M-P. DESCARD-MAZABRAUD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0107
Numéro d'arrêt : JURITEXT000007628018
Date de la décision : 14/11/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2006-11-14;juritext000007628018 ?
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