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19/09/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006950780

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Ct0107, 19 septembre 2006, JURITEXT000006950780


ARRÊT RENDU PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX -------------------------- Le : 19 SEPTEMBRE 2006 CHAMBRE SOCIALE - SECTION A Prud'hommes No de rôle : 05/01636 Monsieur Jérôme X... c/ La S.A.R.L. LES EPICES D'INGWILLER Nature de la décision : AU FOND

JC/PH Notifié par LR AR le : LR AR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à : La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier). Certifié par le Greffier en Chef, Grosse délivrée le : à :

Prononcé publiquement par mise à disposition au Greffe de la Cour, l

es parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au ...

ARRÊT RENDU PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX -------------------------- Le : 19 SEPTEMBRE 2006 CHAMBRE SOCIALE - SECTION A Prud'hommes No de rôle : 05/01636 Monsieur Jérôme X... c/ La S.A.R.L. LES EPICES D'INGWILLER Nature de la décision : AU FOND

JC/PH Notifié par LR AR le : LR AR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à : La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier). Certifié par le Greffier en Chef, Grosse délivrée le : à :

Prononcé publiquement par mise à disposition au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le 19 SEPTEMBRE 2006

Par Monsieur Jérôme CARBONELL, Conseiller, en présence de Mademoiselle Françoise Y..., Greffier,

La COUR D'APPEL de BORDEAUX, CHAMBRE SOCIALE SECTION A, a, dans l'affaire opposant :

Monsieur Jérôme X..., de nationalité Française, demeurant 21, rue de Mexico - 33200 BORDEAUX,

Représenté par Maître Jean-Michel PORTAL, avocat au barreau de LYON, Appelant d'un jugement rendu le 14 février 2005 par le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel en date du 15 mars 2005,

à :

La S.A.R.L. LES EPICES D'INGWILLER, prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité en son siège social, 1, rue de la Brasserie, 67340 INGWILLER,

Représentée par Maître Pierre-Louis DUCORPS, avocat au barreau de BORDEAUX,

Intimée,

Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue en audience publique le 13 juin 2006, devant :

Monsieur Jérôme CARBONELL, Conseiller, qui a entendu les plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées, en application de l'article 945-1 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Mademoiselle Françoise Y..., Greffier,

Monsieur le Conseiller en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, Celle-ci étant composée de :

Madame Marie-Paule DESCARD-MAZABRAUD, Président,

Madame Raphaùlle DUVAL-ARNOULD, Conseiller,

Monsieur Jérôme CARBONELL, Conseiller. ***** *** *

M. X... a été engagé à compter du 15 mai 2003 par la société LES EPICES D'INGWILLER en qualité de "responsable grands comptes industries". Le contrat de travail prévoyait une période d'essai d'une durée de trois mois renouvelable une fois.

Estimant que la période d'essai avait été renouvelée, ce que conteste le salarié, l'employeur a pris l'initiative de rompre le contrat de travail au mois de novembre 2003.

M. X... a saisi le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux pour faire juger qu'il avait fait l'objet d'un licenciement abusif et obtenir le paiement d'indemnités de rupture.

Par jugement en date du 4 février 2005, il a été entièrement débouté de ses prétentions et condamné à payer à la société la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Appelant, M. X... conclut à la réformation du jugement, demande que la rupture du contrat de travail soit analysée en un licenciement irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse et que la société

soit condam-née à lui payer les sommes de 6.600 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif, 3.300 euros titre de dommages-intérêts pour licen-ciement irrégulier, 6.600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre l'indemnité compensatrice de congés payés y afférente avec intérêts de droit à compter de la date de convocation devant le Conseil de Prud'hommes et 3.000 euros à titre de dommages-intérêts pour "préjudice moral".

Il demande également que soit ordonnée la remise sous astreinte d'une lettre de licenciement et d'une attestation ASSEDIC rectifiée et la condamnation de la société au paiement d'une somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

La S.A.R.L. LES EPICES D'INGWILLER conclut à la confir-mation du jugement, demande à titre principal que soient rejetées l'ensemble des prétentions émises par le salarié, à titre subsidiaire que le montant des dommages-intérêts n'excède pas la somme de 3.300 euros. Elle réclame également une indemnité de procédure d'un montant de 1.500 euros.

MOTIFS

- La rupture du contrat de travail

M. X... soutient que, la période d'essai s'étant terminée le 15 août 2003, la rupture du contrat de travail est intervenue après l'expiration de cette période et que les règles de forme comme de fond du licenciement auraient dû en l'espèce être respectées. La société affirme que la période d'essai avait été valablement prolongée et que la rupture est intervenue avant le terme de cette période.

Le contrat de travail stipule que la durée de la période d'essai est de trois mois renouvelable une fois. Il est également précisé (OE 12) : "Pendant la période d'essai, le contrat de travail peut être rompu par l'une des parties avec un préavis de quatre semaines."

La convention collective applicable dispose que "... sauf accord des parties pour une durée plus longue, la durée normale de la période d'essai est fixée à 3 mois. Elle doit être notifiée par écrit à l'intéressé".

S'il n'est ainsi pas discutable qu'a été contractuellement prévue la possibilité de renouvellement de la période d'essai, aucune disposition par-ticulière du contrat ou de la convention collective ne fixe les conditions de son renouvellement. Il convient donc de considérer que, par application des principes régissant la matière, il incombe à l'employeur de démontrer l'exis-tence d'un accord exprès du salarié intervenu au cours de la période d'essai initiale en vue de son renouvellement.

De ce point de vue l'offre de preuve de la société comprend deux volets.

Sont d'une part versées aux débats deux attestations de MM KILHOFFER et HAGEMEYER d'après lesquelles aurait eu lieu à Ingwiller les 21/22 juillet 2003 une réunion en présence de M. X... au cours de laquelle aurait été décidé le renouvellement de la période d'essai du salarié, ce que celui-ci conteste formellement.

Emanant du gérant de la S.A.R.L. et de l'un de ses directeurs, de tels témoignages ne sauraient être reçus dans le cadre d'un litige opposant un salarié à la société qui l'emploie, sauf à permettre à celle-ci de se constituer une preuve à elle-même.

L'employeur s'appuie d'autre part sur un courrier adressé par M. X... à la société le 12 novembre 2003 et plus précisément sur un membre de phrase extrait du quatrième paragraphe de cette lettre : "...sauf erreur, mon contrat a été renouvelé une première fois...", dont il prétend qu'il constituerait l'aveu de l'existence d'un accord concernant le renouvellement de la période d'essai.

Or, cette citation est totalement sortie de son contexte. Dans cette

lettre, en effet, M. X... dénonce les conditions de la rupture de son contrat de travail, rappelle qu'il lui a été demandé de remettre son véhicule de fonction, le téléphone et divers documents professionnels et ajoute :

"...ceci constitue une modification substantielle de mon contrat de travail effectué à vos risques et périls puisque, sauf erreur, mon contrat a été renouvelé une première fois, donc en contrat à durée indéterminée.".

Replacée dans son contexte, cette phrase peut tout aussi bien s'entendre comme exprimant qu'à l'issue de la période d'essai, qu'il assimile à tort à un contrat à durée déterminée, le salarié considère qu'il se trouve sous le régime d'un contrat à durée indéterminée. En tout cas, elle ne peut être utilisée ainsi que la société entend le faire au soutien de son argumentation.

Aucun élément ne vient ainsi établir que Monsieur X... ait consenti au renouvellement de la période d'essai.

Il suit de là que la rupture du contrat de travail est intervenue en dehors de la période d'essai et que les dispositions des articles L 122-4 et suivants du Code du Travail devaient donc recevoir en l'espèce application.

Etant relevé que l'employeur n'a non seulement organisé aucun entretien préalable mais n'a surtout notifié au salarié aucune lettre énonçant les motifs pour lesquels il était mis fin au contrat de travail, il apparaît que cette rupture doit être assimilée à un licenciement irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse, le jugement devant être réformé en ce sens.

- Les conséquences de la rupture

Il y a lieu d'une part de rétablir M. X... dans son droit à indemnité compensatrice de préavis sans qu'il soit cependant justifié de faire droit à la demande spéciale relative au cours des intérêts.

Au vu des éléments de la cause, en tenant plus spécialement compte du temps passé par M. X... au service de la société et de la période de chômage ayant suivi la perte de cet emploi, il lui sera d'autre part alloué à titre de dommages-intérêts la somme de 6.600 euros sur le fondement de l'article L 122-14-5 du Code du Travail, l'irrégularité de la procédure étant réparée par l'octroi de d'une indemnité d'un montant de 3.300 euros.

L'appelant réclame également une somme de 3.000 euros en réparation du préjudice moral dont il estime avoir été victime en faisant notamment valoir la précipitation dans laquelle a été rompu la relation salariale et les difficultés financières qu'il a rencontrées dans les mois qui ont suivi.

Les éléments apportés par le salarié ne caractérisent cependant ni une faute particulière de l'employeur ni un préjudice distinct de celui réparé par les dommages-intérêts précédemment alloués. Ce chef de demande sera donc rejeté.

L'attestation ASSEDIC remise à M. X... portant à la rubrique "motif de la rupture du contrat de travail" la mention "fin de la période d'essai à l'initiative de l'employeur", il convient d'ordonner la délivrance d'une nouvelle attestation faisant mention du licenciement. Aucun élément ne justifie par contre que cette condamnation soit assortie d'une mesure d'astreinte.

En revanche, l'employeur qui a pris l'initiative de rompre le contrat de travail en estimant à tort que la période d'essai courait encore, ne peut se voir condamner à délivrer une lettre de licenciement et à vêtir ainsi une procédure qu'il n'a pas entendu mener.

- Les frais irrépétibles

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. X... sa part des frais irrépétibles qui sera fixée à 1.500 euros. La société LES

EPICES D'INGWILLER, qui succombe, sera par contre déboutée de la demande présentée à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement sur l'appel formé par M. X... à l'encontre du jugement rendu le 14 février 2005 par le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux,

Réforme le jugement,

Dit que la rupture du contrat de travail de M. X... s'analyse en un licenciement irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la S.A.R.L. LES EPICES D'INGWILLER à payer à M. X... les sommes de 6.600 euros (six mille six cents euros) à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif sur le fondement de l'article L 122-14-5 du Code du Travail, 3.300 euros (trois mille trois cents euros) à titre de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier, 6.600 euros (six mille six cents euros) à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 660 euros (six cent soixante euros) à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

Condamne la S.A.R.L. LES EPICES D'INGWILLER à remettre à M. X... une attestation ASSEDIC rectifiée,

Condamne la S.A.R.L. LES EPICES D'INGWILLER à payer à M. X... la somme de 1.500 euros (mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la S.A.R.L. LES EPICES D'INGWILLER aux dépens de première instance et d'appel.

Signé par Madame Marie-Paule DESCARD-MAZABRAUD, Président, et par Mademoiselle Françoise Y..., Greffier, auquel la minute de la

décision a été remise par le magistrat signataire.

F. Y...

M-P. DESCARD-MAZABRAUD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Ct0107
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006950780
Date de la décision : 19/09/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2006-09-19;juritext000006950780 ?
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